Né en 1933, Amartya Sen est un économiste et philosophe indien. Spécialiste des problématiques de la pauvreté et du développement, il a reçu le prix Nobel d’Economie 1998 pour « sa contribution à l’économie du bien-être ». Il enseigne actuellement à Harvard.
La théorie du choix social
Dès la fin des années 1960, les principales publications de Sen ont porté sur la théorie du choix social, prolongeant les travaux de Kenneth Arrow qui a prouvé que les procédures de choix collectifs (comme le vote ou le marché) ne peuvent satisfaire les critères de démocratie (théorème d’impossibilité d’Arrow). Autrement dit, l’intérêt général ne peut être défini à partir de la simple agrégation des préférences des individus : la décision au niveau collectif doit être imposée !
Sen s’est efforcé de montrer que le problème posé par le théorème d’impossibilité réside dans le cadre d’analyse utilisé par Arrow. Ce cadre est extrêmement étroit : la seule information mobilisée pour prendre une décision au niveau collectif est le classement individuel des différentes options proposées. Sen promeut une théorie du choix social qui prenne en considération des éléments autres que la seule utilité des individus et permette la prise en compte des enjeux de justice sociale et de redistribution.
La théorie des « capabilités »
Pour Sen, les inégalités entre les individus ne s’apprécient pas au regard de leurs seules dotations en ressources mais de leurs capacités à les convertir en libertés réelles. Il introduit ainsi la notion de « capabilités », qui invite à considérer la pauvreté au-delà des seuls aspects monétaires et à la penser en termes de libertés d’action, de capacités à faire.
Dans son ouvrage Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté (2000), Sen soutient la thèse selon laquelle il n’y a de développement que par et pour la liberté. La tyrannie, l’absence d’opportunités économiques, l’inexistence des services publics, l’intolérance sont autant d’entraves à la liberté. Le marché est nécessaire : son absence serait le déni d’une liberté fondamentale, l’échange de biens.
Sa théorie a toutefois fait l’objet de critiques, notamment car elle ne propose aucune liste des « capabilités » de base.
L’indice de développement humain (IDH)
Son influence en économie du développement s’est traduite par la création de l’IDH par le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) en 1990, qui permet d’effectuer des comparaisons internationales en termes de développement.
Cet indice combine trois « capabilités » considérées comme essentielles : la santé, l’éducation et les ressources monétaires. Chaque dimension est évaluée via le recours à un indicateur élémentaire : l’espérance de vie (pour la santé), les taux de scolarisation et d’alphabétisation (pour l’éducation) et le revenu par tête en parité de pouvoir d’achat (c’est-à-dire en faisant en sorte que l’unité de monnaie ait le même pouvoir d’achat dans les pays comparés). L’IDH est le produit de la combinaison de ces indicateurs.
D’après le classement IDH établi par le PNUD en 2009, la Norvège arrivait en tête en termes de développement humain. La France se plaçait au 8ème rang mondial, les Etats-Unis étant derrière, au 13ème rang. Le Niger occupait le dernier rang.
Pauvreté et famines
Enfin, Sen a apporté une contribution pionnière à l’étude des famines, ayant trouvé, par la suite, un écho favorable auprès des gouvernements dans les modes de prévention et de lutte contre les famines.
En 1943, alors âgé d’une dizaine d’années, il est témoin de la famine du Bengale au cours de laquelle plus de trois millions de personnes sont décédées. Observateurs et décideurs ont mis en avant la baisse de la production alimentaire pour expliquer ce drame. Dans Pauvreté et Famines (1982), où il traite des famines en Inde, au Bangladesh et dans des pays d’Afrique subsaharienne, Sen a montré que les situations de famine ne s’expliquent pas forcément par des situations de pénurie alimentaire, mais par de mauvais choix politiques.
Son analyse met en évidence les inégalités engendrées par les mécanismes de distribution et les « droits d’accès » à la nourriture. Pour les réduire, il faut commencer par encourager le contrôle démocratique des gouvernements, car, comme il aime à le rappeler, les démocraties ne connaissent pas de famines.
Conclusion
Amartya Sen est un des rares économistes à appréhender sa discipline avec à la fois le formalisme mathématique et le recul philosophique. Auteur très prolifique, il a bouleversé le champ du développement en enrichissant les critères de définition de la pauvreté habituellement retenus par les institutions internationales opérant dans ce domaine.
Grands noms
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- Jean-Baptiste Colbert
En savoir plus
- Le concept de développement humain (en anglais)
- Rapport sur le développement humain
- Courants de pensée
Bibliographie
- Un nouveau modèle économique. Développement, Justice, Liberté, Amartya Sen, éditions Odile Jacob, 2000
- L’économie est une science morale, Amartya Sen, éditions La Découverte, 2004