La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), appartenant au Ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance, est l’organisme national chargé de l’application (ONA) du règlement 181/2011 concernant les droits des passagers dans le transport par autobus et autocar.
En application de l'article 29 du Règlement (UE) n° 181/2011, la présente publication constitue le rapport d’activité de l’ONA française sur l’application du règlement précité pour la période 2022-2023.
Contexte
Le secteur des services réguliers interurbains de transport public routier de passagers librement organisés par autocar sur le territoire national comme international (cabotage) a été libéralisé par la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Aujourd’hui le marché des services librement organisés de transport interurbains par autocar (dit SLO) est caractérisé par un duopole constitué des sociétés FlixBus et BlaBlaCar Bus. Seuls ces deux opérateurs disposent d’un réseau national (distances de plus de 250km conformément à l’article 2 du règlement 181/2011) à la suite de l’acquisition d’Eurolines/Isilines par Flixbus auprès de Transdev et du rachat de Ouibus par BlaBlaCar au groupe SNCF.
La fréquentation des services interurbains par autocars a augmenté de 75% en 2022, avec plus de 8 millions de passages transportés. La demande fut bien orientée dans le sillage de l’amélioration de la situation sanitaire, profitant ainsi aux PME sous-traitantes. Les marges des opérateurs des SLO ont toutefois été sous pression. Flixbus n’a par exemple pas augmenté ses prix durant les 9 premiers mois de 2022 afin d’assurer un trafic dynamique.
Les recettes des SLO se sont accrues de 80% en 2022, pour dépasser la barre des 120 M€. Cette hausse est principalement corrélée à l’augmentation du trafic puisque les professionnels de segment n’ont que légèrement revalorisé leurs tarifs au cours de l’exercice. Les autocaristes pratiquent le « yield management », c’est-à-dire que le prix de leurs prestations varie en fonction de la demande observée sur le moment.
Malgré un niveau de fréquentation proche de son niveau d’avant crise en 2022-2023, les opérateurs du secteur doivent désormais faire face à une forte inflation (carburant, salaires, etc.) et une forte pénurie de conducteurs, dans un contexte de pressions croissantes sur la décarbonation des véhicules (Source : XERFI - LE TRANSPORT EN AUTOCARS Conjoncture et prévisions 2023-2024).
Activités de l’ONA pour la France
La DGCCRF est l’organisme national d’application selon l’article 28 du règlement 181/2011. En application de l’article L.511-7 du code de la consommation les agents de la DGCCRF sont habilités à rechercher et constater l’ensemble des manquements au règlement.
Ainsi, la DGCCRF, qui s’appuie sur son réseau de services déconcentrés (départements et régions) ainsi que sur le site https://signal.conso.gouv.fr/ , exerce une veille et un contrôle permanent du secteur : recueil et traitement des plaintes, contrôle du respect des obligations d’information, contrôle du respect des droits des passagers…
La DGCCRF a émis un guide du voyageur et une fiche pratique sur son site internet et communique régulièrement, notamment avant la période estivale.
Les passagers ont la possibilité de déposer des réclamations de différentes manières. Ils peuvent soit remplir un formulaire en ligne, soit téléphoner au service client, soit envoyer un courrier postal ou un courriel.
En France, en premier ressort, le passager peut, à sa convenance, déposer une plainte indifféremment soit auprès du transporteur, soit auprès du médiateur, soit auprès de l’ONA (la DGCCRF). En ce sens, la DGCCRF n’est pas une instance de recours tel que l’entend l’article 28-3 du règlement(source : Article 28-3 « (…) Un État membre peut décider que le passager est tenu, dans un premier temps, de déposer une plainte auprès du transporteur, auquel cas l’organisme national chargé de l’application ou tout autre organisme compétent désigné agit en tant qu’instance de recours pour les plaintes n’ayant pas été réglées en application de l’article 27 ».
Dans un premier temps, il est recommandé au passager de commencer par saisir le transporteur pour une solution à l’amiable. A noter que la DGCCRF a développé la plateforme de signalements automatisés SignalConso, permettant de moderniser et simplifier les relations entre consommateurs et professionnels.
Conformément aux articles 26 et 27 de ce règlement, les autocaristes ont établi des mécanismes de traitement des plaintes. Ils reçoivent les réclamations dans un délai de 3 mois à compter de la date effective du voyage et les traitent dans un délai de 1 à 3 mois maximum.
Dans un second temps, après avoir déposé plainte auprès du transporteur et si la réponse ne lui convient pas, le passager peut saisir le médiateur afin de trouver une solution amiable à son litige avec son transporteur. En effet, en application de la directive 2013/11/UE du relative au règlement extrajudiciaire des litiges de consommation tous les opérateurs sont obligatoirement adhérents et cotisent à un système de médiation, pour les autocaristes : Médiation Tourisme et Voyage (MTV). Des éléments détaillés figurent dans le Rapport Annuel 2022 du MTV disponible à l’adresse https://www.mtv.travel/wp-content/uploads/2023/03/MTV-RA2022.pdf. A noter qu’en 2022, et parmi l’ensemble des dossiers traité par le MTV, les dossiers relatifs au transport par autocar n’ont représenté que 0,64% de l’ensemble.
La DGCCRF est habilitée pour rechercher et sanctionner les manquements des entreprises aux dispositions du règlement 181/2011. La protection du consommateur, au cœur de ses missions, suppose une veille constante et le lancement de d’enquêtes ou de contrôles visant à garantir le respect par les opérateurs des droits des passagers.
Contrôles réalisés
Une enquête relative aux droits des passagers dans le secteur du transport de voyageurs en autocar et autobus a été réalisée en 2022 par 12 directions départementales au sein de 5 régions. Trente-trois établissements ont été contrôlés.
L’enquête a porté plus spécifiquement sur les services réguliers interurbains exerçant sur le territoire national comme international (SLO). Deux grands opérateurs disposent d’un large réseau national et proposent également des voyages vers ou en provenance des pays européens voisins. Ils sous-traitent une grande partie de leur activité à des transporteurs régionaux.
L’un des opérateurs précise les modalités de réservation de voyage en bus, qui peut se faire selon les manières suivantes :
- par internet (site internet et application) qui représente 90 % des ventes ;
- en boutique (par ex. Paris-Bercy) qui représente 3-4% des ventes ;
- via des revendeurs indépendants qui représente 5-6 % des ventes ;
- via des revendeurs onlines ;
- auprès des chauffeurs de bus qui représente moins 1 % des ventes.
Les prix de vente sont les mêmes pour tous les canaux de vente.
Les contrôles ont été réalisés au siège des entreprises, en boutique et sur le site internet.
Constats effectués au cours de ces contrôles
Les différents contrôles ont été axés principalement sur le respect par les opérateurs du règlement 181/2011 , mais aussi sur des points généraux tels que l’absence de clauses abusives, de pratiques commerciales trompeuses, la conformité des mentions légales, les informations relatives aux numéros surtaxés ainsi qu’aux coordonnées du médiateur sectoriel.
Il a été constaté que dans l’ensemble, les dispositions du règlement (UE) n°181/2011 sont appliquées.
Droit des personnes handicapées et des personnes à mobilité réduite
Concernant l’article 9 dudit règlement concernant le droit au transport des personnes handicapées ou à mobilité réduite, aucune anomalie n’a été relevée.
Pour une société, les personnes à mobilité réduite et qui peuvent monter et descendre du bus seul ou à l’aide d'un accompagnateur, peuvent voyager sur toutes les lignes. Le trajet est gratuit pour l’accompagnateur
Droit des passagers en cas d’annulation ou retard
Concernant les articles 19, 20 et 21 dudit règlement concernant le droit des passagers en cas d’annulation ou de retard, aucune anomalie n’a été relevée.
Pour une société, les informations relevant de cette partie sont explicites sur le site Internet et de nombreuses informations sont affichées à la billetterie (affiches, moniteurs tv) et délivrées par les agents sur place. Pour une autre société, l’information d’un retard peut se faire par SMS ou e-mail. L’information et la gestion du retard se fait par le centre opérationnel « traffic contrôle ». Ce centre opérationnel est mutualisé au niveau européen.
Information des voyageurs
Les informations relatives au voyage et aux droits des passagers (articles 24 et 25 dudit règlement) sont communiquées via la billetterie (par voie d’affichage), le site internet de l’entreprise, l’application mobile ou le numéro de téléphone du service client, numéro non surtaxé.
Concernant le paragraphe 1 de l’article 25, les coordonnées de l’organisme chargé de l’application de ce règlement (la DGCCRF) n’était indiqué nulle part.
Le traitement des plaintes
La gestion interne des plaintes d’une société se base sur le règlement n° 181/2011 (articles 26 et 27) et les informations et modalités relatives aux plaintes sont indiquées sur le site Internet et aussi par téléphone via le service client.
De plus, concernant les avoirs émis pendant la crise sanitaire liée à la pandémie Covid-19 (période de confinement), la société a indiqué que ces avoirs avaient fait l’objet de remboursement et ceux encore actifs étaient des demandes spécifiques de voyageurs souhaitant la prolongation et non le remboursement.
Pour un autre opérateur, les réclamations sont traitées par le service client situé en Allemagne. Ce service peut être contacté par internet sur le site internet via le formulaire de contact en ligne ou par mail, par téléphone, par courrier ou par Signal Conso. Le délai maximum de traitement des réclamations est de 60 jours.
La plupart des réclamations sont faites via le formulaire de contact en ligne ou par téléphone. Les réclamations Signal Conso ne représentent que très peu des réclamations totales.
Les principaux motifs de réclamations sont les retards, les annulations, et les bagages oubliés ou volés.
Le respect des règles consuméristes par les professionnels du secteur de transport par autocar.
Si cette enquête visait bien spécifiquement le transport en autocar en SLO, d’autres professionnels du transport de voyageurs, de taille plus modeste et aux activités de transport diversifiées, ont également fait l’objet de contrôle concernant le respect des règles consuméristes.
Plusieurs manquements (9) aux dispositions relatives à l’obligation générale d’information précontractuelle ont été relevés.
Le formalisme de la note ou de la facture ne sont pas toujours respectés (3 manquements)
Les informations obligatoires concernant les sites internet prévues à l’article 19 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique ne sont pas toujours indiquées (2 manquements).
Le nom du médiateur de la consommation désigné, dans la grande majorité des cas, n’est pas relayé auprès des consommateurs.
Les conditions générales de vente et conditions générales de transporteur et la vérification de l’éventuelle présence de clauses abusives dans les conditions générales de vente (2 cas)
L’information sur la possibilité de s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique n’est mentionnée par aucun opérateur : Lors de la conclusion des contrats à distance, les coordonnées des consommateurs sont relevées sans les informer de leur possibilité à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique BLOCTEL
Données sur les plaintes et infractions constatées
Sur les 33 établissements contrôlés, tant en examinant leur site internet que sur site, 12 présentaient des anomalies, soit un taux de 36 % d’établissements en anomalie. 7 établissements ont reçu un avertissement, 4 ont fait l’objet d’une injonction (voir le détail en annexe ; à noter qu’une même entreprise peut présenter plusieurs anomalies).
La très grande majorité des sociétés ayant été à l’écoute des enquêteurs et très réactives, les suites réalisées sont généralement un avertissement à chacune d’entre elles, ou une injonction dans certains cas. Les avertissements et les injonctions concernent essentiellement le non-respect des dispositions du code de la consommation et les manquements les plus souvent observés ont été relevés sur le site internet des entreprises.
Dans l’ensemble, les transporteurs se sont conformés à leurs obligations découlant du règlement précité à quelques exceptions près. Dans ces cas, un rappel à la loi via un échange entre les services déconcentrés compétents et les opérateurs s’est avéré suffisant pour faire cesser les manquements constatés.