Vaisselle, ustensiles culinaires, équipements ménagers et emballages alimentaires font partie du quotidien des consommateurs. Des précautions doivent cependant être prises car des substances chimiques peuvent migrer à partir de ces articles vers les denrées alimentaires et entraîner un risque pour la santé humaine.

Frédéric Lagniez, expert du secteur à la DGCCRF, fait le point sur la réglementation et rappelle aux consommateurs les conseils de prudence à respecter.
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Que sont les MCDA ?
Les MCDA désignent les matériaux et objets qui, à l’état de produit fini, sont destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires.
La réglementation définit 17 catégories[1] de matériaux pouvant faire l’objet de mesures réglementaires spécifiques par l’Union européenne.
Les MCDA sont constitués de nombreux objets du quotidien, par exemple :
- les articles de table, la vaisselle et les ustensiles de cuisine (spatules, écumoires, louches, etc.) ;
- les conditionnements alimentaires : emballages, papiers, sacs, récipients et boîtes, bouteilles, films ;
- les articles spécifiques pour nourrissons et enfants en bas-âge (biberons, tétines de biberons, tasses, gobelets, etc.) ;
- les matériels et équipements utilisés dans la production, la transformation, le stockage et le transport de denrées alimentaires (broyeurs, pétrins, outils de découpe, etc.).
Les MCDA sont susceptibles de contaminer les aliments par contact direct ou indirect, en leur transférant des substances chimiques pouvant être dangereuses, ce qui peut entraîner un risque pour la santé des consommateurs qui ingèrent ces aliments.
La réglementation prévoit un principe d’inertie chimique des MCDA, ce qui veut dire qu’ils doivent être fabriqués conformément aux bonnes pratiques de fabrication afin, que dans des conditions normales ou prévisibles d’emploi, ils ne transfèrent pas aux denrées des constituants en une quantité susceptible :
- de présenter un danger pour la santé humaine ;
- d’entraîner une modification inacceptable de la composition de la denrée ;
- d’altérer les propriétés organoleptiques de la denrée alimentaire.
Des plans de contrôles des MCDA sont établis chaque année par la DGCCRF, sur la base des résultats des enquêtes précédentes, de nouvelles réglementations, le cas échéant, des plaintes et signalements, etc. Certaines substances chimiques (comme les phtalates, le bisphénol A ou les hydrocarbures d’huile minérale) font l’objet d’une attention particulière.
À titre d’exemple, la principale enquête menée par la DGCCRF en 2016 auprès de 894 établissements a conduit le Service commun des laboratoires à analyser près de 313 échantillons dont 32 se sont révélés non conformes (migration de substances chimiques à partir de différents MCDA : article de table, barquette, boîte à goûter, bidon de cycliste, pince de cuisine, coupelle, billes de cuisson, sauteuse…). Ces articles non conformes ont fait l’objet de mesures de suspension de la mise sur le marché, de retrait, de rappel voire de destruction. Des avertissements (218), des mesures de police administrative (46) et 19 procès-verbaux dans le cadre de procédures pénales ont fait suite à ces contrôles.
Les principaux textes réglementaires
- Règlement cadre (CE) n°1935/2004 du 27 octobre 2004, qui prévoit en particulier l’inertie chimique des MCDA (art. 3), l’étiquetage (art. 15), la traçabilité (art. 17), la déclaration de conformité et la documentation (art. 16) ;
- Règlement (CE) n°2023/2006 de la Commission du 22 décembre 2006 ;
- Décret n°2007-766 du 10 mai 2007 qui constitue le texte cadre national et prévoit notamment le pictogramme d’inaptitude au contact alimentaire ;
- Règlement (UE) n°10/2011 du 14 janvier 2011 relatif aux matières plastiques ainsi que de nombreux textes réglementaires par matériau ;
- Loi n° 2010-729 du 30 juin 2010 modifiée par la loi n°2012-1442 du 24 décembre 2012 (loi relative au bisphénol A).
La connaissance de la réglementation par les opérateurs est contrastée
Elle dépend de la taille de l’entreprise et de son rôle dans la chaîne d’approvisionnement, et reste, d’une manière générale, insuffisante. Les enquêtes menées par la DGCCRF contribuent à une meilleure compréhension de cette réglementation par les opérateurs et permettent de faire sanctionner les manquements graves.
Qui fait quoi en matière de contrôle des MDCA ?
La DGCCRF est l’autorité compétente pour effectuer ces contrôles : elle élabore les règles nationales applicables aux MCDA et participe aux travaux de la Commission européenne et des autres instances internationales. Elle réalise également, à tous les stades, les contrôles officiels des MCDA mis sur le marché et inspecte certains articles avant leur mise en libre pratique sur le territoire. Le SCL (Service de laboratoires commun aux Douanes et à la DGCCRF) analyse les MCDA pour la DGCCRF.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) évalue les risques liés aux MCDA et formule des avis scientifiques.
La déclaration de conformité est un document obligatoire qui doit être émis par l’exploitant (importateur, fabricant, transformateur, etc.) à destination des utilisateurs des industries agroalimentaires et des distributeurs de MCDA.
Cette déclaration est trop souvent indisponible, et lorsqu’elle existe son contenu est rarement conforme aux obligations réglementaires. Les importateurs ou introducteurs[2] non spécialisés éprouvent des difficultés à établir cette déclaration, et les grossistes à l’obtenir.
Les autocontrôles effectués chez les responsables de la mise sur le marché sont fréquemment insuffisants ou incomplets.
La majorité des distributeurs de taille importante et des grandes surfaces spécialisées respectent leurs obligations en matière d’étiquetage. En revanche, les petits distributeurs indépendants, les autoentrepreneurs, les enseignes non spécialisées, les magasins d’usine et autres commerces de détail (bazars, solderies…) ont généralement une connaissance insuffisante des règles applicables. Les anomalies d’étiquetage les plus fréquentes sont l’absence de l’adresse des opérateurs, des instructions d’emploi ou le non-respect de l’emploi de la langue française dans ces instructions.
La traçabilité des MCDA est généralement assurée chez les fabricants. Des pertes d’information (traçabilité, instructions d’emploi…) sont toutefois constatées aux stades intermédiaires[3] de distribution, lorsque ces informations figurent sur des cartons de transport.
Quels conseils peut-on donner aux consommateurs ?
Respecter les instructions d’utilisation
Consulter et suivre les instructions d’emploi (modalités d’emploi, température maximale, restrictions concernant certains aliments, usage possible ou non au four à micro-ondes, etc.) figurant sur les articles ou leurs emballages, au moment de l’achat, et les conserver.
Quelques bons réflexes à retenir
- Ne pas utiliser les feuilles d’aluminium au contact d’aliments acides (par exemple le citron) pour réaliser des papillotes au four ; cette pratique conduit à associer des aliments acides avec une température élevée et peut conduire à la migration de l’aluminium dans les aliments.
- Lire attentivement les instructions d’emploi des films étirables notamment leur utilisation possible au four à micro-ondes, le contact possible avec des aliments gras (beurre, margarine, etc.).
- S’abstenir de cuire ou de réchauffer des aliments directement dans leur emballage sauf dans l’éventualité où une instruction d’usage autorise cette pratique (et ne pas réchauffer directement les aliments dans les briques multicouches carton/aluminium).
- Ne jamais recourir à des contenants et récipients qui ne sont pas initialement destinés au contact de denrées alimentaires par leurs fournisseurs (bacs, boîtes…).
- Eviter de mettre en contact des denrées alimentaires avec des matériaux et objets qui n’ont pas été prévus à cet effet (serviettes de table, papier essuie-tout, sets de table).
Ne pas faire un mauvais usage des matériaux
Certaines pratiques constituent des usages impropres pourtant nombre d’entre elles sont employées dans certaines émissions culinaires télévisées :
- la cuisson des aliments en sacs congélation, ou directement dans des films étirables en matière plastique au four (ou même parfois à la poêle ou au contact d’un bec-bunsen[4]) ;
- l’emploi de tubes en PVC pour la mise en forme et la cuisson des aliments ;
- la réutilisation d’emballages pourtant à usage unique pour la conservation ou la cuisson des aliments (réutilisation de barquette/bacs à glace, de gobelets à eau, de boîtes à camembert pour faire des barbecues).
Pour protéger le consommateur, la DGCCRF poursuivra ses actions de contrôle et de sensibilisation afin que les différents acteurs de la filière respectent les exigences de la réglementation. Néanmoins, la vigilance du consommateur est appelée quant à la bonne utilisation au quotidien de ces matériaux.
[1] Matériaux et objets actifs et intelligents, colle, céramique, liège, caoutchouc, verre, résine, métaux et alliages, papier et carton, matières plastiques, encres d’imprimerie, cellulose, silicone, textile, vernis et revêtement, cire, bois.
[2] Opérateur qui met sur le marché un produit en provenance d’un autre état-membre de l’Union européenne
[3] Grossistes, plates-formes régionales, etc.
[4] Appareil utilisé en laboratoire pour chauffer ou stériliser.
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