Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Information et licéité des frais bancaires

En 2019, la DGCCRF a enquêté sur les frais bancaires afin de vérifier le respect de la réglementation applicable par les établissements de crédit. Les contrôles ont révélé un taux d’anomalie de 10 %.

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L’enquête, menée auprès de l’ensemble des réseaux bancaires de détail, avait pour objectifs de vérifier :

  • la conformité de l’information délivrée aux clients (conditions générales et tarifaires applicables aux opérations relatives à la gestion d’un compte de dépôt) ;
  • la licéité des frais appliqués en cas d’irrégularités de fonctionnement du compte courant ou d’incidents de paiement ;

la conformité des produits commercialisés par l’établissement avec la réglementation relative aux ventes groupées et aux ventes avec prime[1].

Les investigations avaient également pour objet de recueillir des informations relatives aux engagements pris par les établissements bancaires concernant le plafonnement des frais applicables aux bénéficiaires de l’offre spécifique[2], et des frais applicables aux particuliers identifiés comme étant en situation de fragilité financière.

L’enquête a été séquencée en deux phases : les enquêteurs ont d’abord effectué des vérifications au niveau local, en agences bancaires, puis, sur la base des premiers manquements relevés, ils ont mené les investigations au sein des sièges régionaux et nationaux des établissements concernés.

La réglementation en matière d’information tarifaire est globalement respectée

Les enquêteurs ont ainsi mis en évidence que les obligations d’information du consommateur, concernant les conditions générales et tarifaires, sont globalement respectées. Aucun changement significatif n’a été observé depuis l’entrée en vigueur de la réglementation (arrêté du 5 septembre 2018) permettant de mettre ces informations à la disposition des consommateurs sur support durable[3] ; dans la plupart des réseaux, le maintien d’un double affichage, papier et numérique, a été privilégié.

Toutefois dans plusieurs établissements, les agents ont constaté un défaut de mise à disposition en libre-service du document d’information tarifaire (DIT)[4] qui a pour objectif de présenter de manière normalisée leurs principaux tarifs bancaires de manière sincère et de permettre une comparaison entre les différents fournisseurs de services bancaires. Dans certains réseaux, les dénominations des principaux frais et services bancaires utilisées dans les documents tarifaires et dans les courriers d’information ou les relevés annuels de frais, pouvaient varier d’un document à l’autre, risquant de provoquer une confusion chez le consommateur.

Dans certaines brochures tarifaires, les éléments communiqués au consommateur (date comptable, date de l’opération, date de valeur) ne lui permettaient pas d’identifier clairement le point de départ du calcul des agios appliqués à son découvert ou aux commissions d’intervention, contrairement aux exigences de lisibilité de l’information requises par la réglementation.

Les frais bancaires appliqués sont, en règle générale, conformes à la réglementation

De manière générale, les frais applicables en cas d’irrégularités de fonctionnement du compte bancaire ou d’incidents de paiement étaient conformes à la réglementation. L’enquête a toutefois mis en évidence certaines pratiques de contournement telles que :

  • la multiplication de l’envoi de courriers facturés au consommateur : certains établissements envoyaient plusieurs courriers visant à informer le consommateur du dépassement de son autorisation de découvert ou d’un découvert non autorisé. En moyenne, entre trois et quatre lettres – dont le tarif oscillait entre 12,25 € et 25 € chacune – étaient facturées aux clients alors que la documentation tarifaire faisait référence à l’envoi d’un courrier unique. Les investigations mettent cependant en évidence la disparité des pratiques selon les opérateurs, toutes les lettres n’étant pas nécessairement facturées ;
  • des disparités dans le calcul des commissions d’intervention : lorsqu’une opération entraîne une irrégularité de fonctionnement du compte (présentation d'un ordre de paiement irrégulier, coordonnées bancaires inexactes, absence ou insuffisance de provision, etc.), l’organisme bancaire facture une commission d’intervention dont le montant est plafonné par opération et par mois. Lors de l’enquête, la DGCCRF a constaté que, malgré des méthodologies de calcul différentes, ces plafonds réglementaires étaient globalement respectés, même si quelques cas de facturation de commissions d’intervention supérieures au niveau des plafonds réglementaires ont été répertoriés. Certains établissements ont choisi d’aller plus loin que le respect des plafonds mensuels réglementaires en instaurant de manière volontaire des plafonds journaliers de frais, y compris parfois pour la clientèle non éligible à l’offre « clientèle fragile ». Ce type de pratique a un effet positif et contribue de manière significative à la diminution globale des frais appliqués aux clients de l’établissement ;
  • une double facturation des commissions d’intervention en cas d’application des forfaits liés au rejet de prélèvement : la réglementation prévoit en effet que le forfait de frais en cas de rejet de prélèvement inclut « l’ensemble des sommes facturées par le prestataire de services de paiement du payeur au titulaire du compte, quelles que soient la dénomination et la justification de ces sommes » et comprend ainsi la commission d’intervention[5]. Or, l’enquête a révélé que deux réseaux bancaires facturaient des commissions d’intervention en sus de ce forfait. La commission d’intervention était donc facturée deux fois au consommateur, générant ainsi un dépassement du plafond réglementaire. Les contrôles ont relevé la même pratique s’agissant des forfaits applicables en cas de rejet de chèque ;
  • une multiplication des rejets de prélèvements correspondant aux mêmes opérations de paiement : plusieurs réseaux bancaires multipliaient l’application de frais de rejet de prélèvement concernant la même opération de paiement. Cette pratique, qui n’est pas contraire à la réglementation, ouvre droit à une possibilité de remboursement pour le consommateur, rarement mobilisée dans les faits. Par exemple, le relevé de compte d’un client indiquait douze prélèvements qui, présentés à de multiples reprises, ont donné lieu à 42 rejets, pour lesquels le consommateur n’a été remboursé que partiellement ;
  • un manque de lisibilité de l’information préalable à la facturation de frais et des modalités de communication du relevé annuel de frais : si l’enquête a permis de constater que le délai de 14 jours minimal à compter de la date du relevé de compte pour débiter les frais était globalement respecté, l’opération à l’origine de l’incident de paiement facturé par la banque n’était en revanche jamais identifiée. De plus, les relevés annuels de frais manquaient fréquemment de lisibilité, proposant des intitulés de services différents de ceux utilisés dans la brochure tarifaire.  À titre d’illustration, il était fait mention dans un relevé annuel de frais d’une ligne « frais de saisie avis à tiers détenteur » tandis que cette même opération était intitulée « frais d’opposition administrative » dans le relevé de compte.

L’hétérogénéité des critères retenus pour qualifier la situation de fragilité des clients et le manque d’attractivité de l’offre spécifique

Les établissements bancaires, principalement au niveau des sièges, mettent en place des dispositifs permettant d’apprécier la situation de fragilité financière de leurs clients, en s’appuyant, conformément à la réglementation, sur deux éléments : d’une part, l'existence d'irrégularités de fonctionnement du compte ou d'incidents de paiement et leur caractère répété constaté pendant trois mois consécutifs, d’autre part, le montant des ressources portées au crédit du compte. Les investigations ont cependant mis en évidence la forte disparité des critères de détection retenus par les différents réseaux bancaires ; certains réseaux retenant en effet les revenus du client au regard du seuil de pauvreté, le nombre ou le montant de commissions d’intervention sur une période de trois mois et d’autres la situation dans l’emploi ou le montant du « reste à vivre » du foyer.

Les publics identifiés comme étant en situation de fragilité financière sont éligibles à une offre spécifique qui comprend des moyens de paiement, dont au moins deux chèques de banque par mois, et des services appropriés à leur situation de nature à limiter les frais supportés en cas d'incident. Les outils de communication mobilisés par les réseaux pour promouvoir cette offre sont variables (brochures, entretiens réalisés avec les conseillers, relances téléphoniques, courriers personnalisés).

L’enquête de la DGCCRF a montré que des réseaux bancaires pouvaient proposer en outre une offre enrichie, consistant à titre d’exemple à offrir des services annexes tels que le tiers payant pour des dépenses de santé ou un accompagnement budgétaire personnalisé

Néanmoins, l’enquête réalisée a mis en évidence que la part de clients ayant souscrit une offre spécifique « clientèle fragile » représentait moins de 1 % du nombre total de clients. L’offre de moyens de paiement limités (carte à autorisation de paiement systématique, chéquier), la suppression de l’autorisation de découvert et le marqueur social associé à cette offre desservant en effet son image.

Les investigations ont également permis de relever certaines anomalies, telles que le refus d’octroyer cette offre spécifique à des clients identifiés comme étant en situation de fragilité financière ou l’absence de proposition de cette offre à un client dont le compte présentait trois cent quarante-neuf incidents sur une année.

Ventes groupées et ventes avec prime : la réglementation respectée

Les professionnels respectent de manière générale la réglementation applicable aux ventes groupées et ventes avec prime de différents services bancaires. Les investigations ont toutefois mis en lumière certaines pratiques préjudiciables pour les consommateurs. Par exemple, un opérateur imposait au consommateur de domicilier ses revenus dans l’établissement, en contrepartie de l’octroi d’un prêt immobilier, sans que cette obligation ne fasse l’objet d’une clause dans le contrat, alors que cette pratique avait pour conséquence de générer des frais bancaires supplémentaires.

L’offre spécifique reste à développer

L’enquête réalisée par la DGCCRF a permis de vérifier que l’information tarifaire des consommateurs est globalement satisfaisante dans le secteur bancaire et les frais appliqués conformes à la réglementation. Si les engagements pris par la profession en 2018 (cf. encart) paraissent respectés, la disparité des critères appliqués par les réseaux bancaires pour apprécier la situation de fragilité financière de leur clientèle pourrait toutefois constituer un frein à la diffusion de l’offre spécifique auprès des publics qui y sont éligibles.


[1] La vente avec prime, qui génère pour le client l’octroi d’un bien ou d’un service remis gratuitement à l’occasion de la vente du produit, et la vente groupée, qui consiste à lier la vente d’un produit ou d’une prestation de service à l’acquisition d’un autre produit ou d’une autre prestation de service, sont encadrées par le Code de la consommation.

[2] Une offre spécifique clientèle fragile (OCF) est proposée aux personnes considérées en situation de fragilité financière.

[3] Constitue un support durable, au sens de l’ordonnance du 4 octobre 2017 relative à la dématérialisation des relations contractuelles dans le secteur financier, tout instrument offrant au client ou au professionnel la possibilité de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement afin de pouvoir s'y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées, et qui permet la reproduction à l'identique des informations conservées.

[4] La mise à disposition de ce DIT normalisé est prévue par le règlement (UE) n°2018/34 du 28 septembre 2017.

[5] Commission appliquée par la banque en cas de dépassement du seuil de l’autorisation de découvert ou de position débitrice en l’absence d’autorisation prévue par la convention de compte.

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Résultats

Taux d’anomalies : 10 %
39 avertissements
4 procès-verbaux