Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Pratiques restrictives de concurrence : les aspects généraux

Les relations commerciales entre acteurs économiques sont régies par le principe de la liberté contractuelle. Les pratiques restrictives de concurrence sont prévues dans diverses dispositions du Code de commerce et constituent une spécificité du droit français à laquelle vient  désormais s’adosser pour la France la sanction des manquements aux règles européennes posées par le règlement « P2B ».

Illustration d'une personne lisant le code du commerce
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L’essentiel

  • Les pratiques restrictives de concurrence désignent des comportements ou clauses contractuelles imposés par une entreprise à ses partenaires commerciaux, qui déséquilibrent significativement les droits et obligations des parties.
  • Les entreprises qui mettent en œuvre des pratiques restrictives de concurrence peuvent être sanctionnées par des amendes administratives pouvant aller jusqu'à 2 millions d'euros.
  • Les entreprises victimes de pratiques restrictives peuvent intenter une action en justice pour faire annuler les clauses abusives et obtenir des dommages et intérêts.

L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 portant refonte du titre IV du livre IV du Code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées a été publiée au Journal officiel du 25 avril 2019. Elle est intervenue dans le prolongement de la loi n°  2018- 938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi EGAlim, qui dans son article 17, a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi nécessaire pour modifier le titre IV (du livre IV du Code de commerce).

Fruit d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, cette ordonnance a mis en œuvre plusieurs orientations clés de l’action du Gouvernement pour favoriser une meilleure répartition de la valeur et un rééquilibrage des relations commerciales entre la distribution et les acteurs de la filière agroalimentaire.

Les professionnels consultés avaient souligné que les nombreuses réformes dont avaient fait l’objet les dispositions relatives aux pratiques restrictives de concurrence depuis la loi Galland du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l’équilibre des relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, avaient abouti à un empilement de textes devenu illisible qui imposait leur simplification.

L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 a procédé à cette clarification. Les dispositions relatives aux pratiques restrictives de concurrence, qui correspondent à l’ancien article L. 442-6, sont désormais codifiées aux articles L. 442-1 à L. 442-4 du Code de commerce.

Trois importants changements ont, par ailleurs, été apportés ultérieurement aux I et III de l’article L.  442- 1.

D’une part, est intervenue la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière (dite loi « DDADUE ») dont l’article 9 a créé un III à l’article L. 442-1 du Code de commerce. Il s’agissait de mettre le droit national en conformité avec les obligations découlant de l’entrée en vigueur le 12 juillet 2020 du règlement (UE) n° 2019-1150 du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne (dit règlement « P2B »).

En France, cette mise en conformité avec le règlement « P2B » se traduit donc par l’alignement du régime de sanction des manquements audit règlement sur celui applicable en matière de pratiques restrictives de concurrence.

L’article 9 de la loi « DDADUE » a également procédé à une modification de l’article L. 470-1 du Code de commerce en prévoyant la possibilité, en son nouveau III. 1, de délivrer des injonctions sous astreinte lorsque le manquement relevé est passible d’une amende civile.

D’autre part, la loi n°2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs (dite loi « EGalim 2 ») a apporté des modifications au I de l’article L. 442-1.

En matière de pénalités logistiques, la loi « EGalim 2 » procède à la modification du 3° du I. de l’article L. 442-1 tel qu’il avait été créé par la loi n°  2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (dite loi « ASAP »). Il s’agissait de réintégrer une pratique restrictive de concurrence dont la mention explicite avait été supprimée par l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 tout en en précisant les contours.

La loi « EGalim 2 » réintroduit également l’interdiction per se des discriminations qu’avait supprimée la loi n° 2008-776 du 4 aout 2008 de modernisation de l’économie (dite « LME ») en ajoutant un 4° au I de l’article L. 442-1. Cette nouvelle interdiction  ne s’applique qu’aux produits agricoles et alimentaires.

Les grands changements opérés sont repris ci-après.

A la suite de l’ordonnance n° 2019-359, le dispositif de l’article L. 442-1 a été recentré sur les trois notions les plus utilisées en matière de pratiques restrictives de concurrence. Le I vise en son 1° l’avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné et en son 2° le déséquilibre significatif. Le II vise quant à lui la rupture brutale des relations commerciales établies.

Les pratiques énumérées aux 3°, 4°, 7°, 8°, 9°, 10°, 11°, 12° et 13° du I de l’ancien article L. 442-6 avaient été supprimées par l’ordonnance n°2019-359 dans la mesure où ces fondements juridiques étaient peu utilisés, mais aussi parce que les comportements illicites qu’elles visaient à appréhender pouvaient être poursuivis sur le fondement du déséquilibre significatif (1° du nouvel article L. 442-1, I) ou de l’avantage sans contrepartie (2° du nouvel article L. 442-1, I) dont les champs d’application ont été élargis. Certaines de ces pratiques prohibées ont été réintroduites par la loi « EGalim 2 ».

  • L’avantage sans contrepartie et le déséquilibre significatif 

L’article L. 442-1, I du Code de commerce dispose :

« I. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services :

  • 1° d'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie ;
  • 2° de soumettre ou de tenter de soumettre l'autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

Les modifications apportées sont les suivantes :

  • l‘article L. 442-1, I du Code de commerce vise désormais « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services » alors que le texte ancien visait « tout producteur, commerçant, industriel », en référence à l’article L.  410-1 du Code de commerce, premier article du livre IV, disposant que « les règles définies au présent livre s’appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services » ;
  • le texte indique désormais que la responsabilité de l’auteur des pratiques est encourue à tous les stades de la relation commerciale en ajoutant les termes « dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat » ;
  • le nouvel article L. 442-1, I du Code de commerce supprime la notion de « partenaire commercial » pour lui substituer celle d’ « autre partie », ce qui rend les dispositions du nouvel article L. 442-1, I applicables à toutes les relations professionnelles relevant du Code de commerce.
  • La rupture brutale : un champ d’application élargi et simplifié et un préavis encadré

L’article L. 442-1, II du Code de commerce dispose :

« II. - Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l'absence d'un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels.

En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois.

Les dispositions du présent II ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ».

Les modifications apportées à l’ancien article L. 442- 6, I, 5° du Code de commerce répondent, elles aussi, à un objectif de clarté et de simplification :

  • le II de l’article L. 442-1 vise désormais « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services » alors que le texte ancien visait « tout producteur, commerçant, industriel ». Le champ d’application du nouveau texte a donc été harmonisé avec celui de l’article L. 410-1 du Code de commerce, premier article du livre IV, disposant que « les règles définies au présent livre s’appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services » ;
  • le doublement du préavis dans le cadre de la fourniture de produits sous marque de distributeur et de la mise en concurrence par enchères à distance disparait. Ces domaines viennent ainsi s’aligner sur le régime de droit commun ;
  • la véritable innovation concerne l’introduction d’un délai de préavis plafond qui, lorsqu’il est respecté par l’auteur de la rupture, fait obstacle à ce que sa responsabilité soit engagée : « En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l'auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d'une durée insuffisante dès lors qu'il a respecté un préavis de dix-huit mois ».

La pratique contentieuse constatée en matière de rupture brutale des relations commerciales établies était caractérisée par un très grand nombre de décisions dans lesquelles il était reconnu que la durée du préavis qui aurait dû être octroyé avoisinait 24 mois (36 mois dans certains cas exceptionnels).  

Cela conduisait certains opérateurs à rester en relation de façon prolongée, même si l’offre proposée ne correspondait plus aux conditions du marché. La longueur du préavis pouvait ainsi s’analyser comme un facteur de rigidité dans les relations commerciales qui ne permettait pas à la concurrence de s’exercer pleinement.

Ce nouveau mécanisme semble plus pragmatique et adapté à l’économie et devrait également apporter une plus grande sécurité juridique pour les parties au contrat.

À la suite de l’adoption de la loi « DDADUE » en décembre 2020 et de la loi « EGAlim 2 » en octobre 2021, le dispositif de l’article L. 442-1 a été renforcé.

Désormais, le I vise également :

  • en son 3° les pénalités logistiques qui ne respecteraient pas les dispositions de l’article L. 441-17 et,
  • en son 4° les conditions discriminatoires qu’appliqueraient ou obtiendraient les parties à un contrat portant sur des produits alimentaires ou destinés à l’alimentation des animaux de compagnie en l’absence de contreparties réelles.

Le III vise quant à lui les manquements aux exigences du règlement « P2B ».

  • La réintroduction de deux pratiques prohibées (article L. 442-1, I, 3° et 4° du Code de commerce)

Placés sous le chapeau d’ores et déjà commun aux 1° et 2°, les 3° et 4° ont également vocation à s’appliquer à « toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services ». Par ailleurs, la responsabilité de l’auteur des pratiques est ici également encourue à tous les stades de la relation commerciale suite à l’ajout des termes « dans le cadre de la négociation commerciale, de la conclusion ou de l'exécution d'un contrat ».

En matière de pénalités logistiques, le 3° de l’article L. 442-1, I. renvoie aux dispositions du nouvel article L. 441-17 portant sur tous types de pénalités qui pourraient être infligées au fournisseur en cas d’inexécution d’engagements contractuels :

  • les pénalités, quand elles existent, doivent être prévues au contrat ;
  • le contrat doit prévoir « une marge d’erreur suffisante au regard du volume de livraisons prévues par le contrat » et « un délai suffisant doit être respecté pour informer l’autre partie en cas d’aléa » ;
  • les pénalités sont plafonnées et soumises à une exigence de proportionnalité : elles « ne peuvent dépasser un montant correspondant à un pourcentage du prix d’achat des produits concernés » et elles « doivent être proportionnées au préjudice subi au regard de l’inexécution d’engagements contractuels » ;
  • comme le prévoyait l’ancien article L. 442- 6, I, 8°, il est à nouveau « interdit de procéder au refus ou au retour de marchandises, sauf en cas de non-conformité de celles-ci ou de non-respect de la date de livraison » ;
  • il est également prévu que « la preuve du manquement doit être apportée par le distributeur par tout moyen » et que le « fournisseur dispose d’un délai raisonnable pour vérifier et, le cas échéant, contester la réalité du grief correspondant » ;
  • comme le prévoyait le 3° de l’article L.  442- 1, I tel qu’il avait été introduit par la loi « ASAP », la déduction d’office de pénalités ou de rabais reste interdite mais l’expression « pénalités ou rabais correspondant au non-respect d’une date de livraison, à la non-conformité des marchandises » est remplacée par celle plus large de « pénalités ou rabais correspondant au non-respect d’un engagement contractuel » ;

En ce qui concerne spécifiquement les pénalités logistiques, l’article L. 441-17 :

  • prévoit désormais qu’elles ne peuvent en principe être appliquées que dans des « situations ayant entraîné des ruptures de stocks ». Il est ensuite précisé que « par dérogation, le distributeur peut infliger des pénalités logistiques dans d’autres cas dès lors qu’il démontre et documente par écrit l’existence d’un préjudice ». Ainsi, il n’y a que dans les situations de rupture de stocks que le distributeur n’a pas à démontrer qu’il subit un quelconque préjudice s’il souhaite infliger des pénalités logistiques ;
  • prévoit par ailleurs, que « dès lors qu’il est envisagé d’infliger des pénalités logistiques, il est tenu compte des circonstances indépendantes de la volonté des parties » et qu’ainsi notamment « en cas de force majeure, aucune pénalité logistique ne peut être infligée » ;
  • précise enfin que « le distributeur ne peut exiger du fournisseur un délai de paiement des pénalités […] inférieur au délai de paiement qu’il applique à compter de la réception des marchandises ».

En matière de discrimination, le 4° de l’article L.  442- 1, I circonscrit le champ de l’interdiction per se qui était en vigueur avant l’adoption de la « LME » en 2008.

Ainsi :

  • seuls sont concernés les produits alimentaires et les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie soumis au I de l’article L.  441- 1-1 ;
  • le décret n°2021-1426 du 29 octobre 2021 fixe la liste des produits alimentaires, catégories de produits alimentaires ou produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie exclus du champ d’application de l’article L. 441-1-1 du Code de commerce et de l’interdiction de la discrimination ;
  • l’interdiction de la discrimination joue tant quand le fournisseur est lui-même l’auteur de la discrimination que quand l’acheteur pratique envers le fournisseur des conditions discriminatoires ;
  • l’interdiction de la discrimination porte sur les prix, les délais de paiement, les conditions de vente et les modalités de vente ou d’achat ;
  • cette interdiction de la discrimination nécessite la réunion de deux conditions cumulatives : d’une part, une pratique discriminatoire portant sur les éléments mentionnés ci-dessus et d’autre part, une pratique non justifiée par des contreparties réelles prévues par la convention de l’article L. 443-8.
  • enfin, la discrimination identifiée doit être de nature à créer, du fait de son absence de justification par des contreparties réelles, « un désavantage ou un avantage dans la concurrence » pour le fournisseur ou le distributeur selon l’hypothèse considérée.
  • La sanction des manquements aux obligations issues du règlement « P2B » (article L. 442-1, III du Code de commerce)

L’alinéa 1 du nouveau III. de l’article L. 442-1 prévoit, sur le même modèle que les I et II du même article qu’ «engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne proposant un service d’intermédiation en ligne au sens du règlement (UE) n° 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne, de ne pas respecter les obligations expressément prévues par le même règlement ».

Il convient de se référer à la fiche pratique « Pratiques restrictives de concurrence - Focus : règlement « Platform to Business » pour une présentation des nouveautés introduites suite à l’entrée en vigueur de ce règlement et des obligations qu’il prévoit.

Si l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 a simplifié les contours des pratiques commerciales restrictives de concurrence prévues à l’ancien article L. 442‑6 du Code de commerce, en recentrant les pratiques abusives sur trois pratiques d’application large, elle a également conservé la pratique issue de l’ancien article L. 442-6, I, 6° du Code de commerce.

Cette disposition figure désormais à l’article L. 442-2 et prohibe la participation directe ou indirecte par un tiers à la violation de l’interdiction de revente hors réseau.

Par ailleurs, l’article L. 442-3 du Code de commerce, tel que modifié également par la loi « DDADUE », énumère à présent trois clauses noires, donc nulles de plein droit : celles qui prévoient rétroactivement des remises, des ristournes ou des accords de coopération commerciale, celles qui prévoient le bénéfice automatique des conditions plus favorables consenties aux entreprises concurrentes par le cocontractant et enfin celles interdisant au cocontractant la cession à des tiers des créances qu’il détient sur le cocontractant auteur de l’interdiction.

  • La participation à la violation de l’interdiction de revente hors réseau (article L. 442-2 du Code de commerce)

Le nouvel article L. 442-2 du Code de commerce dispose qu’ :

« Engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de participer directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ».

La rédaction de l’ancien article L. 442-6, I, 6° est reprise sans modification de fond.

Le maintien de cette pratique illicite dans le Code de commerce a été unanimement souhaité par les professionnels consultés par le Gouvernement car elle exerce un effet dissuasif à l’encontre d’une pratique qui tend à fragiliser les réseaux de distribution sélective.

  • La prohibition des remises rétroactives, de l’alignement automatique sur des conditions plus favorables et de l’interdiction de la cession de certaines créances à des tiers (article L. 442-3 du Code de commerce)

L’article L. 442-3 dispose désormais que :

« Sont nuls les clauses ou contrats prévoyant pour toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services, la possibilité :

  • de bénéficier rétroactivement de remises, de ristournes ou d’accords de coopération commerciale ;
  • de bénéficier automatiquement des conditions plus favorables consenties aux entreprises concurrentes par le cocontractant ;
  • d’interdire au cocontractant la cession à des tiers des créances qu’il détient sur elle ».

Les pratiques restrictives qui ne sont plus interdites per se

L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 a supprimé l’énumération expresse des nombreuses pratiques  interdites par l’ancien article L. 442-6, I du Code de commerce. La loi « EGAlim 2 » a cependant procédé à la réintroduction de l’interdiction expresse de certaines de ces pratiques.

Ne sont ainsi plus interdites, en tant que pratiques restrictives de concurrence per se, le fait :

  • d’obtenir ou de tenter d’obtenir un avantage, condition préalable à la passation de commandes, sans l’assortir d’un engagement écrit sur un volume d’achat proportionné et, le cas échéant, d’un service demandé par le fournisseur et ayant fait l’objet d’un accord écrit (ancien article L.  442-6, I, 3°) ;
  • d’obtenir ou de tenter d’obtenir, sous la menace d’une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d’achat et de vente (ancien article L.  442-6, I, 4°) ;
  • d’imposer une clause de révision du prix, en application du cinquième alinéa du I de l’article L. 441-7 (ancien) ou de l’avant-dernier alinéa de l’article L.  441- 7-1 (ancien), ou une clause de renégociation du prix, en application de l’article L. 441-8 (ancien), par référence à un ou plusieurs indices publics sans rapport direct avec les produits ou les prestations de services qui sont l’objet de la convention (ancien article L.  442- 6, I, 7°) ;
  • de ne pas communiquer ses conditions générales de vente, dans les conditions prévues à l’article L. 441-6 (ancien), à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour l’exercice d’une activité professionnelle (ancien article L. 442- 6,  I, 9°) ;
  • de refuser de mentionner sur l’étiquetage d’un produit vendu sous marque de distributeur le nom et l’adresse du fabricant si celui-ci en a fait la demande conformément à l’article L.  112-6 du Code de la consommation (ancien article L  442- 6, I, 10°) ;
  • d’annoncer des prix hors des lieux de vente, pour des fruits ou légumes frais, sans respecter les règles définies par le Code de commerce (ancien article L.  442-6, I, 11°) ;
  • de passer, de régler ou de facturer une commande de produits ou de prestations de services à un prix différent du prix convenu résultant de l’application du barème des prix unitaires mentionné dans les conditions générales de vente, lorsque celles-ci ont été acceptées sans négociation par l’acheteur, ou du prix convenu à l’issue de la négociation commerciale faisant l’objet de la convention prévue à l’article L. 441-7, modifiée le cas échéant par avenant, ou de la renégociation prévue à l’article L. 441-8 (ancien article L. 442-6, I, 12°).

Ne sont pas non plus reprises dans l’article L.  442-3, les pratiques des points b) et e) de l’ancien article L. 442-6, II. consistant à « obtenir le paiement d’un droit d’accès au référencement préalablement à la passation de toute commande » ou à « obtenir d’un revendeur exploitant une surface de vente au détail inférieure à 300 mètres carrés qu’il approvisionne mais qui n’est pas lié à lui, directement ou indirectement, par un contrat de licence de marque ou de savoir-faire, un droit de préférence sur la cession ou le transfert de son activité ou un obligation de non-concurrence post-contractuelle, ou de subordonner l’approvisionnement de ce revendeur à une clause d’exclusivité ou de quasi-exclusivité d’achat de ses produits ou services d’une durée supérieure à deux ans ».

Ces fondements juridiques étant très peu utilisés, en tant que tels, devant les juridictions commerciales, l’ordonnance avait procédé à la suppression de ces pratiques.

Cependant, les comportements illicites qu’elles visaient à réprimer peuvent être poursuivis sur le fondement du déséquilibre significatif (1° du nouvel article L. 442-1) ou de l’avantage sans contrepartie (2° du nouvel article L. 442-1) dont les champs d’application ont été élargis dans cette optique.

La simplification apportée par l’ordonnance n’a donc pas pour objet de rendre licites les pratiques et clauses anciennement prohibées mais de recentrer les pratiques restrictives de concurrence sur des notions générales qui permettent d’englober les nombreuses clauses et pratiques énumérées dans l’ancien article L.  442-6 du Code de commerce.

  • Les modalités de mise en œuvre de l’action judiciaire

En ce qui concerne la sanction des pratiques prohibées par les articles L. 442-1, L. 442-2 et L. 442- 3 du Code de commerce, il convient de se référer à l’article L. 442-4 du même Code.

Le I de cet article prévoit notamment que l’action peut être introduite devant la juridiction civile ou commerciale compétente par quatre catégories de personnes distinctes :

  • toute personne justifiant d'un intérêt ;
  • le ministère public ;
  • le ministre chargé de l'Économie ;
  • le président de l'Autorité de la concurrence lorsque ce dernier constate, à l'occasion des affaires qui relèvent de sa compétence, une pratique mentionnée aux articles précités.

Les demandes que peuvent formuler ces différentes catégories de personnes devant la juridiction saisie varient en fonction de la catégorie de personnes considérée :

  • toute personne justifiant d’un intérêt : cessation des pratiques et réparation du préjudice subi ;
  • la partie victime des pratiques (en plus de la cessation des pratiques et de la réparation du préjudice subi) : constatation de la nullité des clauses ou contrats illicites et restitution des avantages indus ;
  • le ministre chargé de l’économie et le ministère public : cessation des pratiques, constatation de la nullité des clauses ou contrats illicites, restitution des avantages indument obtenus (dès lors que les victimes des pratiques sont informées de l’introduction de l’action) et prononcé d’une amende civile dont le montant ne peut excéder le plus élevé des trois plafonds suivants : 5 millions d’euros, le triple du montant des avantages indument perçus ou obtenus ou 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre.

Comme le III de l’article L.442-6 du Code de commerce le prévoyait déjà, la juridiction :

  • ordonne systématiquement la publication des décisions (article L.  442- 4, II), et
  • peut ordonner l’exécution de sa décision sous astreinte.

Comme le prévoyait déjà l’ancien article L.  442- 6, III,  les litiges portant sur des pratiques restrictives de concurrence du titre IV du livre IV  sont attribués à des juridictions spécialisées et désignées par décret (article D. 442-2 pour les commerçants ou artisans et article D. 442-3 pour les personnes qui ne sont ni commerçants ni artisans).

Enfin,  comme le prévoyait également déjà le IV de l’ancien article L. 442-6, le juge des référés peut ordonner, au besoin sous astreinte, la cessation des pratiques abusives ou toute autre mesure provisoire.

  • Les modalités de mise en œuvre de l’action administrative

La loi « DDADUE » a introduit un III à l’article L.  470- 1 du Code de commerce habilitant désormais les agents visés au II de l’article L.  450- 1 du Code de commerce (notamment les agents de la CCRF) à assortir leur mesure d’injonction notifiée à raison d’un manquement passible d’une amende civile d’une astreinte journalière.

Les pratiques restrictives de concurrence du  titre IV du livre IV du Code de commerce étant passibles d’une amende civile, les agents de la CCRF sont susceptibles de prendre des mesures d’injonction sous astreinte à l’égard des auteurs de telles pratiques pour leur enjoindre, en leur impartissant un délai raisonnable :

  • de se conformer à leurs obligation ;
  • de cesser tout agissement illicite ;
  • de supprimer toute clause illicite ;
  • de se conformer aux dispositions du règlement « P2B » et de cesser tout agissement ou de supprimer toute clause contraire à ces dispositions.

L’astreinte journalière :

  • ne peut excéder un montant de 0,1 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos ; son montant doit être « proportionné à la gravité des manquements constatés et tient compte notamment de l’importance du trouble causé » ;
  • « court à compter du jour suivant l’expiration du délai imparti au professionnel pour se mettre en conformité avec la mesure d’injonction notifiée » ;
  • est liquidée « en cas d’inexécution, totale ou partielle, ou d’exécution tardive » par la DGCCRF dans les conditions du IV de l’article L. 470-2 et « le total des sommes demandées […] ne peut être supérieur à 1 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos ».

Lorsque les agents assortissent la mesure d’injonction d’une astreinte, l’injonction doit préciser les modalités d’application de l’astreinte encourue, notamment sa date d’applicabilité, sa durée et son montant.

Enfin, le 2. du III de l’article L. 470-1 prévoit que l’injonction « peut faire l’objet en cas d’inexécution totale ou partielle ou d’exécution tardive, d’une mesure de publicité sur le site internet de [la DGCCRF] ainsi que, aux frais de la personne sanctionnée, sur un support habilité à recevoir des annonces légales que cette dernière aura choisi dans le département où elle est domiciliée. La décision peut en outre être publiée, à ses frais, sur d’autres supports. Dans ce cas, le professionnel est informé, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l’injonction, de la nature et des modalités de la mesure de publicité encourue ».

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