Par un arrêt du 16 mai 2024, la Cour de justice de l’Union européenne juge qu’un travailleur frontalier doit bénéficier des mêmes droits aux allocations familiales dans l’Etat d’accueil qu’un travailleur résident dans cet Etat dès lors que le travailleur frontalier contribue au financement des politiques sociales par les contributions sociales et fiscales qu’il paie dans l’Etat d’accueil en vertu de l’activité salariée qu’il y exerce.
Par un arrêt rendu le 16 mai 2024 dans l’affaire C-27/23 Hocinx, sur un renvoi préjudiciel du Luxembourg, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a interprété l’article 45 TFUE, de l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union et de l’article 67 du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale.
Au cas précis, un ressortissant belge travaille au Luxembourg et réside en Belgique : il bénéficie du statut de travailleur frontalier et dépend du régime luxembourgeois pour les allocations familiales.
Il a perçu des allocations pendant plusieurs années pour un enfant placé dans son foyer par décision judiciaire. Puis l’administration luxembourgeoise chargée des allocations familiales les lui a retirées, considérant en effet que le versement d’allocations familiales est limité aux enfants présentant un lien de filiation direct (légitime, naturel ou adoptif) avec le travailleur frontalier.
Pour cette administration, les enfants qui font l’objet d’un placement judiciaire ont le droit de percevoir une telle allocation, versée à la personne physique ou morale qui en a la garde, si ces enfants résident au Luxembourg.
Saisie du litige, la Cour de cassation luxembourgeoise a demandé à la CJUE si les règles du code social luxembourgeois constituent une discrimination indirecte en ce qu’elles appliquent des conditions d’attribution différentes selon que le travailleur est résident au Luxembourg ou non.
Dans son arrêt, la Cour rappelle que les travailleurs frontaliers contribuent au financement des politiques sociales de l’État membre d’accueil eu égard aux contributions fiscales et sociales qu’ils paient dans cet État, en vertu de l’activité salariée qu’ils y exercent. À ce titre, ils doivent pouvoir bénéficier des prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux dans les mêmes conditions que les travailleurs nationaux.
La Cour considère qu’une réglementation sociale telle que celle du Luxembourg entraîne une différence de traitement entre travailleurs non-résidents et travailleurs résidents dès lors que les travailleurs non-résidents ne peuvent percevoir un avantage social pour des enfants placés dans leur foyer, dont ils ont la garde mais qui n’ont pas leur domicile légal ni leur résidence effective et continue dans l’Etat d’accueil.
Aussi, la CJUE juge que cette réglementation constitue une discrimination indirecte fondée sur la nationalité et qu’elle est contraire au droit de l’Union.