Lettre de la DAJ – Vente en ligne de médicaments : la CJUE précise les interdictions que peut prononcer un Etat membre

Saisie d’une question préjudicielle française, la Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée pour préciser les conditions dans lesquelles un État membre peut interdire un service de mise en relation de pharmaciens et de clients pour la vente en ligne de médicaments sans prescription médicale.

Par un arrêt rendu dans l’affaire C-606/21 Doctipharma, la Cour de justice de l’Union européenne a précisé les conditions dans lesquelles un État membre peut interdire un service de mise en relation de pharmaciens et de clients pour la vente en ligne de médicaments sans ordonnance en interprétant la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

Sur renvoi préjudiciel de la Cour d’appel de Paris, la Cour de justice devait dire si le droit de l’Union permet aux États membres d’interdire la fourniture d’un service qui consiste à mettre en relation, au moyen d’un site Internet, des pharmaciens et des clients pour la vente, à partir des sites d’officines des pharmacies ayant souscrit à ce service, de médicaments non soumis à prescription médicale.

Lors de l’examen de la compatibilité avec le droit de l’Union des conditions de délivrance au détail des médicaments, la Cour a reconnu le caractère très particulier des médicaments, dont les effets thérapeutiques les distinguent substantiellement de toute autre marchandise. La Cour de justice a également jugé que la santé et la vie des personnes occupaient le premier rang parmi les biens et les intérêts protégés par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et qu’il appartenait aux États membres de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé publique et la manière dont ce niveau doit être atteint. Ce niveau pouvant varier d’un État membre à l’autre, les États membres se sont vu reconnaître une marge d’appréciation (arrêt du 19 mai 2009, Apothekerkammer des Saarlandes e.a., C171/07 et C172/07) pour fixer les conditions de délivrance des médicaments au public sur leur territoire.

Dans son arrêt, la Cour juge ce qui suit :

  • lorsque le prestataire, ne possédant pas la qualité de pharmacien, est considéré comme procédant lui-même à la vente de médicaments non soumis à prescription, l’État membre sur le territoire duquel il est établi peut interdire la fourniture de ce service,
  • en revanche, lorsque le prestataire concerné se borne, par une prestation propre et distincte de la vente, à mettre en relation des vendeurs et des clients, les États membres ne peuvent interdire ce service au motif que la société concernée participe au commerce électronique de vente de médicaments sans avoir la qualité de pharmacien.