L’élu local qui préside la commission d’analyse des candidatures n’est pas partial lorsqu’il commente sur un réseau social que l’ancienne délégation de service public sur le point d’être renouvelée est « mal gérée ». Le Conseil d’État juge que la modération des propos et le contexte de la publication suffisent à écarter une éventuelle atteinte au principe d’impartialité.
Dans sa décision du 24 juillet 2024 Commune de Sevran, le Conseil d’État précise la portée qu’il donne à l’application du principe d’impartialité dans le cadre de la commande publique.
L’impartialité est un principe général du droit qui s’impose à toute autorité administrative et à ses membres qui doivent en conséquence s’abstenir de prendre des positions publiques qui contreviendraient à ce principe (1). Une telle position est contraire au principe d’impartialité si elle introduit un biais subjectif de nature à influencer une décision prise ou à prendre. La caractérisation de l’impartialité est nécessairement circonstancielle : si le Conseil d’État a déjà pu considérer comme atteignant à ce principe l’opinion d’une personne associée à la prise de décision d’une autorité administrative (2), tel n’est pas systématiquement le cas (3).
En l’espèce, un élu local, président de la commission chargée d’analyser les candidatures dans le cadre d’un renouvellement d’une délégation service public (DSP), a publié sur le réseau social Facebook un avis négatif sur la DSP en vigueur. Le juge du référé précontractuel du tribunal administratif de Montreuil avait conclu que ce propos, en ce qu’il critique le comportement de l’actuel délégataire candidat à sa succession, porte atteinte au principe d’impartialité (4).
La commune s’est pourvue en cassation devant le Conseil d’État, qui vient compléter sa jurisprudence casuistique en la matière. Il relève que « la modération des propos et le contexte de cette publication ne révélaient ni parti pris ni animosité personnelle à l'encontre » de la société encore délégataire au moment des faits. En premier lieu, il constate que le propos en lui-même ne permet pas de créer un doute quant à un potentiel conflit d’intérêt. Il a ensuite considéré que la critique visait non pas directement les actions du cocontractant mais le fonctionnement même du service public. Ainsi, étant le propre d’un élu local d’avoir une opinion sur un service public communal, celui-ci peut l’exprimer modérément même s’il joue un rôle dans la procédure de passation de la DSP afférente.
Le contexte du propos tenu a également incité le Conseil d’État à censurer la qualification retenue par le tribunal administratif. En effet, le commentaire de l’élu local publié sur un réseau social répondait à un autre commentaire et s’inscrivait dans une discussion générale sur ce service public qui prenait la suite d’une concertation publique lancée sur le sujet.