La Cour des comptes a examiné le fondement législatif des dispositifs fiscaux mis en place pour tenir compte de la situation familiale, analysé leur cohérence et apprécié leurs effets pour les services fiscaux et les contribuables. La Cour a formulé 10 recommandations visant une plus grande cohérence des avantages fiscaux familiaux, une amélioration de leur gestion et une lutte plus efficace contre leur détournement.
Le rapport de la Cour des comptes sur la prise en compte de la famille dans la fiscalité présente les dispositifs existants, leur appropriation par les contribuables, leurs effets et les perspectives de ces dispositifs.
Un coût global estimé à 28 milliards d’euros
L’impôt sur le revenu est le prélèvement qui prend le plus en compte la composition conjugale et familiale des foyers fiscaux. La Cour des comptes relève que « certains dispositifs hérités du passé apparaissent aujourd’hui trop favorables ou attachés à un statut davantage qu’aux ressources et aux charges réelles de leurs bénéficiaires ». La Cour vise ainsi certaines situations concernant des demi-parts fiscales additionnelles (invalidité, veuvage, anciens combattants parents isolés) qui mériteraient, selon le rapport, de « s’adapter au contexte socio-économique ».
L’impact sur les finances publiques de la prise en compte de la famille par le système fiscal est évalué à 28 milliards d’euros en 2021, dont 27,6 milliards au titre de l’impôt sur le revenu, soit 1,1 % du PIB, 9,5 % des recettes fiscales nettes de l’Etat et 34,5 % du produit net de l’impôt sur le revenu.
Une difficulté de gestion liée à des règles fiscales complexes
Selon le rapport de la Cour des comptes, la multiplication des règles fiscales est source de complexité à la fois pour les contribuables et les services de la Direction générale des finances publiques. De plus, la méconnaissance de certains dispositifs conduit à des phénomènes de non recours, comme l’attribution d’une demi-part supplémentaires pour les parents isolés ou la réduction d’impôt au titre des frais de scolarités.
La Cour ajoute que la complexité des règles peut également « favoriser des irrégularités, qu’elles soient intentionnelles ou non ». Le développement récent du réparage d’anomalies grâce au traitement de données a permis la vérification ciblée de milliers de dossiers.
Des effets redistributifs discutés
Les effets redistributifs globaux de la familialisation de l’impôt sur le revenu sont complexes à appréhender. Le quotient familial est particulièrement pointé du doigt par le rapport de la Cour en ce qu’il favorise les familles les plus aisées.
Le système français du quotient familial fait figure d’exception à l’international. Ces trente dernières années, la tendance générale au sein de l’Union européenne est plutôt allée dans le sens d’une individualisation de l’impôt sans pour autant exclure la reconnaissance d’une forme de solidarité au sein des foyers ou en tenant compte des charges de parentalité par des mécanismes comme l’abattement, la réduction d’impôt ou la modulation du barème de l’impôt.
La Cour présente dix recommandations visant à simplifier et rationnaliser la prise en compte de la composante familiale par le système fiscal :
- aligner le régime fiscal des veufs ayant des enfants à charge sur celui des parents isolés à l’issue d’une période transitoire consécutive au veuvage ;
- engager la suppression de la demi-part pour les personnes vivant seules ayant un enfant majeur non rattaché qu’elles ont élevé pendant au moins cinq années au cours desquelles elles vivaient seules ;
- homogénéiser progressivement les niveaux de plafonnement du gain en impôt procuré par les demi-parts additionnelles ;
- remplacer l’abattement en faveur des contribuables ayant des enfants majeurs mariés ou chargés de famille rattachés à leur foyer fiscal par l’attribution des mêmes parts de quotient familial que pour les enfants mineurs ;
- évaluer les effets de l’absence de conjugalisation de l’impôt sur la fortune immobilière et proposer des scénarios d’évolution ;
- uniformiser les majorations de revenu fiscal de référence pour toutes les demi-parts supplémentaires dans la détermination des seuils d’allégements fiscaux en matière de taxe foncière et de contributions sociales ;
- prévoir une obligation de dépôt des justificatifs attachés à la déclaration des revenus sur l’espace personnel numérique pour toute première demande d’un avantage lié à la situation familiale ;
- évaluer les effets du dispositif mis en place en 2023 pour s’assurer que les pensions alimentaires déduites du revenu imposable sont symétriquement déclarées par leurs bénéficiaires ;
- redresser, le cas échéant, les droits éludés de taxe foncière et de contributions sociales consécutivement à un contrôle fiscal ayant conduit à majorer le revenu fiscal de référence ou à minorer le nombre de parts fiscales ;
- mettre à disposition des services gestionnaires un applicatif de gestion des remboursement de malus CO² et de la taxe sur la masse en ordre de marche.