L’« Inflation Reduction Act » (IRA) adopté par les Etats Unis a suscité des craintes d’effets négatifs sur l’industrie européenne avec des risques de délocalisation d’entreprises. En réponse, la Commission européenne a présenté le volet industriel du Pacte Vert. Un rapport d’information de l’Assemblée nationale se propose de donner des pistes pour répondre à ce nouveau plan américain qui constitue une chance de renforcer l’autonomie stratégique européenne.
Le plan dénommé « Inflation Reduction Act » (IRA) par les États-Unis a suscité des craintes de la part des Européens. Si ce plan massif d’investissements de 432 milliards de dollars sur dix ans marque le retour d’une politique de lutte contre le réchauffement climatique aux Etats-Unis, il est également source de potentiels renoncement au développement de projets en Europe voire de délocalisation.
En réponse au vote de l’IRA par le Congrès américain, la Commission européenne a présenté le volet industriel du Pacte Vert. Si des textes sont en cours d’adoption, l’Union doit également apporter un soutien budgétaire à l’industrie européenne et une réponse sur le volet commercial.
Le rapport d’information de l’Assemblée nationale, présenté par Mesdames Marietta Karamanli et Sabine Thillaye, donne des pistes pour répondre à ce nouveau plan américain.
Les risques relatifs de l’IRA sur l’économie européenne
L’IRA promeut notamment la production et l’utilisation d’énergies vertes aux Etats‑Unis dans le but de favoriser une industrie verte américaine. La loi accorde par exemple des avantages fiscaux aux entreprises qui investissent dans les technologies propres sur le territoire américain et des subventions aux consommateurs qui achètent des produits verts fabriqués aux États-Unis.
Le rapport explique que l’adoption de l’IRA a nourri plusieurs craintes de la part des Européens ; la première d’entre elle tient à la logique d’acheter américain afin d’obtenir les subventions prévues (problématique des véhicules notamment). La deuxième crainte tient aux allègements fiscaux pour les entreprises produisant aux Etats-Unis. Enfin, les Européens craignaient que la logique de subvention à la production telle qu’introduite par l’IRA ne pousse les autres pays à faire de même, créant ainsi une « course aux subventions ».
Les risques de délocalisation s’expliquent notamment par le fait que l’IRA viendrait renforcer un différentiel d’attractivité déjà existant entre les Etats-Unis et l’Europe. Les États-Unis bénéficient en effet d’un prix de l’énergie particulièrement compétitif, en raison notamment de l’exploitation sur leur sol du gaz de schiste alors que l’Europe est confrontée à des hausses du coût de l’électricité en raison de l’indexation du prix de l’électricité sur celui du gaz lors des pics de consommation.
Plusieurs études économiques démontrent néanmoins que les mesures prévues par l’IRA auraient un impact limité sur l’économie européenne. Une étude du Conseil franco-allemand des experts économiques révèle par exemple que le volume financier global des divers programmes lancés par l’Union européenne pour atteindre les objectifs climatiques et faciliter la transition verte est comparable à celui de l’IRA.
Le plan industriel du Pacte vert pour l’Europe, réponse principale à l’IRA
Le 16 mars 2023, la Commission européenne a présenté plusieurs initiatives pour répondre à l’IRA : soutien à l’industrie décarbonée, sécurisation des chaînes d’approvisionnement et meilleure régulation des prix de l’électricité dans les États membres.
Le volet industriel du Pacte Vert repose sur deux principaux textes : d’une part, le règlement sur les matières premières critiques et d’autre part, la proposition de règlement pour une industrie « zéro net ». La Commission propose par ailleurs de réformer le marché européen de l’électricité.
Le financement de ces nouvelles mesures s’appuie en grande partie sur des financements déjà existants. L’Union européenne agit également en faveur du verdissement de l’investissement privé, comme en témoigne l’adoption de la taxonomie verte. Dix milliards d’euros seront dégagés et répartis dans plusieurs programmes ou fonds.
La réponse commerciale de l’Union européenne face à l’IRA
Selon les rapporteurs, l’IRA ne respecte pas le droit de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) dans la mesure où la clause de contenu local est contraire à l’article 3 du GATT (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce). Pour autant, il ne semble pas pertinent de saisir l’OMC et ce, même si les chances de succès auprès de l’organe de règlement des différends sont fortes. De même, le recours à des instruments de défense commerciale ne semble pas non plus utile.
Les rapporteurs plaident davantage pour la conclusion d’accords avec les Etats-Unis permettant de rendre éligibles des produits européens aux crédits d’impôt de l’IRA. La conclusion d’un accord sur les minéraux critiques avec les États-Unis permettrait par exemple, d’une part, de rendre les véhicules électriques européens éligibles au crédit d’impôt « véhicules propres » et d’autre part, de résoudre les difficultés d’accès aux matières premières critiques, dans un contexte où la demande mondiale pour ces matériaux est appelée à fortement croître dans les prochaines années.