Direction des Affaires juridiques

Lettre de la DAJ - Publication de la loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France

Dans un contexte international particulièrement troublé, la France est exposée à de forts risques d’actions de déstabilisation venant de puissances étrangères. Le Parlement a adopté une loi visant à limiter les fragilités de notre pays dans ce domaine.

La loi n° 2024-850 du 26 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France est une loi d’initiative parlementaire directement issue des travaux de la délégation parlementaire au renseignement et d’une commission d’enquête de l’Assemblée nationale. La délégation a pointé les vulnérabilités de la France face aux tentatives de déstabilisation orchestrées par des puissances étrangères. La proposition de loi qui en a découlé a été déposée sur le bureau de l’Assemblée en février 2024 puis définitivement adoptée le 5 juin 2024. Le Conseil Constitutionnel, saisi par deux fois, n’a pas examiné la constitutionnalité du texte. En effet, il a déclaré les deux saisines irrecevables, ces dernières ayant été effectuée après la dissolution de l’Assemblée nationale (décision 2024-870 DC du 10 juillet 2024 et décision 2024-871 DC du 24 juillet 2024).

Le texte final comprend neuf articles articulés autour de quatre axes principaux :

  • « transparence des activités d’influence réalisées pour le compte d’un mandant étranger » : il s’agit ici de créer un registre recensant les activités des entités étrangères visant à influencer la décision publique. Les personnes exerçant pour le compte d’un mandant étranger ont désormais l’obligation de déclarer leurs activités (telles que la communication avec des élus ou des décideurs publics ou encore la collecte d’argent par exemple) auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Ce registre, distinct du registre des représentants d’intérêt créé en 2016, est inspiré de pratiques en cours dans d’autres pays tels que les Etats-Unis (Foreign Propagandist Registration Act) ou au Royaume-Uni (Foreign Influence Registration Scheme). Les personnes qui ne se conforment pas aux obligations de déclaration sont passibles de sanctions : trois ans de prison et 45 000 euros d’amende s’il s’agit d’une personne physique et 225 000 euros d’amende et une interdiction de percevoir une aide publique pour les personnes morales.
  • information des parlementaires : la loi prévoit que les assemblées seront destinataires d’un rapport du Gouvernement dressant un état des lieux de la menace d’ingérences étrangères. Ce rapport sera remis par le Gouvernement au Parlement le 1er juillet 2025 puis tous les deux ans afin d’assurer un suivi et la bonne information des députés et sénateurs. Ce rapport pourra faire l’objet d’un débat en séance publique.
  • « technique de l’algorithme » et gel des avoirs : il s’agit d’étendre à l’ingérence étrangère des dispositifs actuellement utilisés en matière de lutte contre le terrorisme. Ainsi, à titre expérimental, jusqu’au 30 juin 2028, la loi permet aux services de renseignement de procéder à des traitements automatisés de données afin de détecter les connexions susceptibles de constituer des tentatives d’ingérence (cyberattaques). De la même manière, la loi autorise le gel des avoirs des personnes « se livrant, incitant ou finançant » des actions d’ingérence.
  • « renforcement de la réponse pénale » : cet article, issu du Sénat, crée une circonstance aggravante en cas d’atteinte aux biens ou aux personnes commise pour le compte ou sous le contrôle d’une entité étrangère.

Parallèlement à ce travail législatif, le Sénat a également mené des travaux dans le cadre d’une commission d’enquête qui a rendu son rapport à la fin du mois de juillet 2024.

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