Lettre de la DAJ – Mission d’information de l’Assemblée nationale sur la justice pénale des mineurs

Plus d’une année après l’entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs, le rapport d’information du 22 mars 2023 de la Commission des lois de l’Assemblée nationale porte un regard analytique sur l’application de ce code.

Une première évaluation du Code de la justice pénale des mineurs (CJPM) est apparue opportune à la commission des Lois qui a créé une mission d’information ayant pour objet l’évaluation de la mise en œuvre du CJPM.

La justice des mineurs concerne en France les mineurs en danger (régis au civil par l'article 375 du code civil) et les mineurs délinquants (régis au pénal par l'ordonnance du 2 février 1945 puis le code de la justice pénale des mineurs, entré en vigueur le 30 septembre 2021.

Une transformation en profondeur du cadre juridique de la justice pénale des mineurs

Le mineur n'est pas un justiciable comme les autres. C’est pour cette raison que le législateur avait pour ambition d'accélérer les procédures pénales et de renforcer la prise en charge des mineurs délinquants par la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). Pour cela, toutes les dispositions spécifiques aux mineurs ont été réunies dans un même code.

Le CJPM instaure la présomption de non-discernement pour les mineurs âgés de moins de 13 ans qui permet à la France de se mettre en conformité avec le 3° de l'article 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant, qui requiert des États parties "d'établir un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n'avoir pas la capacité d’enfreindre la loi pénale". Cette présomption a des effets à tous les stades de la procédure, mais n'est pas juridiquement irréfutable. La capacité de discernement est donc appréciée au cas par cas.

Grâce au CJPM, les modalités de prise en charge éducative sont renforcées. Le code crée une mesure éducative unique, modulable et adaptable dans le temps. Elle permet de prendre en compte la personnalité et l'évolution du mineur. La mesure éducative judiciaire peut ainsi comporter des modules (insertion, réparation, santé, placement, interdiction de paraître dans des lieux ou d'entrer en contact avec la victime ou les coauteurs). Les conditions de recours aux mesures de sûreté (par exemple la détention provisoire) ont été durcies.

Selon les dispositions du code, certains juges des libertés et de la détention seront spécialement chargés des affaires concernant les mineurs. La continuité de l'intervention de l'avocat du mineur tout au long de la procédure est inscrite dans le nouveau code. De la spécialisation des procédures résulte l'obligation de notifier ses droits à un mineur en des termes simples et accessibles.

Les améliorations permises par le code de la justice pénale des mineurs peuvent encore être consolidées

La mission constate que la réforme a eu un effet radical en faveur de la réduction des délais de jugement en permettant également une réduction de la durée passée en détention provisoire. Plus généralement, le nombre de mineurs détenus tend à diminuer, de 768 détenus en avril 2021 à 614 en janvier 2023, soit une baisse de plus de 20 %. Cependant des ajustements sont nécessaires pour que la dernière réforme atteigne tous ses objectifs :

  • il convient, en premier lieu, de mieux encadrer l’audience unique sans contourner les principes de la réforme. L’audience unique est une exception au principe, instauré par le CJPM, de la césure du procès pénal des mineurs. Sans modifier les critères du recours à l’audience unique, les rapporteurs proposent de mieux anticiper la transformation de l’audience de culpabilité en audience unique à l’initiative de la juridiction ;
  • il conviendrait de mieux appréhender les problématiques nouvelles consécutives à la césure du procès pénal. Cette césure présente de multiples avantages, notamment la rapidité tant du jugement sur la culpabilité que de l’indemnisation des victimes, mais aussi l’adaptation de la sanction à l’évolution du mineur durant la période de mise à l’épreuve éducative ;
  • enfin, il est envisagé de faciliter le travail de la protection judiciaire de la jeunesse et la prise en charge éducative des mineurs délinquants en mobilisant lorsque cela est possible, l’éducateur référent ou les informations précédemment collectées ou encore en permettant de substituer au recueil de renseignements socio-éducatifs (RRSE) une simple note de situation lorsque le jeune est déjà suivi par la PJJ (proposition nécessitant une évolution législative ;
  • une meilleure connaissance statistique est également préconisée afin de pouvoir disposer de chiffres par juridiction et consolidés, obéissant aux mêmes règles de calcul, par exemple en matière de taux de recours aux audiences uniques.