Lettre de la DAJ - Loi tendant à rééquilibrer les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs

La loi n° 2023-221 du 30 mars 2023 complète les dispositifs de régulation des relations entre les fournisseurs et les distributeurs mis en place en 2018 et 2021 par les lois dites « Egalim I » et « Egalim II » dans un contexte de forte inflation.

Dans le contexte d’une augmentation régulière des prix à la consommation, le député Descrozaille ainsi que les membres de son groupe parlementaire ont été à l’initiative d’une proposition de loi visant à « rééquilibrer les relations commerciales entre les fournisseurs et les distributeurs ».

Si le rapport de force entre les distributeurs et les fournisseurs semble structurellement déséquilibré au profit des distributeurs, le législateur entend intervenir pour lutter contre ce déséquilibre et atteindre des objectifs parfois contradictoires : i)  les fournisseurs doivent pouvoir tirer un revenu suffisant de leur travail, ii) les consommateurs ne doivent pas subir de trop fortes hausses des prix mais iii) la liberté contractuelle doit être sauvegardée.

Après les lois Egalim I – loi du 30 octobre 2018 dont l'objectif était d'améliorer l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire – et Egalim II – loi du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs – le législateur est revenu sur ce sujet afin d’apporter de nouvelles réponses à ce triple défi. Si, dans les discussions, l’Assemblée Nationale et le Sénat ont pu montrer des désaccords, les députés et les sénateurs sont finalement parvenus à un compromis lors d’une commission mixte paritaire et le texte a finalement été largement soutenu sur les divers bancs des assemblées.

Les principaux points du texte de la loi sont :

  • trouver une solution pour les cas où les négociations annuelles n’aboutissent pas : le texte met en place pour trois ans une expérimentation qui permet, si les négociations sont infructueuses au 1er mars de choisir entre deux solutions ; soit les fournisseurs interrompent les livraisons s’ils estiment que le prix durant le préavis est trop faible, soit ils peuvent appliquer un préavis de rupture classique » ;
  • lutter contre « l’évasion juridique » : avec cette disposition, dès lors que les produits concernés ont vocation à être vendus en France, les contrats négociés entre les fournisseurs et les distributeurs via des centres d’achat basés à l’étranger sont soumis au droit et aux tribunaux français ;
  • lutter contre certains abus constatés : la loi prévoit d’encadrer plus fortement les « pénalités logistiques », c’est-à-dire les sanctions financières en cas de retard ou d’absence de livraison. Ainsi, ces dernières sont désormais plafonnées à 2% de la valeur des produits commandés ;
  • prolonger l’encadrement des promotions et les règles du seuil de revente à perte : la loi de 2023 prolonge jusqu’à 2026 deux expérimentations prévues dans la loi dite « Egalim I » : i) l’encadrement des promotions alimentaires, qui est de plus étendu, à partir de mars 2024, à tous les produits de grande consommation ; ii) le seuil de revente à perte « SRP » 10%, c’est-à-dire le seuil obligeant les distributeurs à réaliser une marge minimale de 10 % - qui ne s’applique pas à la filière fruits et légumes ;
  • étendre la « non-négociabilité de la matière première » : ce principe, établi par la loi dite « Egalim II », impose que la négociation commerciale ne puisse pas porter sur la part représentant les matières premières agricoles dans le tarif proposé sur un produit. Désormais, cette « non-négociabilité » s’étend aux produits vendus sous la marque du distributeur alors qu’ils en étaient exclus jusqu’alors.