Lettre de la DAJ – Les enseignements des données bancaires sur la performance énergétique des logements

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) des logements est devenu un outil important de l’orientation des politiques publiques énergétiques. Or, la prédiction de consommation indiquée par le DPE peut différer de la consommation réelle des ménages. Le CAE, en partenariat avec le Crédit Mutuel Alliance Fédérale, a réalisé une étude visant à déterminer l'écart entre consommation énergétique réelle et théorique.

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) des logements est devenu un outil important tant pour les responsables des politiques publiques énergétiques que pour le grand public. En effet, acheteurs et locataires voient dans le DPE un document destiné à signaler les gains espérés des travaux de rénovation sur la facture énergétique. Or, la consommation réelle des ménages diffère parfois de la consommation théorique établie par le DPE.

L’étude du CAE vise à mesurer l’écart entre consommation énergétique réelle et théorique en s’appuyant sur les données bancaires anonymisées des clients du Crédit Mutuel Alliance Fédérale.

Le CAE en bref

Le Conseil d’analyse économique (CAE)instance pluraliste composée d’économistes professionnels reconnus et de sensibilités diverses, est placé auprès du Premier ministre. Il a pour mission de réaliser, de façon indépendante, des analyses économiques pour le Gouvernement destinées à éclairer la conduite des politiques économiques du pays.

Le DPE, véritable outil de la politique de rénovation énergétique

Le diagnostic de performance énergétique (DPE global) renseigne sur la performance énergétique et climatique d’un logement ou d’un bâtiment (étiquettes A à G) en évaluant sa consommation d’énergie (DPE « énergie ») et son impact en termes d’émissions de gaz à effet de serre (DPE « climat »).

La consommation théorique prédite par le DPE est une mesure centrale pour modéliser les économies d'énergie attendues d'une rénovation. Le DPE sert par conséquent à définir les priorités de rénovation de bâtiments et conditionne les aides à la rénovation.

Pour autant, cette consommation, théorique, peut différer de la consommation réelle : en effet, le DPE se base sur une demande de confort thermique fixe (19° C l’hiver et 28° C l’été). Or, les études montrent que souvent, moins le logement est performant et plus ses occupants auront tendance à limiter leur consommation par rapport à la consommation théorique et inversement. En outre, la précision du DPE varie en fonction de la surface du logement : en raison des calculs, le DPE est plus faible pour les petites superficies où le rapport surface déperditive/surface au sol est plus élevé. Le rapport dénonce également le fait que le DPE est manipulable en raison d’une trop grande subjectivité dans l’appréciation des paramètres, ce que dénoncent les experts et les associations de consommateurs.

Les données recueillies par le CAE

Le DPE global prédit-il correctement la dépense finale d’énergie des ménages ?

L’étude montre que la dépense énergétique par m2 est en hausse significative pour chaque classe par rapport à la classe AB, avec une hausse maximale de 85 % pour la classe G.

Le CAE note surtout que des facteurs sociodémographiques, comme le revenu ou l’âge, expliquent autant, voire davantage les variations de dépenses énergétiques que la performance énergétique prédite par le DPE. Ainsi, la dépense énergétique varie du simple au double entre un ménage à revenu médian (10ème vingtile) et un ménage du dernier vingtile. Elle est également 40 % plus élevée pour un ménage de moins de 25 ans que pour un ménage de plus de 65 ans.

Le DPE « énergie » prédit-il correctement la consommation primaire effective des ménages ?

La note du CAE détaille les raisons expliquant que l’on ne retrouve pas dans la relation entre dépense finale et étiquette DPE une progressivité aussi forte que celle affichée par le DPE.

L’une d’elle tient à la nature duale du DPE global : en effet, celui-ci est fondé sur une étiquette correspondant à la performance énergétique du logement, le DPE « énergie » et sur une étiquette correspondant à sa performance environnementale, le DPE « climat ». Or, l’étiquette du DPE global correspond à la moins bonne étiquette de chacune de ses composantes.

En outre, le CAE indique que la prédiction de la performance énergétique s'atténue lorsque la superficie croît, ce qui ne rentre pas nécessairement dans le calcul pour le DPE. En effet, celui-ci part de l’hypothèse que la consommation énergétique est une fonction linéaire de la surface. Or une grande partie des besoins énergétiques est soit fixe (eau chaude et sanitaire) soit décroissante avec la surface (on ne chauffe pas toutes les pièces d’un grand logement, inertie thermique…). Partant, la progressivité de la consommation est exagérée par le DPE pour les grandes surfaces.

Est-il possible de quantifier le poids respectif de l’ajustement comportemental et de l’erreur de modélisation dans le différentiel entre la consommation théorique prédite par le DPE et la consommation réelle ?

L’étude du CAE montre que l’ajustement comportemental explique une part prépondérante de l’écart, le tiers restant étant lié à l’erreur de modélisation de la consommation théorique du DPE.

En effet, il apparaît que les usagers adaptent leur comportement en fonction de leurs caractéristiques sociodémographiques et notamment de leurs revenus. Ainsi la consommation des ménages dépend autant des revenus que de l’étiquette DPE.

Le CAE conclut donc que des pistes d’amélioration et d’homogénéisation du DPE sont nécessaires pour en faire un indicateur plus fiable de la qualité énergétique des logements. Les effets comportementaux, très importants, doivent être davantage étudiés afin de bien évaluer les économies d’énergie associées aux rénovations énergétiques.