Le juge administratif, saisi par une partie à un contrat d’un litige relatif à son exécution, dans le cadre duquel l’illicéité du contenu du contrat était invoquée par la voie de l’exception, ne peut annuler ce contrat sans être saisi d’un recours de plein contentieux en contestant la validité.
CE, 27 novembre 2023, SNCF Voyageurs, n°462445
Dans le cadre d’un litige indemnitaire relatif à l’exécution d’un contrat conclu entre SNCF Mobilités et la région PACA, SNCF Mobilités a demandé au tribunal administratif de Marseille la condamnation de la région à lui verser une somme, à titre principal, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, et à titre subsidiaire, eu égard au moyen tiré de l’illicéité du contrat invoquée en défense par la voie de l’exception, sur les fondements de la responsabilité quasi-contractuelle et quasi-délictuelle.
A la suite de l’annulation du contrat par le tribunal administratif compte tenu de son illicéité, SNCF Mobilités a interjeté appel devant la cour administrative d’appel de Marseille qui a rejeté ses conclusions.
Saisi du litige[1], le Conseil d’Etat rappelle d’abord l’office du juge du contrat saisi de conclusions tendant à la contestation de la validité du contrat eu égard à l’illégalité commise et à l’objectif de stabilité des relations contractuelles, consistant soit à décider la poursuite de l’exécution du contrat éventuellement sous réserve de sa régularisation, soit à procéder à sa résiliation ou son annulation[2].
Puis, la Haute juridiction rappelle l’office du juge du contrat saisi de conclusions indemnitaires relatives à l’exécution du contrat eu égard à l’exigence de loyauté des relations contractuelles, consistant soit à se prononcer sur le fondement contractuel lorsque le contrat peut être appliqué, soit à se prononcer sur le fondement extracontractuel lorsqu’il constate l’illégalité du contrat qui a été invoquée ou qu’il a relevé d’office[3].
Le Conseil d’Etat en déduit donc que le juge du contrat ne peut annuler un contrat s’il n’est pas saisi de conclusions tendant à la contestation de sa validité, à défaut de quoi il statue au-delà des conclusions qui lui sont soumises et méconnait l’interdiction de l’ultra petita. Il lui appartient seulement, lorsqu’il est saisi de conclusions indemnitaires relevant de l’exécution du contrat et que le moyen tiré de l’exception d’illicéité du contrat est fondé, d’en écarter l’application pour se prononcer.
En l’espèce, la Haute juridiction annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille en relevant qu’il lui appartenait de relever d’office le moyen tiré de ce qu’en annulant le contrat, les juges de première instance ont méconnu leur office et ont statué au-delà des conclusions qui leur étaient présentées.