Le maître d’ouvrage peut rechercher la responsabilité contractuelle des constructeurs dans un délai de dix ans à compter de la date d’effet de la réception des travaux, qu’elle soit formulée sans réserve, avec réserves ou sous réserve.
CE, 20 décembre 2024, Société JSA Technology, n° 475416
Un marché de travaux portant sur la construction d’une centrale photovoltaïque a été conclu entre un constructeur et un maitre d’ouvrage. Bien que la centrale ait été construite, les travaux ont été réceptionnés le 28 février 2013 sous réserve du raccordement de la centrale au réseau électrique.
Ce raccordement n’ayant jamais eu lieu, le maitre d’ouvrage a recherché la responsabilité contractuelle de son constructeur.
Saisi du litige, le Conseil d’État doit, avant de se prononcer en l’espèce, déterminer le point de départ à compter duquel court le délai de prescription décennale de l’action en responsabilité contractuelle de droit commun du maitre d’ouvrage dirigée contre son constructeur.
Si en principe, cette responsabilité s’éteint à la réception des travaux, qui met un terme aux relations contractuelles en l’absence de réserve, le maitre d’ouvrage peut toujours, ainsi que le rappelle le rapporteur public, « se prévaloir des droits et obligations financiers nés de l’exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, la réception étant sans effet sur ces droits et obligations qui ne seront définitivement fixés qu’avec l’intervention du décompte général et définitif du marché » (conclusions de M. Nicolas Labrune, p. 1).
Le Conseil d’État a déjà consacré l’application de la prescription décennale aux actions dirigées par le maitre d’ouvrage à l’encontre des constructeurs ou sous-traitants (CE, 12 avril 2022, Société Arest, n° 448946), régie par l’article 1792-4-3 du Code civil faisant courir le délai à compter de la réception des travaux.
Aussi, à l’occasion de la présente décision, la Haute juridiction précise que le point de départ est la date d’effet de la réception, qu’elle soit prononcée sans réserve, avec réserve ou sous réserve en application des articles 41.6, 41.4 et 41.5 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux.
En l’espèce, tandis que la cour avait considéré que la « réception des travaux » mentionnée à l’article 1792-4-3 du Code civil était la date de levée des réserves, et a appliqué le délai de prescription quinquennale en l’absence de levée des réserves en l’espèce, le Conseil d’État procède à une substitution de motif, fait courir le délai de prescription décennale à compter du 28 février 2013 et confirme l’arrêt de la cour en tant que l’action du maitre d’ouvrage n’était pas prescrite.