Par une décision du 18 octobre 2024, le Conseil d’Etat a jugé qu’un agent public n’est pas fondé à demander réparation lorsqu’il fait l’objet d’une mesure de contrôle judiciaire l’empêchant d’exercer ses fonctions et que l’administration a interrompu le versement de son traitement pour absence de service fait.
En 2014, un professeur agrégé d’histoire et de géographie (le requérant) exerçant dans un collège a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de se livrer à toute activité d’enseignement à l’égard de mineurs, ou le mettant en relation avec des mineurs.
L’administration a ensuite informé le requérant que sa rémunération serait suspendue. En février 2018, ce professeur a été condamné à une peine d’un an d’emprisonnement avec sursis et à une peine complémentaire d’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs et ce, pour une durée de trois ans.
En juillet 2018, le ministre de l’Education nationale a prononcé la révocation du professeur. Dans un jugement datant de 2021, le tribunal administratif a rejeté la demande du requérant visant à la condamnation de l’Etat au versement d’une indemnité d’un montant de 220 000 euros en réparation des préjudices du fait de fautes de l’administration commises entre la date de suspension de son traitement et celle de sa radiation. En 2022, un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes a condamné l’Etat à verser à l’ancien professeur la somme de 5 000 euros au titre de son préjudice moral. Le ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse ainsi que le demandeur ont chacun formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.
Pour le Conseil d’Etat, il résulte des articles L 531-1 et suivants du code général de la fonction publique que « l’autorité ayant le pouvoir disciplinaire peut suspendre un fonctionnaire ayant commis une faute grave mais doit, à l’expiration d’un délai de quatre mois, le rétablir dans ses fonctions si aucune décision n’a été prise par elle à son encontre, sauf s’il fait l’objet de poursuites pénales ». Ces mêmes dispositions ne font pas obligation à l’administration de prononcer la suspension qu’elles prévoient à l’encontre d’un agent empêché de poursuivre ses fonctions du fait de mesures prises dans le cadre d’une enquête ou procédures pénales. De plus, l’administration n’a pas à attribuer provisoirement une autre affectation ou à détacher dans un autre corps ou cadre d’emploie l’agent concerné et peut interrompre le versement de son traitement pour absence de service fait. C’est notamment le cas lorsque l’agent fait l’objet d’une incarcération ou d’une mesure de contrôle judiciaire lui interdisant d’exercer ses fonctions.
Dans sa décision n° 470016 du 19 octobre 2024, le Conseil d’Etat retient que l’Etat a pu, sans commettre de faute, constater l’absence de service du demandeur en s’abstenant de lui proposer une autre affectation compatible avec son contrôle judiciaire et en ne prononçant pas sa suspension. Le demandeur n’est pas fondé à demander une réparation des préjudices financiers et moraux qu’il estime avoir subis.