La notification au titulaire d'un décompte général, même irrégulier, fait obstacle à l'établissement d'un décompte général et définitif tacite à l'initiative du titulaire dans les conditions prévues par le CCAG-travaux. Dès lors, il appartient au juge du contrat, en l'absence de décompte général devenu définitif, de statuer sur les réclamations présentées par chacune des deux parties.
CE, 9 novembre 2023, Société Transport tertiaire industrie, n° 469673
Le centre hospitalier intercommunal de Créteil a confié à la société Transport tertiaire industrie un marché de travaux pour la réhabilitation d'un poste de livraison. Après réception des travaux, la société a adressé son projet de décompte final au centre hospitalier. Le maître d'œuvre a alors transmis un décompte général avec un solde négatif. La société a formé une réclamation contre ce décompte, laquelle a été implicitement rejetée. La société a ensuite adressé un projet de décompte général, signé, au centre hospitalier et a saisi le tribunal administratif de Melun afin qu'il condamne l’établissement à lui verser des sommes au titre des travaux non payés et du coût de la prolongation du chantier. Le centre hospitalier a présenté des conclusions reconventionnelles tendant à la condamnation de la société au titre des préjudices liés à la faute commise par cette dernière au cours de l'exécution des travaux.
Le tribunal administratif de Melun a fixé le solde du marché à une somme négative. La société Transport tertiaire industrie se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris qui a rejeté ses conclusions d’appel tendant à l’annulation du jugement rendu par le tribunal administratif.
Après avoir rappelé les modalités d’établissement du décompte général et définitif telles que prévues par le CCAG-travaux applicable au marché, dans sa version de 2009 modifiée en 2014, le Conseil d’État juge qu’il résulte de ces stipulations que la notification au titulaire par le représentant du pouvoir adjudicateur d'un décompte général, même irrégulier, fait obstacle à l'établissement d'un décompte général et définitif tacite à l'initiative du titulaire dans les conditions prévues par l'article 13.4.4. du CCAG.
En l’espèce, le titulaire du marché ne pouvait donc se prévaloir des stipulations de cet article qui prévoit l’établissement d’un décompte général et définitif tacite dès lors que le maître d’œuvre lui avait été préalablement notifié un décompte général, contre lequel il avait d’ailleurs formé une réclamation. En conséquence, faute de décompte général définitif, les stipulations relatives aux règlements des différends telles que prévues par l’article 50.1 étaient applicables.
Le Conseil d’État précise, dans un second temps, qu’en l'absence de décompte général devenu définitif, le juge du contrat doit statuer sur les réclamations pécuniaires présentées par chacune des deux parties pour déterminer le solde de leurs obligations contractuelles respectives. En l’espèce, la cour administrative d’appel n’avait donc pas commis d’erreur de droit pour fixer le solde du marché en prenant en compte les pénalités de retard réclamées dans le décompte général et contestée par la société Transport tertiaire industrie.