Dans un arrêt du 18 janvier 2024, la Cour de justice de l’Union européenne confirme que le droit de l’Union s’oppose à une règlementation nationale qui interdit de verser au travailleur une indemnité financière compensant les jours de congés payés non pris.
Dans l’affaire C-128/22 « Commune di Cupertino », une question préjudicielle est posée dans le cadre d’un litige opposant un ancien employé public, désormais retraité, à son ancien employeur, la commune de Cupertino en Italie.
Le requérant a occupé pendant près de 25 ans le poste d’instructeur exécutif auprès de la commune. Souhaitant prendre une retraite anticipée, le requérant a démissionné et demandé le versement d’une indemnité financière visant à compenser les 79 jours de congé annuel payé non pris durant sa période de travail. La commune a opposé un refus à cette demande sur le fondement de la législation italienne : les travailleurs du secteur public n’ont pas le droit à une indemnité financière compensant les congés payés non pris à la fin de la période de travail.
A la suite du refus opposé par la commune, le requérant a saisi le tribunal de Lecce afin d’obtenir la compensation financière des jours de congé non pris. Le tribunal a ensuite interrogé la Cour de justice de l’Union européenne quant à la compatibilité de la législation italienne au droit de l’Union en la matière et notamment l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.Cet article dispose qu’un travailleur qui n’a pas pu prendre tous ses droits au congé annuel payé avant la fin de sa relation de travail a droit à une indemnité financière pour les jours de congé annuel payé non pris.
Par un arrêt du 18 janvier 2024, la Cour a jugé que le droit de l’Union européenne s’oppose à une réglementation nationale qui interdit de verser au travailleur une indemnité financière au titre des jours de congé annuel payé non pris lorsque ce travailleur met volontairement fin à sa relation de travail.
Dans cet arrêt, la Cour précise que des considérations purement économiques, telles que la maîtrise des dépenses publiques, ne peuvent pas justifier l’adoption d’une telle réglementation. En effet, la protection efficace de la sécurité et de la santé des travailleurs ne saurait être subordonnée à des considérations purement économiques. Le fait que le travailleur mette fin de son propre chef à sa relation de travail n’a également aucune incidence sur son droit de percevoir une indemnité financière.
Pour justifier une telle règlementation, l’employeur public peut invoquer ses besoins organisationnels. En effet, la Cour a déjà admis que cet objectif peut, sous certaines conditions, être compatible avec la directive 2003/88/CE. L’employeur doit cependant démontrer qu’il a incité son employé à utiliser de ses congés.
Ainsi, la Cour retient que dans les cas où le travailleur s’est abstenu de prendre ses jours de congés délibérément et ce, bien que l’employeur l’ait incité à prendre ses congés et l’ait informé d’un risque de perte de son droit à la fin d’une période donnée ou de report, une perte de droit est possible et compatible au droit de l’Union. L’employeur est cependant tenu de veiller concrètement et en toute transparence à ce que le travailleur soit effectivement en mesure de prendre ses congés annuels payés ce qu’il appartiendra à la juridiction nationale de vérifier au cas précis.