Le Conseil constitutionnel censure une partie des dispositions de la loi relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires.
Par une décision n° 2023-851 DC du 21 juin 2023, les sages de la rue Montpensier ont censuré une partie des dispositions de la loi relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.
Le Conseil constitutionnel écarte avant son examen au fond l’argument des députés selon lequel la loi a été adoptée en méconnaissance des dispositions constitutionnelles relatives à la procédure d’adoption législative, plus particulièrement des exigences de clarté et de sincérité des débats parlementaires protégés à la fois par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et par l’article 3 de la Constitution. Il relève à ce titre que les parlementaires ont pu disposer des informations nécessaires afin d’apprécier la portée effective des dispositions débattues.
Par ailleurs, les sages estiment que les articles 7, 12 et 13 de la loi ne méconnaissent pas l’article 1er de la Charte de l’environnement garantissant à chacun le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. Ces articles visaient à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, notamment en qualifiant d’intérêt public majeur certains de ces réacteurs ou encore en prévoyant que leur réalisation, leur construction, aménagement, équipement et installation et travaux liés à leur exploitation ne soient pas soumis au chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme comportant des dispositions relatives à l’aménagement et à la protection du littoral.
Pour le Conseil constitutionnel, le législateur a entendu, en adoptant ces mesures propres à accélérer la réalisation de nouveaux réacteurs électronucléaires, « créer les conditions qui permettraient d’augmenter les capacités de production d’énergie nucléaire afin notamment de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre ». De ce fait, le législateur a mis en œuvre les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation, parmi lesquelles figurent l’indépendance de la Nation et les éléments essentiels de son potentiel économique. Le Conseil ajoute que le législateur a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement.
Ces limitations apportées par le législateur à l’article 1er de la Charte de l’environnement sont donc liées à des exigences constitutionnelles et sont par ailleurs proportionnées à l’objectif poursuivi.
Le Conseil constitutionnel déclare donc les articles 7, 12 et 13 conformes à la Constitution.
A contrario, les sages censurent l’article 17 de la loi en considérant que ces dispositions sont contraires à la séparation des pouvoirs protégée par l’article 16 de la Déclaration de 1789. En effet, cet article prévoyait qu’avant tout dépôt de projet de loi prévu en application du I de l’article L. 100-1 A du code de l’énergie organisant l’adoption de lois tous les 5 ans visant à déterminer les objectifs et fixer les priorités d'action de la politique énergétique nationale pour répondre à l'urgence écologique et climatique, le Gouvernement établit une carte et une liste des sites potentiels d’installation de petits réacteurs modulaires d’une puissance installée supérieure à 150 mégawatts. Il doit présenter à cet égard un bilan des avantages et des inconvénients de chacun des sites concernés en s’appuyant sur une consultation des collectivités territoriales et de leurs groupements volontaires.
Les sages considèrent à l’égard de telles dispositions qu’en subordonnant le dépôt d’un projet de loi à l’établissement de telles carte, liste et bilan par le Gouvernement, le législateur a méconnu le principe de séparation des pouvoirs ainsi que le 1er alinéa de l’article 20 de la Constitution prévoyant que le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation.
Par conséquent, le Conseil censure l’article 17 de la loi contrôlée, celle-ci étant contraire à la Constitution.
Enfin, le Conseil constitutionnel censure, sans préjuger de leur constitutionnalité, les cavaliers législatifs des articles 3, 4, le paragraphe III de l’article 9 ainsi que les articles 19, 24 à 27 et 29.