Au titre de son suivi de l'application des lois, le Sénat a publié un rapport d’information visant à contrôler que les mesures d'application prévues par les lois votées par le Parlement sont prises dans un délai raisonnable. Si l’adoption des mesures réglementaires se fait désormais dans les 6 mois de la promulgation de la loi, comme prescrit, le Sénat regrette que le Gouvernement ne réalise pas également un suivi de la prise des arrêtés.
Pascale Gruny, Vice-présidente du Sénat, présidente de la délégation du Bureau en charge du travail parlementaire, du contrôle et du suivi des ordonnances, a déposé le 24 mai 2023 le bilan annuel de l’application des lois au 31 mars 2023 portant sur les lois adoptées lors de la session 2021-2022 (adoptées entre le 1er octobre 2021 et le 30 septembre 2022).
Lors de la session 2021-2022, 64 lois ont été promulguées, dont 45 via la procédure accélérée (contre 51 lois adoptées lors de la session précédente). 18 lois étaient d’application directe tandis que 46 autres nécessitaient des mesures d’application.
Le taux d’application des lois calculé par le Sénat est de 65 % (68 % en ne tenant pas compte des mesures différées). Parmi les 46 lois nécessitant des mesures d’application, 25 lois attendaient encore la publication de mesures d’application au 31 mars 2023. Pour 7 d’entre elles, aucune mesure d’application n’avait encore été adoptée.
Le délai moyen d’adoption des textes d’application est de 5 mois et 20 jours. Ce délai est, pour la première fois en trois ans, conforme à la limite de 6 mois fixée par le Gouvernement dans la circulaire du Premier ministre du 29 février 2008 (réaffirmé par la circulaire du 27 décembre 2022 relative à l’application des lois) et par la jurisprudence du Conseil d’Etat[1].
Le Sénat relève que si le taux d’application des lois s’améliore par rapport aux précédentes sessions, de fortes disparités demeurent. Il indique notamment que le taux d’application des lois d’origine parlementaire est moins élevé puisqu’il s’établit à 56 % contre 65 % pour le taux global d’application des lois. Le Sénat remarque également dans son rapport que le taux d’application des dispositions provenant d’amendements sénatoriaux est bien plus faible que celui des dispositions provenant d’amendements gouvernementaux.
Le taux d’application des lois diffère entre le calcul opéré par le Sénat et celui réalisé par le Secrétariat Général du Gouvernement (SGG). En effet, le Sénat retient pour son calcul toutes les mesures réglementaires d’application des lois tandis que le SGG comptabilise uniquement les décrets d’application : les arrêtés ne sont ainsi pas retenus par le Gouvernement. Or, le nombre d’arrêtés pris en application de la loi a fortement augmenté et le taux d’application pour ces textes est relativement faible ; le Sénat a calculé que le taux de parution des arrêtés s’établissait à 42 % contre un taux de parution des décrets de 72 %.
Cette absence de suivi d’adoption des arrêtés pourrait être remise en cause. En effet, Claire Landais, la Secrétaire Générale du Gouvernement, a indiqué lors de son audition le mercredi 27 juillet 2022 sur le précédent bilan annuel de l’application des lois, envisager que le SGG soit « au moins le relais d’une demande de suivi un peu plus précis des arrêtés et sur des schémas plus harmonisés, avec éventuellement des clauses de revoyure ».
Dans le cadre de son contrôle de l’application des lois, le Sénat suit également la publication des rapports demandés par le Parlement au Gouvernement (prévue par l’article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit). Le Sénat a calculé que ce taux de remise des rapports s’établissait à 36 % en 2021-2022 contre 21 % lors de la session précédente. Ce chiffre, en amélioration, demeure cependant trop faible selon le rapport sénatorial qui pointe que certaines de ses commissions ne reçoivent que très peu de rapports. Si la commission des finances, la commission des affaires sociales et celle des affaires économiques observent une amélioration des taux de remise, il n’en va pas de même pour la commission de la culture, la commission de l’éducation ou encore celle de la communication.
1 CE, 27 novembre 1964, Ministre des Finances et des Affaires économiques c/ Dame veuve Renard, n° 59068