Brevet : un nouveau droit d’opposition entre en vigueur

Une nouvelle procédure issue de la loi PACTE permet désormais à tout tiers de contester partiellement ou totalement la délivrance d’un brevet par l’INPI sans passer par la voie judiciaire, à l’instar de dispositifs similaires dans d’autres pays et à l’Office européen des brevets. L’objectif est de faciliter la remise en cause de titres non valables au regard des conditions strictes de brevetabilité et dans un contexte de multiplication des demandes de brevet.

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Les contours du nouveau droit d’opposition

Prévu dans la loi PACTE et encadré par l’ordonnance n° 2020-116 du 12 février 2020 entrée en vigueur le 1er avril 2020, et complétée par le décret n° 2020-225 du 6 mars 2020, le droit d’opposition concerne les brevets délivrés à compter de cette date.

Le droit d’opposition permet à tout tiers de demander la révocation totale ou partielle d’un brevet délivré qu’il estimerait non valable au regard des conditions de délivrance d’un brevet, à savoir en particulier :

  • la nouveauté : la solution technique présentée ne doit pas être comprise dans l’état de la technique accessible au moment du dépôt ;
  • l’inventivité : elle ne doit pas découler de manière évidente de l’état de la technique pour une personne du métier ;
  • l’applicabilité industrielle ;
  • le fait de n’être pas exclue de la brevetabilité par la loi (par exemple, les découvertes scientifiques).

L’opposant peut également former opposition si l’invention n’est pas suffisamment décrite dans le brevet.

Cette disposition rappelle que l’objectif du système des brevets est d’inciter les innovateurs à publier leurs inventions afin qu’elles puissent être réalisées librement par toute personne, en contrepartie d’une période de droit exclusif de 20 ans.

Le délai pour former opposition est de 9 mois à compter de la délivrance. Contrairement à l’opposition en droit des marques, c’est donc postérieurement à la délivrance du brevet, et non pendant sa phase d’examen, que le droit d’opposition est prévu.

A l’issue d’une procédure contradictoire devant l’INPI, le brevet peut être révoqué totalement ou partiellement, ou maintenu sous forme modifiée ou identique à la délivrance initiale, cette décision étant susceptible de recours devant la Cour d’appel de Paris.

Le certificat d’utilité, un autre titre de propriété industrielle relatif aux inventions d’une durée de 6 ans, n’est pas concerné par le nouveau droit d’opposition.

Une nouvelle vision stratégique pour les acteurs économiques

Cette procédure a pour but de faciliter la remise en cause de brevets juridiquement fragiles, dans un contexte de renforcement du rôle de l’INPI et de volonté d’accroitre la qualité et la sécurité juridique du système des brevets.

Pour les déposants, la perspective de cette opposition éventuelle incite à une prudence accrue dans la rédaction des demandes et à l’analyse fine de la solidité réelle du brevet.

Pour les titulaires de brevets, cette nouvelle possibilité d’action incite plus que jamais à surveiller étroitement les délivrances de brevets afin d’identifier au plus tôt un brevet pouvant porter atteinte à leurs droits et agir dans le délai.

Pour tous les acteurs économiques, titulaires ou non de brevets, le droit d’opposition ouvre des perspectives nouvelles car il est ouvert à tout tiers sans avoir à démontrer l’intérêt à agir. Ainsi, l’apparition d’un brevet non valable pouvant avoir un impact sur la marge de manœuvre des autres acteurs dans un domaine d’activité pourrait inciter à se montrer proactif en agissant sans attendre, et sans passer par l’action judiciaire.