La DGCCRF a enquêté auprès de prestataires de sites internet et d’agences web d’installation d’imprimantes/photocopieurs ou de location d’autres biens ou services sur leurs pratiques de démarchage en cycle court, auquel ces professionnels recourent très souvent. Dans ce cadre, le commercial a pour objectif de n’effectuer qu’une seule visite qui doit s’achever par la signature d’un contrat, d’où le nom de "one shot" (une visite = un contrat)
Le risque lié à ces pratiques pour les professionnels (commerçants, artisans, infirmiers libéraux...) est que, mal informés par le démarcheur, ils découvrent lorsqu'ils ne sont pas satisfaits de la prestation, qu'ils ne peuvent se désengager du contrat signé avec le fournisseur car celui-ci a été cédé à une société de location financière. Celle-ci exige alors que le contrat soit honoré jusqu'à son terme (48 mois, par exemple) et généralement, le bailleur financier n’hésite pas à assigner le locataire en justice pour tout défaut de paiement du loyer financier. Par ailleurs, à l’issue du contrat, le coût du bien loué peut s’avèrer prohibitif. Enfin, à la différence du crédit bail, cette opération de location qui peut être proposée par des sociétés dédiées ou des filiales d’établissement bancaires spécialisées, ne comporte pas d’option d’achat. Elle ne fait pas non plus l’objet d’un encadrement spécifique.
Des pratiques récurrentes surtout en temps de crise…
La DGCCRF est régulièrement saisie de plaintes qui émanent de professionnels isolés, ayant été démarchés dans leur locaux et incités à signer des contrats de location de biens ou de prestation de service dont ils n’ont pas nécessairement besoin mais qui leur sont présentés comme permettant de faire connaitre et de développer leur activité (création de site internet), voire comme obligatoires (défibrillateur cardiaque pour tout lieu recevant du public, logiciel de caisse antifraude à la TVA).
L’enquête a permis de constater que les démarcheurs peuvent utiliser des méthodes commerciales controversées, voire agressives. Dans certains cas, ils convainquent les prospects de signer le contrat en leur promettant un « cadeau de bienvenue », tel que le remboursement anticipé d’un contrat de location de photocopieur en cours, dans d’autres cas, ils se présentent comme des clients et exposent l’offre commerciale comme une proposition de partenariat publicitaire.
Par ailleurs, le contrat signé en one shot (à l’issue de la visite) se résume parfois à un bon de commande, rempli par le démarcheur (fournisseur), et faisant apparaitre le versement du montant du « cadeau de bienvenue » et, de manière plus discrète, le montant du loyer mensuel à payer.
Le professionnel démarché ne dispose donc pas dans ces cas des garanties prévues par le code de la consommation. Il reçoit une information précontractuelle insuffisante, ne bénéficie pas d’un délai de réflexion et n’est pas informé de son droit de rétractation. Des contreparties financières ont même pu dans certains cas être demandées dès la signature du contrat, ce qui n’est pas légal.
La livraison du matériel ou de la prestation n’est souvent pas formalisée par la signature d’un document attestant de la réception et de la conformité du bien ou du service.
Dès la cession du contrat à l’organisme de location financière, le démarcheur se dégage de toute responsabilité vis-à-vis du locataire, même si ce dernier rencontre des difficultés. Les conditions générales de vente ou de location adossées au bon de commande comportent souvent des clauses prévoyant l’indépendance des contrats de fourniture et de location financière. L’organisme financier réalise un « financement locatif » et se rémunère avec les « loyers financiers » quelles que soient les difficultés que le professionnel peut rencontrer avec le bien loué. Le bailleur financier n’est pas responsable de l’exécution du, ou des contrats de fourniture, entretien ou maintenance. Le professionnel démarché n’a donc plus le fournisseur comme interlocuteur pour résoudre les difficultés liées à l’usage du bien loué.
Si le professionnel cesse de payer son loyer financier avant le terme du contrat, l’organisme financier, sauf s’il trouve un règlement amiable, saisit la justice.
Ces pratiques se sont développées avec la crise sanitaire.
…malgré les suites apportées
A l’issue des contrôles de la DGCCRF, des suites correctives (avertissements et injonctions) et des suites répressives (procès-verbaux) ont été mises en œuvre.
- 3 avertissements ont ainsi été adressés à des fournisseurs ou apporteurs d’affaires (dénomination donnée aux fournisseurs par certains bailleurs financiers) pour non-respect des dispositions relatives au contrat conclus hors établissement commercial (L. 221-8 à L. 221-10 du Code de la consommation) avec des professionnels (L. 221-3) en matière d’information précontractuelle obligatoire (L. 221-5 à L. 221-7) et de droit de rétractation (L. 221-18 à L. 221-28).
- 8 injonctions ont été adressées à des fournisseurs et apporteurs d’affaires pour mise en conformité avec les règles précitées du Code de la consommation applicables aux professionnels ou aux non professionnels (clauses abusives (L. 212-1)) ou clauses interdites (L. 212-1, 4° et 6°),
- 3 procès-verbaux pénaux ont été dressés à l’encontre de bailleurs, pour non-respect des règles relatives à la vente hors établissement commercial auprès des professionnels, pratiques commerciales trompeuses sur la portée des engagements du vendeur et des droits du client, manœuvre frauduleuse pour faire renoncer le professionnel à son droit de rétractation, pratiques commerciales agressives.
- 1 procès-verbal d’amende administrative a été notifié pour manquement aux obligations d’information précontractuelle prévues à l’article L. 221-5 du Code de la consommation et utilisation d’un signe distinctif d’un service public sans autorisation préalable du service public concerné (article L. 731-2 du Code de la propriété intellectuelle).
La DGCCRF poursuit ses investigations dans plusieurs régions et d’autres sanctions seront prises si nécessaire. En complément, des actions de communication de plusieurs ordres sont menées régulièrement pour alerter et mettre en garde les professionnels contre ces pratiques : campagne d’information auprès des syndicats professionnels ayant en charge des actions de formation auprès des créateurs d’entreprise, guide de prévention, vadémécum.
Cible
22 établissements contrôlés
Résultats
3 avertissements
8 injonctions
3 procès-verbaux pénaux
1 procès-verbal d’amende administrative