Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Fruits et légumes frais : améliorer la traçabilité des produits

Afin d’apporter aux consommateurs l’assurance de consommer des produits de qualité et de pouvoir bénéficier d’une information complète et fiable sur l’origine des fruits et légumes, la DGCCRF mène régulièrement des contrôles auprès des opérateurs de cette filière.

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L‘enquête menée en 2018, illustre l’importance de ces contrôles  pour lutter contre les pratiques commerciales trompeuses telles que la francisation[1] des produits et plus généralement garantir le respect des règles de traçabilité des produits et de loyauté des transactions.

La prise de conscience écologique incite des consommateurs de plus en plus nombreux à affirmer une préférence pour les fruits et légumes d’origine française et pour les circuits courts. Pour accompagner ces évolutions, et veiller à préserver la confiance des consommateurs, la DGCCRF veille au respect des normes de commercialisation et à la loyauté des transactions, au bénéfice des consommateurs mais aussi de la filière agricole française.

En effet, la filière fruits et légumes est un secteur économique majeur pour l’économie française. Elle est fortement dépendante des aléas climatiques, tant pour la production que pour la consommation, dans un contexte où la concurrence sur les prix est forte. En Europe, la France est le 4ème pays producteur de fruits et légumes après l’Espagne, l’Italie et la Pologne.

Pour garantir la qualité des fruits et légumes frais, les professionnels de la filière doivent se conformer aux normes de commercialisation fixées au niveau européen[2].

En matière de fruits et légumes, la DGCCRF est l’autorité compétente chargée du contrôle de conformité aux normes, à tous les stades de commercialisation. Elle est également responsable du respect des règles de protection des consommateurs, des règles relatives aux relations commerciales entre professionnels (facturation notamment) ainsi que des règles d’hygiène et de sécurité alimentaire.

Les contrôles effectués ont mis en évidence des manquements trop nombreux aux règles de loyauté des transactions et notamment de traçabilité des produits.

La francisation, une fraude au détriment des producteurs nationaux, et qui porte atteinte à l’image de la filière

Les manquements en matière d’indication du pays d’origine des fruits et légumes sont nombreux et récurrents. Même si certaines anomalies relèvent d’erreurs ou d’une méconnaissance de la réglementation (absence d’indication ou indication abrégée voire erronée), des cas avérés de francisation ont été rencontrés.

  • Ainsi, un contrôle de l’étiquetage de colis de fruits et légumes biologiques stockés dans les chambres froides d’un opérateur en Occitanie a, par exemple, permis de constater qu’un lot de kiwis de deux tonnes, commercialisé par son fournisseur en Ardèche, ne respectait pas les exigences requises pour la catégorie I[1] étiquetée. Les vérifications effectuées auprès du fournisseur ardéchois ont mis en évidence la francisation de 150 tonnes de kiwis bio achetés en Italie et revendus avec la mention « origine France » à l’entreprise occitane. Des procès-verbaux ont été transmis par la DGCCRF au parquet.

Par ailleurs, l’enquête d’ampleur, menée entre fin 2016 et début 2018, par le service national des enquêtes de la DGCCRF et qui a permis la découverte de 15 000 tonnes de kiwis francisés a abouti, en novembre 2019 à la condamnation de deux entreprises par le tribunal correctionnel de Valence. Les peines prononcées ont été plus lourdes que celles requises par le procureur soit 40 000 € d’amende pour l’une et  50 000 € d’amende pour l’autre. Quant aux responsables de ces sociétés, des amendes d’un montant de 15 000 € dont 8 000 € avec sursis et de 20 000 € dont 10 000 € avec sursis ont été prononcées à leur encontre.

  • En Bretagne, un grossiste a été contrôlé en flagrant délit de tromperie. Il étiquetait des tomates cerise et des tomates rondes « origine France » alors qu’elles provenaient de différentes origines. Le tribunal correctionnel de Saint-Brieuc a condamné le 14 novembre l’entreprise à une amende pénale de près de 100 000 € et à la confiscation des 248 000 € qui avaient été saisis.
  • Enfin, une procédure judiciaire a été rédigée à l’encontre d’une SARL basée dans le Nord pour francisation de champignons. Cette société achetait depuis trois ans des champignons frais (plus de 142 tonnes en 2016, plus de 62 tonnes en 2017 et plus de 146 tonnes en 2018) auprès de fournisseurs polonais et belge et les revendait en alléguant une origine française. Sur certains produits une référence directe à l’origine française du produit était même apposée (drapeau tricolore accompagné de la mention « récolté en France »).  Aucune information relative à l’origine polonaise des produits n’a pu être confirmée ni sur les factures de vente des différentes sociétés ni sur les produits. Cette fraude a pu être constatée grâce à la collaboration de diverses administrations (notamment les services locaux de la DGCCRF et de la Douane). Le tribunal de grande instance de Lille a condamné la société holding du groupe (composé de trois établissements), à 13 500 € d’amende et son gérant à 2 700 € d’amende.

Des nombreux manquements aux exigences liées à la traçabilité des produits

Des erreurs récurrentes dans l’application des règles de facturation

La facturation est source de nombreuses anomalies : mentions incomplètes (catégorie, calibre, variété), abréviation erronée de l’indication de l’origine mais aussi ventes sans facture. Les factures sont capitales car, outre qu’elles garantissent la loyauté des relations entre entreprises, elles permettent aux agents de la DGCCRF de contrôler la traçabilité des produits.  Les règles de facturation ont fait l’objet de 756 contrôles.

  • Une opération de contrôle nocturne réalisée sur le marché d’intérêt national des ARNAVAUX (13) a mobilisé plusieurs administrations[4] ainsi que le parquet de Marseille. Elle avait pour objectifs de rechercher les vendeurs se faisant indument passer pour des producteurs, le contrôle du respect des règles de facturation entre professionnels ainsi que le contrôle métrologique des instruments de pesée. Le défaut d’étiquetage des colis étant passible d’une amende de 1 500 € par colis, certains faux producteurs n’ont pas hésité à abandonner leurs marchandises sur place à l'arrivée des enquêteurs. Plus de trois tonnes de denrées végétales d’origine suspecte ont ainsi été retrouvées. Ces marchandises, dont la qualité avait préalablement été vérifiée par les services de l’Etat, ont été remises gracieusement à des associations caritatives. Sept procès-verbaux pénaux ont été établis.
  • Sur un marché de gros en région Provence-Alpes-Côte d’Azur générant trois fois par semaine un volume de transactions d'environ 1 000 tonnes, une vaste opération pilotée par plusieurs administrations[5] a permis le contrôle de 200 opérateurs (vendeurs ou acheteurs). 24 procès-verbaux notamment pour non-respect des règles de traçabilité et de facturation dans le commerce des fruits et légumes ont été établis. Parallèlement, les services de la Mutualité sociale agricole (MSA) vont poursuivre leurs investigations en matière de travail dissimulé.

L’absence des mentions obligatoires sur les sites internet des drives (points de retrait)

Entré dans les habitudes des consommateurs français, ce mode de distribution, devenu le circuit de distribution le plus dynamique, a récemment développé une offre de produits frais et notamment de fruits et légumes.

Les contrôles réalisés dans près de 150 drives ont mis en évidence une mauvaise connaissance des normes de commercialisation et des règles applicables à la vente à distance par les professionnels (absence d’information concernant la catégorie, l’origine, ou indication de plusieurs origines comme « France ou Espagne ou Italie » ou encore des mentions imprécises, telles que « selon arrivage » ou « importé »). Par ailleurs, un site annonçant faussement des prix identiques en drive et en magasin a été verbalisé.

Le non-respect des obligations relatives à la vente au déballage

L’attrait des Français pour la production locale, pour des raisons environnementales notamment, n’est plus marginal. Dès lors, les producteurs locaux investissent dans une activité de vente en bord de route. Néanmoins, depuis quelques années, des vendeurs ambulants mettent en avant une fausse activité de producteurs, de surcroît sans respecter les règles afférentes à la vente au déballage[6]. L’absence de déclaration préalable obligatoire des activités de vente au déballage a été de nouveau constatée ainsi que d’autres infractions à la réglementation en vigueur : pratiques commerciales trompeuses sur l’origine et le circuit de distribution, absence d’indication du pays d’origine des produits, défauts de facturation.

  • En Corrèze, un procès-verbal de délit a été transmis au parquet à l’encontre d’une entreprise spécialisée dans la vente au déballage pour absence de déclaration préalable. Parallèlement, 16 infractions aux règles de commercialisation des fruits et légumes, une non-conformité aux règles d’hygiène et 11 infractions aux règles d’emploi de la langue française sur des denrées préemballées ont été relevées. Ce dossier a abouti à une transaction de 6000 euros.

D’autres manquements à la loyauté des transactions ont été relevés

Une utilisation abusive de mentions valorisantes

L’utilisation de mentions valorisantes notamment sur le caractère biologique, non traité ou encore sur les signes de qualité (AOC ou IGP) a été relevée au cours de l’enquête. Le surclassement frauduleux des fruits et légumes dans une catégorie supérieure est aussi fréquemment constaté.

Le paiement  par une entreprise d’une transaction pénale d’un montant de 30 000 € pour pratique commerciale trompeuse (commercialisation de pommes de terre « Juliette de Bourgogne » pour des produits non issus de la région Bourgogne), a été validée par le Parquet de Bourg-en-Bresse.

Des plaintes enregistrées pour démarchage à domicile abusif

Dans plusieurs départements, des plaintes pour démarchage à domicile pour la vente de fruits et légumes frais ont été enregistrées. Elles concernent souvent des fruits ou légumes de longue conservation (pommes, oignons, pommes de terre, etc.). Les règles qui encadrent la vente hors établissement commercial sont rarement respectées et les abus fréquents. Le consommateur est ainsi incité à acheter, sous la pression d’un vendeur, une quantité importante de produits.

La fraîcheur attendue des produits n’est pas toujours présente

Les fruits et légumes mis en vente ne répondent pas toujours à l’obligation de qualité. Des cas de maturité excessive, pourriture ou moisissure ont été établis et de nombreux colis de fruits et légumes souvent entreposés à même le sol au mépris des règles d’hygiène, ont été relevés. Dans certains cas, l’argumentaire « anti-gaspillage », apprécié du consommateur, est détourné pour vendre des produits alors qu’ils ne sont plus commercialisables.

  • Lors de la campagne d’importation des oignons rouges de « Madagascar » à la Réunion, 18 lots avaient été importés pour un volume de 370 tonnes. Les contrôles à l’importation réalisés sur 5 lots représentant 90 tonnes ont tous révélé des non-conformités en raison notamment d’un transport à une température inadéquate[7].

Au stade du commerce de gros, si les professionnels ont une bonne connaissance des produits et de leur réglementation, des faiblesses dans le formalisme et/ou la délivrance de factures sont relevées. En revanche, au stade des commerces de détail (sédentaires ou non), les règles de commercialisation sont souvent méconnues, le manque de formation et d’implication d’un personnel peu spécialisé entraînent des négligences, tant au niveau de la qualité des produits que de l’information donnée au consommateur. La surveillance sera maintenue sur l’ensemble de la filière.

[1] Présentation de produits étrangers comme français.

[2] Ces normes déterminent la qualité, l’origine, la catégorie, le marquage et la classification des produits.

[3] Cette catégorie fait référence au classement en matière de qualité (règlement UE n° 543/2011).

[4] Les services de la DGCCRF de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la Mutuelle sociale agricole (MSA) et la direction départementale de la sécurité publique.

[5] Les services de la DGCCRF de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, de la région Auvergne-Rhône-Alpes, du département du Vaucluse, la gendarmerie nationale et la Mutualité sociale agricole (MSA).

[7] Les produits étaient transportés en conteneur non réfrigéré avec une durée de transport de 5 à 10 jours dans une température ambiante pouvant monter jusqu’à 50° et générant ainsi une moisissure voire une pourriture des lots.