La menace de rupture ou la rupture brutale des relations commerciales établies pour tenter d'obtenir des conditions abusives concernant les prix ou les modalités de vente sont des pratiques interdites par la loi.
Susceptibles de perturber le tissu économique, la menace d’une rupture et la rupture brutale de relations commerciales établies sont prohibées par la loi.
La menace de rupture des relations commerciales vise à l’obtention d’avantages au bénéfice d’un cocontractant, tandis que la rupture brutale (même partielle) de relations commerciales établies suppose une absence de préavis ou un préavis insuffisant au regard des caractéristiques de la relation existante.
Les textes
L’article L. 442 -6-I-4° du Code de commerce prévoit qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
- « d'obtenir ou tenter d'obtenir sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d’achat et de vente ».
L'article L. 442 -6-I-5° du Code de commerce prévoit qu’engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :
- « de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ; Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance, la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas ».
Remarques importantes
L’article L. 442.6 I 4° du Code de commerce vise les pratiques des acheteurs qui exercent des pressions auprès de leurs fournisseurs en utilisant la menace de déréférencement pour obtenir des avantages qu’ils n’obtiendraient pas par la seule négociation.
L’article L. 442.6 I 5° du Code de commerce vise uniquement la rupture fautive : seul le caractère brutal de la rupture est illicite. La jurisprudence considère classiquement que la brutalité de la rupture résulte de l’absence de préavis écrit ou de l’insuffisance de la durée de ce préavis au regard des relations commerciales antérieures.
Ces dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure.
Le champ d’application de ce texte est celui des relations commerciales établies, c'est-à-dire les cas où la relation commerciale entre les parties revêtait avant la rupture un caractère suivi, stable et habituel et où la partie victime de l’interruption pouvait raisonnablement anticiper pour l’avenir une certaine continuité du flux d’affaire avec son partenaire commercial.
Les "relations commerciales" doivent en outre s'entendre au sens large, c'est-à-dire qu'elles s'appliquent à toutes relations commerciales, aussi bien à l'achat de produits que de services. Elles s’étendent au-delà des simples relations contractuelles et couvrent toutes formes de relations d’affaires, qu’elles fassent ou non l’objet d’un écrit.
Le terme "rupture" doit également s'apprécier en fonction du type de relations commerciales établies. Ainsi, il ne peut y avoir rupture fautive si un contrat ponctuel à durée déterminée arrivait à son terme. La rupture dans ce cas résulterait du jeu normal de la négociation contractuelle et commerciale. Lors du débat parlementaire, la faculté pour les parties de stipuler une clause de résiliation de plein droit a été expressément exclue.
Ces dispositions couvrent la rupture brutale des relations commerciales, même partielle. La rupture brutale partielle des relations commerciales a été constatée par les juges notamment lorsqu’une baisse significative du chiffre d’affaires est intervenue sans préavis et en l’absence d’un commun accord. La modification des conditions commerciales antérieures caractérise également une rupture partielle lorsque les changements ont un caractère substantiel, de nature à bouleverser l’économie du contrat.
En tout état de cause, que la rupture soit partielle ou totale, il convient de vérifier la forme du préavis, sa durée et ses conditions pour s’assurer de l’absence d’illicéité de la rupture.
Le préavis de rupture doit, ainsi, informer le partenaire commercial de son intention claire et non équivoque de ne plus poursuivre les relations commerciales. Il doit tenir compte de la durée de la relation commerciale et respecter la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Il convient également de se référer à la jurisprudence sur ce point. Les critères d’appréciation de la durée du préavis raisonnable le plus souvent invoqués par la jurisprudence sont : l’ancienneté de la relation commerciale, l’importance du courant d’affaires ainsi que la spécificité des investissements réalisés par la victime au profit de l’auteur de la rupture. La jurisprudence se réfère également, par exemple, à la dépendance économique du partenaire commercial ou à l’existence d’un accord d’exclusivité afin d’apprécier le caractère suffisant du préavis.
Sanction
Le Code de commerce prévoit également que le Ministère public, le ministre chargé de l’économie ou le président de l'Autorité de la concurrence peuvent, aux termes des articles L.442-6 III et IV :
- introduire une action en cessation de la pratique devant la juridiction civile compétente ;
- faire constater la nullité des clauses ou contrats illicites et demander la répétition de l'indu ;
- demander le prononcé d'une amende civile dont le montant ne peut être supérieur à 5 millions d'euros ;
toutefois, cette amende peut être portée au triple du montant des sommes indûment versées ou, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques mentionnées au présent article ont été mises en œuvre ;
- demander la réparation des préjudices subis.
La juridiction peut ordonner la publication, la diffusion ou l'affichage de sa décision ou d'un extrait de celle-ci selon les modalités qu'elle précise. Elle peut également ordonner l'insertion de la décision ou de l'extrait de celle-ci dans le rapport établi sur les opérations de l'exercice par les gérants, le conseil d'administration ou le directoire de l'entreprise. Les frais sont supportés par la personne condamnée. La juridiction peut ordonner l'exécution de sa décision sous astreinte.
Les éléments ci-dessus sont donnés à titre d'information. Ils ne sont pas forcément exhaustifs et ne sauraient se substituer à la réglementation applicable.
Pour tout renseignement complémentaire, reportez-vous aux textes applicables ou rapprochez-vous d'une direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE).
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Fiche pratique - Rupture des relations commerciales : menace de rupture et rupture brutale - application/pdf - 316 Ko - 30/01/2017
Textes applicables
- Code du commerce - Articles L.442 -6-I-4° et 5°
Liens pratiques
- Commission d'examen des pratiques commerciales
- Jurisprudence de la chambre commerciale de la Cour de cassation et des cours d’appels