Le projet de loi relatif à l’industrie verte a pour ambition de réindustrialiser la France tout en faisant de l’industrie française un levier de réduction de son empreinte carbone. Il a été présenté en Conseil des ministres le 16 mai 2023.
L’objectif économique de réindustrialisation se double d’une exigence climatique consistant notamment à produire en France de façon plus propre grâce à son mix énergétique décarboné. Le projet de loi relatif à l’industrie verte s’articule autour de trois axes qui concourent au renforcement de l’attractivité industrielle de nos territoires et de la souveraineté industrielle de la France.
Faciliter l’implantation et le développement de sites industriels
Le poids de l’industrie dans notre économie a été divisé par deux depuis les années 1970. Il s’élève aujourd’hui à environ 12 % du PIB, soit 10 points de moins que la moyenne de l’Union européenne[1]. Si en 2021 et 2022, la France a ouvert plus d’usines qu’elle n’en a fermées, les délais afférents à l’implantation d’une usine demeurent trop longs dans notre pays par rapport à ceux prévalant dans les pays partenaires ou concurrents.
Le projet de loi relatif à l’industrie verte a pour ambition d’améliorer les procédures d’installation, tout en préservant l’environnement et en favorisant l’association du public. Pour ce faire, il prévoit une accélération des procédures administratives de délivrance des permis et autorisations ainsi qu’une modernisation de l’enquête publique. Ainsi, les phases d’instruction par les différents services compétents s ‘accompliraient en parallèle de la consultation du public et les concertations préalables du public seraient mutualisées à l’échelle d’une zone géographique et non plus à celle du projet. L’objectif est de diviser par les deux les délais réels d’implantations industrielles (passant de 17 à 9 mois) en renforçant notamment les moyens des services responsables de l’étude des dossiers y afférents.
La politique industrielle s’inscrit également dans un territoire et dans une planification. Le projet de loi relatif à l’industrie verte prévoit de renforcer le volet industriel des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET), afin d’optimiser son intégration dans les écosystèmes locaux. A ce titre, le projet de loi poursuit un objectif de réhabilitation des friches pour un usage industriel, par une amélioration de la gestion des cessations d’activité et par une facilitation de la libération des fonciers industriels. Le projet de loi tend à faciliter la montée en charge des sites « clés en main[2] » et les procédures de mise en compatibilité avec les documents d’urbanisme pour les projets industriels présentant un intérêt national en matière de souveraineté ou de décarbonation.
Enfin, le projet de loi cherche à faciliter l’usage des déchets recyclés comme matière première et la réutilisation des résidus de production au sein des plateformes industrielles. En contrepartie, les exportations irrégulières de déchets seraient plus sévèrement sanctionnées.
Financer l’industrie verte
La France s’est fixé pour objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050 et de diminuer de 55% ses émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. L’industrie a son rôle à jouer dans l’atteinte de cet objectif dans la mesure où elle concourt à la production de 18 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre françaises. Par ailleurs, les technologies de la décarbonation (éolien, solaire, hydrogène vert etc.) ont un coût initial de production structurellement élevé qui nécessite un soutien spécifique pour leur développement.
Le soutien à l’industrie verte passe par des mesures de financement privé. Le projet de loi prévoit que l’épargne privée puisse être mobilisée grâce à la création d’un plan d’épargne avenir climat, lequel permettrait des investissements plus risqués et à long terme. Ce produit d’épargne serait réservé aux mineurs dont l’épargne serait investie par l’intermédiaire d’un établissement public chargé de la gestion des encours. Le périmètre d’investissement serait quant à lui soumis à des critères précis fixés par voie réglementaire.
De plus, il est prévu que cette épargne privée soit mieux fléchée notamment vers les fonds labellisés par l’Etat ou des instruments d’investissements de long-terme dans des PME/ETI. L’assurance-vie et le plan épargne retraite (PER) seraient davantage mobilisés pour le financement d’actifs réels ; la protection des épargnants serait également renforcée. Dans la continuité de ce qui a déjà été fait pour le PER, il est prévu un fléchage accru des investissements, incluant l’affectation d’une part minimale des encours vers le « non coté » ou les actifs finançant les PME/ETI cotées.
Favoriser la prise en compte des enjeux environnementaux dans la commande publique
Le projet de loi vise notamment à favoriser la prise en compte des enjeux environnementaux dans tous les aspects de la commande publique. Deux nouveaux motifs d’exclusion des procédures de passation des marchés et des contrats de concession sont prévus pour les opérateurs économiques qui ne satisferaient pas leurs obligations de publication d’informations en matière de durabilité issues de la directive n°2022/2464 du 14 décembre 2022 (directive « CSRD ») ou de bilan des émissions de gaz à effet de serre[3]. Un acheteur ou une autorité concédante aurait alors la faculté d’exclure de la procédure de passation d’un marché ou d’un contrat de concession les opérateurs économiques candidats à leur attribution ne respectant pas les obligations de publicité susmentionnées.
En outre, il serait précisé, dans le code de la commande publique, que l’offre économiquement la plus avantageuse est déterminée sur la base de critères qui peuvent comprendre des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux.
Enfin, les schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables[4] seraient étendus à l’Etat. Autrement dit, l’article L. 2111-3 du code de la commande publique serait modifié afin de préciser qu’il est applicable à toutes les catégories d’acheteurs et son champ d’application serait étendu aux acheteurs de l’Etat.
[1] Données des comptes nationaux de la Banque mondiale et fichiers de données des comptes nationaux de l'OCDE pour l’année 2021, ID: NV.IND.TOTL.ZS.
[2] Un site industriel clés en main est un site immédiatement disponible, pouvant recevoir des activités industrielles ou logistiques. Les procédures relatives à l’urbanisme, à l’archéologie préventive et à l’environnement sont par ailleurs anticipées afin de permettre l’instruction des autorisations nécessaires à l’implantation d’une nouvelle activité industrielle dans des délais maîtrisés.
[3] Prévu à l’article L. 229-25 du code de l’environnement.
[4] Voir DAJ, Fiche technique « Le schéma de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables », 2019.