Selon la Cour de cassation, le code de déverrouillage d'un téléphone mobile peut constituer une convention secrète de déchiffrement dont le refus de transmission aux autorités judiciaires constitue un délit au sens de l’article 434-15-2 du code pénal.

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Dans le cadre d’une enquête pour trafic de stupéfiants, une personne gardée à vue a refusé de communiquer aux enquêteurs les mots de passe des deux smartphones découverts en sa possession lors de son interpellation.
Poursuivie pour détention et offre ou cession de cannabis et refus de remettre la convention secrète de déchiffrement d'un moyen de cryptologie, elle a, cependant, été relaxée du délit de refus de remettre ou de mettre en œuvre la convention secrète d'un moyen de cryptologie prévu à l’article 434-15-2 du code pénal(1).
Le procureur général près la cour d'appel de Douai reprochait à l'arrêt rendu le 20 avril 2021 par la cour d'appel de Douai d’avoir relaxé le prévenu en jugeant, de manière générale, que le code de déverrouillage d'un smartphone n'est pas une convention secrète de chiffrement sans même effectuer une analyse des caractéristiques techniques du téléphone concerné, en l’espèce un IPhone 4, analyse pourtant indispensable pour fonder la décision de la juridiction.
Dans sa décision du 7 novembre 2022(2), la Cour de cassation rappelle, d’une part, qu’au regard des dispositions du code de procédure pénale, un moyen de cryptologie s'entend de tout matériel ou logiciel conçu ou modifié pour transformer des données à l'aide de conventions secrètes ou pour réaliser l'opération inverse avec ou sans convention secrète – les moyens de cryptologie ayant principalement pour objet d'assurer la confidentialité, l’authentification ou le contrôle de l’intégrité des données.
D’autre part, elle indique qu’une convention de déchiffrement s'entend de tout moyen logiciel ou de toute autre information permettant la mise au clair d'une donnée transformée par un moyen de cryptologie, que ce soit à l'occasion de son stockage ou de sa transmission.
Partant, le code de déverrouillage d'un téléphone mobile peut constituer une clé de déchiffrement si ce téléphone est équipé d'un moyen de cryptologie.
Il appartient donc au juge de rechercher si le téléphone en cause dans une affaire est équipé d'un tel moyen et si son code de déverrouillage permet de mettre au clair tout ou partie des données cryptées qu'il contient ou auxquelles il donne accès.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel de Douai et renvoie les parties devant la cour d'appel de Paris.