Le rapport d’information du Sénat se penche sur une proposition de directive qui vise à définir le statut professionnel des travailleurs de plateformes, entre indépendants choisis et salariés déguisés, et à encadrer juridiquement le modèle économique innovant des plateformes tout en garantissant les droits des travailleurs.
Télécharger l'article en pdf ( 96,8 Ko)
La proposition de directive sur les conditions de travail des travailleurs de plateformes, publiée le 9 décembre 2021 par la Commission européenne(1), a généré de nombreux débats. Le rapport d’information du Sénat se penche sur cette proposition qui vise à définir le statut professionnel de ces travailleurs et à encadrer juridiquement le modèle économique des plateformes (telles qu’Uber, Deliveroo, Just eat, Brigad…) en garantissant les droits des travailleurs et le développement de ce modèle économique.
Si la Commission européenne et les rapporteurs du Sénat s’accordent sur le fait qu’il est nécessaire de légiférer pour clarifier la situation des travailleurs de plateforme, des divergences quant aux moyens à mettre en œuvre perdurent.
Au sein de l’Union européenne, ils seraient 28 millions de travailleurs de plateformes et devraient être 43 millions en 2025, la majorité d’entre eux étant considérés comme non-salariés. Cette appellation cache une réalité différente, certains de ces travailleurs indépendants étant en fait « économiquement dépendants », questionnant ainsi l’adéquation de leur statut d’emploi avec la réalité de leur situation. A ce titre, la Commission estime que sur les 28 millions de travailleurs de plateforme au sein de l’Union, 5,5 millions pourraient relever d’un statut différent. Dès lors, ces personnes ne bénéficient pas du droit du travail et de la protection sociale dont ils pourraient bénéficier si un statut adéquat leur était reconnu. C’est sous cet angle du statut que se place la directive, prévoyant une présomption de salariat en cas de réunion d’une majorité de critères sur les cinq fixés.
Les rapporteurs partagent la nécessité de fixer un cadre juridique mais en trouvant un équilibre entre la liberté d’organisation du travail (question du statut d’indépendant) et les droits accordés aux travailleurs des plateformes par rapport aux salariés. Il est nécessaire de s’assurer que les travailleurs, indépendants par leur statut, le soient réellement dans les faits et de rechercher un juste équilibre pour permettre aux vrais travailleurs indépendants de le rester et aux travailleurs erronément qualifiés d’indépendants de devenir salariés.
Enfin, les rapporteurs proposent d’améliorer la transparence et la lisibilité des algorithmes mis en œuvre par les plateformes.
La résolution européenne relative à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil a été adoptée par la commission des affaires sociales le 14 novembre 2022 et est devenue résolution du Sénat(2).