Note n°1 - Prise en compte des conditions géotechniques dans les projets

Sommaire

  1. Préambule
  2. Importance du paramètre "sol" vis-à-vis de la pérennité des ouvrages
  3. Comportement du sol environnant pendant et après la réalisation d'un ouvrage
  4. Prise en compte des conditions géotechniques dans l'établissement des projets
  5. Étude des sols
  6. Problèmes d'exécution liés au sol

1. Préambule

Le sol et le sous-sol renferment des fondations d'ouvrages, parfois très différentes, ainsi que d'éventuelles canalisations. Le massif de sol peut avoir un comportement et des mouvements, liés aux conditions naturelles, à l'influence des ouvrages existants, ou aux travaux de mise en œuvre des ouvrages. Ce comportement est à prendre en compte dans les projets, afin d'assurer la pérennité et le bon fonctionnement des structures soient assurés.

On trouve dans cette note des indications sur les mécanismes géotechniques, ainsi que des recommandations permettant d'apporter des solutions aux différents problèmes posés par le sol de fondation et l'environnement, lors de l'établissement des projets, les études de sols, ainsi que les problèmes d'exécution liés au sol.

2. Importance du paramètre "sol" vis-à-vis de la pérennité des ouvrages

Dans tout projet de construction, le paramètre "sol" doit être pris en considération, soit pour constater que ce paramètre ne pose pas ou peu de problèmes particuliers, soit pour poser correctement les problèmes géotechniques et envisager les mesures propres à les résoudre.

Il y a lieu de prendre en compte :

2.1. Les conditions géologiques initiales :

  • contexte géologique et géomorphologique du site,
  • pendage des couches,
  • pente du terrain naturel,
  • accidents éventuels.

2.2. Les conditions géotechniques initiales :

  • géométrie des couches,
  • nature des sols rencontrés,
  • hydrogéologie.

2.3. Les conditions géotechniques résultant de l'exécution des travaux

Ces conditions interviennent dans les mécanismes géotechniques susceptibles de conduire à des désordres sur l'ouvrage et décrits sommairement ci-après.

3. Comportement du sol environnant pendant et après la réalisation d'un ouvrage

3.1. Glissements de terrain

Dans leurs déplacements, ils entraînent avec eux l'ouvrage. Différents cas sont possibles :

a) Ouvrage sur une pente initialement instable

C'est le cas notamment d'ouvrages construits sur une pente naturelle ou un remblai instable.

Une remontée de la nappe est souvent à l'origine de la mise en mouvement du sol, mais aussi, des charges supplémentaires résultant de la construction d'un ouvrage, de terrassements (remblais et/ou déblais), voir même des modifications du réseau hydrodynamique.

b) Ouvrage sur une pente rendue instable par le creusement de l'assise de fondation

Dans tous les cas, la pente doit être suffisamment stable pour éviter les désordres dans l'ouvrage, les équipements divers et les canalisations éventuelles.

3.2. Affaissements et effondrements

Ils sont dus à l'existence d'un vide souterrain entraînant des mouvements dans le sol sus-jacent, et par suite, des efforts de flexion ou de cisaillement dans les semelles et radiers qu'ils renferment. Ce phénomène entraîne des tassements et tassements différentiels, qui peuvent conduire à la ruine de l'ouvrage ou à de graves désordres.

Les affaissements peuvent être progressifs. Ils sont alors dans l'ensemble maîtrisables (cas des exploitations minières profondes), en adoptant des dispositions techniques appropriées dès la conception des projets.

Ils peuvent aussi être brutaux et localisés (phénomènes de fontis) et avoir une origine artificielle (tunnels, carrières souterraines, mines) ou naturelle (cavités de dissolution), ou d'origine karstique.

D'origine naturelle, ils ne sont pas totalement imprévisibles, si l'on sait que certaines roches y sont sujettes, en particulier :

a) les roches peu solubles telles que les calcaires et les dolomies : les cavités peuvent préexister (karsts) mais évoluent très peu durant la vie de l'ouvrage.

b)  les roches très solubles telles que le sel et le gypse : les dissolutions peuvent être très rapides s'il y a circulation d'eau et les vides se former pendant l'exploitation de l'ouvrage.

3.3 Entraînements hydrodynamiques de matériaux fins

L'écoulement de l'eau, dans un matériau fin, où les éléments les plus fins d'un matériau constituent une assise de fondation, crée des forces hydrodynamiques tendant à entraîner les éléments de sol dans le sens de l'écoulement.

Le risque d'entraînement est fonction du gradient hydraulique et des caractéristiques du sol (perméabilité, résistance au cisaillement, granularité).

Dans le cas d'une fondation (telle que semelle, radier, etc.) ou d'un ouvrage (réservoir, cuvelage, etc.) mis en place sous la nappe, la plate-forme de terrassement et son environnement perméable (couche de forme, assise, remblai au contact des parois, collecteurs) peuvent constituer des drains favorisant les écoulements d'eau et donc les entraînements de fines, notamment en cas de mouvement de la nappe phréatique, mais aussi de pompages pendant l'exécution, ou de pompages voisins non liés à l'ouvrage.

Les manifestations de ce phénomène sont les suivantes :

- les fines du sol sont entraînées, soit dans l'ouvrage (cas notamment des joints secs ou de dilatation dans les canaux etc.), soit dans l'assise de fondation, ou les cuvelages, soit dans des cavités formées elles-mêmes par l'entraînement du sol, soit dans des exutoires naturels (fissures d'un substratum rocheux, par exemple).

- les vides ainsi créés au voisinage de la fondation provoquent des désordres dans celle-ci (ruptures, fissures, etc.) qui se communiquent éventuellement à l'ensemble de l'ouvrage, favorisant la pénétration du matériau à l'intérieur et contribuant ainsi à l'amplification du phénomène.

3.4. Tassements du sol environnant

Globalement pour l'ouvrage ce phénomène peut se traduire par des tassements et un basculement d'ensemble, pouvant entraîner des contres pentes, flasches, etc. au niveau des dalles et radiers. En effet si les tassements évalués sont importants (zones marécageuses, tourbières, argiles molles, remblais non compactés ou compressibles), il y aussi risque de tassements différentiels non négligeables pouvant entraîner dans la structure de l'ouvrage, des efforts de flexion et de cisaillement.

Ces tassements différentiels peuvent se produire lorsque l'ouvrage est fondé :

a) dans un remblai récent sur zone compressible en cours de consolidation,

b) dans une zone très compressible non remblayée,

c) dans un remblai mal compacté reposant sur un substratum résistant,

d) dans un site où l'on passe d'une zone compressible à une zone non compressible (phénomène de "point dur"),

e) dans un site où l'assise de fondation n'est pas homogène,

f) dans un site homogène mais insuffisamment consolidé par rapport à certaines charges ou contraintes apportées à la structure dans certaines zones de la fondation, ou lorsque ces dernières varient de façon notable, entraînant ainsi un accroissement du niveau de consolidation.

Il faut également signaler les tassements dus aux très fréquents remaniements de la plate-forme surtout dans les sols argileux (causes mécaniques, climatiques, hydrauliques, etc.) du fait de l'action mécanique du terrassement, mais aussi de l'exécution de tranchées sous-jacentes.

Tous ces tassements, plus ou moins rapides suivant la perméabilité du sol ne sont généralement pas pris en compte (ou d'une manière trop approximative) lors du dimensionnement de la fondation, bien que ce point soit clairement mentionné dans les chapitres III "actions et sollicitations des règlements BAEL et BPEL".

3.5. Gonflement et retrait des argiles raides

Certaines argiles et marnes raides ont tendance à gonfler en absorbant de l'eau, lorsqu'elles sont déchargées et mises en présence d'eau. Ce gonflement peut conduire à deux types de problèmes pour les fondations et les structures.

a)  L'argile déchargée qui ne peut gonfler librement du fait de la présence des fondations ou d'une partie de l'ouvrage exerce sur elle des efforts (pression de gonflement) qui peuvent être suffisamment importants pour occasionner des désordres. C'est notamment le cas si une fondation ou un radier est mis en œuvre peu de temps après le terrassement,

b) l'argile qui gonfle en présence d'eau voit sa résistance diminuer et devient compressible. Les conséquences sont généralement le remaniement du fond de fouille examiné au paragraphe précédent,

Une argile raide qui perd son eau par dessiccation subit une diminution de volume avec fissuration : c'est le phénomène de retrait. Si cette argile est remise en présence d'eau, elle a tendance à gonfler.

Lorsqu'une fondation est au contact d'une argile soumise à des cycles gonflement-retrait par suite des fluctuations du niveau de la nappe phréatique, elle peut subir des désordres et mouvements importants.

4. Prise en compte des conditions géotechniques dans l'établissement des projets

On se place dans l'hypothèse où les conditions géotechniques posent des problèmes géotechniques et où l'étude des sols est le plus souvent nécessaire. Il s'agit de se prémunir contre les risques inhérents aux mécanismes géotechniques énumérés au paragraphe 3 de cette note, la solution se situant le plus souvent dans un compromis entre deux attitudes :

- supprimer ou diminuer la cause du problème,
- accepter certains risques ou adapter le projet.

On propose ci-après un éventail de solutions propres à résoudre les problèmes énumérés au paragraphe 3.

4.1. Ouvrages sur une pente instable

Dans le cas où la pente est initialement instable, on peut choisir une ou plusieurs des solutions suivantes :

- changer l'implantation,
- adapter la conception de l'ouvrage aux risques,
- améliorer la stabilité par les méthodes habituelles telles que modifications de la géométrie, systèmes de drainage, soutènements.

4.2. Ouvrages en zone d'affaissement ou d'effondrement

Sauf dans le cas où un traitement par injection est envisagé sur l'ensemble du site, on est contraint :

- soit d'accepter le risque d'une dégradation ponctuelle qu'il faudra réparer. Un suivi dans le temps s'avère alors nécessaire ;

- soit de rechercher un type d'ouvrage et un mode de fondations capables de supporter les conséquences d'un affaissement ou d'un effondrement. Il est toujours possible de construire des ouvrages fondés sur des radiers généraux ou semelles filantes reposant éventuellement sur des pieux, micropieux ou puits, utilisant, suivant les cas, le béton armé, le béton, le gros béton, la grave-ciment, la grave-laitier avec éventuellement si nécessaire l'utilisation de géotextiles ou géogrilles.

Ces semelles ou radiers doivent être dimensionnés avec une condition de "fontis" : permettant le franchissement de vide pouvant atteindre parfois plusieurs mètres.

Dans le cas où les cavités sont dues à des phénomènes de dissolution (sel-gypse), il y a lieu d'éviter l'aggravation du phénomène par circulations d'eau autour de l'ouvrage ou des parties enterrées (rôle du drain joué par le remblai et les canalisations de raccordement).

4.3. Entraînements hydrodynamiques de matériaux fins autour de l'ouvrage

Un certain nombre de précautions peuvent être prises pour éviter ou limiter ce phénomène dont les conséquences peuvent être graves pour l'ouvrage.

a) Ces entraînements peuvent se produire lors des travaux, lorsque le pompage en fond de fouille conduit à un gradient hydraulique élevé, et que le sol est constitué de matériau fin.

b) Ces entraînements peuvent aussi se produire après les travaux, l'assise de fondation jouant un rôle de drain, surtout dans le cas où le sol de la couche de forme est un sable fin ou un matériau comportant un pourcentage de fines élevé, alors que cette zone est temporairement ou en permanence sous l'eau.

Les solutions possibles à un tel problème sont à choisir parmi les suivantes :

- éviter qu'il y ait drainage par la couche de forme en introduisant des coupures et parafouilles en matériau imperméable dans la plate-forme perméable,

- si on ne peut éviter ce drainage ou s'il n'est pas souhaitable de le supprimer (cas où ce drainage améliore la stabilité du site, par exemple), il est préférable d'utiliser un matériau assez grossier (graviers) pour la couche de forme et de la protéger vis à vis de sa contamination par les éléments fins par un filtre géotextile,

- utilisation de gros béton pour l'assise de fondation qui permet d'assurer un drainage éventuel, tout en améliorant la répartition des contraintes sur le sol.

4.4. Ouvrages soumis aux tassements du sol

a) Ouvrages en zone compressible

Si les fondations doivent être mises en place dans une zone compressible de portance insuffisante ou hétérogène, il est souhaitable de s'en préoccuper dès la conception en faisant en sorte que la plus grande partie du tassement puisse avoir lieu avant la mise en œuvre ; on procède dans ce cas par un préchargement. Si ce n'est pas possible, il y a lieu de faire au moins un traitement local ou général, de la zone compressible par substitution ou élimination de sols compressibles en tout ou partie, utilisation de remblais allégés, surcharges temporaires, drains verticaux, etc., avant la mise en place de la fondation. Ceci est également valable lorsque la fondation est implantée dans une zone remblayée mal compactée, (par ex : décharge), dans ce cas, un traitement par compactage dynamique peut être envisagé.

Pour limiter au maximum les contre-pentes dues aux tassements différentiels, il est recommandé de prévoir au niveau des radiers une pente moyenne supérieure aux cas courants. Dans les cas extrêmes, on sera amené à fonder les ouvrages sur pieux, ce qui nécessite d'en tenir compte dans la conception et les calculs de l'ouvrage.

b) Tassements dus au remaniement du sol

Dans certains sols, l'ouverture d'une fouille provoque un remaniement, c'est à dire une altération des propriétés mécaniques du sol qui, notamment, devient plus compressible. Les paramètres qui influent sur ce remaniement sont les suivants :

1. Nature et résistance du sol : un sol sableux hors nappe pose peu de problèmes ; un sol argileux sous la nappe, surtout s'il est peu résistant, et un sable fin, boulant, sous la nappe peuvent poser des problèmes importants.

2. Conditions climatiques (défavorables : pluie, gel...).

3. Durée d'ouverture de la fouille (dans tous les cas, elle devra être aussi courte que possible).

4. Dimensions de la fondation et surtout sa profondeur.

5. Conditions d'exécution :

On distinguera en général :

  • les conditions normales : absence de blindage de la fouille et absence de pompage.
  • les conditions spéciales : blindage partiel ou jointif de la fouille descendu au fur et à mesure du terrassement avec ou sans pompage en fond de fouille.

La mise en œuvre de telles conditions nécessite l'application de techniques telles que cloutage, blindages ou parois berlinoises etc., avec tirants métalliques ou précontraints.

Des conditions intermédiaires peuvent bien entendu être utilisées.

c) Choix du mode de fondation et d'exécution et du niveau de l'étude de sols en fonction des tassements prévisibles.

* Conditions géotechniques favorables

Elles se rencontrent pour tous les sols qualifiés de résistants et pas ou peu compressibles qui vont des sols semi-rocheux jusqu'au limons en passant par les marnes, les argiles, les sables et graves hors d'eau, etc.

Dans la plupart des cas, il n'y a pas de problème majeur :

- la fondation superficielle ou le radier repose sur une assise de fondation dimensionnée par les règles en vigueur ;

- le choix de l'emprise du terrassement et de l'inclinaison ou maintien de la fouille (talutée ou maintenue par blindage) est fait à partir de conditions économiques, et après une étude de stabilité permettant la réalisation des fondations et de la structure en toute sécurité.

L'étude géotechnique est généralement limitée aux étapes 1 et 2 définies ci-après. Le choix du mode de fondation dépend de la portance du sol, des charges apportées par la structure, de la profondeur et de la nature de la fondation.

* Sols argileux peu résistants et compressibles

Ces sols correspondent généralement à des dépôts alluvionnaires récents (tourbes, vases, argiles molles) mais il peut s'agir également de remblais mal compactés.

En fonction de l'importance de l'ouvrage, la consistance de l'étude géotechnique sera ajustée.

Il y a dans ce cas un problème spécifique vis-à-vis de la pérennité des ouvrages et une étude du tassement prévisible doit être faite au stade des étapes 2 ou 3 de l'étude géotechnique. En classant les solutions dans un ordre de plus en plus contraignant du point de vue technique, sachant que l'aspect économique devra également être pris en compte, on peut être conduit :

- à constater qu'il y a peu de problème et qu'un ouvrage avec une fondation superficielle et des conditions d'exécution normales conviennent ;

- à soigner particulièrement les conditions d'exécution (rapidité des phases) ou à recourir à des conditions spéciales d'exécution pour conserver un mode de fondation superficiel ;

- à utiliser des conditions d'exécution classiques et adopter un type de fondation superficielle ou un radier général et des dispositions constructives susceptibles de compenser l'effet des tassements différentiels ;

- à utiliser des conditions d'exécution classiques ou spéciales et adopter un mode de fondations "profondes" tel que pieux (béton, métal), colonnes ballastées, substitution des sols etc.

- à utiliser des procédés spéciaux tels que : techniques spéciales, injection des sols, etc.

- à modifier l'implantation pour éviter la zone de sols compressibles.

* Sols sableux sous l'eau

Dans ce cas, il s'agit d'éviter le remaniement (ou la boulance) du sable.

Il est en général nécessaire d'avoir recours à des conditions spéciales d'exécution et dans les cas les plus critiques, en particulier à grande profondeur, on peut être conduit à employer des procédés spéciaux : écrans étanches, injections, congélation, injection préalable.

Conformément aux indications du chapitre suivant, c'est au moins une étude au niveau de l'étape 2 voire de l'étape 3, qu'il faut envisager (conditions d'épuisement de la fouille ou de rabattement préalable de la nappe convenablement étudiées).

4.5. Fondation reposant sur une argile raide gonflante

Pour limiter les désordres liés à ce comportement particulier des argiles raides, une des précautions à prendre consiste à laisser la fouille ouverte le moins longtemps possible et par conséquent à progresser par tronçons de longueur limitée avec exécution et remblaiement de la fondation au furet à mesure de l'avancement des travaux.

Une autre solution consiste après étude géotechnique à réaliser des fondations sur pieux qui devront tenir compte des diverses sollicitations provoquées par ces argiles gonflantes.

5. Étude des sols

Les mécanismes examinés précédemment montrent qu'il y a une interaction étroite entre le comportement du sol environnant, le comportement géotechnique des terrains auquel il y a lieu d'ajouter les conditions d'exécution, et le comportement de l'ouvrage en service. Il est donc nécessaire de procéder à une étude de sol. Il s'agit de définir les contraintes géotechniques qui peuvent avoir une incidence directe ou indirecte sur la pérennité de l'ouvrage et sur les conditions d'exécution.

Cette étude concerne :

1) les propriétés géotechniques des sols qui permettent de déterminer leur portance (caractéristiques mécaniques), mais aussi qui conditionnent leur aptitude aux terrassements et leur tenue à court terme (géométrie, caractéristiques de nature et d'état, et les variations de ces propriétés suivant le mode d'exploitation de l'ouvrage).

2) les conditions hydrauliques qui ont une influence sur l'exécution des travaux et sur le comportement ultérieur de l'ouvrage et du sol environnant.

La prise en compte dans l'établissement du projet des propriétés géotechniques des sols et des conditions hydrauliques constitue l'objectif final de l'étude géotechnique. Celle-ci doit fournir au maître d'œuvre des recommandations sur la nature des charges qui peuvent être supportées, sur le ou les types de fondations possibles et sur la méthode d'exécution la mieux adaptée à l'environnement géotechnique.

Les ouvrages du fascicule 74 du CCTG sont, dans la très grande majorité des cas, des ouvrages ayant des fondations peu profondes. Du fait de leur faible profondeur par rapport au terrain naturel, ces ouvrages affectent les terrains superficiels qui correspondent généralement :

- soit à des matériaux naturels (alluvions, éboulis) ou artificiels (remblais),

- soit à une frange d'altération ou de remaniement d'un substratum rocheux peu profond,

- soit à des terrains alluvionnaires dans les zones de vallées,

- soit à des terrains marécageux ou alluvionnaires, avec des horizons plus ou moins sableux, aux caractéristiques mécaniques très médiocres dans les fonds et vallées, bords de rivières, anciens lits, etc.

De par leurs origines, ces terrains présentent des propriétés géotechniques généralement défavorables.

Le projeteur est donc confronté à des problèmes de reconnaissance spécifique inhérents à ces caractéristiques :

- l'étude géotechnique nécessite l'emploi systématique de sondages ponctuels, avec une maille très resserrée, afin de déceler d'éventuelles variations de nature des sols, ce qui entraîne une investigation onéreuse ;

- contraintes d'environnement interdisant l'utilisation de certaines techniques géophysiques légères, en zone urbanisée (courant électrique, vibrations...) ;

- problèmes d'extrapolation ou d'interpolation des résultats géotechniques ponctuels, en raison de l'hétérogénéité des sols et notamment estimation des tassements, dans certaines zones particulièrement perturbées ;

- mauvaise adaptation des cartes géologiques à l'échelle des fondations de l'ouvrage.

Dans ces conditions, il y a donc lieu de débuter les études en utilisant les méthodes légères et globales : recherches d'archives, photos aériennes, géomorphologie, dans le déroulement des ; investigation, puis d'adapter la reconnaissance à l'importance du projet.

Si dans les cas simples ou au niveau d'un APS, une analyse documentaire assortie d'une visite sur place peuvent suffire, l'exécution d'ouvrages plus importants ou implantés en site difficile, justifie une reconnaissance géotechnique plus détaillée, basée sur la mise en œuvre de méthodes spécifiques. Selon la complexité du projet et les difficultés géotechniques pressenties, l'étude géotechnique peut être scindée en plusieurs étapes successives (ou simultanées, le cas échéant).

Étape N° 1 : enquête de sol.

Étape N° 2 : étude géotechnique qualitative ou semi-quantitative.

Étape N° 3 : reconnaissance géotechnique complémentaire et études détaillées de problèmes spécifiques de mécanique des sols.

Étape N° 4 : proposition d'un système de fondation adapté à la structure de l'ouvrage.

La succession ou la simultanéité des 3 premières étapes, est décidée en fonction de critères qui ne relèvent pas strictement du domaine de la géotechnique, mais qui sont généralement déterminants : organisation administrative du projet et planning. Néanmoins, il est toujours préférable de hiérarchiser les études et en particulier de disposer du maximum de renseignements disponibles à un stade donné afin d'optimiser techniquement et financièrement les investigations ultérieures, si celles-ci s'avèrent nécessaires.

Étape N° 1 - Enquête sur le sol

Cette phase initiale, essentiellement documentaire, complétée éventuellement par une reconnaissance à la pelle mécanique, doit intervenir le plus tôt possible dès la définition des projets. Elle consiste en une recherche des contraintes géotechniques du site, en tirant parti de la documentation existante et en effectuant un examen visuel des lieux et des fonds de tranchées de reconnaissance.

Elle peut se traduire, au moindre coût, et sans intervention lourde sur le site, par l'établissement d'un rapport "d'analyse documentaire des contraintes géotechniques" qui peut comporter les éléments suivants :

- le recensement des sources d'informations utilisées avec indication de leur fiabilité ;

- les observations effectuées sur le site ;

- une évaluation des difficultés géotechniques prévisibles sur la base de l'interprétation des données recueillies (difficultés de terrassement, tenue des fouilles, sensibilité de l'environnement, stabilité générale du site, etc.) ;

- un profil géologique et hydrogéologique prévisionnel avec les localisations des contraintes géotechniques répertoriées.

Cette étape, qui ne nécessite qu'une intervention légère (de l'ordre de un à quelques jours de géotechnicien) est absolument indispensable dans tous les cas, si l'on veut intégrer le paramètre géotechnique à l'ensemble des contraintes du projet. Elle peut suffire dans un certain nombre de cas limites où le contexte géotechnique ne met pas en cause le dimensionnement, l'économie ou la pérennité de l'ouvrage.

Elle peut conduire à modifier l'avant-projet pour tenir compte des caractéristiques géotechniques. Toutefois, si le projet est situé dans une zone difficile ou hétérogène, elle ne peut permettre de lever tous les aléas inhérents à la structure, à la nature et à l'état des terrains, ainsi qu'à la présence d'une nappe aquifère. Elle ne peut pas non plus dans ce cas fournir des indications fiables sur la portance des sols, les tassements différentiels, etc. C'est pourquoi, il est généralement nécessaire de compléter la phase d'enquête (étape 1) par une reconnaissance géotechnique sur le site (étape 2).

Étape N° 2 - Étude géotechnique qualitative

Cette étape a pour objet de définir plus précisément la stratigraphie et les caractéristiques physiques et mécaniques des sols et de préciser la profondeur de la nappe phréatique.

Les résultats ainsi obtenus doivent permettre de juger de la continuité et de l'homogénéité des sols de fondation de l'ouvrage concerné et de localiser les difficultés géotechniques et les zones difficiles ("points délicats"), tels que les terrains compressibles, les zones instables, les formations solubles, affouillables, gonflantes, les zones d'arrivée d'eau, etc.

Les moyens à mettre en œuvre au cours de cette étape doivent être proportionnés à l'importance de l'ouvrage et aux difficultés géotechniques prévisibles. Schématiquement, on peut distinguer deux cas :

a) Ouvrages posés au sol ou semi enterrés tels que réservoirs, cuves, bassins, cuvelages, canaux

Les prélèvements ponctuels, à la pelle mécanique ou à la tarière, doivent être concentrés dans le périmètre de l'assise de l'ouvrage et plus particulièrement dans les zones supposées critiques. L'utilisation du pénétromètre (statique ou dynamique), ainsi que du pressiomètre est à envisager.

Lorsque la continuité latérale des couches n'est pas certaine (zone de versants, de vallées), on pourra recourir à des méthodes globales non destructives et spécialement aux mesures géophysiques de surface telles que :

1) le traîné électrique : mesure de la résistivité apparente des sols qui dépend de leur nature et de leur teneur en eau.

2) la radio-magnéto-tellurique (RTM) : mesure des composantes horizontales des champs magnétique et électrique créés par des émissions d'ondes électromagnétiques et détermination d'une résistivité apparente du sol.

3) la sismique-réfraction : détermination des variations d'épaisseur et de compacité des couches de sol, à partir de la mesure des vitesses de propagation d'ondes sismiques réfractées au niveau des interfaces.

Rapides et peu onéreuses, ces méthodes ont l'avantage d'être non destructives et de délivrer des informations en continu, après étalonnage sur quelques forages à la tarière ou à la pelle.

Chaque méthode possède un domaine d'utilisation bien spécifique et le choix doit être fait par un géotechnicien qualifié, après une étude de faisabilité.

b) Ouvrages posés au sol ou semi enterrés tels que châteaux d'eau ou réservoirs, cuves, et batteries de cuves à étages :

En plus des moyens indiqués ci-dessus, il y a lieu de prévoir des sondages (destructifs, carottés éventuellement, pénétrométriques) permettant de tester l'homogénéité des sols, et même, si l'importance des problèmes le justifie, de caractériser mécaniquement les familles de sols rencontrés (caractéristiques de cisaillement et de compressibilité par exemple) par des essais classiques de mécanique des sols en nombre limité. La pose de piézomètres, à ce stade, peut être très utile.

L'utilisation d'enregistrement de paramètres de forage permet d'appréhender, à un moindre coût, la nature des sols dans les terrains très hétérogènes et plus particulièrement dans les sols rocheux altérés.

Cette étape conclut par un rapport de synthèse géotechnique précisant :

- la définition des familles de sol homogènes et leur disposition géométrique et structurale ;

- la définition et le fonctionnement du système hydrogéologique : charge d'eau au-dessus du radier, perméabilité de l'aquifère, fluctuation des niveaux, écoulements ;

- l'implantation des points délicats et la définition des problèmes d'exécution ou de pérennité de l'ouvrage qui risquent d'en résulter ;

- l'impact du projet ou de sa réalisation sur l'environnement ou les ouvrages voisins.

Dans la conclusion de ce rapport, on devra indiquer clairement si cette phase d'étude suffit ou si, compte tenu des problèmes rencontrés, il est nécessaire de passer à l'étape 3 plus quantitative.

Étape N° 3 - Étude géotechnique spécifique

Elle n'est mise en œuvre que lorsque des problèmes spécifiques tels que nature des ouvrages, mode d'exploitation ou localisation risquent d'avoir une influence déterminante sur l'économie ou la pérennité de l'ouvrage et que leur résolution passe par une parfaite connaissance des paramètres liés à la mécanique des sols. Elle doit apporter les éléments qui manquaient aux étapes 1 et 2 pour traiter ces problèmes et effectuer si nécessaire :

- des études de stabilité de tassement ou de gonflement des sols ;

- des études de comportement de sols sous chargements particuliers (cycliques, vibratoires, et/ou interaction sol-structure) ;

- le dimensionnement des ouvrages de soutènement ;

- les adaptations nécessaires pour résoudre les problèmes hydrauliques dans les meilleures conditions (pompages, filtres, etc.) ;

- le traitement du terrain par injections (cavités, etc.) ;

- l'étude des méthodes de terrassement (notamment pour le rocher) ;

- l'étude de la réutilisation des déblais de terrassement en remblai et leurs conditions de compactage ;

- l'étude de l'impact des travaux à réaliser sur l'environnement.

Pour mener à bien, ces études, des données complétant celles obtenues dans les étapes 1 et 2 sont nécessaires. Ces données sont obtenues à partir de moyens divers dont le choix est du ressort d'un spécialiste. La gamme des sondages et essais possibles est donnée ci-après :

a) Sondages carottés

- avec extraction d'échantillons remaniés permettant de déterminer la nature du sol, sa teneur en eau, sa granulométrie, ses limites d'Atterberg (liquidité, plasticité), les teneurs en matières organiques et carbonate de calcium, les caractéristiques de compactage (essais PROCTOR). Ces caractéristiques permettent de classer les sols (classification absolue type LPC (Laboratoire des ponts et chaussées) ou en fonction des aptitudes aux terrassements type RTR (recommandations pour les terrassements routiers).

- avec extraction d'échantillons intacts soumis à des essais particuliers permettant de déterminer :

  • la masse volumique du sol,
  • ses caractéristiques de compressibilité, de gonflement (essais oedométriques),
  • sa résistance au cisaillement (essais à la boîte, au triaxial, de compression simple, au scissomètre de laboratoire).

b) Essais de sol en place

Ils peuvent souvent compléter, voir remplacer avantageusement les essais de laboratoire sur échantillons intacts. On ne fait ici que les citer :

  • essai scissométrique (mesure de la cohésion non drainée des sols mous argileux),
  • essai pressiométrique (mesure de la pression limite et du module de déformation des sols),
  • diagraphie nucléaire avec sondes à neutrons (mesure des poids volumiques sec et humide et de la teneur en eau),
  • essais de pompage (mesure de la perméabilité des sols).

Cette étude spécifique doit se conclure par un rapport fournissant tous les éléments nécessaires à la compréhension et à la résolution des problèmes posés et comportant, si besoin est :

  • le dimensionnement des fondations spéciales, des ouvrages de soutènement ;
  • les calculs de tassement, de stabilité, de rabattement de nappes ;
  • des données sur le traitement des cavités éventuelles (injections) ;
  • des recommandations sur les remblais de tranchées et leur compactage, notamment sur la constitution, la nature et la protection du lit de pose de la canalisation, pour les travaux réalisés en tranchées ;
  • des recommandations sur le mode de soutènement du front de taille, méthode de creusement, injections préalables ;
  • des recommandations sur la constructibilité de procédés spéciaux éventuellement nécessaires.

Étape N° 4 - Proposition d'un système de fondation

A partir des éléments obtenus par la ou les différentes étapes précédentes, le rapport de géotechnique doit proposer le ou les systèmes de fondations les mieux adaptés au projet et à la structure de l'ouvrage. Dans certains cas, le projet devra être partiellement voire totalement modifié afin de tenir compte des résultats de l'étude des sols. Une grande collaboration entre le géotechnicien et l'ingénieur chargé du projet est indispensable dans la majorité des cas.

6. Problèmes d'exécution liés au sol

6.1. Exécution de fouilles peu profondes

a) Présence de formations rocheuses

Il s'agit essentiellement de savoir si le sol qui va supporter les fondations est un sol meuble ou un sol rocheux (dont il faut préciser s'il s'agit d'un rocher sain ou altéré), afin de choisir au mieux le mode de terrassement (nécessité ou non d'explosifs) en fonction de l'étendue de ce rocher dans l'environnement de la fondation de l'ouvrage. En particulier, il est important, lorsque le rocher se trouve à une certaine profondeur, de bien connaître, suivant le niveau de la fondation, les variations en continu de la cote de son toit et de préciser, le cas échéant, l'importance et les propriétés de la partie altérée.

b) Venues d'eau importantes

La connaissance du régime hydraulique de la zone intéressée par l'ouvrage à réaliser est essentielle pour prévoir correctement les conditions dans lesquelles devront s'effectuer les travaux. Cette connaissance du régime hydraulique est, bien sûr, indissociable de celle du sol, mais aussi de la position et la géométrie de l'ouvrage. La prise en compte de sous-pressions peut imposer le lestage d'un ouvrage.

Elle doit permettre de prévoir, suivant le cas :

- un terrassement à sec sans problèmes,

- la nécessité d'un système de rabattement de la nappe pendant la durée des travaux, lorsque les venues d'eau dans la fouille risquent d'être importantes (terrains perméables sous la nappe),

- des pompages en fond de fouille pendant la durée des travaux,

- un système de drainage provisoire approprié.

Il faut se rappeler que toutes ces mesures peuvent comporter des risques d'entraînements hydrodynamiques des fines du sol en place et de remaniement du fond de fouille. On évitera dans ce cas les couches de formes ou "assises intermédiaires" constituées de sable fin, que l'on remplacera avantageusement par du béton poreux.

c) Soutènements des parois de fouille

Dans le cas d'ouvrages enterrés ou semi-enterrés, si des parois talutées sont retenues, la pente des talus devra être fixée en fonction des caractéristiques mécaniques des sols et des conditions hydrauliques ;

C'est en fonction également de ces mêmes critères qu'on devra choisir et éventuellement dimensionner le dispositif de soutènement dans le cas de terrassements à parois verticales ou subverticales.

6.2. Exécution de fondations profondes

Les problèmes d'exécution de telles fondations étant liés aux conditions géotechniques et hydrodynamiques des sols, mais aussi aux actions et aux sollicitations de la structure, un tel choix ne peut se concevoir qu'après une reconnaissance géotechnique très approfondie, une parfaite adaptation à la structure de l'ouvrage, l'examen des problèmes de faisabilité des fondations et le cas échéant le choix du matériel d'exécution.

6.3. Influence d'exécution sur les ouvrages environnants

Le choix des modes d'exécution peut avoir une influence sur les ouvrages environnants. Ce choix devra les prendre en compte. En particulier, il faudra examiner les conséquences de certaines dispositions envisagées :

1. Pompages ou drainages provoquant des déformations par entraînement de fines, ou par rabattement de nappe,

2. Obstacles ou effets de seuils consécutifs à la réalisation d'un ouvrage qui perturbe le régime hydrodynamique du sol,

3. Système de collecte des sous-pressions drainant l'eau de la nappe et provoquant des tassements,

4. Soutènements entraînant des déformations du sol dans le voisinage,

5. Aptitude au compactage des remblais trop médiocres,

6. Utilisation d'explosifs.