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La gabelle et les taxes sur le sel, une longue histoire !
Le 10 novembre 1723 sont publiées des lettres patentes afin de diffuser la décision, prise par l’arrêt du 25 octobre précédent, d’uniformiser la jurisprudence relative à la perception de la gabelle, redevance sur l’achat du sel. La question des amendes devant être prononcées contre ceux qui ne s’acquittent pas correctement de ce droit y est notamment abordée. Préparées par le Conseil du roi et prises après avoir recueilli son avis, les lettres patentes expriment la volonté royale sous forme de lettre ouverte. Pour prendre effet, elles doivent être enregistrées par un parlement. Ce terme n’avait alors pas la même définition qu’aujourd’hui : les parlements (de Paris, de Toulouse, de Normandie…) étaient des cours rendant la justice au nom du roi, mais exerçaient également un contrôle de légalité sur les ordonnances, édits ou déclarations du roi.
Sous l’Ancien régime, le sel, denrée de première nécessité indispensable pour conserver les aliments, fait l’objet d’un monopole royal dont la forme a pu varier dans le temps. Ainsi, avant 1547 le sel est soumis à une taxe, variable selon les provinces, mais son commerce est libre, le roi exerçant seulement un monopole sur la vente en gros.
Par les lettres patentes du 4 janvier 1547 l’État se réserve le monopole de la vente dans des greniers à sel, mais s’en dessaisit au profit de marchands adjudicataires. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, ces marchands vont tenter de se réunir, ce qui aboutira à la création en 1578 de la ferme générale des droits de gabelle.
La perception de la gabelle n'est cependant pas uniforme sur tout le territoire : l'ordonnance de mai 1680 (citée dans le document présenté ici) « sur le fait des gabelles » entraîne la division administrative du royaume en six zones obéissant à des règles différentes, en fonction du statut des provinces concernées et de l’éloignement des lieux de production (marais salants de l’Ouest et du Midi, salines de Franche-Comté et de Lorraine). Cette situation très inégale sur le plan fiscal engendre évidemment une contrebande spécifique, le faux-saunage. Fortement impopulaire, la gabelle est à l'origine de nombreux soulèvements jusqu'à la Révolution.
L’Assemblée nationale constituante abolit la gabelle le 1er décembre 1790, mais l’impôt est remis en place dès 1806. Malgré une nouvelle tentative de le supprimer sous la Deuxième République, en 1848, il faudra finalement attendre la loi de finances du 31 décembre 1945 pour que la gabelle disparaisse définitivement. Il convient toutefois de relever qu’aujourd’hui, le sel, comme tous les biens de consommation, est soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Voilà un bel exemple de continuité historique dans l’histoire fiscale française !