Le principe de libre communicabilité des archives publiques s'applique dès lors que celles-ci ne mettent pas en cause l’un des intérêts protégés par la loi (protection de la vie privée, secret médical, défense nationale, sûreté de l’État...).
Lorsque les documents s'avèrent non librement communicables, le service des archives propose au chercheur de solliciter une autorisation de consultation par dérogation.
Les délais de communicabilité des archives publiques
Les articles L.213-1 et L.213-2 du code du patrimoine et les articles L311-1 à R311-8-2 du code des relations entre le public et l'administration précisent ces délais spécifiques :
25 ans à compter de la date de l'acte pour :
- les documents dont la communication porte atteinte :
- au secret médical (délai à partir du décès de l'intéressé, ou délai de 120 ans à partir de sa naissance si la date de décès est inconnue).
- au secret des délibérations du gouvernement,
- à la conduite des relations extérieures,
- à la monnaie et au crédit public,
- au secret commercial et industriel,
- à la recherche des infractions fiscales et douanières,
- au secret en matière de statistiques (cas général),
- les documents élaborés dans le cadre d'un contrat de prestation de services exécuté pour le compte d'une ou de plusieurs personnes déterminées,
- les avis du Conseil d’État et des juridictions administratives,
- les documents de la Cour des comptes mentionnés à l'article L. 141-3 du code des juridictions financières,
- les documents des chambres régionales des comptes mentionnés aux articles L. 241-1 et L. 241-4 du même code,
- les documents élaborés ou détenus par l'Autorité de la concurrence dans le cadre de l'exercice de ses pouvoirs d'enquête, d'instruction et de décision,
- les documents élaborés ou détenus par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique dans le cadre des missions prévues à l'article 20 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique,
- les documents préalables à l'élaboration du rapport d'accréditation des établissements de santé prévu à l'article L. 6113-6 du code de la santé publique et les rapports d'audit des établissements de santé mentionnés à l'article 40 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000).
50 ans pour les documents :
- portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée ou facilement identifiable,
- dont la communication porte atteinte :
- au secret de la défense nationale,
- aux intérêts fondamentaux de l'État dans la conduite de la politique extérieure,
- à la sûreté de l'État,
- à la sécurité publique,
- à la protection de la vie privée.
75 ans à compter de la date du document ou du document le plus récent du dossier ou 100 ans si l'intéressé est un mineur, ou 25 ans à compter du décès de l'intéressé si ce délai est plus bref, pour :
- les documents dont la communication porte atteinte au secret en matière de statistiques (données collectées au moyen de questionnaires sur les faits et comportements privés),
- les enquêtes de police judiciaire,
- les affaires portées devant les juridictions et l'exécution des décisions de justice, sous réserve des dispositions particulières aux jugements,
- les minutes et répertoires des officiers publics et ministériels,
- les registres de naissance et de mariage de l'état civil, à compter de leur clôture.
100 ans à compter de la date du document ou du document le plus récent du dossier, ou 25 ans à compter du décès de l'intéressé si ce délai est plus bref, pour :
- tous les documents concernés par le délai de 75 ans, dès lors qu'ils se rapportent à une personne mineure,
- les documents couverts ou ayant été couverts par le secret de la défense nationale dont la communication porte atteinte à la sécurité de personnes nommément désignées ou facilement identifiables,
- les documents des enquêtes de police judiciaire, les documents des affaires portées devant les juridictions et les documents relatifs à l'exécution des décisions de justice, quand leur communication porte atteinte à l'intimité de la vie sexuelle des personnes.
Demande de consultation par dérogation aux délais légaux de communicabilité
L’accès anticipé par dérogation aux délais de communicabilité des archives publiques est prévu par l’article L. 213-3 du code du patrimoine : « L’autorisation de consultation de documents d’archives publiques avant l’expiration des délais fixés au I de l'article L. 213-2 peut être accordée aux personnes qui en font la demande dans la mesure où l’intérêt qui s'attache à la consultation de ces documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. [...] L’autorisation est accordée par l’administration des archives aux personnes qui en font la demande après accord de l’autorité dont émanent les documents. »
Lorsque le Service des archives économiques et financières (SAEF) indique au chercheur que des documents qu'il souhaite consulter ne sont pas encore librement communicables, il lui transmet un formulaire de demande de dérogation.
La demande d’accès par dérogation est effectuée par la personne physique qui souhaite consulter les documents. L’autorisation accordée étant nominative, la personne qui remplit le formulaire et signe l’engagement de réserve est la seule autorisée à consulter les documents en cas d’accord.
A titre exceptionnel, une autorisation de reproduction de documents non librement communicables peut être sollicitée ; le chercheur doit alors en faire explicitement la demande et la motiver.
Voici les étapes du processus d'instruction d'une demande de dérogation :
- Le chercheur adresse sa demande motivée au SAEF par le biais du formulaire qui lui a été adressé ;
- Après contrôle des documents mentionnés, le SAEF saisit le service dont ils émanent pour avis préalable, en lui soumettant le formulaire de dérogation et en l'informant de la nature des secrets auxquels portent atteinte les documents ainsi que des délais de communicabilité qui pèsent sur eux ;
- Le service dont émanent les documents exprime son avis et retourne le formulaire au SAEF.
- Le dossier complet de demande d’accès par dérogation est transmis au service interministériel des Archives de France pour instruction et rédaction de la réponse au chercheur ;
- La réponse parvient au demandeur. Si elle est positive, le chercheur reprend contact avec le SAEF pour organisation de la consultation de ces documents en salle de lecture.
Les recours possibles en cas de refus de consultation
Lorsqu’un refus implicite ou explicite à une demande d'accès aux archives publiques est opposé au lecteur, ce dernier peut saisir la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) dans un délai de deux mois à compter de la réponse à sa demande de dérogation. Il est nécessaire de présenter ce recours soit par courrier (20 avenue de Ségur 75007 PARIS), soit en passant par le formulaire de saisine présent sur le site de la CADA.
La CADA est compétente pour se prononcer sur tous les refus opposés à une demande de dérogation, même si les documents qui sont demandés à la consultation ne sont pas des documents administratifs, par exemple des documents relatifs à une procédure judiciaire. Lorsque la CADA donne un avis favorable au demandeur, l’administration est invitée à se prononcer à nouveau. Dans les cas où elle maintient son refus initial, le demandeur a la possibilité de déposer un recours devant le tribunal administratif.
Bien remplir son formulaire
Avant de transmettre votre formulaire de demande au Service des archives économiques et financières, assurez-vous qu’il soit complet.
- Vous avez indiqué vos coordonnées.
La demande est effectuée à titre individuel. En cas de réponse positive, seule la personne munie d’une autorisation à son nom pourra obtenir l’accès aux documents.
- Vous avez donné les informations concernant la nature de votre recherche.
- Vous avez motivé votre demande et indiqué l’usage éventuel qu’il sera fait des documents.
- Vous avez indiqué si vous sollicitez ou non le droit de reproduire les documents.
L’autorisation de reproduction doit être explicitement demandée et motivée dans le formulaire, en raison de son caractère exceptionnel.
- Vous avez daté et signé l’engagement de réserve.
- Vous avez complété la fiche d’identification avec la référence, la description et les dates extrêmes des documents qui font l’objet de votre demande (document, dossier, article, etc.). Cette fiche doit être dupliquée pour chacune des cotes sollicitées.
- Le cas échéant, vous avez joint tout document permettant d’appuyer votre demande (preuve de filiation, mandat, attestation du directeur de recherche, etc.).
Vous pouvez à tout moment solliciter l’appui du service pour qu’il vous aide à compléter votre demande.
► Obligations de confidentialité
Comme le rappelle l’engagement de réserve que vous avez signé, toute divulgation d’un secret protégé par la loi contenu dans les documents dont vous avez obtenu l’accès est interdite et vous expose à des sanctions pénales et administratives.
► Textes de référence
La procédure d’accès anticipé par dérogation à des archives publiques non librement communicables est prévue par les articles L. 212-10-1, L. 213-1 à L. 213-5 et R. 212-50-2 du code du patrimoine. Sa mise en œuvre est encadrée par la note d’information DGPA/SIAF/2021/007 du service interministériel des Archives de France, accessible sur le portail FranceArchives : https://francearchives.gouv.fr