Le premier rapport exploratoire sur le Métavers, commandé en février 2022, a été remis ce jour au Gouvernement. Ce document tente de définir le plus justement possible le concept de Métavers, mais aussi ses opportunités, ses limites et les enjeux qui y sont liés. Les auteurs proposent dix leviers d’actions pour se saisir de cette innovation technologique. Décryptage.
10 propositions autour du Métavers. C’est le résultat du rapport exploratoire remis ce jour à Rima Abdul Malak, ministre de la Culture, et Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications.
Objectifs ? Donner des clés de compréhension pour clarifier le débat, saisir les opportunités émergentes, mieux appréhender les risques posés par les métavers et rassembler les acteurs français autour d’un horizon commun.
Consulter le rapport complet [PDF - 2,9 Mo]
Les auteurs du rapport
Ce premier rapport exploratoire a été produit par Camille François, chercheuse à Columbia University et directrice d’une société de pointe en réalité augmentée, Adrien Basdevant, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies et membre du Conseil National du numérique, et Rémi Ronfard, directeur de recherche à l’Inria et chercheur associé à l’École des Arts Décoratifs.
Le Métavers, une notion abstraite
Le Métavers, c’est en premier lieu un concept. Celui d’aboutir à « un espace virtuel, persistant, avec des données de synthèse tridimensionnelle, qui serait interopérable ».
Toutefois les auteurs du rapport insistent sur le fait qu’il y a plusieurs métavers. En effet, le Métavers c’est une multitude de services et d’espaces, plus ou moins ouverts.
Beaucoup d’autres entreprises profitent ainsi du flou entourant ce concept pour s’afficher comme des acteurs du Métavers, proposant leur propre définition du concept, servant leurs intérêts. Ainsi, des projets aussi différents que des plateformes de réalité virtuelle, des jeux vidéo multijoueurs, des plateformes de diffusion de concerts en réalité augmentée ou des sites de vente en ligne (marketplaces) fondées sur des blockchains, ont tous recours au terme de « métavers » pour se définir.
Pour y voir plus clair, plus de 80 personnalités ont été consultées : entrepreneurs de la réalité virtuelle et de la blockchain, acteurs culturels, artistes, professionnels du jeu vidéo, chercheurs en sciences sociales, en intelligence artificielle et en informatique. Les auteurs du rapport propose une définition, en se basant quelques éléments constitutifs d’un métavers en général.
Un métavers est un service en ligne donnant accès à des simulations d’espaces 3D temps réel, partagées et persistantes, dans lesquelles on peut vivre ensemble des expériences immersives.
10 propositions autour du Métavers
À travers ce premier rapport sur le sujet, les co-missionnés formulent une série de propositions et appellent à rassembler experts, acteurs privés et publics, chercheurs et citoyens pour en débattre.
Le rapport appelle à la définition d’une véritable politique française et européenne des métavers. Il propose dix leviers d’actions qui visent à développer l’infrastructure technologique, soutenir l’innovation, miser sur les usages, orchestrer la régulation et prendre en compte les enjeux sociétaux et environnementaux :
- se saisir de l’opportunité des Jeux olympiques pour rassembler les acteurs français des métavers autour de projets concrets, au sein d’un consortium public/privé placé sous le pilotage de l’Inria. Objectif, proposer des actions de grande visibilité autour d’expériences immersives pouvant être partagées avant, pendant et après les Jeux olympiques et paralympiques (entraînement/compétitions, transport/tourisme, coulisses/échanges avec les athlètes),
- réinvestir les instances de négociation des standards techniques, pour faire en sorte que la France et les principaux acteurs français (du secteur numérique de l’immersion, mais aussi de la recherche sur ces sujets) participent activement aux discussions sur l’interopérabilité des technologies de l’immersion,
- amener la puissance publique à faire émerger les services communs et essentiels permettant l’avènement d’une pluralité de métavers interopérables,
- développer une analyse rigoureuse des différentes chaînes de valeur des métavers afin de guider au mieux d’une part les domaines d’investissement stratégiques, d’autre part les risques de perte de souveraineté ou de fuite de valeur,
- mettre en place des commandes publiques répondant aux objectifs de souveraineté culturelle et de souveraineté technologique afin de soutenir des attelages hybrides entre structures françaises technologiques et institutions culturelles,
- lancer dès maintenant le travail d’adaptation, notamment du règlement général sur la protection des données (RGPD), la législation sur les services numériques (DSA) et la législation sur les marchés numériques (DMA), aux enjeux métaversiques,
- investir dans les outils et les techniques d’analyse des métavers, et des transactions qui s’y déroulent afin de permettre aussi bien la détection des infractions pour remonter aux auteurs que de percevoir l’impôt,
- réaliser des investissements dans des initiatives de recherche interdisciplinaire (informatique, neurosciences et sciences sociales) de grande ampleur et à long terme, utilisant les dispositifs existants (France 2030, PIA 4, PEPR, ANR). Objectif, développer simultanément des métavers expérimentaux guidés par des besoins sociétaux (culture, santé, éducation) et les moyens d’en évaluer les risques sociotechniques par des études empiriques,
- créer un institut de recherche et coordination, sur le modèle de l’Ircam. Celui-ci serait à la fois un laboratoire de recherche en informatique dédié aux arts immersifs, un lieu de coordination entre chercheurs et artistes pour la création d’œuvres immersives innovantes dans les métavers et un comptoir d’expertise pour toutes les institutions culturelles concernées,
- explorer des solutions écoresponsables et développer un système de mesure de l’impact environnemental des infrastructures du Métavers.
Des débouchés majeurs dans divers secteurs
Les auteurs du rapport sont formels. Les métavers s’annoncent comme porteurs de débouchés majeurs, de l’industrie à la santé, en passant par la formation et l’économie. Parce qu’ils pourront contribuer à la démocratisation de nouvelles formes d’expressions culturelles et d’outils de création en ligne, ils représentent une opportunité indéniable.
Pour la France et pour l’Europe, le développement des métavers doit permettre l’émergence de nouveaux leaders mondiaux des usages du numérique et renforcer le rayonnement culturel français. Selon le rapport, encourager cette innovation sur le territoire favoriserait ainsi l’exportation de la culture francophone, dans la francophonie et au-delà.
Presse
Communiqué : Remise du rapport de la mission sur le développement des métavers - 24/10/2022