Les difficultés de certains pays menacent l’unité de la zone euro. Les institutions existantes sont dans l’impossibilité de venir en aide à ces États. Dans ces conditions et afin d’enrayer tous risques de contagion, les dirigeants européens décident de mettre en place différents dispositifs pour sortir l’Europe de l’impasse.
Le fonds européen de stabilité financière : Un dispositif pour enrayer la contagion à d’autres pays
Alors que l’Irlande et le Portugal se trouvent en difficulté, les chefs d’État et de gouvernement des États membre de l’Union européenne réalisent que les institutions européennes existantes sont dans l’impossibilité de venir en aide aux États en difficulté.
L’article 123 du traité de Lisbonne précise bien que ni la Banque centrale européenne ni les banques centrales nationales ne peuvent « accorder de découvert ou tout autre type de crédits aux institutions, organes ou organisme de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres. L’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite ».
Dans ces conditions et afin d’enrayer tous risques de contagion, le 10 mai 2010, les ministres des finances européens (ECOFIN) décident de mettre en place un mécanisme reposant sur la solidarité financière des États membres (ratification par tous les pays européen le 4 aout 2011). Le FESF est un dispositif temporaire en attendant de modifier le traité de Lisbonne afin d’envisager un mécanisme permanent de financement des États.
Le fonctionnement du FESF
L’appellation commune parle de fonds, en fait il est préférable de parler de mécanisme car ce dispositif n’est pas constitué de sommes déposées sur un compte par les États de la zone euro. Le FESF est une possibilité donnée à l’Union européenne de lever des fonds sur le marché via le FESF, Société anonyme basée au Luxembourg.
Le Fonds européen de stabilité financière est donc un dispositif intergouvernemental qui permet d’apporter un financement aux États membre de la zone euro jusqu’à hauteur de 440 milliards d’euros. Ce fonds permet d’accorder des prêts conditionnels à des États de la zone euro rencontrant des difficultés de refinancement sur les marchés. Il se finance en émettant des obligations garanties par les Etats de la zone euro aux meilleurs taux d’intérêt possibles et peut effectuer des prêts à des taux assez faibles aux États de la zone euro en difficulté. La hauteur de garantie des États est calculée au prorata des participations des pays de la zone euro au capital de la Banque centrale européenne.
Ce dispositif intergouvernemental est complété par un mécanisme communautaire de stabilisation financière (MESF) qui permet à l’Union européenne de lever jusqu’à 60 MdE. A la différence du FESF, le MESF bénéficie de la garantie implicite du budget européen. Enfin le FMI apporte une assistance financière complémentaire de 220 MdE.
Novembre 2010 une première aide du FESF- FMI est accordée à l’Irlande ( 45 milliards d'euros complété par 22,5 milliards d'euros du FMI). En mai 2011, un nouveau plan d’aide est accordé au Portugal (52 milliards d'euros complété par 26milliards d'euros provenant du FMI).
Les évolutions du mode d’intervention du FESF
Le contexte de la crise et le rôle des agences de notation obligent les États de la zone euro à affiner les modes d’intervention du FESF.
- les agences de notation font savoir qu’elles ne donneront pas la note maximale AAA à ce mécanisme. En effet pour elles, seuls les pays ayant la note AAA apportent une réelle garantie. Dans ces conditions, les pays notés AAA sont contraints d’augmenter leur plafond de garantie. La France par exemple passe de 111 milliards d'euros de garanties données au FESF à 159 milliards d'euros (Accord du 11 mars 2011).
- En juillet 2011, les chefs d’État et de gouvernement de la zone euro décident d’élargir le champ d’activité du FESF. Désormais, le FESF peut aussi acheter des titres d’État sur le marché secondaire. Il peut participer à la recapitalisation financière des établissements de crédit par des prêts aux gouvernements de tous les pays membres de l’Union européenne. Le FESF peut accorder à certains États en difficulté et sous certaines conditions une ligne de crédit. Un réaménagement des prêts déjà accordés est aussi prévu. (Accord du 21 juillet 2011)
Le mécanisme européen de stabilité financière
Le Mécanisme Européen de Stabilité
(MES) a officiellement vu le jour lundi 8 octobre 2012.
Dans les 15 jours qui suivent sa création, il sera doté d’un capital de 32 milliards d’euros qui sera investi dans des titres jugés sûrs. À terme, son capital sera de 80 milliards d’euros.
Le MES devrait prochainement émettre des obligations d’une maturité de 30 ans maximum et des titres de court terme. Cela devrait permettre de faire baisser la pression sur les taux des obligations émises par les pays européens en difficulté.
Le Mécanisme Européen de Solidarité (MES)
Le Mécanisme Européen de Solidarité (MES) est entré officiellement en vigueur le 8 octobre 2012. Il s’agit d’un organe de coopération intergouvernementale destiné à soutenir financièrement les États européens qui subissent des difficultés financières. Explications.
À quoi sert le MES ?
Le MES doit apporter une aide financière aux États dans la zone euro en difficulté. Il va coexister avec le FESF jusqu’en juillet 2013, date à laquelle le FESF sera dissout. Seuls les États qui ont ratifié le pacte budgétaire européen
pourront bénéficier de cette aide.
Liens externes
A savoir
Le terme de Mécanisme a été préféré à celui de "fonds", car il ne se présente pas sous la forme d’une somme d’argent déposée sur un compte et prête à l’emploi. Il s’agit de la possibilité de lever des fonds sur le marché en cas de besoin, avec la garantie du budget communautaire ou du budget des Etats concernés.
Quels sont les pouvoirs du MES ?
Le MES peut aider les pays en difficulté de deux façons principales :
- Il peut accorder des prêts aux pays les plus fragiles. En 2014, sa capacité de prêts s’élèvera à 500 milliards d’euros. Il pourra aussi bénéficier des 200 milliards d’euros qui n’ont pas été utilisés par le FESF, ce qui porte donc sa force de frappe à 700 milliards d’euros. À titre de comparaison, la capacité de prêt du FMI est de 570 milliards de dollars (soit environ 442 milliards d’euros).
- Les décisions d’approuver un prêt, le taux d’intérêt de ces prêts et les conditions de remboursement sont prises à l’unanimité des ministres des Finances de la zone euro.
- Il peut émettre des obligations sur les marchés financiers. Ces nouvelles obligations seront échangeables avec les obligations émises par le FESF, jusqu’à la disparition totale du FESF. Elles devraient permettre de faire baisser la pression sur les taux d’intérêt subis par les pays en difficulté. Ces obligations sont bien accueillies par les investisseurs internationaux car ils ont confiance en cette nouvelle structure.
A savoir
Le MES a reçu le label AAA des agences de notation Moody’s et Fitch.
Le MES pourra aussi participer directement à la recapitalisation des banques en difficultés, à condition que l’union bancaire prévue soit effectivement mise en place.
Quels sont les avantages du MES ?
Le MES a la plus importante force de frappe de tous les organismes supranationaux. Cela permet de rassurer les investisseurs. D’autres États européens dont la monnaie n'est pas l'euro souhaitant témoigner de leur solidarité peuvent y contribuer.
Les garanties apportées par les États européens ne sont pas comptabilisées comme de la dette publique. Le MES n’aggrave donc pas le niveau de la dette publique des États.
Toutes les décisions doivent être prises à l’unanimité sauf en cas d’urgence susceptible de menacer la stabilité de la zone euro. Dans ce cas, une majorité de 85 % des voix peut suffire, ce qui offre un droit de véto à l’Allemagne, la France et l’Italie.
A savoir
Le MES est dirigé par l’actuel directeur général du FESF, Klaus Regling.
Le conseil des gouverneurs de cette institution est composé des 17 ministres des Finances de la zone euro.
Le renforcement du Pacte de stabilité et de croissance
Le 15 mars 2011, les ministres des finances décident de renforcer la discipline budgétaire afin d’éviter un alourdissement des déficits publics.Il constitue le principal instrument de la coordination budgétaire des Etats au sein de la zone Euro. Les nouvelles règles devraient être adoptées en accord avec le Parlement Européen en septembre 2011.
Les modifications prévues du pacte de stabilité et de croissance
- Surveillance accrue des dépenses : la hausse des dépenses publiques annuelles dans chaque pays ne pourra pas excéder la hausse du PIB à moyen terme. Une déviation significative par rapport à la valeur de référence pourrait conduire à des sanctions.
- Attention accrue portée à la dette : Les Etats membres devront prendre des mesures de correction si la dette dépasse 60 %, même si leur déficit est en dessous de la limite de 3 % du PIB fixée par le Pacte. La dette excédentaire devra être réduite à un rythme annuel de 5 % sur trois années glissantes.
- Sanctions financières plus automatiques et plus lourdes : Ce sera à l’Etat souhaitant éviter une procédure pour déficit excessif proposée par la Commission européenne de réunir une majorité. Les sanctions interviendront plus tôt dans la procédure pour déficit excessif et s'appliqueront de manière graduelle.
- Coordination renforcée : Les Etats membres s'engagent à soumettre leurs budgets à l’examen du conseil européen et le conseil des ministres avant de les faire adopter par leurs parlements nationaux.
A savoir
La coordination renforcée des politiques économiques de tous les pays de la zone euro : le pacte pour l’euro
Ce pacte concerne tous les pays de la zone euro
Le pacte pour l’Euro adopté par les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone Euro le 11 mars 2011 vise à renforcer la coordination des politiques économiques nationales des Etats membres de la zone en vue de renforcer la compétitivité des économies de chacun. Il est ouvert aux pays de l’Union non membres de la zone euro. Sur les 10 états concernés, la Bulgarie, la Roumanie, la Pologne, la Lettonie, la Lituanie et le Danemark ont décidé de s’y joindre mais pas le 4 autres dont notamment le Royaume Uni.
Le pacte repose sur 4 règles directrices :
- Il s’intégrera dans la gouvernance économique existant dans l’union européenne (pas de modification des pouvoirs entre le niveau national et le niveau européen ; pas de modification des pouvoirs des différentes institutions européennes).
- Il couvrira des domaines d'action prioritaires essentiels pour favoriser la compétitivité et la convergence. Dans les domaines politiques choisis, des objectifs communs feront l'objet d'un accord au niveau des chefs d'État ou de gouvernement.
- Les États membres participants poursuivront ces objectifs avec leur propre panoplie de mesures, en tenant compte des défis qui leur sont spécifiques.
- Chaque année, des engagements nationaux concrets seront pris par chacun des chefs d'État ou de gouvernement.
Le pacte respectera pleinement l'intégrité du marché unique.
Le pacte concernera notamment les domaines suivants :
- la politique salariale (surveillance des couts unitaires du travail, surveillance particulière des salaires du secteur public…) ;
- les politiques de renforcement de la productivité (ouverture des marchés, environnement des entreprises, enseignement, recherche et innovation) ;
- les politiques d’assainissement des finances publiques (viabilité des retraites, des soins de santé et des prestations sociales ;
- la politique de l’emploi (flexi sécurité, formation tout au long de la vie, fiscalité du travail) ;
- la coordination des politiques fiscales et notamment l’harmonisation de l’impôt sur les sociétés.
Les premiers engagements concrets figurent dans les programmes nationaux de réforme et les programmes de stabilité qui ont été soumis au Conseil européen de juin 2011.
Le pacte pour l’Euro a fait l’objet de vives critiques des syndicats européens car il constitue selon eux essentiellement une « gouvernance européenne de l’austérité ».
Le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, TSCG
Le texte du traité a été signé le 2 mars 2012 par 25 des 27 Etats membres de l’Union européenne. Le Royaume-Uni et la république Tchèque ne l’ont pas signé. Avant de devenir effectif dans les Etats signataires, il devra être ratifié par au moins 12 Etats sur les 17 de la zone euro. Il devrait entrer en vigueur dès le 1er janvier 2013.
Les principes du traité
Ce traité a pour objectif principal de « renforcer le pilier économique de l’Union économique et monétaire en adoptant des règles destinées à favoriser la discipline budgétaire au moyen d’un pacte budgétaire, à renforcer la coordination de leurs politiques économiques et à améliorer la gouvernance de la zone euro, en soutenant ainsi la réalisation des objectifs de l’Union européenne en matière de croissance durable, d’emploi, de compétitivité et de cohésion sociale ». Article 1 du TSCG.
Les engagements pris par les pays signataires (règle d’or)
- L’article 3 du traité pose le principe de l’équilibre budgétaire (ou excédent) des administrations publiques (APU). Ce qui signifie que les dépenses prévues ne peuvent être supérieures aux recettes. En termes techniques, le déficit structurel annuel des APU ne doit pas être supérieur à 0,5 % du PIB en euros courants.
Pour l’objectif à moyen terme
- Les Etats s’engagent à ne pas s’écarter même temporairement de cet objectif.
- Si la dette publique est supérieure à 60 % du PIB, le pays défaillant s’engage à réduire son déficit au rythme d’un vingtième par an (article 4).
Les exceptions à la règle
- Certaines circonstances exceptionnelles peuvent provoquer un déficit de leur budget, des mécanismes de correction seront mis en place pour permettre aux Etats de retrouver leur équilibre budgétaire.
- Si la dette publique de l’Etat signataire est inférieure à 60 % de son PIB en euros courants, alors les APU pourront avoir un déficit structurel plus important (1 % du PIB en franc constant).
Le pacte budgétaire repose sur le partenariat entre pays de la zone euro
Le traité insiste sur la nécessité que les pays signataires coordonnent leur politique budgétaire (articles 9 et 10). Lorsqu’un pays ne pourra respecter ces engagements budgétaires, il fera l’objet d’un « programme de partenariat budgétaire et économique comportant une description détaillée des réformes structurelles à établir et à mettre en œuvre pour assurer une correction effective et durable de son déficit excessif » (Article 5).
La cour de Justice européenne peut être saisie par un des pays signataires si les réformes proposées ne sont pas effectives : La cour de justice peut alors infliger une « amende » dont le montant maximum est de 1 % du PIB du pays en défaut.
Des avis divergents sur le TSCG
Alors que les membres de la fondation Schuman se réjouissent de l’adoption de ce nouveau traité, plusieurs économistes s’inquiètent des contraintes que le pacte budgétaire fera peser sur les Etats signataires. Les pro TCSG avancent que le pacte budgétaire permet de renforcer le pilier économique de l’UEM. Pour eux, réaffirmer l’équilibre budgétaire est une mesure saine et pragmatique. Ils apprécient la responsabilisation de chaque Etat qui s’engage à surveiller les équilibres budgétaires.
Les anti STCG, essentiellement des économistes dont par exemple Patrick Artus ou Christian Stoffaës, économistes membre du Cercle des Economistes, alertent sur les efforts insoutenables que devront faire les Etats signataires pour retrouver l’équilibre budgétaire. Les ménages et entreprises seront les premières victimes de la rigueur budgétaire. Une baisse de la consommation s’accompagnera mécaniquement d’un ralentissement de la croissance économique, déjà faible, et donc d’une baisse des rentrées budgétaires. Quant au partenariat entre Etats, Christian Stoffaës y voit plutôt une « surveillance multilatérale sourcilleuse ».
Comment ce traité va s’appliquer en France ?
Un projet de loi de ratification du TSCG : L’adoption de cette loi confirmera l’engagement de la France à appliquer le traité. Un projet de loi organique relatif au pilotage des finances publiques définit les modalités selon lesquelles le TSCG sera effectivement appliqué en France. En particulier :
- L’objectif d’équilibre budgétaire des comptes publics et sociaux sera défini sur 3 ans : Programmation triennale. Les crédits budgétaires et les dépenses sociales seront encadrés. La programmation des dépenses devra être précise.
- Un haut conseil des finances publiquessera constitué. Ce sera un organisme indépendant, présidé par le premier président de la cour des Comptes. Cette institution veillera à ce que les engagements budgétaires soient effectivement respectés. Dans le cas contraire, cet organisme devra alerter publiquement le gouvernement et le Parlement afin de déclencher des mécanismes de correction.
Ces deux projets de loi sont passés en conseil des ministres le 19 septembre 2012. Ils seront discutés à l’Assemblée nationale à partir du 2 octobre.
TSCG et Pacte pour la Croissance
Afin de soutenir les pays qui ont ratifié le TSCG, et uniquement ces pays (condition nécessaire), le traité a institué le Mécanisme Européen de Stabilité. Par ce MES, les pays en difficulté pourront bénéficier d’une assistance financière. Pour le moment le MES (mot dico) dispose de 120 milliards d’euro répartis de la façon suivante : 55 milliards de fonds structurels à disposition des régions en difficulté, 60 milliards de prêts accordés par la BEI (Banque européenne d’investissement) et 5 milliards de Project bonds.
Liens externes
- Article précédent : Le plan du 21 juillet 2011
- Article suivant : Les accords européens pour sortir de la zone euro (2001-2012)
- Retour au sommaire