Transition écologique : une planification pour accélérer la décarbonation des sites industriels

Réunissant les 50 sites industriels les plus émetteurs, le Président de la République a fixé le 8 novembre 2022 un objectif de division par deux des émissions industrielles françaises au cours de la prochaine décennie. Pour y parvenir, des moyens sans précédent vont être consacrés en faveur de la décarbonation de l’industrie. Retour sur les enjeux et les objectifs auxquels l’industrie française doit faire face.

©BercyPhoto Sebastien Muylaert

Atteindre la neutralité carbone pour le continent européen en 2050 : c’est l’objectif ambitieux que se sont donnés la France et ses partenaires européens pour lutter contre le réchauffement climatique. 

Cet objectif est par ailleurs inscrit dans la législation française par la loi relative à l’énergie et au climat du 8 novembre 2019 et dans la législation communautaire par le paquet « Fit For 55 » négocié par la France lors de sa présidence de l’Union Européenne en 2022.

Faire de la France un pays pionnier de l’industrie décarbonée 

Quels défis pour l’industrie française ?

20 % des émissions de gaz à effet de serre. C’est ce que génère aujourd’hui l’industrie française.

Pour le secteur industriel, l’objectif de neutralité carbone représente dès lors un défi de taille, les technologies et énergies fossiles ayant structuré son histoire depuis la première révolution industrielle. L’atteinte de cet objectif nécessite ainsi de modifier en trois décennies des modes de production et des procédés datant parfois de plus de 200 ans. 

part totale émission GES

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20
%

Part des émissions totales de gaz à effet de serre en France générée par l’industrie

GES 50 sites industriels

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12
%

Part des émissions nationales totales de gaz à effet de serre issue des 50 sites industriels les plus émetteurs

émissions industrielles

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55
%

Part des émissions industrielles émise par les 50 sites industriels

La décarbonation de l’industrie représente par ailleurs une opportunité économique et stratégique pour la France, comme l’explique Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie :

Notre ambition avec Bruno Le Maire est que la France devienne demain, grâce aux zones industrielles bas carbone, à son mix électrique décarboné, et à son excellence dans les technologies de décarbonation, la destination la plus attractive au monde pour les industries décarbonées.

La décarbonation de l’industrie apparaît ainsi comme un levier de réindustrialisation.

 Quels objectifs ?

La décarbonation de l’industrie doit répondre à plusieurs objectifs, qu’ils soient environnementaux, économiques ou encore technologiques :

  • contribuer à l’atteinte d’objectifs environnementaux internationaux et nationaux : la neutralité carbone à l’horizon 2050, et la baisse de 55 % des gaz à effet de serre d’ici 2030,
  • préparer les technologies de rupture de décarbonation de demain, indispensables à cette transition écologique,
  • assurer l’émergence d’une offre française compétitive de solutions de décarbonation de l’industrie provenant de start-ups, PME, ETI, ou encore grands groupes, pour faire des entreprises françaises des leaders dans le domaine,
  • développer des actions d’envergure pour démontrer la faisabilité de la décarbonation des zones industrielles en favorisant les synergies à l’échelle des territoires, permettant une « réindustrialisation verte »,
  • créer et renforcer l’offre de formation répondant aux enjeux de la décarbonation de l’industrie, avec de nouveaux emplois créés.

Quels sont les moyens mis en place ? 

Une stratégie nationale et des moyens financiers inédits

Adoptée pour la première fois en 2015 et révisée en 2019, la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) est la feuille de route de la France pour conduire la politique d’atténuation du changement climatique.

Le soutien public au financement des projets de décarbonation de l’industrie constitue un volet majeur de la stratégie du plan France 2030, qu’il s’agisse d’encourager l’innovation et le développement d’une offre française de solutions jusqu’à l’industrialisation ou de massifier le déploiement de ces solutions afin de concrétiser le verdissement de l’industrie.

Avec France 2030, l'État mobilise 54 milliards d'euros pour transformer durablement des secteurs clefs de l’économie française (énergie, hydrogène, automobile, aéronautique ou encore espace) par l’innovation technologique et l’industrialisation, et positionner la France non pas seulement en acteur, mais bien en leader du monde de demain.

En particulier, pour décarboner les sites industriels français et soutenir le
développement et le déploiement des technologies, l’État investit massivement :

enveloppe globale

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5.6
milliards d’euros

Investissement en faveur de la décarbonation de l’industrie

aides directes

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5
milliards d’euros

Investissement consacré à des aides directes au déploiement de solutions de décarbonation des sites industriels

investissement technologies

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610
millions d'euros

Investissement consacré à l’innovation et au développement des technologies pour une économie bas carbone

Quatre technologies de rupture pour décarboner l'industrie

Quatre technologies de rupture nécessaires à la décarbonation ont été identifiées dans le cadre de France 2030.

Aujourd’hui, les acteurs engagés dans la décarbonation de leur industrie font appel à plusieurs technologies pour atteindre les objectifs fixés :

Hydrogène bas carbone

L’hydrogène est dit « décarboné » ou « vert » quand ni sa production ni son utilisation n’émettent de CO2.

L’hydrogène décarboné est une des solutions identifiées pour décarboner massivement des industries fortement émettrices, en agissant sur la diminution des émissions de CO2.

L’hydrogène décarboné est gaz produit principalement à partir d’eau et d’électricité, qui constitue un substitut aux énergies fossiles pour les procédés chimiques ou sidérurgiques.

Pour en savoir plus : Une stratégie nationale dédiée pour le développement de l’hydrogène décarboné en France

Biomasse

La biomasse définit l'ensemble des matières organiques pouvant devenir des sources d'énergie.

Cette biomasse provient de la forêt, de l’agriculture (cultures dédiées, résidus de culture, cultures intermédiaires et effluents d’élevage), de déchets (déchets verts, biodéchets des ménages, déchets de la restauration, de la distribution, des industries agroalimentaires et de la pêche, déchets de la filière bois, boues de stations d’épuration, etc.).

La biomasse est mobilisée pour produire de la chaleur haute-température, principalement dans la chimie, l’agroalimentaire et les matériaux de construction, ou encore pour remplacer les composés de base pétrochimiques par de la chimie biosourcée.

Électrification des procédés

L’électrification des procédés, qui concerne l’ensemble des secteurs industriels, vise le remplacement des moteurs et des chaudières à base d’énergie fossiles pour les remplacer par des composants électriques. L’électrification recouvre des projets très divers : électrification de la chaleur avec l’installation de fours électriques, électrification des turbines et chaudières des vapocraqueurs, importantes consommatrices d’électricité.

Elle fait appel à de l'électricité décarbonée, c’est-à-dire de l’électricité issue des énergies renouvelables (éolien, solaire et hydraulique) ou du nucléaire.

Capture, stockage et utilisation de carbone

La capture et le stockage de carbone permettent de retenir du CO2 émis par les procédés industriels et de le stocker dans des formations géologiques profondes.

Ce procédé empêche que le carbone ne soit libéré dans l’atmosphère et ne contribue au réchauffement climatique. Il est utilisé pour les émissions de CO2 pour lesquelles il n’existe pas à ce jour d’alternative technologique.

Il s’agit d’un levier de transition mobilisé pour l’ensemble des secteurs particulièrement dans la pétrochimie et le ciment, mais également dans la métallurgie.

Pour y parvenir, le Gouvernement s’engage à investir massivement dans l’innovation et le déploiement de ces solutions dédiées.

Les premières actions et réalisations

Une concertation avec les industriels : des contrats de transition écologique pour les filières et les sites les plus émetteurs

Chaque site industriel a construit avec l’État une trajectoire de décarbonation aboutissant à la signature d’un contrat de transition écologique, qui précise les objectifs de baisse d’émissions par site ou entreprise et les leviers pour les atteindre.

32 contrats pour 50 sites totalisant un engagement de baisse d’émissions de 45 % d’ici 2030, ont été signés par Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie et les présidents des entreprises concernées, le 22 novembre dernier.

Par ailleurs, 7 feuilles de route correspondant aux travaux de 4 Comités Stratégiques de Filière ont été remises. Ces feuilles de routes permettent d’identifier, au-delà de la décarbonation des 50 sites les plus émetteurs, les leviers de décarbonation de l’ensemble de l’industrie et les besoins associés.

En vidéo : Décarbonation, les entreprises s'engagent

Plusieurs vidéos sont proposées pour découvrir comment les industries s'engagent dans la décarbonation. « Transition écologique | Vers une décarbonation de l'industrie », une playlist à retrouver sur la chaîne Youtube du ministère :

Les premiers projets soutenus et des lauréats annoncés

Appel à projets Zones Industrielles Bas Carbone

L’appel à projets « ZIBAC »  a pour objectif d’accélérer fortement la décarbonation à l’échelle d’une grande zone industrielle, en favorisant les synergies et les coopérations d’acteurs. À travers ce programme, l’État s’engage pour accompagner les territoires dans leur transformation écologique et énergétique afin de gagner en compétitivité et en attractivité pour soutenir la reprise de l’activité économique.

Ces zones ont vocation à constituer des territoires pionniers de la décarbonation de l’industrie française ainsi que des territoires industriels « clé en main » pour les entreprises désireuses d’investir dans la transition écologique, afin d’en faire un levier majeur de réindustrialisation verte.

Le 16 janvier dernier, les deux premiers lauréats de l’appel à projets « Zones Industrielles Bas Carbone » (ZIBAC) ont été annoncés. Il s’agit des projets des bassins industriels de Dunkerque et de Fos-sur-Mer. Annoncé le 28 avril, la zone industrialo-portuaire du Havre est la troisième lauréate de cet appel à projets ZIBAC. Le 26 juillet, Loire Estuaire est devenu le 4e lauréat de l’appel à projets « Zones industrielles Bas Carbone ».

À titre d’exemple, le projet DKarbonation, qui couvre la zone industrialo-portuaire de Dunkerque, implique 30 partenaires publics et privés. 13,6 millions d’euros d’aides seront alloués pour réaliser des études d’ingénierie et de faisabilité de décarbonation de la zone. 

Appel à projets  « Industrie Zéro Fossile » : 55 lauréats annoncés 

Suite au conflit ukrainien, le Gouvernement a lancé en avril 2022 un appel à projets « Industrie Zéro Fossile » (IZF) dans le cadre du plan de résilience économique et sociale, et vise le déploiement rapide de projets permettant des réductions de gaz à effets de serre par la réduction du recours aux énergies fossiles. Les 55 lauréats ont été annoncés le 5 avril dernier à l'occasion d'un point d'étape de la planification écologique.

De nouvelles aides à la décarbonation de l’industrie annoncées 

Par ailleurs, à l'occasion de cet événement, des à projets ont été annoncés : ils sont à consulter sur le site de l'Ademe.

De nouveaux appels d’offres de décarbonation profonde des sites les plus émetteurs seront lancés au premier semestre 2024.