NOR : ECOC0300364S
Le Conseil de
la concurrence (section III A),
Vu la lettre enregistrée le
6 août 1997 sous le numéro F 976, par
laquelle le ministre de léconomie, des finances
et de lindustrie a saisi le Conseil de la concurrence
de pratiques mises en uvre par les sociétés
Noblet et Texas Instruments France dans le secteur des calculatrices
à usage scolaire ;
Vu le livre IV du code de commerce
relatif à la liberté des prix et de la concurrence,
le décret no 86-1309 du 29 décembre
1986 modifié fixant les conditions dapplication
de lordonnance no 86-1243 du 1er décembre
1986 ainsi que le décret no 2002-689
du 30 avril 2002 fixant les conditions dapplication
du livre IV du code de commerce ;
Vu les observations présentées
par le commissaire du Gouvernement, par les sociétés
Noblet Distribution, Texas Instruments France, Carrefour France,
Casino Guichard Perrachon, Sapac magasins populaires, Majuscule
et distributeurs associés ;
Vu les procès-verbaux des 5 octobre
2001 et 11 janvier 2002, par lesquels le rapporteur général
du Conseil de la concurrence sest engagé à
proposer au Conseil de la concurrence daccorder à
la société Texas Instruments France et à
la société Distributeurs associés le
bénéfice des dispositions nouvelles de larticle
L. 464-2 (II) du code de commerce et proposer que
la sanction pécuniaire, le cas échéant
encourue, soit réduite de 50 % ;
Vu les autres pièces du dossier ;
La rapporteure, la rapporteure générale
adjointe, le commissaire du Gouvernement et les représentants
des sociétés Noblet Distribution, Texas Instruments
France, Carrefour France, Casino Guichard-Perrachon, Sapac
magasins populaires, Majuscule et distributeurs associés
entendus lors de la séance du 27 mai 2003 ;
la société Plein Ciel Diffusion ayant été
régulièrement convoquée,
Adopte la décision suivante :
I. - CONSTATATIONS
A. - LE
SECTEUR DES CALCULATRICES
SCIENTIFIQUES
1. Les produits
1.
Parmi les produits présentant des fonctions de calcul,
il faut distinguer les calculatrices dites « scientifiques »
ou à usage scolaire des autres types de calculatrices.
2. Les calculatrices classées
sous lappellation « calculatrices scientifiques »
et/ou « calculatrices à usage scolaire »
présentent des fonctionnalités spécifiques
qui les rendent particulièrement adaptées à
une utilisation dans le cadre des enseignements de mathématiques
et de physique des collèges et lycées ainsi
que pendant les études supérieures.
3. En effet, sous la dénomination
générique de « calculatrices scientifiques »,
sont regroupées les calculatrices qui présentent,
outre les fonctions dites « quatre opérations
de base », des caractéristiques que ne possèdent
pas les autres produits présentant des fonctions de
calcul (« priorités mathématiques »
ou « priorités opératoires »,
fonctions mathématiques, trigonométriques, statistiques).
4. Ces fonctionnalités plus
ou moins complexes permettent de distinguer trois grandes
catégories au sein des calculatrices scientifiques :
- les calculatrices
scientifiques « simples », non programmables,
qui comportent, outre les quatre opérations arithmétiques
de base, tout ou partie des fonctions de calcul de racines
et exposants, de logarithmes et exponentielles, ainsi que
les fonctions trigonométriques et statistiques.
Appartiennent
notamment à cette catégorie les modèles :
Casio FX 92, Texas Instruments TI 30, Galaxy 9,
Galaxy 40, Sharp EL 531 ;
- les calculatrices
programmables non graphiques comportant, en sus des fonctions
précédentes, une mémoire de programmation
permettant de mémoriser les étapes successives
des processus de calcul.
Appartiennent
notamment à cette catégorie les modèles :
Casio FX 180 P plus, Texas Instruments Galaxy 67,
Sharp EL 5020, Hewlett-Packard 20 S et 32 S II ;
- les calculatrices
programmables graphiques autorisant le tracé de courbes
et histogrammes de fonctions sur un écran intégré.
Les
plus performantes disposent dune fonction permettant
le calcul formel, cest-à-dire quelles fournissent
un résultat comportant des lettres.
Appartiennent
à cette catégorie les modèles :
Casio
FX 6900, FX 7900, FX 9900 et leurs successeurs
FX 6910, FX 9930 et X 9960, Texas Instruments
TI 80, TI 81, TI 82, TI 83, TI 85
et TI 92,
Sharp
EL 9200 et EL 9300 et Hewlett-Packard 38 G,
48 G et 48 GX.
5. Le montant en valeur
des ventes de la totalité des produits présentant
des fonctions de calcul sélevait en 1996 à
11 429 millions deuros (74 970 millions
de francs) pour 4 316 400 unités.
6. Sur lensemble
des produits présentant des fonctions de calcul, les
calculatrices dites « scientifiques »
ou à usage scolaire représentent, en 1995, plus
de 50 % en valeur.
2. Lenvironnement
juridique
et son incidence sur le rôle des enseignants
7. Dans
de nombreux textes relatifs aux programmes de mathématiques
des classes de lenseignement secondaire et concernant
le déroulement des concours et examens, il existe des
recommandations expresses en matière dusage des
calculatrices.
Les textes relatifs
aux concours et examens
8. Depuis
1979, lemploi des calculatrices électroniques
est autorisé dans les examens et concours scolaires
organisés par le ministère de léducation
nationale et dans les concours de recrutement des personnels
enseignants.
9. La circulaire no 86-228
du 28 juillet 1986 prévoit que les matériels
autorisés sont toutes les calculatrices de poche, y
compris les calculatrices programmables et alphanumériques,
à condition que leur fonctionnement soit autonome et
quil ne soit pas fait usage dimprimantes.
Les textes relatifs aux programmes
10. Dune
manière générale, les textes, dont la
circulaire du 28 juillet 1986 précitée,
exposent que la maîtrise de lusage des calculatrices
est un objectif important pour la formation de lensemble
des élèves, car elle constitue un outil efficace
dans le cadre de leurs études et dans la vie professionnelle
économique et sociale. Ces textes disposent, par conséquent,
que lemploi des calculatrices doit être largement
autorisé.
11. Aussi, les instructions
ministérielles relatives aux programmes précisent
que le travail effectué doit, notamment, permettre
à lélève dutiliser rationnellement
les calculatrices de poche.
12. Par exemple, larrêté
du 14 novembre 1985 fixant les programmes des classes
des collèges prévoit, pour les élèves
de 6e et de 5e, lemploi
dune calculatrice parmi les travaux numériques
en précisant que le travail effectué durant
lannée scolaire doit permettre à lélève
« dacquérir définitivement
des techniques opératoires et conjointement, dutiliser
avec sûreté des calculatrices de poche ».
13. Larrêté
du 5 août 1985, modifiant les programmes de mathématiques
des classes de 1re, relève
que les problèmes et les méthodes numériques
doivent tenir une large place et que « lemploi
systématique des calculatrices vient renforcer les
possibilités détude de ces questions,
aussi bien pour effectuer des calculs que pour vérifier
des résultats ou alimenter le travail de recherche.
Lemploi de calculatrices programmables et, à
loccasion, celui de moyens informatiques, sont souhaitables ».
Limpact de
ces textes sur les enseignants
14. Lors
de son audition, le 19 janvier 2001, le président
de lAssociation des professeurs de mathématiques
de lenseignement public (« APMEP »)
a déclaré :
(...) Léducation nationale
a aussi prévu que les professeurs de mathématiques
apprennent aux élèves à utiliser les
calculatrices correspondant aux programmes.
Du fait de ces exigences légales,
les professeurs de mathématiques sont amenés
à inciter les élèves à acquérir
une calculatrice adaptée à leur niveau et donc,
à les conseiller sur le modèle à choisir.
En début dannée
ou dès juin, dans certains établissements, une
réflexion est menée et il est décidé
de conseiller une gamme de calculatrices souvent limitée
à deux modèles, parfois un seul.
Les éléments pris en
compte pour arrêter ce choix sont ladéquation
des modèles au programme et la facilité dutilisation
(taille de lécran, accès à certaines
fonctions...) et le prix.
Sagissant des calculatrices
quil est décidé de conseiller aux élèves,
les situations peuvent être très diverses :
le plus souvent, un modèle Texas et un modèle
Casio sont conseillés au niveau du lycée (1re,
2e, terminale). Parfois, une seule marque peut
être conseillée.
Sagissant du collège,
cest surtout à partir de la 4e
que le conseil du professeur va prendre de limportance
dans le choix.
Bien sûr, le choix final est
laissé aux élèves (...).
Toutefois, la multiplicité
des calculatrices rend le travail de lenseignement plus
difficile. Aussi, la tendance naturelle sera de veiller à
ce quil existe une certaine unité dans la classe
(...).
On a constaté notamment quaprès
avoir lancé certaines calculatrices et constaté
quelles correspondaient aux besoins des professeurs
et des élèves, les producteurs décidaient
de supprimer les modèles les moins chers pour en fait
imposer lachat dun modèle à peine
plus performant, mais beaucoup plus cher.
Jusquà la rentrée
de septembre 2000, alors que la TI 80 et la Graph 25
(Casio) étaient commercialisées en général
à 299 F, subitement et concomitamment, on constate
que :
- TI supprime la
TI 80 pour ne conserver que la TI 82, modèle
à peine plus performant, et vendu à environ
350 F ;
- le prix de la Graph 25
(Casio) est alors porté à environ 350 F.
Certains adhérents ont vu,
dans cette identité de prix, le signe dune entente
entre les deux principaux producteurs. Dautres, ny
ont vu que leffet du marché (...). »
15. Par courrier du 1er décembre 2000,
le responsable de la « commission lycée »
de lAPMEP a expliqué, sagissant du rôle
des professeurs dans le choix dune calculatrice :
« En début dannée,
nous sommes obligés maintenant dexiger de nos
élèves dêtre possesseurs dune
calculatrice (graphique au lycée) et donc de les guider
dans leurs choix...
Ce choix a été compliqué
lors de la rentrée scolaire de septembre 2000 par la
disparition chez TI du modèle le moins onéreux
de leur gamme de calculatrices graphiques, modèle que
beaucoup de professeurs recommandaient à leurs élèves :
la TI 80 (280 F en supermarché) a été
enlevée du marché et remplacée par la
TI 82 dans une version certes améliorée.
Le coût minimum dune calculatrice graphique est,
donc, de 350 F environ cette année aussi bien
chez Casio que chez TI...
Cest le plus souvent le professeur
qui prend les devants, vu lobligation qui nous est faite
dans les programmes, en conseillant les élèves
pour éviter, autant que faire se peut, des achats trop
onéreux ou des achats de calculatrices non adaptées
pour le niveau denseignement concerné (par exemple,
posséder une calculatrice permettant du calcul formel
nest pas nécessaire au lycée, mais on
ne peut empêcher les gens qui en ont les moyens de le
faire).
Il est effectivement fréquent
pour ne pas dire général quen début
dannée, quand ce nest pas dès le
mois de juin selon les établissements, les professeurs
indiquent les modèles qui leur semblent répondre
le mieux aux exigences du programme en rejetant, a priori
il est vrai, des calculatrices jugées demploi
trop difficile pour nos élèves (genre HP du
fait de son système de notation polonaise inversée). »
3. Le produit
du point de vue de loffre
16. Il
ressort des guides établis par les offreurs à
destination des demandeurs que les calculatrices scientifiques
ne sont pas substituables aux autres produits présentant
des fonctions de calcul, notamment les calculatrices « quatre
opérations ».
17. La société
Noblet, par exemple, éditait en 1993 un guide reprenant
sa gamme de calculatrices scientifiques et présentant
ce type de calculatrices comme le seul répondant aux
besoins induits par les programmes officiels établis
par léducation nationale.
18. A cet égard,
MM. Baratte et Ocana de la société Noblet,
lors de leur audition du 28 juin 1994, ont déclaré
(cf. cotes 501 à 514 du rapport) : « En
France, la calculatrice scientifique est obligatoire au collège,
la calculatrice programmable est obligatoire au lycée,
puisque les textes officiels datant de 1985 imposent que lélève
connaisse lutilisation dune calculatrice. »
19. Cette spécificité
des calculatrices scientifiques, par rapport aux autres produits
présentant des fonctions de calcul, est reprise par
les distributeurs, et notamment par un dossier intitulé
« Sélection calculatrices et assistants
personnels 1996 » édité par la FNAC
et figurant en cote 407 du rapport.
4. Les données
chiffrées
Part
des calculatrices « scolaires » ou « scientifiques »
sur lensemble des produits présentant des fonctions
de calcul.
20. Les résultats
du panel Nielsen relatif aux ventes en volume et en valeur
sont repris dans le tableau no 1 ci-après :
Tableau no 1
VOLUMES EN 1 000 UNITÉS
(valeurs en
millions de francs) |
DE FÉVRIER 1992
À JANVIER 1993 |
DE FÉVRIER 1993
À JANVIER 1994 |
DE FÉVRIER 1994
À JANVIER 1995 |
DE FÉVRIER 1995
À JANVIER 1996 |
|
Volumes |
Valeurs |
Volumes |
Valeurs |
Volumes |
Valeurs |
Volumes |
Valeurs |
Scientifiques simples |
794 |
60,7 |
885 |
69,8 |
827,59 |
74,71 |
852,93 |
75,81 |
Scientifiques program. |
268 |
47,9 |
220 |
39,9 |
175,41 |
33,93 |
153,57 |
28,01 |
Scientifiques graphiques |
386 |
243,7 |
417 |
267,4 |
419,36 |
259,69 |
456,49 |
260,81 |
Total scol. ou scientifiques |
1 448 |
352,3 |
1 522 |
377,1 |
1 422,36 |
368,33 |
1 462,99 |
364,63 |
Total calc. + pocket s. |
3 331 |
696 |
3 728 |
719 |
4 060,3 |
721,6 |
4 316,4 |
749,7 |
Evolution du prix moyen des calculatrices.
21. Le tableau no 2
ci-après fait apparaître, sur la base des chiffres
du tableau no 1 (rapport de la valeur par
le volume) :
- lévolution
du prix moyen des machines des différents segments
des calculatrices scolaires ;
- lévolution
du prix moyen de lensemble des calculatrices scolaires ;
- lévolution
de tous les produits présentant des fonctions de calcul
(4 opérations, imprimantes, financières, data-banks
[organiseurs, traducteurs], etc.).
Tableau no 2
|
DE FÉVRIER 1992
À JANVIER 1993 (1) |
DE FÉVRIER 1993
À JANVIER 1994 (2) |
DE FÉVRIER 1994
À JANVIER 1995 (3) |
DE FÉVRIER 1995
À JANVIER 1996 (4) |
ÉVOLUTION
(4) - (1)/(1) |
Scientifiques simples
(A) |
76,44 F |
78,87 F |
90,27 F |
88,88 F |
+ 16,3 % |
Scientifiques programmables
(B) |
178,73 F |
181,36 F |
193,43 F |
182,39 F |
+ 2 % |
Scientifiques graphiques
(C) |
631,34 F |
641,24 F |
619,25 F |
571,34 F |
- 9,5 % |
« Scolaires
» ou « scientifiques »
(D = A + B + C) |
243,30 F |
252,75 F |
258,95 F |
249,24 F |
+ 2,4 % |
Toutes calculatrices
(E) |
208,94 F |
192,86 F |
177,72 F |
173,68 F |
- 16,9 % |
Non « scolaires
» ou « scientifiques »
(F = E - D) |
182,52 F |
152,90 F |
133,92 F |
134,95 F |
- 26,1 % |
22. Lanalyse du prix
moyen des calculatrices scolaires de 1992 à 1995, tel
quil ressort des données du panel Nielsen précité,
révèle :
- une progression
assez sensible du prix moyen des modèles scientifiques
simples (+ 16,3 %) ;
- une faible progression
du prix moyen des modèles scientifiques programmables
(+ 2 %, sur un segment en forte baisse) ;
- et une baisse du
prix moyen des modèles scientifiques graphiques (- 9,5 %),
particulièrement sensible en 1995.
23. Globalement, on constate
que le prix moyen des modèles « scolaires »
ou « scientifiques » a connu une légère
hausse (+ 2,4 %) tandis que les volumes ont progressé
(le volume des scientifiques graphiques est passé,
en effet, de 26 % à 31 % de lensemble).
24. Parallèlement,
sur la même période, le prix moyen des autres
calculatrices (4 opérations, imprimantes, organiseurs,
etc., hors scolaires) a diminué de 26,1 % ;
de même, les machines de bureau ont connu, selon lindice
des prix à la consommation, une baisse de 23,5 %
entre 1992 et 1995.
5. Loffre
et la position des différents offreurs
25. Le
marché des calculatrices « scientifiques »
est caractérisé par lexistence dun
duopole de fait, réunissant les entreprises Noblet
distribution (importateur des produits Casio) et Texas Instruments
qui représentent, pour les années 1994 et 1995,
plus de 89 % des ventes en valeur et presque 92 %
en volume.
26. Par famille de produits,
cette part de marché atteint 95 % sur le segment
des scientifiques simples, 92 % sur le segment des scientifiques
programmables et 85 % sur le segment des scientifiques
graphiques.
Tableau no 3
VOLUMES-VALEUR
(en %) |
SCIENTIFIQUES
simples |
SCIENTIFIQUES
programmables |
SCIENTIFIQUES
graphiques |
TOTAL SCOLAIRES |
|
1994 |
1995 |
1994 |
1995 |
1994 |
1995 |
1994 |
1995 |
Casio : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Volumes
Valeur |
58,4
57,7 |
53,2
54,8 |
78,6
72,8 |
81,6
76,2 |
66,5
57,3 |
60,2
52,8 |
63,3
58,8 |
57,5
55,0 |
Texas Instruments : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Volumes
Valeur |
39,2
41,2 |
38,7
40,8 |
17,7
19,9 |
15,0
16,7 |
25,4
27,7 |
32,7
34,0 |
32,5
29,7 |
34,3
34,1 |
Hewlett Packard : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Volumes
Valeur |
*
0,1 |
*
0,1 |
3,0
6,5 |
2,7
6,0 |
5,5
12,7 |
5,6
11,8 |
2,0
9,5 |
2,0
8,9 |
Sharp : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Volumes
Valeur |
0,6
0,5 |
0,8
0,8 |
0,5
0,7 |
0,6
1,0 |
2,6
2,2 |
1,6
1,4 |
1,2
1,7 |
1,0
1,2 |
Autres : |
|
|
|
|
|
|
|
|
Volumes
Valeur |
1,8
0,6 |
7,2
3,3 |
0,2
0,1 |
0,1
0,1 |
*
* |
*
* |
1,0
0,3 |
5,2
0,8 |
La société Noblet
27. La société
Noblet, créée en 1935, a pour activité
depuis lorigine la distribution exclusive de marques
internationales darticles de papeterie et de fourniture
de bureau (Staedtler, Ibico, Leitz, Durable, Dahle...). Parmi
ces marques, figurent depuis 1975 les produits Casio
suivants : calculatrices, organisers, ordinateurs de
poche et étiqueteuses électroniques.
28. Cette société
est liée à la société Casio Computer
Company, établie à Tokyo, par un contrat interdisant
à la société Noblet de commercialiser
dautres marques de calculatrices et lui assurant en
contrepartie lexclusivité de la distribution
des calculatrices Casio sur le territoire français.
29. Le chiffre daffaires
et le résultat net de la société Noblet
se sont établis pour les exercices 1993 à 1996
aux niveaux suivants :
A N N É E S |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
CA total SA Noblet (KF) |
547 527 |
610 962 |
621 438 |
660 373 |
Résultats nets SA Noblet (KF) |
24 097 |
23 859 |
25 688 |
23 146 |
30. De 1993
à 1996, le chiffre daffaires de la SA Noblet,
réalisé avec la marque Casio, a évolué
comme suit :
A N N É E S |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
CA total produits Casio (KF) |
299 810 |
300 251 |
277 792 |
255 610 |
% Casio/CA total Noblet |
54,76 % |
49,14 % |
44,70 % |
38,71 % |
31. Les calculatrices
scientifiques représentent plus de 60 % du chiffre
daffaires réalisé par la société
Noblet avec les produits Casio. Environ 80 % du chiffre
daffaires des calculatrices scientifiques est réalisé
pendant la période de rentrée des classes.
A N N É E S |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
CA total scientifiques (KF) |
192 782 |
198 851 |
189 683 |
175 789 |
Pourcentage scientifiques/CA total
Casio |
64,30 % |
66,23 % |
68,26 % |
68,77 % |
dont rentrée scolaire sur
07/08/09 (KF) |
158 721 |
160 285 |
144 423 |
142 867 |
% rentrée/total scientifiques |
82,33 % |
80,61 % |
76,14 % |
81,27 % |
32. Sagissant
de la marge réalisée par la société
Noblet sur les calculatrices « scientifiques »
Casio, différentes pièces du dossier font état
de marges nettes variant de 30 à 38,5 % :
33. Dans une note (en cote 450
du rapport) saisie au siège de la société
Noblet, datée du 31 janvier 1995, M. Ocana,
directeur marketing de la société Noblet, écrit
à M. J.P. Noblet, président du conseil dadministration
de la société Noblet :
« (...)
Prix publics |
* |
FX 92 |
79 89 |
|
* |
FX 180 P |
139 159 |
|
* |
FX 6800 |
219 219 |
|
* |
FX 690 |
299 299 |
|
* |
FX 7900 |
539 549 |
|
* |
CF 9900 |
749 749 |
|
|
|
(...) |
Le nouveau calcul
prévisionnel donne les chiffres suivants :
CA Net Net 144 913 000 au
lieu de 138 890 000.
Marge nette 43 714 000 au
lieu de 37 691 000.
Le % de marge passe à 30,2 %.
Ceci permettrait, comme vous lavez
souligné, de donner un peu plus de marges à
nos revendeurs. »
34. Dans une note à
M. Noblet datée du 22 mars 1996 (cotée 451
à 453 du rapport) et relative au prix de la FX 92
Collège III pour la rentrée des classes 1996,
M. Ocana explique : « (...) Si nous
mettons la FX 92 Collège III à 79 F
public, nous travaillons avec une marge de 38,5 % (...). »
35. La répartition
par circuit de distribution du chiffre daffaires réalisé
par la société Noblet avec les calculatrices
scolaires Casio est la suivante :
Hypermarchés |
60 %. |
Spécialistes |
10 %. |
Groupements/grossistes |
18 %. |
Détaillants (ventes directes) |
12 %. |
36. Les trois
principaux clients de la société Noblet étaient,
pour lannée 1995/1996, la société
Carrefour (20,712 MF HT), la société
Leclerc (18,083 MF HT) et la société
Auchan (18,110 MF HT).
La société Texas Instruments
France
37. La société
Texas Instruments France, filiale de la société
Texas Instruments Inc., a été créée
en 1960. Elle a pour activité principale la revente
de produits semi-conducteurs, la revente de calculatrices
ne représentant que 2,3 % de son chiffre daffaires
total qui sélève, pour lexercice
fiscal 2000, à 8,155 milliards de francs.
38. Les calculatrices vendues
par la société Texas Instruments France, dans
le cadre du contrat de commissionnaire liant cette société
à sa maison mère, Texas Instruments Inc., sont
importées en Europe, via le centre de distribution
européen de Texas Instruments situé aux Pays-Bas.
39. Les chiffres daffaires
et les résultats nets communiqués par la société
Texas Instruments France, pour les années 1993
à 1996 sétablissent comme suit :
|
1993
(en FF) |
1994
(en FF) |
1995
(en FF) |
1996
(en FF) |
CA total Texas Instruments France |
2 257 300 000 |
2 094 200 000 |
2 326 319 201 |
2 904 786 785 |
Résultat net |
67 300 000 |
107 400 000 |
47 709 721 |
68 227 635 |
CA calculatrices (scientifiques et
autres) |
118 259 760 |
126 608 802 |
160 741 687 |
175 950 000 |
CA calculatrices « scientifiques
» |
90 315 929 |
98 978 680 |
116 600 467 |
145 350 000 |
Part du CA calculatrices «
scientifiques » réalisé lors de
la rentrée des classes |
Non communiqué |
Non communiqué |
81 246 590
soit 69,6 % |
102 000 000
soit 70 % |
40. La répartition
des ventes par circuit est la suivante :
|
TI
1994 |
TI
1995 |
MARCHÉ
1995 |
Grande distribution alimentaire |
48 % |
52 % |
48 % |
Spécialistes |
19 % |
20 % |
29 % |
Papetiers |
19 % |
15 % |
19 % |
VPC |
12 % |
10 % |
4 % |
Ventes directes |
2 % |
3 % |
|
41. Le graphe
et le tableau, cotés 463 à 466 du
rapport et saisis au siège de la société
Noblet, montrent que la rentabilité pour la société
Texas Instruments France des différents circuits de
distribution, très homogènes en 1993, excepté
pour la vente par correspondance, sest différenciée
en 1995, les hypers (49 %) et les grossistes (48 %)
devançant nettement les spécialistes (44 %)
et la VPC (45 %), ceci dans le contexte dune profitabilité
globale (taux de marge nette) passée en 2 ans
de 37 à 45 %.
42. Le tableau ci-après,
extrait des pièces saisies au siège de la société
Texas Instruments France, reprend pour les années 1993
et 1995, les marges nettes par catégorie de distributeurs
(cf. cote 466 du rapport).
NET GPM (1) |
1993 |
1995 |
Hypermarchés |
41 % |
49 % |
Multispécialistes (FNAC, Darty,
Boulanger, Interdiscount) |
41 % |
44 % |
Groupements (Plein Ciel diffusion,
Majuscule) |
40 % |
51 % |
VPC (vente par correspondance) |
35 % |
45 % |
Grossistes (Spicers, DA) |
40 % |
48 % |
Galeries Lafayette |
42 % |
53 % |
Total France |
37 % |
45 %
|
(1) Net GPM (Gross Margin Profit) :
marge après déduction des remises de
fin dannée. |
43. Les quatre
principaux clients de la société Noblet étaient,
en 1995 : Carrefour (21,5 MF), la FNAC (15,7 MF),
Auchan (12,8 MF), Leclerc (11,1 MF).
La société Hewlett-Packard France
44. La société
Hewlett-Packard France, créée en 1980, est une
filiale de la société américaine Hewlett-Packard
Corporate. La part des calculatrices est marginale dans son
chiffre daffaires, puisquelle représente,
selon les déclarations du 19 septembre 1996
de Mlle Anne-Catherine Ohlmann, chef de produit calculatrices
pour lEurope (cotes 474 à 478 du rapport), 20 millions
de francs environ sur un total de plus de 8 milliards
de francs, réalisés en grande partie dans le
secteur de la micro-informatique.
45. Sur le marché
des calculatrices « scientifiques »
ou à usage scolaire, cette société réalise
50 % du total de ses ventes avec les calculatrices scientifiques
programmables graphiques, segment de marché dont elle
détient, en 1995, 11,8 % en valeur (et 5,6 %
en volume).
La société Sharp Electronics
France
46. La société
Sharp Electronics France, créée en 1991, est
une filiale de la société japonaise Sharp Japon,
dont lactivité principale est la distribution
de produits audio, vidéo et photocopieurs. Elle occupe
une place très marginale sur le marché des calculatrices
scientifiques, soit en valeur, 1,7 % en 1994 et 1,2 %
en 1995.
47. En effet, selon les
déclarations du 10 septembre 1996 du président
de son conseil dadministration et de son directeur des
ventes (cotes 483 à 486), les calculatrices scientifiques
ne représentent quun million de francs sur un
chiffre daffaires total de 500 millions de francs,
dont environ 40 millions de francs pour les calculatrices
et les organiseurs.
48. La part de marché
des calculatrices scientifiques Sharp sur les différents
segments sétablit, selon les indications du panel
Nielsen, aux niveaux suivants :
|
SCIENTIFIQUES |
PROGRAMMABLES |
GRAPHIQUES |
|
Volume |
Valeur |
Volume |
Valeur |
Volume |
Valeur |
Février 1992 à janvier
1993 |
0,5 % |
0,7 % |
1,3 % |
1,8 % |
2,6 % |
2,2 % |
Février 1993 à janvier
1994 |
0,3 % |
0,3 % |
1,1 % |
1,6 % |
3,6 % |
3,2 % |
Février 1994 à janvier
1995 |
0,6 % |
0,5 % |
0,5 % |
0,7 % |
2,6 % |
2,2 % |
Janvier 1995 à janvier 1996 |
0,8 % |
0,8 % |
0,6 % |
1,0 % |
1,6 % |
1,4 % |
6. Les circuits de distribution
49. Les
données du panel Nielsen permettent de chiffrer, comme
suit, limportance des différents circuits de
distribution sur les segments des calculatrice scientifiques
simples et des programmables graphiques :
|
|
SCIENTIFIQUES (A) |
PROGRAMMABLES
graphiques (B) |
(A) + (B) |
|
|
1994 |
1995 |
1994 |
1995 |
1994 |
1995 |
Tous circuits. |
Unités |
827 590 |
852 930 |
419 360 |
456 490 |
|
|
|
Millions F. |
74,7 MF |
75,8 MF |
259,7 MF |
260,8 MF |
334,4 MF |
336,4 MF |
Hypermarchés. |
Volume |
73 % |
76 % |
52 % |
55 % |
|
|
|
Valeur |
72 % |
74 % |
46 % |
46 % |
52 % |
52 % |
Multispécialités (*). |
Volume |
9 % |
9 % |
26 % |
27 % |
|
|
|
Valeur |
9 % |
9 % |
31 % |
34 % |
26 % |
28 % |
Papetiers (**). |
Valeur |
|
11 % |
|
13 % |
|
12,5 %
|
(*) Les multispécialistes regroupent
notamment les enseignes suivantes : Galeries Lafayette,
BHV, Prisunic, FNAC, Darty, Boulanger...
(**) Les papetiers regroupent, notamment, les grossistes
et les enseignes telles que Plein Ciel diffusion,
Majuscule... |
50. Il ressort
de ces données que la part des ventes de calculatrices
pour les hypermarchés est très importante puisque
ceux-ci réalisent plus de la moitié des ventes
globales des calculatrices à usage scolaire, et près
de 75 % des ventes de calculatrices scientifiques simples
telles que la TI 30 de la société Texas Instruments
France et la Casio FX 92 de la société Noblet.
B. - LES PRATIQUES
CONSTATÉES
1. Les
pratiques de promotion mises en uvre par les sociétés
Nobletet Texas Instruments France en direction du corps enseignant
51. Eu égard
au rôle de prescripteur joué inévitablement
par les professeurs, les deux principaux producteurs, Texas
Instruments France et Noblet, ont mis en place des stratégies
marketing ciblant cette demande intermédiaire afin
de lui faire connaître leurs produits et den obtenir
in fine la prescription auprès des élèves.
1.1. Laction de la
société Noblet
auprès du corps enseignant
La communication, la formation et les conditions
commerciales spécifiques aux enseignants
52. Lors
de son audition du 28 juin 1994 (cotes 501 à
514 du rapport), M. Ocana, responsable marketing de la société
Noblet, a déclaré :
« Quand je suis arrivé
chez Noblet, jai, comme Texas Instruments, leader sur
le marché, développé les relations avec
les enseignants pour implanter Casio. Casio a, avec ses calculatrices
graphiques, bénéficié dune avance
technologique de six ans, de 1986 à 1992. En 1991,
Texas Instruments a sorti la TI 81, beaucoup plus adaptée
à la clientèle, parce que plus scolaire et pédagogique.
Nous avons eu lidée dentrer
en communication avec les enseignants et léducation
nationale, par les mailings de fascicules techniques. Un groupe
de réflexion, le GRIP (Groupement de réflexion
sur linformatique pédagogique) réunit
maintenant 18 « professeurs contact »
dont le rôle est de faire part de ce qui se passe sur
le terrain est danimer des stages de formation.
Ces professeurs écrivent aussi
dans une revue trimestrielle « 333 »
qui annonce les dates de stages annuels dans le numéro
du mois de septembre. »
53. M. Ocana faisait effectivement
état, lors de laudition du 28 juin 1994
précitée, de lorganisation denviron
50 stages par an, dont 30 dune journée et 20
dune demi-journée, rassemblant chacun environ
25 participants. Dans une lettre du 10 juillet 1996
(cf. cote 510 du rapport), il est précisé que
le nombre total de participants à ces stages variait
de 1 500 à 2 000 suivant les années.
54. Cette politique devait
saccentuer au cours des années suivantes, puisquun
total de 79 stages (dont 34 dune journée entière)
était annoncé dans la brochure de septembre
1994, et de 94 stages (dont 54 dune journée entière)
dans celle de septembre 1995.
55. Le compte rendu dune
réunion du 26 février 1996 mentionne
(cf. cotes 515 et 516 du rapport) :
« Depuis le début
de son action, Casio a sensibilisé 50 % des professeurs
de mathématiques des lycées (1500 sur 3000). »
Objectifs 1996 :
- augmenter le nombre
de professeurs « contacts » ;
- le nombre de machines
en prêt ;
- la dotation aux
professeurs en « machines à prix bas ».
56. Il ressort, de la pièce
cotée 517 et des pièces cotées 519 et
521 du rapport, que la société Noblet a mis
en place en 1994, 1995 et 1996, via la société
Casio France, un tarif spécial GRIP, réservé
aux membres de léducation nationale, dont les
prix sont inférieurs de 20 % à 30 %
aux prix publics des mêmes modèles. Ce tarif
prévoit également loffre dune machine
gratuite pour tout achat groupé de plus de 20 machines
du même type, comme le prévoyait pour 1994 et
1995 la dernière page du Journal « 333 ».
Le budget des actions auprès des
enseignants
57. Les
mentions, figurant sur la pièce cotée 523 à
527 du rapport, permettent de constater que les actions marketing
en direction du corps enseignant représentent 1/3 du
budget total consacré à la publicité
pour les calculatrices Casio, soit 3,8 millions de francs.
1.2. Laction de la
société Texas Instruments
auprès du corps enseignant
La communication, la formation et les conditions
commerciales spécifiques aux enseignants
a) Les actions de lannée 1994
58. Le
compte rendu de la réunion commerciale de février
1995 (cf. cotes 528 à 540 du rapport), relatif à
la « productivité » de Vincent
Bastid, responsable du marketing et du « service
éducation » de la société
Texas Instruments, indique pour lannée 1994 :
« Objectif :
- faire connaître
la TI 82 auprès des enseignants ;
- mener les professeurs
à utiliser notre gamme en classe ;
- conduire les professeurs
à faire une recommandation dabord orale, puis
écrite (sur liste).
Moyens :
- forte répétition
dans notre communication prof ;
- prêt de la
TI 82 OHD ;
- envoi de documents
pédagogiques pour la classe ;
- trainings. »
59. Suivent une liste
dactions telles que des mailings, trainings, et documents
pédagogiques divers parmi lesquels la revue « Hypothèses ».
Ces actions, représentant lenvoi de 350 000
courriers environ, conduisent à toucher 12 fois en
sept mois un professeur coordonnateur de mathématiques.
Un total de 48 stages de formation (trainings) devait par
ailleurs toucher 2 100 professeurs.
b) Les actions de lannée
1995
60. Pour
1995, la poursuite de cette stratégie devait se traduire
par 420 000 courriers touchant 100 000 professeurs,
afin de leur faire connaître les nouveaux produits lancés.
Sagissant des stages de formation, 117 devaient
être organisés pour réunir 3 510 participants
(cf. cotes 533 et 534 du rapport).
c) Les actions de lannée
1996
61. Une
note présentant les « actions profs »
prévues pour 1996 fait état de (cf. cotes 542
et 543 du rapport) :
5 000 enseignants formés
à lutilisation des TI 80, TI 83 et
TI 92, au terme de 120 formations totalisant plus
de 500 heures annuelles.
Environ 1/2 million denvois
annuels de courriers et documents, parmi lesquels des cahiers
de programmes pour les modèles TI 80, TI 81,
TI 82, TI 83, TI 85 et TI 92 aux
professeurs, au rythme de deux envois mensuels à 22 000 destinataires.
62. Selon le tableau communiqué
par M. Pietri, directeur commercial de la société
Texas Instruments France, en annexe au procès-verbal
du 10 octobre 1996 (les lignes correspondant au
marketing scolaire « school » y ont
été cochées dune croix), le coût
de ces actions sélève à 2 098 083 F
pour le premier semestre 1996. Les sommes budgétées
pour le second semestre sélèvent, au 1er octobre 1996,
à 808 314 F, soit un total non définitif
pour 1996 de 2 906 397 F.
Le budget des actions auprès des
enseignants
63. Il
ressort des pièces du dossier (cf. cotes 528 à 540
du rapport) que :
- en 1994, la société
Texas Instruments France a consenti 140 prêts de machines
TI 82 OHD qui « ont enfin permis à
400 professeurs de la découvrir et abouti à
105 ventes » ;
- en 1995, 600 prêts
de machines et accessoires devaient être effectués
et des offres spéciales aux enseignants devaient être
lancées, avec un objectif de 14 000 ventes à
prix réduit pour un coût évalué
à 260 000 F ;
- en 1996, étaient
prévues des offres spéciales permettant déquiper
à la rentrée 1996, 8 000 professeurs
dune TI 80, 6 500 dune TI 82 et
6 000 dune TI 92.
64. La société
Texas Instruments France a également mis en uvre
sa stratégie marketing en direction des enseignants
par lintermédiaire de lentreprise de vente
par correspondance Camif, et en particulier sa filiale Camif
collectivités entreprises (cf. cotes 544 à
546 du rapport).
1.3. Limpact des
politiques de préconisation
sur les distributeurs et les offreurs
Limpact sur les distributeurs
65. M.
Marc Altes, chef de produits de la société Carrefour
France a déclaré, le 7 juin 1994 (cf. annexe 54,
cotes 1003 à 1006 du rapport denquête) :
« Les calculatrices
sont des produits de rentrée des classes par excellence :
à peu près 65 % à 70 % des
volumes et chiffres daffaires sont réalisés
à cette période pour ces produits.
(...) dès lentrée
des enfants au collège, il devient très difficile
pour les parents de choisir autre chose que Casio ou Texas
Instruments. Deux raisons à cela : la formation
de professeurs, organisée par Noblet Casio et Texas
Instruments, sur leurs produits et la communication grand
public télévisée effectuée. Doù
lintérêt de travailler en direct avec eux
plutôt que dessayer de trouver ces produits, à
létranger.
(...) Nous recommençons
à travailler avec Sharp, qui est cependant plus spécialisé
en agendas organiseurs. Ses calculatrices scientifiques sont
beaucoup moins chères mais moins connues des consommateurs. »
66. Mme Lefevre, responsable
des achats de la société Alsatia sise à
Mulhouse, déclare, lors de laudition du 17 octobre 1995
(cf. cotes 547 à 551 du rapport) :
« Nos fournisseurs en
calculatrices scientifiques sont Noblet pour la marque Casio
et Texas Instruments. Nous sommes tenus de commercialiser
ces deux marques en raison de la prescription du monde enseignant.
Les acheteurs viennent chez nous en vue dacquérir
une marque et un modèle bien définis. Les enseignants
sont en effet contactés par les fournisseurs qui leur
communiquent les informations sur ces produits .»
67. M. Muller, président-directeur
général de la société exploitant
la librairie Berger-Levrault à Strasbourg, a déclaré,
le 6 octobre 1995 (cf. cotes 556 à 561
du rapport) :
« Nous distribuons en
calculatrices scientifiques exclusivement les marques Casio
et Texas Instruments. Ceci en raison de la notoriété
de ces marques. Il faut signaler que souvent ce sont les professeurs
qui sont les prescripteurs. Les écoliers viennent chez
nous et désirent telle marque et tel modèle
qui leur sont indiqués par les enseignants. Les fabricants
adressent des prospectus aux enseignants et les mettent au
courant des nouveautés .»
68. M. Brethenoux,
manager du département bazar de lhypermarché
Cora de Metz (57), a déclaré, le 17 octobre 1995
(cotes 562 à 565 du rapport) :
« Au niveau des calculatrices
scientifiques, le magasin Cora de Metz travaille exclusivement
avec Texas Instruments et Casio, qui sont les deux marques
préconisées par léducation nationale
(campagnes dinformation auprès des instituteurs
et professeurs de mathématiques). »
69. MM. Barrier et
Koby, acheteurs calculatrices au Galec/Leclerc ont déclaré,
le 27 juin 1994 (cf. cotes 569 à 572
du rapport) : « (...) il y a, selon
nous, deux grandes marques sur le marché des calculatrices
qui sont Casio et Texas Instruments (...). Des enseignants
préconisent certaines références dans
les marques Casio et Texas Instruments pour la rentrée
des classes. De fait, il devient plus difficile de vendre
les autres références. »
Limpact sur les offreurs
La société Hewlett-Packard France
70. En 1995,
la société Hewlett-Packard France était
présente sur le marché des calculatrices scientifiques,
essentiellement sur le segment des calculatrices programmables
graphiques avec une part de marché de 11,8. En novembre
1995, cette société a décidé de
mettre sur le marché un nouveau modèle de calculatrices
programmables graphiques, la calculatrice HP 38 G,
spécialement conçue pour être adaptée
aux besoins des lycéens.
71. Connaissant leffet
important du phénomène de prescription, Mlle Anne
Catherine Ohlmann, chef de produits Europe pour les calculatrices
dans la société Hewlett-Packard France, a expliqué,
le 19 septembre 1996 (cf. cotes 474 à
479 du rapport) :
« (...) Nous savions,
car cest de notoriété publique, que le
phénomène de prescription par les enseignants
était important sur ce marché. Aussi, parmi
les actions marketing accompagnant ce lancement, avons-nous
créé une brochure à diffusion trimestrielle
destinée au corps enseignant de mathématiques.
Pour ce faire, nous avions noué
des contacts avec une dizaine de professeurs « pionniers »
dans les principales régions françaises, chargés
dorganiser des séminaires à lattention
de leurs collègues. Nous avons également acheté
une liste de destinataires pour ce fascicule, comprenant 7 500 noms
de professeurs.
Le coût total de cette opération
(création, impression et diffusion) se monte entre
80 et 100 000 F HT, par trimestre, pour lensemble
des pays concernés.
Malgré ces actions, nous navons
pris quune faible part de marché en 1995, pour
une part du fait de larrivée tardive du produit.
Les autres raisons de ces difficultés sont le rôle
de la prescription par les enseignants qui sest révélé
plus fort que prévu, du fait du volume et de lancienneté
des actions menées par nos concurrents Texas Instruments
et Casio. Dans dautres pays dEurope, notre produit
a reçu un accueil plus favorable quen France
de la part du corps enseignant et du public.
Pour ces raisons, nous nenvisageons
pas dintensifier nos actions à destination du
corps enseignant français à lheure actuelle (...). »
72. Daprès
les estimations dune étude réalisée
par linstitut Nielsen, la vente du modèle HP
38 G sur la période octobre 1995/janvier 1996
atteint 1,1 % en volume et 1,3 % en valeur,
au treizième rang des modèles graphiques programmables.
73. Sur lensemble
du segment des programmables graphiques, la part de marché
de la société Hewlett-Packard France, selon
cette même étude a atteint 12,7 % en valeur
pour 1994 [et 5,5 % en volume] et 11,8 % en valeur
pour 1995 [5,6 % en volume].
74. Interrogé par
le rapporteur le 13 mars 2000, M. Blondel, de la
société Hewlett-Packard France, a expliqué
quen 2000, cette société a mis sur le
marché un modèle scientifique de base, la HP 30 S,
à un prix compétitif par rapport aux modèles
équivalents de chez Texas Instruments France (TI 30 X)
et Casio (FX 92) (cf. cotes 480 à 482 du
rapport).
75. Comme pour la HP 38 G
en 1995, les résultats en termes de vente ont été
décevants du fait de la quasi absence dactions
marketing auprès du corps enseignant.
76. En effet, M. Blondel
a expliqué :
« (...) Nous estimons
quil faudrait investir en ressources humaines et budgets
marketing un total de 35 millions de francs, afin de
pouvoir espérer prendre 25 % de part de marché
en 4 ans. Ne pouvant investir de telles sommes au regard
de notre chiffre daffaires actuel, notre stratégie
a été de nous orienter vers des applications
réellement pédagogiques.
Nous estimons que, depuis 1993, le
marché des calculatrices scientifiques a progressé
(jusquen 1998) et que depuis, il est devenu stable,
et même a connu une légère baisse en 2000
de 4 %. »
La société Sharp Electronics
France
77. MM. de
Riberolles et Milord, respectivement directeur général
et directeur de la société Sharp Electronics
France, ont déclaré, le 10 septembre 1996
(cf. cotes 483 à 486 du rapport), à propos
de la faible part de la société Sharp électronics
France sur le marché des calculatrices scolaires :
« (...) La raison essentielle
de la faiblesse de notre part de marché en France réside
dans la non-préconisation de nos produits par le corps
enseignant. Nous savons que les deux principaux fournisseurs
sur le marché français, Casio et Texas Instruments,
se livrent à ce type de préconisation. Nous
avons chiffré à 3 millions de francs par
an environ le coût que représenterait la mise
en place dune telle pratique correspondant à
lédition, la publication et la distribution aux
enseignants des publications nécessaires. Ce coût
est disproportionné par rapport au retour sur investissement
que nous pouvons en attendre à court terme. »
78. Aussi, sur le segment
des calculatrices graphiques où sa position était
la moins défavorable en 1994 mais se dégradait
fortement en 1995, la société Sharp Electronics
France a décidé de retirer de son catalogue
les deux modèles, EL 9200 et EL 9300, dont
3 800 exemplaires seulement avaient été
vendus en 1995.
79. Ainsi, en 1996, seuls
subsistaient dans la gamme de la société Sharp
Electronics France un modèle scientifique de base [EL 531]
et un modèle programmable non graphique [EL 5020].
80. Le tableau ci-dessous
met en évidence, pour le modèle scientifique
simple Sharp EL 531, dont le dossier « Sélection
calculatrices et assistants personnels 1996 » édité
par la FNAC révèle les caractéristiques
comparables à celles des modèles Casio FX 92
et Texas TI 30, lécart de prix significatif
en sa faveur dans les conditions dachat dont ont bénéficié
les groupes FNAC en 1995 ou CIM/Promodes en 1996 :
PRIX HORS TAXES |
FNAC 1995 |
CIM 1996 |
Sharp EL 531 GHB |
39,89 |
42,75 |
Casio FX 92 collège |
57,78
(après remises 23 %) |
65,68
(après remises 11 %) |
Texas TI 30 X |
51,69
(après RFA 3 %) |
56,33
(après remises 14 %) |
81. Pour
autant, cet écart de prix, qui se trouve dailleurs
atténué au stade de la revente (69 F TTC chez
ces deux distributeurs), est sans influence sur la part de
marché très marginale de ce modèle.
2. Les conditions de
vente de la société Noblet
et leur mise en uvre
2.1. Les conditions de vente
de la société Noblet
82. A
partir de la rentrée des classes 1994, la société
Noblet a mis en place un nouveau système de facturation.
83. A cet égard,
la société Noblet a expliqué, dans une
lettre du 16 février 2001 : « Du
fait de labsence de formalisation de nos conditions
commerciales, nous avons eu en 1994, un procès-verbal
de délit sur lapplication de nos conditions
commerciales en 1993 et 1994, qui a donné lieu en septembre
1994, au paiement dune amende.
Ceci nous a conduit, dès septembre
1994, à formaliser nos conditions commerciales :
conditions permanentes, conditions promotionnelles rentrée
des classes, ainsi que des modèles de contrats
de services. »
a) Les tarifs
à partir de la rentrée des classes 1994
84. En
1994, la société Noblet distingue, comme pour
les années précédentes, un tarif permanent
et un tarif rentrée des classes. Le tarif permanent
est assorti dune remise de 10 % sur facture et
le tarif « rentrée des classes »
est applicable sur une période de trois mois environ
(juillet à septembre) et est subordonné à
une commande minimum de 50 pièces.
85. Ces tarifs prévoient
deux types de ristournes : les unes basées sur
la répartition des commandes entre différentes
familles de produits, dune part, et sur la progression
de ces commandes par rapport à lannée
précédente, dautre part, les autres pour
services rendus.
b) Les ristournes de
répartition et de progression
applicables pendant la période dite « rentrée
des classes »
86. Le
mécanisme des ristournes de répartition et de
progression est double :
- certaines ristournes
sappliquent, dans le cadre des « conditions
promotionnelles Casio rentrée des classes »,
sur les commandes de la gamme scolaire effectuées pendant
la période concernée ;
- dautres ristournes
sappliquent sur les commandes aux conditions permanentes,
hors période de rentrée des classes, des quatre
gammes de calculatrices et produits assimilés de la
marque Casio commercialisés par la société
Noblet.
87. Les commandes de rentrée
des classes représentant la majeure partie du chiffre
daffaires réalisé par la société
Noblet sur sa gamme dite « scolaire »
ou « scientifique » (environ 80 %
du chiffre daffaires) et les conditions tarifaires pratiquées
durant cette période constituant un élément
essentiel de la politique commerciale de cette société,
seules les ristournes applicables sur les commandes de rentrée
des classes sont examinées dans le cadre de la présente
décision.
88. A cet égard,
lors de leur audition du 28 juin 1994 (cf. cotes 501
à 514 du rapport), M. Ocana, responsable
marketing de la société Noblet, et M. Baratte,
directeur commercial chargé de la grande distribution
dans la même société, ont déclaré :
« (...) La rentrée des classes correspond
à la période la plus importante des ventes de
calculatrices qui sétale jusquà
la fin de lannée (...). »
89. Le mécanisme
de ristourne différée prévu pour la période
de rentrée scolaire sapplique à lensemble
des acheteurs, quelle que soit la catégorie à
laquelle ils appartiennent (grande distribution, revendeurs
spécialisés, grossistes...).
90. Selon les déclarations
de MM. Ocana et Baratte, ce mécanisme a été
mis en place « afin déviter une
surenchère sur les rémunérations de services
sans aucune garantie de commande et de réalisation
de ventes par la clientèle ».
91. Ce mécanisme
de ristourne différée combine les paramètres
de familles (ou gamme) et de progression :
- le facteur famille :
les produits de la gamme scolaire sont répartis en
trois familles, correspondant à la distinction entre
machines scientifiques simples, programmables et graphiques.
Cette répartition est indiquée sur les bons
de commande spécifiques édités à
loccasion de la rentrée des classes. Chacune
des trois familles doit représenter au minimum 15 %
du volume total des ventes, déterminant ainsi la valeur
du facteur famille au niveau de 1, 1,5 ou 2 ;
- le facteur progression,
quant à lui, est déterminé par la variation
par rapport à lannée précédente
du nombre de machines commandées et peut atteindre
une valeur maximum de 4.
92. Le produit de ces deux
facteurs détermine le taux de la ristourne différée
due au client, qui sétablit donc au maximum à
8 %. Il peut être affecté jusquen
fin de période par toute commande complémentaire
venant notamment modifier la répartition du volume
total entre les trois familles de produits.
93. Selon le mécanisme
prévu à partir de 1994, une progression
négative des commandes détermine néanmoins
une valeur de 1 pour le facteur progression, et donc,
au final, un taux de ristourne au minimum égal à 1 %,
dans lhypothèse la plus défavorable où
une seule famille représenterait au moins 15 %
des commandes totales.
94. Cette pondération
est modifiée à partir de 1995. Une progression
négative entraîne une valeur de 0 pour le
facteur progression, et donc un taux de remise lui aussi égal
à 0 % quelle que soit la répartition
des commandes, puisque résultant du produit du facteur
progression et du facteur famille.
95. Toutefois, le tableau
ci-après, qui reprend, sur la base des « conditions
promotionnelles rentrée des classes » établies
par la société Noblet en 1994, 1995 et 1996,
les taux de progression du volume des ventes nécessaires
pour obtenir les différentes valeurs du facteur progression,
témoigne de la baisse très sensible des performances
demandées par la société Noblet à
ses clients pour loctroi dun taux de ristourne
donné :
FACTEUR
progression |
PROGRESSION NÉCESSAIRE DES COMMANDES |
|
1994-1993 |
1995-1994 |
1996-1995 |
0 |
- |
Négative |
Négative |
0,5 |
- |
Identique (*) |
- |
1 |
Négative |
0,5 % |
Identique |
2 |
Identique |
1 |
0,5 % |
2,5 |
2 % |
- |
- |
3 |
4 % |
1,5 % |
0,7 % |
3,5 |
6 % |
- |
- |
4 |
8 % |
2 % |
1 %
|
(*) Le terme identique signifie que
le chiffre daffaires de lannée
n est le même que celui de lannée
n-1. |
96. En 1996,
la performance exigée des distributeurs est encore
atténuée par le fait que cette progression nest
calculée que sur les seules commandes de machines graphiques
(famille Fc).
97. Cette ristourne différée
est payable au 30 novembre de lannée en
cours « sous réserve de lencaissement
de toutes les factures échues et si aucun report déchéance
na eu lieu ».
c) La rémunération
des services
98. Le
système mis en place en 1994 prévoit, conjointement
avec lapplication des tarifs permanents et rentrée
des classes et avec les ristournes qui leur sont liées,
la conclusion, avec les distributeurs, de contrats pour rémunération
de services rendus par ceux-ci à la société
Noblet.
99. Le principe applicable
à lensemble de ces rémunérations
est celui dune facturation par le distributeur.
Les services proposés aux détaillants
100. Les
détaillants se voient proposer, dès 1994, des
contrats dits « vitrine » et « démonstration »
rémunérés chacun à hauteur de 2 %.
101. Les contreparties
de ces rémunérations sont, dune part,
la présentation dans les points de vente en vitrine
sur rue de lensemble de la gamme Casio « rentrée
scolaire » et, dautre part, la mise en place
de tous les éléments promotionnels PLV (publicité
sur les lieux de vente) fournis pour la rentrée scolaire.
102. Par exception au principe
évoqué ci-dessus, ces contrats de coopération
commerciale sont remplacés, à partir de 1995,
par des ristournes ne nécessitant plus de facturation
de la part des distributeurs, et incorporées dans les
dispositions des conditions promotionnelles « Rentrée
des classes » soumises aux détaillants.
103. Cette évolution
a été confirmée par M. Karmes, secrétaire
général commercial de la société
Noblet, qui a déclaré sur ce point, lors de
son audition le 14 juin 1996, à propos des
rémunérations pour vitrine et démonstration
(cf. cotes 735 à 742 du rapport) :
« Sagissant des
deux dernières conditions citées, elles prenaient
la forme de contrats de services donnant lieu à facturation
par le détaillant, à hauteur de 2 % du
CA RdC pour chacune, pour les années 1993 et 1994.
Pour la RdC 1995, elles ont été intégrées
dans les conditions promotionnelles RdC offertes aux détaillants. »
Les conditions
proposées aux grossistes
et aux groupements de détaillants
104. M. Karmes,
de la société Noblet, lors de son audition du
14 juin 1996, a fait état dun contrat
de soutien logistique au taux de 6 % et dun « contrat
de distribution PLV pour (publicité sur les lieux de
vente), dun montant de 4 %, en vertu duquel le
grossiste ou le groupement est chargé dobtenir
de ses clients la mise en place des panneaux publicitaires
et autres présentoirs que nous mettons à sa
disposition ».
105. M. Etienne Perhaut,
responsable grands comptes de la société Noblet,
a déclaré, quant à lui, le 8 juillet 1996
(cf. cotes 758 à 763 du rapport) :
« Pour 1996, ont été
reconduites les conditions de coopération commerciale
qui avaient été conclues les années précédentes
avec ces deux groupements (Plein Ciel Diffusion et Majuscule),
soit un contrat de soutien logistique dun taux de 6 %
des achats, ainsi quune participation financière
pour présentation de nos produits dans leur catalogue
rentrée des classes.
Ces deux groupements bénéficient
également, depuis 1995, des ristournes prévues
dans les conditions particulières rentrée des
classes qui leur octroient deux ristournes de 2 %
chacune au titre du relais quils effectuent auprès
de leurs adhérents dans la mise en place de notre PLV
et de la formation de la force de vente. »
106. Il ressort des
documents saisis au siège de la société,
et notamment des « conditions promotionnelles
Casio rentrée des classes 1995 » destinées
aux grossistes, que, comme vis-à-vis des détaillants,
les contrats de coopération commerciale, conclus en 1994
pour rémunérer les grossistes au titre de leur
rôle de relais dans la fonction de présentation
de la PLV, ont été transformés en 1995
en une « ristourne distribution PLV »
au taux de 4 % pour stockage des supports PLV, redistribution
aux clients et présentation de cette PLV par les distributeurs.
Les conditions
proposées aux multispécialistes
107. Il
ressort des documents communiqués par M. Baratte,
M. Aubertin de la société Darty et MM. Alexandre
et Legris de la FNAC que, pour les années 1994 et 1995,
les rémunérations suivantes étaient prévues :
|
FNAC |
TOTAL |
DARTY |
TOTAL |
BOULANGER |
TOTAL |
1994 |
3 contrats :
6 % + 5 % + 4 % |
15 % |
2 contrats :
4 % + 5 % |
9 % |
|
|
1995 |
2 contrats :
3 % + 12 % |
15 % |
2 contrats :
3 % + 7 % |
10 % |
2 contrats :
3 % + 2 % |
5 % |
2.2. La
mise en uvre des conditions commerciales de la société
Noblet
a) Les
tarifs
108. Les
tarifs spécifiques établis par la société
Noblet à loccasion des périodes de rentrée
des classes conduisent à des prix de facturation nets
hors taxes, calculés pour correspondre, après
application du taux de TVA, à des montants psychologiquement
attractifs :
MODÈLES |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
|
HT |
TTC |
HT |
TTC |
HT |
TTC |
HT |
TTC |
HT |
TTC |
FX 92 |
50,60 |
60 |
60,71 |
72 |
75,04 |
89 |
75,04 |
89 |
73,80 |
89 |
FX 180 |
108,77 |
129 |
126,48 |
150 |
142,50 |
169 |
134,07 |
159 |
131,84 |
159 |
FX 3900 |
125,64 |
149 |
139,12 |
165 |
150,92 |
179 |
150,92 |
179 |
- |
- |
FX 6800/6900 |
243,68 |
289 |
231,87 |
275 |
252,11 |
299 |
252,11 |
299 |
247,92 |
299 |
FX 7800/7900 |
483,98 |
574 |
522,77 |
620 |
501,69 |
595 |
462,90 |
549 |
413,76 |
499 |
FX 9900/9960 |
- |
- |
- |
- |
666,10 |
790 |
631,53 |
749 |
621,06 |
749 |
109. Ces
montants TTC sont précisés sur les tarifs de
la société Noblet pour les rentrées des
classes 1992 et 1993, et éventuellement arrondis
par ses soins.
b) La nature des ristournes
de répartition et de progression
Le principe
110. Dans
un document daté du 25 mars 1994 (cf. cote 607
du rapport) et établi par la société
Noblet à lattention de ses représentants
et intitulé « Types de remises »,
il est indiqué :
« 1. Sur
facture : répercutables sur prix dachat :
- remises quantitatives ;
- remises sur montant
de la commande ;
- prix promotionnels
spécial rentrée ;
- remises acquises
et chiffrables (même si paiement ultérieur)...
2. En différé :
non répercutables sur prix dachat :
Ces primes sont souvent conditionnelles
et leur montant nest pas acquit ni chiffrable au moment
de la facturation.
Exemple : remise de fin
dannée si il ny a pas de retour
et si les factures sont payées sans report déchéance .
Exemple : remise de fin dannée
si atteinte des 3 premiers objectifs trimestriels...
Exemple : remise rentrée
scolaire en fonction des résultats.
3. Avec contrats spécifiques :
non répercutables sur prix dachat.
Il ne sagit pas en réalité
de remises mais de la rémunération dun
service rendu par un revendeur.
Le revendeur adresse une facture à
Noblet, pour le service rendu qui a été au préalable
défini par un contrat spécifique.
Exemple :
- mise en avant dans
une vitrine... ;
- promotion en tête
de gondole ... ».
111. Par procès-verbal
du 7 juin 1996, M. Baratte, directeur commercial
de la SA Noblet, a déclaré (cf. cotes 608
à 615 du rapport) :
« (...) pour ce qui
concerne la ristourne prévue dans les conditions particulières
Casio rentrée des classes ,
il sagit dune ristourne conditionnelle, qui nest
garantie au client quaprès satisfaction de deux
paramètres qui la composent (...) ».
c) Lapplication
des ristournes de répartition et de progression
c-1. Les
dérogations accordées
pour la période de rentrée des classes 1994
Les dérogations accordées
aux grossistes
112. Une note
du 19 avril 1994 établie par M. Gérard
Paumier, responsable au sein de la société Noblet
du réseau traditionnel pour la moitié nord de
la France, à lattention des chefs de vente en
vue de la campagne de rentrée des classes 1994 mentionne
(cf. cote 620 du rapport) :
« (...) 2. Le document
condition promotion rentrée des classes
1994 concerne également, dans son intégralité,
les grossistes. Seul, pour le facteur famille ,
nous ferons preuve de souplesse car
il est extrêmement difficile, pour un grossiste, de
réaliser le pourcentage de 15 % dans la famille
Fc. (...). »
113. M. Paumier a confirmé,
le 4 juillet 1996 (cf. cotes 621 à 627 du
rapport) les termes de cette note, indiquant quil sagissait
là dune initiative personnelle de sa part :
« (...) Sur la note en cote 101 du scellé
8, relative aux conditions pratiquées lors de la rentrée
des classes 1994, jindiquais aux quatre chefs de vente
qui chapeautaient à lépoque les représentants,
que nous ferions preuve de souplesse dans le calcul du facteur
famille vis-à-vis des grossistes, dont la spécificité
de clientèle rendait difficiles, voire négligeables
les ventes de calculatrices graphiques. Cette règle
de souplesse na pas fait lobjet dune communication
particulière en 1995 ni en 1996. Il sagissait,
en 1994 dune initiative propre de ma part (...) ».
114. Les récapitulatifs informatiques
relatifs au calcul de la ristourne octroyée aux grossistes
au titre de la campagne de rentrée des classes 1994,
communiqués par M. Paumier, confirment effectivement
la difficulté pour de nombreux grossistes dobtenir
des résultats satisfaisants pour le calcul du facteur
« famille ».
115. Parmi les 17 grossistes
concernés par ces documents, seuls deux, DIFPAP et
SOPACO, voient les trois familles atteindre au moins 15 %
des commandes globales (cf. point 100 de la présente
décision). A lopposé, trois autres ne
réalisent ce pourcentage que sur une seule famille.
116. Dix de ces grossistes, parmi
lesquels les plus importants en termes de chiffre daffaires,
connaissent une évolution négative du volume
de leurs commandes par rapport à 1993. Le tableau ci-dessous
présente le calcul théorique de la ristourne
qui leur était due et celle qui leur a été
effectivement octroyée.
|
CA 1994
(en KF) |
RISTOURNE
due
(en %) |
RISTOURNE
octroyée
(en %) |
Loubet |
222 |
1,5 |
8 |
DIFPAP |
124 |
2 |
8 |
Loubet-Payet |
175 |
1,5 |
8 |
Lumy-Gardot-Dumas |
749 |
1,5 |
8 |
PBL |
253 |
1 |
8 |
Midi |
288 |
1,5 |
8 |
Lumy-Gardot |
326 |
1,5 |
8 |
PAP-Lumy |
592 |
1,5 |
8 |
Epatan |
199 |
1,5 |
8 |
Les dérogations accordées
aux détaillants en 1994
117. Lors de
son audition le 7 juin 1996, M. Baratte, directeur
commercial de la société Noblet, a déclaré
(cf. cotes 608 à 615 du rapport) : « (...) Il
est arrivé que des dérogations a posteriori
soient accordées. Cela a été le cas
en 1994, notamment du fait de ruptures qua subies Noblet
sur deux modèles de la gamme. La ristourne a ainsi
été accordée à des distributeurs
pour qui nous avions en commandes des volumes que nous navions
pu honorer et qui leur auraient permis datteindre lobjectif.
Cela a également été le cas en 1995,
où nos objectifs de vente avaient été
trop optimistes et où quasiment aucuns distributeurs
navaient pu atteindre la progression en volume de 8 %
nécessaire à loctroi de la ristourne à
son taux maximum (...) ».
Le groupe Darty
118. En 1994, les commandes
du groupe Darty ont diminué par rapport à lannée
précédente (18 080 machines contre 20 730
lors de la rentrée 1993). Un premier versement correspondant
à une ristourne au taux de 2 % (correspondant
à un facteur « progression »
égal à 1 et à un facteur « famille »
égal à 2) a été complété
ultérieurement par un second versement portant ainsi
la ristourne effectivement accordée à son taux
maximum de 8 % (cf. cotes 633 à 644 du rapport).
Le groupe Auchan
119. De même,
les commandes de la rentrée scolaire 1994 du groupe
Auchan ont été en baisse par rapport à
lannée précédente (102 800
machines contre 113 500 lors de la rentrée 1993).
Au versement dune ristourne de 2 % (correspondant
à un facteur « progression »
égal à 1 et à un facteur « famille »
égal à 2) a été ajoutée,
selon les déclarations de M. Baratte, une ristourne
au taux maximum de 8 % au titre de la rentrée
1994 (cf. audition du 6 novembre 1996, cotes 628
à 636).
120. Sur les ristournes accordées
aux groupes Darty et Auchan, M. Baratte a déclaré :
« (...) Vous constatez au vu des documents que
je vous communique à votre demande, que Darty et Auchan
ont réalisé en 1994 une progression des commandes
négative. Nous leur avons néanmoins versé
le taux maximum de 8 % suite à négociation
pour les mêmes raisons quévoquées
précédemment (...) ». (Ces motifs
correspondaient à une rupture de stock des différents
modèles graphiques haut de gamme 7 900 et 9 900).
« (...) Vous constatez
dailleurs quapparaît sur un récapitulatif
de commandes Darty, une commande 1 800 FX 9 900
non honorée. »
121. Sagissant de Darty, les
pièces du dossier font effectivement apparaître
des commandes non facturées pour un nombre de 1 850
machines FX 9 900. Toutefois, même en tenant
compte de ces commandes non honorées, la progression
quantitative de ce distributeur serait demeurée négative.
122. Sagissant du groupe Auchan,
aucun élément fourni par M. Baratte ne
démontre lexistence de commandes non honorées.
123. Le tableau ci-après reprend
létat des commandes 1993 et 1994 des groupes
Darty et Auchan.
|
1993
Commandes
en nombre de pièces |
1994
Commandes
en nombre de pièces |
PROGRESSION
1994/1993 |
MACHINES
non facturées
en 1994 |
Darty |
20 730 |
18 080 |
Négative
(- 2 650 machines) |
1 800 + 50 = 1 850 |
Auchan |
113 500 |
102 800 |
Négative
(- 10 700 machines) |
Aucune |
Le groupe Carrefour
124. Le 23 décembre
1994, la société Noblet écrit à
la société Carrefour France (cote 648 du rapport) :
« Suite à notre dernier entretien et
considérant que nous avons été en rupture
sur un certain nombre de références lors de
nos promotions Rentrée des classes 1994 ,
nous acceptons de considérer, compte tenu de nos excellentes
relations commerciales, que vous avez atteint le palier maximum
de 8 % de remises RDC. »
125. Il ressort des pièces
adressées par M. Baratte au service denquêtes,
par courrier du 14 juin 1996, que les commandes
du groupe Carrefour pour la rentrée des classes 1994
ont été inférieures à celles de
1993 (141 690 machines en 1994 contre 148 069 en
1993). En revanche, ces documents ne font apparaître
aucune commande non facturée (cf. cotes 645 à
650 du rapport).
126. Au titre de lannée
1995, la société Carrefour a bénéficié
dune dérogation aux règles théoriques
de calcul du taux de la ristourne différée de
la société Noblet, dont lapplication stricte
aurait entraîné à son profit une ristourne
nulle (cf. cotes 680 et 681 du rapport, récapitulatif
des commandes du groupe Carrefour, déterminant un facteur
famille égal à 1,5 et un facteur progression
égal à 0). En effet, comme il a été
expliqué au point 92 de la présente décision,
le produit du facteur famille et du facteur progression détermine
le taux de la ristourne différée due au client.
127. M. Christophe Artèse,
chef de rayon du magasin Carrefour de Langueux (22), ayant
souhaité effectuer, en septembre 1995, une promotion
sur le prix dun modèle de la gamme Casio, a expliqué
(cf. cotes 682 à 684 du rapport) : « Jai
fixé ce prix de 719 F (inférieur au prix net
de 749 F TTC facturé par Noblet, compte tenu des ristournes
que le fournisseur nous accordait en application des accords
nationaux signés avec lui. Dans le même temps,
jai demandé par télex, puis par lettre
au fournisseur de mentionner ces ristournes sur facture. Il
sy est refusé prétextant quelles
étaient conditionnelles, ce qui nétait
pas le cas. »
Le groupe Promodès-Continent
128. Le récapitulatif
des commandes de rentrée scolaire 1994 de cette centrale,
communiqué par M. Baratte le 6 novembre 1996,
montre quune progression de 12 % a été
réalisée mais que la famille des graphiques
natteignait pas le seuil nécessaire pour assurer
un facteur famille égal à 2, la ristourne théorique
sétablissant ainsi au taux de 6 % (facteur
progression 4 × facteur famille 1,5).
129. La centrale Promodès-Continent
obtient néanmoins une ristourne de 8 % payée
par deux avoirs du 25 novembre 1994 correspondant
respectivement à 6 % et 2 % du chiffre daffaires
réalisé au titre de la rentrée des classes
1994 (cf. cotes 657 et 658 du rapport).
Le groupe FNAC
130. M. Baratte a communiqué
au service denquêtes, par courrier du 18 novembre 1996 :
- le récapitulatif
des commandes de la période de rentrée des classes
1994, qui fait apparaître une baisse de 13 % du
nombre de machines facturées par rapport à lannée
précédente, et un taux de ristourne applicable
de 2 %, les trois familles de produits étant représentées
(cf. cotes 652 et 653 du rapport) ;
- une lettre de la
société Noblet adressée le 26 janvier 1995
à ce distributeur, à laquelle étaient
joints deux avoirs et un chèque de règlement,
pour un montant total correspondant à 8 % du chiffre
daffaires réalisé (cf. cote 654 du rapport).
Le groupe Leclerc
131. Sagissant
du groupe Leclerc, M. Baratte a communiqué, par courrier
du 14 juin 1996, le récapitulatif des commandes
de la rentrée scolaire 1994, doù il ressort
que la famille des calculatrices graphiques représente
12 % seulement du volume global, et que lévolution
du volume global par rapport à 1993 est négative,
71 163 machines en 1994 contre 96 903 en 1993. Le
taux de ristourne résultant de ces chiffres sétablissait
donc à 1,5 % (facteur famille) × 1 (facteur
progression), soit 1,5 (cf. cote 661 du rapport).
132. Le Galec fera, dans le cadre
de cette ristourne, deux avoirs successifs correspondant chacun
à 1,5 % du chiffre daffaires. Selon les déclarations
de M. Baratte en date du 6 novembre 1996, ce montant
a été motivé par des problèmes
de rupture de stocks (cf. cotes 662 et 663 du rapport).
La SA Alsatia
133. Mme Lefevre, responsable
des achats papeterie de la société Alsatia à
Mulhouse, a communiqué, dans le cadre de lenquête,
une lettre adressée à cette société
le 1er décembre 1994
par la société Noblet, à laquelle était
joint le récapitulatif de ses commandes pour la période
de rentrée des classes 1994. Cette lettre met en évidence
une forte diminution des commandes par rapport à lannée
précédente. Pour autant, la ristourne octroyée
est calculée au taux de 8 %, sans quaucun
commentaire particulier ne soit formulé sur cette dérogation
au mode de calcul théorique (cf. cotes 664 et 666 du
rapport).
c-2. La
dérogation générale accordée
pour la période de la rentrée des classes 1995
134. Pour
lannée 1995, M. Karmes, secrétaire
général commercial de la société
Noblet, dans une note du 30 novembre 1995 (cf. cote
674 du rapport) intitulée Ristournes différées
Casio rentrée des classes 1995 adressée
aux agents commerciaux, précisait :
« Nous avons fait procéder
sur le mois de novembre à létablissement
des notes de crédit concernant les ristournes différéesassortiment
et progression et ristournes vitrine et
démonstration. Ces notes de crédit
seront portées sur les relevés clients de novembre.
Compte tenu de la baisse générale
du marché des calculatrices scientifiques scolaires
confirmée par létude INSEE et afin daider
nos revendeurs, nous avons pris la décision daccorder
à tous nos clients la ristourne maximum de 8 %
(assortiment et progression) à partir dune commande
minimum de 50 machines.
Nous vous remettons ci-inclus une
copie de la lettre adressée aux clients. Chaque client
recevra :
- une note explicative ;
- un état
récapitulatif de ses achats avec le calcul de la remise ;
- une note de crédit
correspondante.
Nous vous ferons parvenir par un prochain
courrier une copie de la fiche récapitulative avec
le montant de la note de crédit par client.
Ne manquez pas, lors de vos visites,
de mettre laccent sur notre geste commercial et sur
laide que nous apportons à notre distribution. »
135. De la même
façon, dans une note du 19 décembre 1995
(cf. cotes 675 et 676 du rapport) adressée
au responsable du service informatique de la société
Noblet et relative à la rentrée universitaire 1995,
M. Karmes indique à propos du calcul de la ristourne
différée due sur les quantités facturées
entre le 1er octobre 1995
et le 22 décembre 1995 :
« Facteur progression
(détail du mécanisme en annexe) ;
Comme pour la rentrée scolaire,
nous accorderons à tous les clients la remise maximum
assortiment et progression de 8 % ».
c-3. Les
pièces relatives aux dérogations
Le groupe Carrefour
136. Pour
lannée 1994, le document coté 677
du rapport, saisi dans le bureau de M. Baratte, comporte,
notamment, les indications manuscrites suivantes :
« Carrefour |
Marc ALTES |
RDC |
RDC 93 6,5 |
(...)
OK pour garantir 6,5 si 94 = 93 en
volume.
(...). »
137. Pour lannée 1995,
de la même façon, le document coté 679
du rapport, saisi dans le bureau de M. Baratte comporte,
notamment, les mentions manuscrites suivantes :
« Carrefour
(...)
1995
garantie du palier de 8 %
(...). »
La centrale Continent-Promodès
138. Les
documents figurant aux cotes 685 et 686 du rapport, dont
M. Baratte a déclaré quils constituaient
son compte rendu dune entrevue avec Continent en date
du 22 février 1994, comportent, sous la liste
de la gamme Casio pour la rentrée des classes 1994,
les notes suivantes :
« Proposition |
incond. 6 % |
|
contrat 2 % |
|
+ conditionnel. » |
Cette dérogation
nest justifiée par aucun des éléments
communiqués par M. Baratte.
Le groupe Leclerc/Galec
139. La page
cotée 687 du rapport, constituant les notes de M. Baratte
relatives aux négociations qui se sont déroulées
en novembre et décembre 1994, et notamment le 6 décembre 1994
avec M. Barrier, acheteur des calculatrices au Galec,
comporte les mentions suivantes :
« Le 6 décembre 1994 M. Barrier.
Le 16 novembre 1994 :
Pb. de conditionnalité des
ristournes (...)
Le 6 décembre 1994 :
Offre occulte...
5 % garanti
+ paliers 1, 2, 3 (...).
Vu JPN le 7.12. OK pour 8 % garanti. »
140. M. Baratte
a déclaré, lors de son audition du 7 juin 1996
(cf. cotes 608 à 615 du rapport) :
« La mention Vu
JPN le 7.12 OK pour 8 % garanti doit être
comprise comme le résultat dune démarche
auprès de mon président (les lettres JPN correspondent
aux initiales de M. Jean-Pierre Noblet, PDG de la SA Noblet)
pour quil me garantisse que jaurai lors de la
rentrée des classes 1995 une grille de ristourne potentielle
pouvant atteindre jusquà 8 %. »
M. Barrier, responsable calculatrices
au Galec, a déclaré, le 16 septembre 1996
(cf. notification de griefs, page 60) : « En
1995 et 1996, Noblet nous a proposé le bénéfice
de sa ristourne mixte différée pour la rentrée
des classes comme pour le permanent. Noblet nous garantit
lors de nos rendez-vous de négociation que nous bénéficierons
du taux maximum de 8 %, compte tenu de nos réalisations
de lannée précédente mais nous
fait parvenir les avoirs correspondants sans les accompagner
des éléments (chiffre daffaires réalisé
et mention explicite des taux) qui nous permettraient de vérifier
que cest bien ce taux qui nous est accordé. »
M. Laurent Burel, chef de
rayon au centre Leclerc de Bernay (60), précise
« ... la ristourne de 8 % conditionnelle
qui figure dans les conditions Casio est versée quel
que soit le chiffre daffaires réalisé
par le magasin. Aucune condition nest fixée au
niveau du magasin pour le versement de cette ristourne. »
(Cf. notification de griefs page 60).
M. Florian Guillot, chef du rayon
bazar à lhypermarché Leclerc de Neufchâteau (88)
a déclaré le 3 octobre 1995 (cf. notification
de griefs page 60) à propos des prix dachats
des machines Casio : « Je précise
que les prix dachat HT nets mentionnés dans le
tableau ci-dessus ne prennent pas en compte pour la marque
Casio loctroi dune remise inconditionnelle de
8 % non mentionnée sur facture. »
La société Plein Ciel
141. La circulaire
interne, adressée en juillet1993 aux membres du groupement
Plein Ciel Diffusion par la société Plein Ciel,
indique (cf. cotes 798 et 799 du rapport) :
« Rentrée des
classes 1993
Casio
Comme en 1992, les MAC Casio pour
la rentrée des classes, sont exclusivement distribuées
par Noblet, il va donc de soi quaucune importation parallèle
ne sera faite sur les produits phares de cette gamme (produits
du journal).
Afin dêtre au même
tarif que lensemble des grandes surfaces, le positionnement
prix du Journal rentrée des classes pour
les produits Casio est prix coûtant, à savoir,
prix dachat plus TVA.
Sur la ligne des calculatrices de
marque Casio, votre centrale vous adressera, fin octobre,
une remise de campagne scolaire dont le taux se situera entre 9
et 11 % en fonction des résultats générés
par lensemble de notre campagne rentrée scolaire
1993. »
142. La circulaire
interne, adressée au printemps 1995 par la société
Plein Ciel aux membres du groupement Plein Ciel Diffusion
pour la préparation des commandes de rentrée
des classes 1995 Casio, indique à propos de la remise
différée constituant leur rémunération
pour ces ventes (cf. cote 439 du rapport) :
« Comme tous les ans
depuis trois ans, la politique tarifaire pour la rentrée
des classes Casio sarticule de la façon suivante :
Votre prix dachat + TVA
= prix de vente public TTC.
Votre rémunération se
fera comme lannée précédente sous
forme de remise rétroactive (en octobre 1995) et ce
à hauteur de 12 % du chiffre daffaires que
vous aurez réalisé pendant la période
de rentrée des classes (du 1er juillet
au 29 septembre 1995).
Ces 12 % de remise arrière
sont la remise maxi que Noblet accorde aux distributeurs pendant
cette période (cf. copie des contrats Noblet).
Chez Noblet, pour bénéficier
de cette remise maxi, certaines conditions sont à respecter :
Minimum de commande de 50 pièces,
assortiments à respecter, taux de progression à
réaliser.
Votre centrale quant à elle,
vous accorde dentrée de jeu la remise arrière
maximum à laquelle vous pouvez prétendre et
ce, sans engagement de votre part (aussi bien sur la commande
dimplantation que sur les réassorts de septembre).
Comme tous les ans, vous aurez donc
le même positionnement tarifaire que les différents
acteurs de la distribution (grandes surfaces, Multispécialistes),
ce qui ne pourra que créditaliser vos points de vente
aux yeux des consommateurs et ce tout en vous garantissant
une marge de fonctionnement. »
143. Dans une circulaire
marketing du 21 mai 1996 (cf. cotes 710
à 712 du rapport), pour la période de rentrée
des classes 1996, la société Plein Ciel diffusion
écrit à ses adhérents dans des termes
identiques.
144. Dans une note du 1er juillet
1995 (cf. cote 728 du rapport), M. Karmes,
secrétaire général commercial de la société
Noblet, précisait à ses représentants
les éléments suivants :
« Le groupe Plein Ciel
diffusion a annoncé aux Maisons de la Presse
des conditions de facturation rentrée des classes Casio,
laissant entendre une remise sur facture de 8 % sur nos
prix nets rentrée scolaire.
Ces conditions nétant
pas conformes à la législation actuelle (loi
Sapin), Plein Ciel a adressé en date du 30 mai
un rectificatif aux Maisons de la Presse pour
les informer que cette remise de 8 % serait pratiquée
rétroactivement et non pas sur facture.
Nous attirons votre attention sur
le fait que seuls les clients Maisons de la Presse livrés
par Plein Ciel diffusion (ex-Sodalfa), ont bénéficié
de cette information, le reste de la distribution Plein Ciel
diffusion, adhérents Plein Ciel et clients indépendants
sont traités normalement (...). »
145. M. Fabrice
Gabet, chef de marché bureautique et informatique de
Plein Ciel diffusion, a déclaré, lors de son
audition du 13 décembre 1993 : « (...) Ces
conditions prévoient un taux de remise de 12 %
maximum qui était acquis au moment de la commande,
tant au plan de lassortiment, de la progression et de
la mise en avant des produits PLV. » (cf. cotes 722
et 723 du rapport).
146. M. Laurent
Frankel, directeur dexploitation de la société
Plein Ciel Diffusion, a déclaré, le 4 septembre 1996
(cf. cotes 703 à 709 du rapport) : « Ces
dernières années, jétais régulièrement
en contact avec Noblet pour massurer que nous remplissions
les conditions doctroi de la ristourne Noblet à
son taux maximum et, dans le cas inverse, jeffectuais
les commandes nécessaires pour y parvenir. »
Les récapitulatifs de commandes
du groupement Plein Ciel Diffusion communiqués le 6 novembre 1996
par M. Etienne Perhaut, responsable grands comptes de
la société Noblet (cf. cotes 717 à
721 du rapport) font apparaître une diminution très
sensible du nombre de machines commandées en 1995,
soit 34 169, en intégrant les chiffres dun
membre affilié en cours dexercice, contre 43 300
en 1994.
M. Perhaut, de la société
Noblet, a déclaré, le 8 juillet 1996
(cf. cotes 758 à 763 du rapport) : « De
toute façon, ce client a bénéficié,
comme tous les autres en 1995, de la ristourne différée
à son taux maximum de 8 %. »
La société Majuscule
147. La « Lettre
des achats Majuscule » du 17 mai 1995,
numéro 20, adressée par le groupement Majuscule
à ses adhérents en même temps que leur
bon de commande de produits Casio pour la rentrée des
classes 1995 indique (cf. cotes 800 et 801 du rapport) :
« Vous trouverez ci-joint
le bon de commande rentrée des classes Majuscule/Casio.
Ce bon reprend les machines à calculer scientifiques,
programmables et graphiques pour la rentrée, appuyé
des prix de vente TTC conseillés (...). Sur
ces prix de vente conseillés, il vous sera reversé
par la centrale 12 % sous forme davoir courant
décembre. »
Ces éléments sont
également envoyés, par M. Panaville de
la société Majuscule à M. Perhaut,
de la société Noblet, le 11 mai 1995 :
« Vous trouverez ci-joint
un exemplaire du bon de commande rentrée des classes
Majuscule/Casio et du courrier daccompagnement. Ces
éléments seront envoyés à nos
adhérents, dont la liste ci-jointe, le jeudi 18 mai 1995.
Nous vous rappelons que lenvoi des commandes de nos
adhérents à la centrale seffectuera le
l6 juin 1995 et le 7 juillet 1995. »
(Cf. télécopie en cote 801 du
rapport).
2.3. Les prix de vente
publics
148. M. Baratte, directeur
commercial chargé de la grande distribution, a déclaré
lors de son audition du 7 juin 1996 (cf. cotes 608
à 615 du rapport du rapporteur), à propos des
nombreuses listes de prix TTC figurant dans ses notes de préparation
dentretiens avec les centrales de la grande distribution :
« La société
nélabore jamais de prix publics conseillés.
Lorsquil est mentionné dans mes notes manuscrites
des prix TTC, il sagit de prix de cession à la
clientèle présentés toutes taxes comprises.
Japporte cette précision à ma clientèle
afin déviter toute confusion avec dautres
taux de TVA. »
149. M. Karmes a déclaré,
le 14 juin 1996 (cf. cotes 735 à 742 du rapport),
à propos de mentions figurant dans ses notes de préparation
dune visite au groupement Plein Ciel Diffusion en avril
1993, époque à laquelle il occupait les fonctions
de directeur commercial du réseau traditionnel pour
la région parisienne : « Lorsque
jécris prix publics TTC, jexprime mes prix
de cession TTC envers le revendeur. La mention Baratte = prix
plancher GS signifie que je devais vérifier auprès
de M. Baratte que mes prix de cession auprès du
réseau traditionnel étaient les mêmes
que ceux accordés aux grandes surfaces. »
150. M. Jean-Pierre
Noblet, président du conseil dadministration
de la société Noblet, a déclaré,
pour sa part, lors de son audition du 3 septembre 1996
(cf. cotes 595 à 599 du rapport) : « Les
diverses indications que lon retrouve dans des documents
saisis dans notre société, comme le document 5
du scellé 2, le document 15 du scellé 4
ou le document 142 du scellé 1, où
il est fait mention de prix publics, révèlent
lexpérience que nous avons au sein de la société
du fait que lensemble des distributeurs commercialisent
en période de rentrée des classes nos produits
sur la base de nos prix promotionnels majorés de la
TVA. Nous calculons donc nos prix de cession en tenant compte
de cette expérience et cest par une habitude
interne que nous les qualifions de prix publics. »
Lélaboration des prix de vente
publics
151. De
nombreux documents, recueillis lors de lopération
de visite et saisie diligentée le 2 avril 1996
au siège de la société Noblet, font référence
à des « prix publics » et
à des « prix publics minima ».
152. Il ressort de
diverses pièces du dossier que les tarifs « rentrée
des classes » des années 1992 et 1993
comportent non seulement les prix HT mais également
une colonne intitulée « prix TTC »
dans laquelle figurent les prix résultant du calcul :
prix HT + TVA.
153. Les montants TTC figurant
sur ces tarifs sont parfois arrondis par la société
Noblet (exemple de la FX 92, dont le prix HT majoré
de la TVA au taux de 18,6 %, sétablit en
1992 à 60,01 F, mais où la société
Noblet mentionne 60 F).
154. Lexamen de ces
tarifs montre également quils sont calculés
pour correspondre, après application du taux de TVA,
à des montants psychologiquement attractifs pour le
consommateur. Par exemple, pour 1992 :
- prix HT de la FX 180 = 108,77
F pour un prix TTC de 129 F ;
- prix HT de la FX 3900 = 125,64
F pour un prix TTC de 149 F.
155. Cette même constatation
peut être faite pour tous les tarifs Casio RDC de 1992
à 1996.
156. Dans une note du 31 janvier 1995
relative au calcul prévisionnel des marges pour la
rentrée 1995, M. Ocana, de la société
Noblet, indique (cotes 743 et 744 du rapport) :
« (...) Veuillez trouver
ci-joint le nouveau calcul prévisionnel de marges Casio
pour la RS. Les prix publics sont modifiés, comme vous
lavez demandé au cours de la réunion du
27 janvier 1995.
Prix publics |
* |
FX 92 |
79 89 |
|
|
FX 180 P |
139 159 |
|
* |
FX 6800 |
219 219 |
|
|
FX 6900 |
299 299 |
|
|
FX 7900 |
539 549 |
|
|
CFX 9900 |
749 749 |
(...). »
157. Dans une note interne
du 22 juin 1995 (cf. cote 517 du rapport), adressée
à ses directeurs commerciaux, M. Jean-Pierre Noblet
écrit :
« La TVA portée
de 18,6 à 20,6 % à partir du mois daoût
aura pour conséquence directe daugmenter le prix
public TTC rentrée des classes Casio.
Il me semble indispensable de vous
demander de prévenir, selon des modalités à
définir au cas par cas, vos principaux distributeurs
que Noblet ne peut, en aucun cas, envisager de financer le
surcoût de la TVA sous quelque forme que ce soit.
Je vous suggère de calculer
le nouveau prix public et de le publier dans une note générale. »
158. Cette note a donné
lieu à une directive générale datée
du 28 juin 1995 (cf. cotes 618 et 619 du rapport)
à lattention des représentants de la société,
signée de M. Karmes, secrétaire général
commercial de la société Noblet, qui comporte
un tableau où sont listés, pour chaque modèle
de la gamme :
« - le tarif
promo revendeur rentrée des classes HT ;
- le prix public TTC TVA
18,6 % ;
- et le prix public TTC
TVA 20,6 %.
Informez bien vos clients sur la structure
des prix de cette rentrée des classes 1995, afin déviter
toute réclamation lors de la parution des catalogues
et publicités de la rentrée. »
159. Les prix figurant
dans la colonne « prix publics TTC, TVA 20,6 % »
sont arrondis, de plusieurs dizaines de centimes dans
certains cas, par rapport aux montants précis résultant
de lapplication du nouveau taux de TVA.
162,00 F pour 161,67 F pour le modèle
FX 180 P PLUS.
558,30 F pour 558,25 F pour le modèle
FX 7 900 GC.
762,00 F pour 761,62 F pour le modèle
FX 9 900 GC et FX 795 P.
1 016,00 F pour 1 015,83
F pour le modèle FX 880 P.
160. Dans une lettre du
4 juillet 1995 au distributeur Spicers, M. Perhaut,
responsable grands comptes de la société Noblet,
précisait (cf. annexe 5, cotes 37 et 38 du rapport
denquête) :
« (...) Notre gouvernement
a pris la décision de porter le taux de la TVA à
20,60 % à dater du début août 1995.
Cette décision aura pour conséquence une augmentation
des prix publics minima, taxes comprises (...). Pour votre
information personnelle, nous vous communiquons ci-après
le détail des produits Casio rentrée des classes
avec le prix de facturation revendeur Promotionnel, le prix
public TTC à 18,6 %, le prix public TTC avec TVA
à 20,6 %. »
161. De même,
pour lannée 1996, le tableau intitulé
« prix rentrée », daté
du 18 mars 1996 figurant en cote 32 du scellé
constituant lannexe 9, comporte le calcul des marges
pour lopération de rentrée des classes
1996 ; la colonne de droite, reprenant les prix de facturation
HT et TTC des modèles de la gamme scientifique, porte
en chapeau le libellé « public »
(cf. annexe 9, cote 32 du rapport denquête).
162. La mention « prix
publics » figure également dans le compte
rendu de la réunion du 26 janvier 1996, à
laquelle participaient la plupart des responsables opérationnels
de la société où le texte de la rubrique
« Rentrée 1996 » se présente
comme suit (cf. annexe 2, cotes 141 et 142 du rapport
denquête :
« Prix publics TTC = |
FX |
92 collège 3 |
89 |
|
FX |
180 P |
159 |
|
FX |
6910 G |
299 |
|
FX |
7900 GC |
499 |
|
FX |
9930 GT |
649 |
|
FX |
9960 GT |
749 |
Conditions commerciales
à définir. »
La diffusion des prix de vente publics
163. Un
cahier saisi dans le bureau de M. Gilles Baratte, directeur
commercial chargé de la grande distribution, comporte,
aux pages cotées 104 à 109 de lannexe 7
du rapport denquête, une double colonne de prix,
HT et TTC, pour huit modèles Casio proposés
dans le cadre de la « Rentrée des classes
1994 ». Selon les déclarations de M. Baratte
en date du 7 juin 1994 (cf. cotes 609 à 613
du rapport), ces notes correspondent à la préparation
ou au compte rendu dentretiens avec les acheteurs des
centrales Continent, Auchan et Galec au cours du 1er trimestre
1994.
164. Le même type
dindications se retrouve dans un autre cahier saisi
dans le bureau de M. Gilles Baratte, relatif aux négociations
pour lannée 1995 : les pages cotées
27 et 38 de lannexe 6 du rapport denquête,
qui retranscrivent, selon lui, les comptes rendus de deux
entretiens avec le Galec en date des 17 et 30 janvier 1995,
ne comportent, en regard de la liste des modèles proposés
pour la rentrée des classes 1995, que des prix TTC,
la colonne HT nétant remplie que pour le modèle
FX 92 (cf. cotes 609 à 613 du rapport).
165. Sagissant de
toutes ces notes, la position de M. Baratte est la suivante :
« Les tarifs que lon retrouve reproduits
lors de ces entretiens sont ceux qui sont proposés
à lensemble des distributeurs à qui sont
indiqués, pour les raisons évoquées plus
haut, des prix TTC (éviter toute confusion avec
dautres taux de TVA) » (cf. cotes 610 et
611 du rapport).
166. Des notes manuscrites
rédigées par M. Lalouette, chef de produit papeterie
de la société Sapac, centrale dachats
des magasins Prisunic, du 1er octobre
1995 au 1er septembre 1996, reprennent
les références de six modèles de la marque
Casio pour lesquels sont indiqués, sous labréviation
« PV TTC », les chiffres de 89 F,
159 F, 299 F, 499 F, 649 F et 749 F
(cf. cotes 745 à 751 du rapport).
167. Interrogé sur
ces notes manuscrites de M. Lalouette, M. Tasseau, directeur
délégué à la direction des marchandises
générales et M. Bruneau, chef de marché
de la société Sapac, ont déclaré,
lors de leur audition du 11 septembre 1996 :
« (...) vous constatez que les notes de M. Lalouette,
agrafées au tarif Noblet, reprennent les conditions
accordées par Noblet et font également mention
de PV TTC pour six modèles, dont les quatre
premiers sont surlignés (...). » (Cf.
cotes 747 à 750 du rapport).
168. Dans deux lettres
identiques adressées les 5 et 8 novembre 1993
au grossiste EURO + et au groupement Plein Ciel (cf.
cotes 752 à 755 du rapport), M. Karmes, de la
société Noblet, fait état des conditions
promotionnelles offertes par Noblet sur deux calculatrices
graphiques à loccasion de la rentrée universitaire
et de la période des cadeaux de fin dannée
dans les termes suivants :
« (...) vos conditions
dachat seront les suivantes :
FX 7 800 GC |
|
Prix promotionnel |
496,80 F HT |
Prix public |
590,00 F HT |
FX 8 800 GC |
|
Prix promotionnel
|
631,80 F HT |
Prix public |
750,00 F HT (...). » |
169. Par
lettre en date du 7 mars 1996 (cf. cotes 756 à
757 du rapport) et relative à la rentrée des
classes 1996, M. Leclerc, de la société
Noblet, collaborateur de M. Perhaut, écrit au
groupement Plein Ciel diffusion :
« A titre indicatif,
vous trouverez ci-après les prix de vente public TTC
pour chaque modèle :
FX |
92 Collège III |
89,00 F TTC |
FX |
180 P Plus |
159,00 F TTC |
FX |
6910 G |
299,00 F TTC |
FX |
7900 GC |
449,00 F TTC |
FX |
9930 GT |
649,00 F TTC |
FX |
9960 GT |
749,00 F TTC. » |
170. La
lettre datée du 4 juillet 1995 (figurant
en annexe 5, cotes 37 et 38 du rapport denquête),
adressée au grossiste Spicers par M. Perhaut,
responsable grands comptes de la société Noblet,
reprend à lidentique le texte de la directive
du 28 juin 1995 de M. Karmes décrite
supra (cf. paragraphe 158), où étaient
communiqués les nouveaux prix publics arrondis après
application du taux de TVA à 20,6 %.
171. Questionné
sur lutilisation, dans ces deux courriers adressés
à des distributeurs, des termes « prix publics »
pour celui du 28 juin 1995 et « prix
publics minimums » pour celui du 4 juillet 1995,
M. Perhaut, responsable grands comptes de la société
Noblet, a déclaré lors de son audition du 8 juillet 1996
(cf. cotes 758 à 763 du rapport) quil fallait
entendre par là « prix de cession toutes
taxes comprises, même si je constate avec vous que certains
des prix de la dernière colonne sont arrondis ».
172. Dans une note
du 4 mai 1995, M. Perhaut précisait à
ses représentants pour la rentrée des classes
1995 (cf. cotes 764 à 765 du rapport) :
« Plein Ciel :
rentrée Casio
Vous trouverez, en annexe, un exemplaire
du bon de commande Plein Ciel qui sera à utiliser dans
le cadre des prix de commandes Casio Rentrée auprès
des adhérents Plein Ciel (nous vous joindrons un carnet
de 20 bons de commandes dans la note de la semaine prochaine
(...). Les adhérents Plein Ciel ont reçu de
leur centrale les informations concernant les conditions de
la rentrée et ont reçu un courrier annonçant
votre venue pour explication et formation sur les produits
et la stratégie (...). »
173. Lexemplaire
du bon de commande joint à cette note comporte, après
les colonnes « tarif » et « conditionnement »,
une colonne intitulée « prix public TTC »
dans laquelle figure, en face de chaque référence
de calculatrice Casio, le prix public TTC établi par
la société Noblet.
174. Interrogé sur la
présence de ces prix publics TTC sur le bon de commande
à destination des adhérents de Plein Ciel, M.
Karmes, secrétaire général commercial
de la société Noblet, a déclaré,
par procès-verbal du 14 juin 1996 (cf. cotes
735 à 742 du rapport) : « Sagissant
des prix publics TTC qui apparaissent sur le bon
de commande Plein Ciel en cote 70 et qui figuraient vraisemblablement
sur le document correspondant en 1993, il sagit des
prix publics déterminés de manière autonome
par Plein Ciel en fonction de la politique de prix coûtants
quelle choisissait dadopter. »
2.4. Les interventions de la
société Noblet
auprès des distributeurs
175. Les
notes de M. Karmes (cote 734 du rapport), secrétaire
général commercial de la société
Noblet, datée de « Pâques 1993 »,
montrent que le respect des prix publics par les distributeurs
est un objectif stratégique de la politique de la société
Noblet depuis 1992 au moins :
« Stratégie = reconduire
la politique 1992
(...)
politique concurrentielle (...)
(E) Respect des prix publics sinon
pas de marge arrière (...) ».
« 15 juin 1994
Prix DARTY « Les Halles »
Comment expliquer ces prix de vente
de DARTY qui sont inférieurs aux prix coûtants
actuels (...). »
176. Plusieurs pièces
du dossier font état dinterventions de la société
Noblet auprès de distributeurs visant les prix publics
minima TTC.
a) Lintervention
de la société Noblet auprès de Maxicoop
à la demande de la société Plein Ciel
Diffusion
177. Une
lettre du 12 août 1993 (cote 768 du rapport),
adressée par M. Gabet de la société
Plein Ciel Diffusion à M. Karmes de la société
Noblet, comporte les indications suivantes :
« (...) Suite à
différents relevés tarifaires effectués
sur le terrain, il savère que certains de vos
clients vendent la FX 92 Collège à un prix
inférieur à notre prix dachat.
Le modèle étant exclusivement
distribué par Noblet, il sagirait là soit
de ventes à perte soit de conditions commerciales privilégiées
accordées à certaines enseignes nationales et
relevant donc de la vente discriminatoire.
Nous vous demandons donc de bien vouloir
prendre contact avec nous dès votre retour afin déclaircir
ce dossier.
Dans cette attente (...). »
178. Ce courrier comporte
une annotation manuscrite de M. Karmes à lencre
rouge en haut à gauche (cote 768 du rapport) :
« Tel le 23 août
1993
F. GABET
Maxicoop prix rectifiés
Erratum affiché dans chaque
magasin à/c du 24 août 1993. »
179. Par ailleurs, la copie dune
lettre de M. Karmes de la société Noblet à
M. Gabet du groupement Plein Ciel Diffusion, en date
du 25 août 1993 (cote 767 du rapport), indique :
« Monsieur,
A mon retour de vacances, jai
pris connaissance de votre courrier du 12 août 1993
ainsi que de votre télécopie du 17 août 1993
concernant les prix de vente de la FX 92 pratiqués
par certaines enseignes.
Comme jai eu loccasion
de vous le préciser lors de notre entretien téléphonique
du 23 août 1993, le prix constaté sur
la FX 92 chez Maxicoop est consécutif à
une erreur de tarification. Ce prix a été rectifié
et un erratum sera affiché dans chaque magasin à
partir daujourdhui. Pour ce qui est de Prisunic
Rochefort et après vérification, la FX 92
est vendue au prix public TTC de 90,00 F ».
b) Lintervention de la société
Noblet auprès de la papeterie A3 à Nice, adhérente
à la coopérative Plein Ciel, à la demande
de la papeterie Jean-Jaurès, à Nice
180. Les notes manuscrites,
portées sur le document figurant en cotes 771 et 772
du rapport (recto/verso) et constituant le compte rendu dun
appel téléphonique, sont reproduites ci-après :
« Le 8 septembre 1993
A M. Karmes
Concerne Papeterie Jean-Jaurès,
à Nice.
nous informe que A3 à Nice,
adhérent Plein Ciel, vend FX 92 à 62 F
TTC et fait 15 % sur toutes les Casio aux étudiants.
M. Fareau est également
informé de cette situation :
- alignement sur
FNAC Nice
- interventions auprès
FNAC (alignement sur le Forum du livre)
- tel. Gabet le 9/9/93
Prix A3 remontés. »
181. Lors de son audition
du 14 juin 1996 (cf. cotes 738 et 739 du rapport),
M. Karmes, de la société Noblet, a expliqué
que ce compte rendu dappel téléphonique
faisait état de linformation communiquée
par la papeterie Jean-Jaurès à Nice, selon laquelle
ladhérent Plein Ciel Diffusion « A3 »
vendrait la FX 92 à 62 F (alors que le prix
de facturation de la société Noblet sétablissait
à lépoque comme on la vu ci-dessus,
à 72 F TTC) et « ferait 15 % »
sur toutes les Casio aux étudiants.
182. M. Karmes, à
qui cette note était destinée, a identifié
comme étant de sa main les annotations au verso de
ce document et les a décrites comme présentant
les informations recueillies sur lincident susvisé,
tout dabord auprès du responsable grandes surfaces
de la région, puis auprès de lacheteur
du groupement Plein Ciel Diffusion, M. Gabet (cf. cotes
738 et 739 du rapport).
c) Lintervention de la société
Noblet auprès du groupement Sodalfa-Plein Ciel Diffusion
à la demande du groupement Majuscule
183. Par lettre
du 8 septembre 1994 (cf. cote 774 du rapport),
le directeur général adjoint, directeur des
achats, du groupement Majuscule, M. Carlier, protestait
auprès de la société Noblet contre la
remise sur facture de 10 %, proposée par le grossiste
Sodalfa, sur la base dun tarif hors taxes identique
aux prix promotionnels nets de la société Noblet :
« Monsieur,
Vous trouverez ci-joint copie de la
page 7 du tarif rentrée des classes 94-Sodalfa.
Comme vous le savez déjà,
vous pourrez voir que les machines Casio y sont proposées
avec une remise sur facture de 10 %.
Comme il est coutume de vendre en
septembre les calculatrices à prix dachat, certains
petits détaillants vont ou sont déjà
(comme nous le signalent certains points de vente), moins
chers que nos adhérents et autres GMS qui ont eux joué
le jeu loyalement.
Notre question est simple et pourtant
très importante :
Comment comptez-vous pénaliser
Sodalfa ?
Quel dédommagement pour nos
points de vente aujourdhui concurrencés illégalement
par des bureaux de tabac ?
Comptant sur une réponse rapide
de votre part, nous vous prions dagréer, Monsieur,
lexpression de nos meilleurs sentiments. »
184. Par lettre du 10 novembre 1994
(cf. cote 773 du rapport), M. Karmes, de la société
Noblet, répondait à M. Carlier, du groupement
Majuscule, en ces termes :
« Nous avons bien reçu,
en son temps, votre courrier du 8 septembre 1994
dans lequel vous évoquez les conditions offertes par
Sodalfa dans le cadre de la rentrée des classes Casio
1994.
Je souhaitais vous expliquer de vive
voix notre position et la démarche que nous avons eue
vis-à-vis de ce client. Je nai malheureusement
pas pu le faire lors de votre réception à Saint-Quentin,
vous étiez ce jour-là occupé par dautres
préoccupations.
Jai fait part, par téléphone
à M. Panaville de notre intervention vis-à-vis
de Sodalfa. Au reçu de votre courrier, nous avons rencontré
Sodalfa et attiré son attention sur les prix affichés
sur les produits Casio Rentrée des classes et, notamment,
sur le fait que les prix quils offraient aux revendeurs
étaient inférieurs à leurs prix dachat,
ce qui les plaçaient en dehors de la législation
en vigueur.
Sodalfa a procédé à
larrêt de cette politique et a informé
ses commerciaux de cette situation. Comme vous avez pu le
constater, nous avons depuis deux ans déployé
beaucoup defforts pour appliquer une politique de prix
cohérente dans les différents réseaux
de distribution, et ce, en conformité avec la législation
actuelle. Cependant, nous ne sommes jamais à labri
dun client qui, pour des raisons diverses, se mettrait
hors la loi. »
185. Une note du 1er juin 1995
(cf. cote 776 du rapport), adressée par M. Karmes
à ses représentants, précisait que :
« Le groupe Plein Ciel
Diffusion a annoncé, aux Maisons de la Presse,
des conditions de facturation rentrée des classes
Casio laissant entendre une remise sur facture de 8 %
sur nos prix nets rentrée scolaire.
Ces conditions nétant
pas conformes à la législation actuelle (loi
Sapin), Plein Ciel a adressé en date du 30 mai un
rectificatif aux Maisons de la Presse pour les
informer que cette remise de 8 % serait pratiquée
rétroactivement et non pas sur facture. »
186. M. Frankel, de la société
Plein Ciel Diffusion, a confirmé, lors de son audition
du 4 septembre 1996 (cf. cotes 703 à 709
du rapport), que cette note « renvoie à
un problème survenu lan dernier, où nous
avions annoncé aux Maisons de la Presse, clients traditionnels
de Sodalfa, que nous avons racheté fin 1993, quils
bénéficieraient dune ristourne sur facture
de 8 %. Ces revendeurs nayant pas de lien juridique
avec nous, cela a heurté les services commerciaux de
Noblet. Jai reçu, à cette occasion, un
appel de M. Jean-Pierre Noblet qui me rappelait que les
remises quil moctroyait étaient strictement
conditionnelles, et quen conséquence, je ne pouvais
pas les porter sur facture lors de mes propres reventes. Jai
donc informé le client concerné, à savoir
la SEDIF, que ces remises ne pourraient donc être portées
sur facture, puisque liées à des conditions
dassortiment et de PLV ».
d) Lintervention de la société
Noblet auprès du magasin Carrefour de Langueux à
la demande du magasin Leclerc de Plérin
187. Une télécopie
émanant du magasin E.-Leclerc à Plérin
(Côtes-dArmor), reçue par la société
Noblet le 18 septembre 1995 (cf. cotes 779 et 782
du rapport), signale la parution le même jour, dans
le quotidien Ouest-France, dune publicité
de lhypermarché Carrefour de Langueux (Côtes-dArmor)
proposant la calculatrice Casio FX 9900 GC à 719 F
au lieu dun prix barré de 749 F.
188. M. David Lebreton,
responsable du rayon bazar technique du magasin Leclerc, a
déclaré, lors de son audition du 18 juin 1996
(cf. cotes 783 à 786 du rapport) :
« Jai contacté
Galec et le fournisseur Noblet pour avoir des explications.
Ce dernier ma indiqué quil allait faire
remonter le prix chez ce distributeur .»
189. Le 18 septembre 1996,
M. Baratte communiquait cette annonce, sans commentaire
particulier, à M. Marc Altes, chef de collection
électronique-photo-ciné-son du groupe Carrefour
(cf. cote 778 du rapport).
190. M. Christophe Artese, chef de
rayon photo-hifi de lhypermarché Carrefour de
Langueux, a expliqué, le 20 juin 1996 (cf.
cotes 682 à 684 du rapport), avoir effectué
cette opération publicitaire lors de la rentrée
des classes 1996, afin découler son stock de
calculatrices Casio CFX 9900 GC, pour laquelle il
avait fait des prévisions de ventes trop optimistes.
Il précise :
« Jai fixé
ce prix de 719 F, compte tenu des ristournes que le fournisseur
nous accordait en application des accords nationaux signés
avec lui. Dans le même temps, jai demandé
par télex, puis par lettre au fournisseur, de mentionner
ces ristournes sur facture. Il sy est refusé
prétextant quelles étaient conditionnelles,
ce qui nétait pas le cas.
Dès le lundi 18 septembre,
jour de début de la promotion sur la Casio 9900, le
fournisseur ma appelé pour mindiquer que
la promotion ne me permettrait pas daugmenter les ventes
et minviter ainsi à remonter mon prix.
Je my suis refusé dans
la mesure où, dune part, je pourrais pratiquer
ce prix et, dautre part, il était hors de question
de mécontenter la clientèle qui pourrait être
attirée par cette publicité. Une promotion en
période de rentrée des classes en première
page de Ouest-France sur un article de cette valeur
peut amener des consommateurs à effectuer un déplacement
de 50 à 60 kilomètres. »
191. M. Christophe Artese
a ajouté que la société Noblet a ultérieurement
accepté de reprendre son stock résiduel, malgré
son refus, lors de cette intervention, de remonter son prix.
Toutefois, il a précisé que la société
Noblet lui avait rappelé quelle souhaiterait
quil évite à lavenir de renouveler
de telles opérations publicitaires.
e) Lintervention
de la société Noblet
auprès du groupe Comptoirs Modernes
192. Une
télécopie émanant dun distributeur
dénommé « Toubureau »,
a été transmise, le 13 septembre 1995,
par M. Paumier, directeur commercial du réseau
traditionnel de la SA Noblet à M. Baratte, directeur
commercial grande distribution de la société
Noblet. Ce document reproduisait une publicité de lenseigne
des supermarchés Stoc proposant la calculatrice Casio
FX 92 au prix de 85 F (cf. cote 787 du rapport).
193. M. Baratte a déclaré
à propos de ce document, lors de son audition du 7 juin 1996,
ne pas avoir réagi auprès des supermarchés
Stoc suite à cette information (cf. cotes 608 à
615 du rapport).
194. M. Jean-Luc Charruault,
directeur des achats bazar du groupe Comptoirs Modernes exploitant
cette enseigne, entendu le 5 juillet 1996 (cf. cotes
788 à 794 du rapport), a déclaré avoir
décidé de retenir la calculatrice Casio FX 92
pour une promotion sur toute la dernière page de son
prospectus national de rentrée des classes 1995, et
avoir ainsi pu anticiper, du fait de laugmentation prévisible
des volumes de vente induite par une telle opération,
un taux de ristourne différée tel que déterminé
par les conditions commerciales de la société
Noblet lui permettant de proposer ce produit aux prix de 85 F.
195. M. Charruault a ajouté :
« M. Gouriou [lacheteur
en charge de ces produits] nous indique avoir reçu
à la suite de la diffusion de cette publicité
un appel de son correspondant chez Noblet, M. Bachelet,
faisant part de son mécontentement en raison du prix
inférieur au prix de marché que nous avons retenu. »
f) Le comportement du
groupement de grossistes Sodalfa
196. Pour
la rentrée des classes 1993, la société
Noblet avait, à lorigine, annoncé à
ses clients un premier niveau de prix de revente minimum TTC,
sétablissant notamment à 70 F TTC
pour le modèle FX 92 et 265 F TTC pour
le modèle FX 6800 G (cf. annexe 9, cote 63
du rapport denquête).
197. Par lettre du 7 juin 1993
(cote 803 du rapport du rapporteur), la société
Noblet écrit à Sodalfa, pour linformer
dune augmentation denviron 3 % du tarif des
calculatrices Casio motivée par laugmentation
du cours du yen et lui faire connaître les nouveaux
prix de revente minima TTC :
« Laugmentation
importante du yen, + 16 % depuis le début
de lannée, nous met dans lobligation de
modifier les prix des calculatrices Casio de lordre
de 3 %.
Nous navons volontairement répercuté
quune partie de laugmentation de la monnaie de
façon à ne pas grever les prix de vente de nos
calculatrices. Notre nouveau tarif que nous vous remettons
ci-inclus entrera en vigueur à compter du 28 juin 1993.
Nous vous communiquons, ci-joint,
le détail des calculatrices Casio scientifiques, programmables
et graphiques Rentrée des classes 1993
vous donnant pour chaque modèle les prix HT et
TTC. Sauf avis contraire de votre part, nous traiterons donc
votre commande aux conditions annoncées. »
198. A la suite de cette
lettre, Mme Anne Le Crom Lichou, assistante « produits »
chez Sodalfa, a fait parvenir à M. Karmes, de
la société Noblet (par télécopie
du 9 juin 1993, faisant référence
à un entretien téléphonique du même
jour, cote 804 du rapport), copie de la page des machines
à calculer du catalogue scolaire rentrée des
classes, sur laquelle étaient présentés
les modèles FX 92 et FX 6800 G aux prix
respectifs de 70 F et 265 F TTC, en indiquant :
« Monsieur,
Suite à notre entretien ce
jour, je vous envoie un exemplaire de la page des machines
à calculer de notre catalogue scolaire RDC, tiré
à un million dexemplaires. Vous constaterez que
nous avons respecté les prix que vous nous avez communiqués
pour la FX 92 Collège et pour la FX 6800.
Nous comptons sur vous pour trouver une solution concernant
les prix publics. »
199. Il résulte,
des termes des documents figurant en cotes 808 à
817 du rapport, que la société Noblet a obtenu
de ce distributeur lenvoi à chacun de ses clients
détaillants concernés dune demande dinsertion
dun erratum dans ses catalogues, moyennant la prise
en charge par la société Noblet des frais dencart,
de photogravure et montage correspondants pour un total de
55 000 F.
200. Selon lerratum
ainsi publié, le catalogue Sodalfa proposait les machines
Casio FX 92 Collège et FX 6800 G
aux prix de 72 F et 275 F, soit les nouveaux prix
de cession TTC de la société Noblet tels
quindiqués en annexe à la lettre
du 7 juin 1993.
201. Le 30 juin 1993,
M. Paslier, directeur général de la société
Sodalfa, a écrit à ses clients pour leur faire
part de la hausse du tarif des machines Casio, en leur précisant
(cf. cote 808 du rapport) :
« (...) Bien quun
texte en page 2 du magazine stipule que les prix sont
indicatifs, Casio nous a demandé de bien vouloir, pour
lui éviter tout problème ultérieur, vous
demander dencarter un erratum dans chaque magazine. »
202. Le 15 juillet 1993,
M. Noblet lui-même écrivait à M. Paslier
pour le remercier de son aide apportée dans « la
correction des prix Casio » (cf. cote 806
du rapport) :
« Je voudrais vous remercier
de votre compréhension et de toute laide que
vous avez bien voulu nous apporter dans la correction des
prix Casio. Grâce à vous, nous pouvons ainsi
offrir à notre distribution une politique préservant
les intérêts de chacun. Jespère
que nous connaîtrons ensemble une rentrée scolaire
aussi réussie quen 1992 (...). »
2.5. Les prix pratiqués
a) Les prix pratiqués
lors de la rentrée des classes 1995
203. Le
tableau ci-après récapitule les prix de vente
des calculatrices Casio tels quils résultent
des prospectus publicitaires édités par un nombre
significatif de distributeurs à loccasion de
la rentrée des classes 1995, et notamment des
prospectus nationaux publiés par la plupart des groupes
de la grande distribution à dominante alimentaire :
ENSEIGNES |
DATES |
CASIO |
|
Début
validité |
Fin
validité |
FX
92 C |
FX
180 P |
FX
6800 G |
FX
6900 G |
FX
7900 GC |
CFX
9900 GC |
Cf.
cotes |
ANNEXES |
Auchan |
25/08 |
9/09 |
89 |
159 |
229 |
299 |
549 |
749 |
4 601 |
167 |
Carrefour |
23/08 |
9/09 |
89 |
159 |
|
299 |
549 |
749 |
1 304 |
56 |
Casino Géant |
16/08 |
26/08 |
89 |
|
|
299 |
549 |
749 |
4 813 |
176 |
Continent |
23/08 |
2/09 |
89 |
159 |
229 |
299 |
549 |
749 |
4 364 |
157 |
Cora |
23/08 |
2/09 |
89 |
|
|
299 |
549 |
749 |
3 288 |
121 |
Mammouth |
23/08 |
2/09 |
89 |
159 |
|
299 |
|
749 |
4 148 |
152 |
Interdiscount |
|
15/10 |
89 |
159 |
229 |
299 |
549 |
749 |
6 014 |
250 |
Leclerc |
23/08 |
2/09 |
89 |
159 |
|
299 |
|
749 |
2 395 |
80 |
Nouvelles Galeries |
20/08 |
16/09 |
89 |
|
|
|
|
749 |
5 329 |
210 |
Boulanger |
|
23/09 |
|
|
|
304 |
549 |
762 |
6 142 |
262 |
Plein Ciel |
22/07 |
16/09 |
90,5 |
161,7 |
|
304 |
555,2 |
761,60 |
6 525 |
274 |
204. En cotes 818
à 824 du rapport figurent 231 relevés de
prix effectués par les agents de la DGCCRF au cours
des mois doctobre et novembre 1995 ; ils font
ressortir une forte homogénéité des prix
sur les principaux modèles de calculatrices.
b) Les prix pratiqués
lors de la rentrée des classes 1996
205. Le
dossier contient également les prospectus publicitaires
édités à loccasion de la rentrée
scolaire 1996 par les principales enseignes de la grande
distribution : Leclerc (cf. annexe 80, cotes 2397
à 2399), Continent et Champion (cf. annexe 153,
cotes 4262 et 4263), Carrefour (cf. annexe 56, cotes 1353
à 1363), Auchan (cf. annexe 321, cote 7461),
Interdiscount (cf. annexe 323, cote 7463), Casino
(cf. annexe 322, cote 7462), Plein Ciel diffusion
(cf. annexe 272, cotes 6485 et 6509 du rapport denquête).
3. Les conditions de
vente de la société
Texas Instruments France et leur mise en uvre
3.1. Les conditions commerciales
de la société Texas Instruments France
206. Le
dispositif mis en place par la société Texas
Instruments France est expliqué par M. Pietri,
son directeur commercial :
« Les critères
que je prends en compte pour la détermination de ma
politique de prix sont, dune part, mon prix dachat
des produits et les objectifs fixés par mon plan et,
dautre part, le positionnement de mes produits sur le
marché. Cette dernière contrainte sest
accrue en 1985 et 1990 avec limportance croissante du
rôle des hypermarchés dans la distribution de
ces produits.
Les pratiques de marges avant
que lon observait jusqualors dans ce secteur ont
fait place à des pratiques de prix coûtant, cest-à-dire
prix facturé sur un nombre limité
de produits-phares, dabord en période de rentrée
des classes, puis tout au long de lannée.
Le mode de calcul de nos prix de cession
à ces distributeurs, qui aboutit à des prix
coûtants TTC psychologiquement attractifs, a été
de notre part une adaptation à ces pratiques de la
grande distribution. Ce faisant, nous adaptons notre positionnement
prix à celui des produits concurrents, qui paraissent
soumis au même phénomène (...) »
(cf. cote 827 du rapport).
207. La politique tarifaire
de la société Texas Instruments France reposait
sur une classification des distributeurs par catégories
en fonction des services rendus par eux.
208. A partir de cette
classification, lappartenance à telle ou telle
catégorie donnait lieu à des différences
tarifaires très importantes selon les distributeurs.
Les conditions commerciales de la société Texas
Instruments France prévoyaient également des
ristournes différées dont les plus importantes
étaient attribuées aux distributeurs bénéficiant
des tarifs les plus élevés.
a) La différenciation
tarifaire
par catégories de revendeurs
209. M. Pietri,
directeur commercial de la société Texas Instruments
France, a expliqué la politique tarifaire de cette
société (cf. audition du 7 août 1996,
cotes 825 à 832 du rapport) :
« Notre politique tarifaire
consistant à proposer aux différentes catégories
de distributeurs des niveaux de prix distincts, basés
sur des critères de services rendus, a été
mise en place sous mon impulsion il y a une dizaine dannées.
Auparavant, existait un barème quantitatif en fonction
du conditionnement, applicable de manière indifférenciée
à tout distributeur. Lécart de conditions
tarifaires qui résultait de volumes commandés
était de 10 % de remise pour les plus petites
commandes à 25 % pour les plus importantes.
Le système actuel, depuis lorigine,
comporte un premier palier correspondant au système
de vente en libre-service, où le distributeur se contente
dexposer nos produits.
Le deuxième palier,
équivalent à des prix inférieurs de 10 %
aux précédents, correspond aux distributeurs
qui sont à même de présenter aux clients
et de leur fournir des explications. Il sagit pour lessentiel
des grands magasins.
Le troisième palier, qui correspond,
sur les tarifs promotionnels des produits scolaires, à
un niveau inférieur de 20 % au premier palier,
est appliqué aux distributeurs qui regroupent un certain
nombre de magasins (exemple : FNAC ou Plein Ciel), imposent
un référencement commun obligatoire, génèrent
des actions promotionnelles pour lensemble du groupe,
qui font lobjet dune livraison et dune facturation
en un seul point, et génèrent un règlement
unique.
Les deux derniers paliers, qui vont
jusquà 24 % de réduction, sont
applicables aux grossistes, et différenciés
selon le caractère obligatoire ou non du référencement
quils proposent et leur rôle en matière
de stockage (...).
Lensemble de ces critères
a été mis en place progressivement à
partir de 1988. Ils sont inchangés depuis 1990-1991. »
210. A côté
de ces prix distincts par catégorie de distributeurs
en fonction des services rendus, les conditions commerciales
de la société Texas Instruments France prévoyaient
également, pour certaines de ces catégories,
des ristournes différées, cest-à-dire,
selon la société Texas Instruments France, des
ristournes présentant un caractère conditionnel.
Ces ristournes différées étaient plus
importantes pour les distributeurs des catégories bénéficiant
des tarifs les plus élevés.
211. Cette différenciation
tarifaire par catégorie de revendeurs figure sur la
série de documents intitulés « conditions
commerciales calculatrices 1995 », conditions
commerciales qui ont été reconduites en 1996
et 1997.
Les cinq catégories de revendeurs
différenciées par les conditions commerciales
de vente ont été spécifiées dans
une lettre adressée par la société Texas
Instruments France au rapporteur le 4 août 2000
(cf. cotes 847 à 852 du rapport).
212. La catégorie I
correspondait aux « revendeurs non spécialisés
dans la vente de produits électroniques, disposant
de vendeurs ou conseillers non exclusivement affectés
à la vente de calculatrices, et/ou disposant les produits
en libre-service ». Cette catégorie
concerne les hypermarchés comme Carrefour, Auchan,
Leclerc, Cora, Casino, Continent, Mammouth, Intermarché,
Métro et Système U (cf. cote 468 du
rapport).
213. La catégorie II
correspondait aux « revendeurs disposant dun
rayon et de vendeurs spécialement affectés à
la vente de calculatrices et ne disposant pas de produits
en libre-service ». En pratique, cette catégorie
concerne les supermarchés et les grands magasins comme
les magasins Nouvelles Galeries, Galeries Lafayette, Printemps,
BHV, Prisunic, Monoprix (cf. cote 468 du rapport).
214. La catégorie III
correspondait aux « revendeurs disposant dun
rayon spécifiquement affecté à la vente
de calculatrices, dont les vendeurs ont suivi une formation
technique sur les produits Texas Instruments France et ne
disposant pas de produits en libre-service. Du point de vue
logistique, ces revendeurs sont dans lobligation de
centraliser leur stock sur des entrepôts régionaux
ou nationaux afin de permettre à la société
Texas Instruments France de livrer et facturer un nombre limité
dadresses ».
215. La société
Texas Instruments France considère que : « Les
conditions tarifaires de cette catégorie sappliquent
également aux groupements de revendeurs-papetiers disposant
dun rayon spécialement affecté à
la vente de calculatrices et ne disposant pas de produits
en libre-service. Les livraisons et facturations seffectuent
sur un entrepôt logistique national permettant de maintenir
en permanence un stock sur les produits TI »
(cf. cote 839 du rapport). Selon la société
Texas Instruments France, entraient dans cette catégorie,
dune part, les magasins FNAC, Darty, Boulanger, Hypermédia,
Interdiscount, dautre part, les groupements Plein Ciel
Diffusion, Majuscule, Buro +/SACFOM, Intropa, Papethèque
(cf. cote 468 du rapport).
216. La catégorie IV
correspondait aux « grossistes-distributeurs
indépendants qui réalisent avec elle un chiffre
daffaires minimum de 200 000 F par adresse
de livraison-facturation et suivent en stock en permanence
32 produits calculatrices Texas Instruments »,
tels quArrety et Sodalfa (cf. cote 468 du rapport).
217. La catégorie V
correspondait aux « groupements grossistes-distributeurs
et grossistes-distributeurs indépendants disposant
dune représentativité nationale, à
travers un minimum de 4 agences/entrepôts ».
Chaque grossiste-distributeur doit par ailleurs, remplir
les conditions de la catégorie 4 (un chiffre daffaires
minimum de 200 000 F par adresse de livraison-facturation,
et suivi en stock, en permanence, de 32 produits calculatrices
TI). Ces grossistes sont Distributeurs associés, Gramma
et Spicers (cf. cote 468 du rapport).
218. La société
Texas Instruments France réalisait, au moment des faits
reprochés, environ 50 % de ses ventes de calculatrices
scientifiques ou scolaires auprès des distributeurs
correspondant à la première catégorie.
b) Les tarifs et les
remises
pour chaque catégorie de revendeurs
219. Les
pièces intitulées « conditions
commerciales calculatrices 95 », dune
part, et « tarif » pour la période
allant du 1er avril 1993
au 1er mars 1996, dautre
part, montrent que la société Texas Instruments
France éditait un tarif de base pour ses produits et
que les conditions tarifaires prévoyaient des remises
sur ces tarifs dont le montant variait en fonction de la catégorie
à laquelle appartenait le distributeur, dune
part, et des produits concernés, dautre part
(cf. cotes 838 à 846 et 853 à 864
du rapport).
220. Toutefois, il ressort
de ces mêmes documents que les calculatrices dénommées
« scolaires » ou « scientifiques »
ne bénéficiaient daucune remise sur facture,
mais faisaient lobjet toute lannée de tarifs
dits « promotionnels » qui différaient
selon la catégorie à laquelle appartiennent
les distributeurs.
Les prix promotionnels nets applicables
aux calculatrices « scolaires »
Les
prix promotionnels consentis aux 5 catégories de distributeurs :
221. Après lénoncé
des remises sur tarifs, les conditions tarifaires susvisées
précisent, pour les 5 catégories de distributeurs :
« Des prix promotionnels nets peuvent sappliquer
sur certains produits. »
222. Les prix promotionnels
nets étaient déclinés en plusieurs niveaux
distincts applicables aux différentes catégories
de distributeurs : les prix promotionnels les plus élevés
étaient pratiqués par Texas Instruments France
à légard de la catégorie I,
puis ils décroissaient de la catégorie II
à la catégorie V.
223. En effet, par rapport
aux hypermarchés (catégorie I), les distributeurs
des autres catégories obtenaient des prix promotionnels
inférieurs :
DÉTAILLANTS |
GROSSISTES |
Catégorie II
(supermarchés,
grands magasins)
par rapport
à catégorie I |
Catégorie III
(FNAC, Darty,
Plein Ciel...)
par rapport
à catégorie I |
Catégorie IV
(grossistes)
par rapport
à catégorie I |
Catégorie V
(grossistes)
par rapport
à catégorie I |
- 10 % |
- 20 % |
- 20 % |
- 23,50 % |
224. Par
rapport au tarif de base, les prix promotionnels des calculatrices
scolaires par segment correspondaient aux réductions
suivantes (exemple à partir des tarifs Texas Instruments
France au 1er septembre 1995) :
|
SCIENTIFIQUES
simples |
SCIENTIFIQUES
programmables
non
programmables |
SCIENTIFIQUES
programmables
graphiques |
Catégorie I
(hypermarchés) |
de - 15,4 %
à - 16,7 % |
de - 16 %
à - 30 % |
de - 17,6 %
à - 32,7 % |
Catégorie II
(supermarchés et grands magasins) |
de - 15,4 %
à - 25 % |
de - 24,4 %
à - 37,1 % |
de - 24,2 %
à - 39,4 % |
Catégorie III
(FNAC, Darty, Plein Ciel...) |
de - 23,1 %
à - 33,3 % |
de - 32,8 %
à - 44,1 % |
de - 32,6 %
à - 46,1 % |
Catégorie IV
(grossistes indépendants) |
de - 23,1 %
à - 33,3 % |
de - 32,8 %
à - 44,1 % |
de - 28,3 %
à - 46,1 % |
Catégorie V |
- 36 % |
de - 35,7 %
à - 46,5 % |
de - 35,5 %
à - 48,5 % |
Les prix
proposés aux sociétés de vente par correspondance :
225. Dans les conditions
commerciales de la société Texas Instruments
France, les sociétés de vente par correspondance
napparaissent pas comme une catégorie de revendeurs
bénéficiant dun cadre de conditions commerciales
formalisées.
226. Toutefois, les documents
saisis dans les locaux commerciaux de la société
Texas Instruments France montrent quelles ont bénéficié
de conditions tarifaires plus avantageuses que celles, théoriques
ou réelles, accordées aux autres catégories
de revendeurs.
227. Ainsi, la « proposition
de sélection » CAMIF P/E (pour printemps-été)
1996, adressée en télécopie du 17 juillet 1995
par M. Freysz à ce distributeur (cf. cotes 865
à 868 du rapport) proposait les prix nets suivants :
MODÈLES |
PRIX
proposé
à la CAMIF |
PRIX
catégorie I |
ÉCART
par rapport à
la catégorie I |
TI 30 |
49,00 |
66,61 |
- 26,4 % |
TI 40 GXY |
70,00 |
108,77 |
- 35,5 % |
TI 80 |
200,00 |
294,27 |
- 32,0 % |
TI 81 |
285,00 |
420,74 |
- 32,3 % |
TI 82 |
388,00 |
589,37 |
- 34,2 % |
TI 85 |
470,00 |
715,85 |
- 34,3 % |
TI 92 |
830,00 |
1 235,48 |
- 32,8 % |
228. Par
ailleurs, la « Sélection 3 Suisses
P/E/96 » (cf. cote 869 du rapport) comportait
pour trois modèles (TI 80, TI 81, TI 85)
des prix HT nets proposés à ce distributeur
identiques à ceux présentés ci-dessus
pour la Camif mais, pour deux autres modèles, des prix
encore inférieurs :
TI 40 Galaxy : 68,00 F,
soit - 37,5 % par rapport au tarif catégorie I ;
TI 82 : 373,80 F, soit - 36,6 %
par rapport au tarif catégorie I.
c) Les ristournes et
les rémunérations différées
Les ristournes consenties aux distributeurs
détaillants (catégories I, II et III)
229. Pour
1995, au sein des avantages différés proposés
dans ses conditions générales de vente, la société
Texas Instruments France distinguait ce quelle appelait
des « ristournes différées »,
dune part, et la « rémunération
de services », dautre part.
Sagissant
des distributeurs de la catégorie I :
230. Les conditions
commerciales prévoyaient deux ristournes relatives,
lune, à la mise en linéaire et lautre
à la progression du chiffre daffaires, et deux
« rémunérations » relatives
à la facturation et au stockage :
Les ristournes de mise en linéaire
231. Cette
ristourne variait de 1 à 4 % sur le chiffre daffaires
annuel HT et nétait accordée que si les
deux conditions cumulatives suivantes étaient remplies
par le distributeur :
- le référencement
permanent de 6 produits minimum à 20 produits maximum ;
- la mise en linéaire
de 3 produits au minimum à plus de 10 produits dans
80 % du magasin tout au long de lannée (cf.
cotes 876 à 877 du rapport).
232. Jusquen 1994,
cette ristourne était accordée en contrepartie
du seul référencement dun certain nombre
de produits. Ce nest quen 1995 que la société
Texas Instruments France a assorti la ristourne de référencement
de la condition supplémentaire consistant dans la mise
en linéaire des produits.
233. M. Pietri, directeur
commercial de la société Texas Instruments France,
a expliqué dans quel contexte a eu lieu ce changement :
« En 1994, Leclerc a
présenté sur son tract rentrée
des classes des produits TI à un prix correspondant
à notre prix facture diminué du montant (3 %)
dune ristourne de référencement liée
au nombre de produits. En effet, chez Leclerc, le référencement
dun fournisseur est global et lensemble de ses
produits sont considérés comme références.
A lépoque, notre ristourne de référencement
nimposait que le référencement dun
certain nombre de produits, après quoi elle pouvait
être considérée comme de principe acquis.
Cest en 1995 que nous avons assorti la ristourne de
référencement de la condition supplémentaire,
consistant en la mise en linéaire des produits. »
(Cf. cotes 825 à 832 du rapport).
Ristournes de volumes/progression
234. Cette
ristourne variait de 1 à 6 % et nétait
accordée que si les deux conditions suivantes étaient
remplies :
- un chiffre daffaires
HT annuel variant entre 8 millions de francs minimum
et 18 millions de francs,
- le chiffre daffaires
HT annuel des produits non scientifiques dau moins 20 %
du chiffre daffaires HT annuel global (cf. cote 878
du rapport).
235. Toutefois, pour les
distributeurs réalisant un chiffre daffaires
annuel inférieur à 8 millions de francs,
la société Texas Instruments France a prévu
une ristourne de progression de 1 à 3 % sur le
chiffre daffaires HT net pour une progression par rapport
au chiffre daffaires de lannée précédente
de 10 à 30 %. Dans ce cas, le chiffre daffaires
HT annuel des produits non scientifiques devait atteindre
au moins 20 %.
Rémunération de « la
livraison-facturation sur entrepôt »
236. Cette
rémunération variait de 3 à 5,5 %
sur le chiffre daffaires HT annuel en fonction du nombre
de points de vente approvisionnés par lentrepôt
ou la plate-forme du distributeur (cf. cotes 877 à 879
du rapport).
Il ressort de la pièce cotée 838
et 839 que pour les distributeurs appartenant à la
catégorie III, ce même service était
rémunéré par un prix promotionnel sur
facture attractif, alors que sagissant des distributeurs
de la catégorie I, ce service donnait lieu à
une « remise arrière conditionnelle ».
Rémunération pour stockage permanent
237. Cette
rémunération sélève à
2 % du chiffre daffaires HT annuel et sappliquait
aux revendeurs dont les entrepôts ou les plates-formes
géraient en permanence un stock de produits TI
sans quaucune livraison ne soit effectuée directement
aux points de vente à aucune période de lannée
(cf. cote 879 du rapport).
238. Lensemble de
ces ristournes et rémunérations pouvait permettre
aux distributeurs de la catégorie I (hypermarchés)
de bénéficier dune remise arrière
globale de 17 % maximum.
Sagissant
des distributeurs de la catégorie II :
239. Les conditions
commerciales calculatrices 1995 prévoyaient trois
des ristournes concernant la catégorie I à
des taux identiques : la ristourne de mise en linéaire,
la rémunération pour livraison-facturation sur
entrepôt et la rémunération pour stockage
permanent (cf. cotes 881 à 884 du rapport).
240. La ristourne de volume/progression
nétait pas prévue pour cette catégorie.
En théorie, lensemble de ces ristournes pouvait
permettre aux distributeurs de la catégorie II
(supermarchés et grands magasins) de bénéficier
dune remise arrière globale de 11,5 % maximum.
Sagissant
des distributeurs de la catégorie III :
241. Les conditions
commerciales calculatrices 1995 ne prévoyaient
aucune condition de ristournes différées ou
de rémunérations de services (cf. cotes 885
à 886 du rapport).
242. Le tableau ci-après
reprend les prix promotionnels et les ristournes arrière
figurant dans les conditions de vente des distributeurs de
chacune des catégories I, II et III.
|
CATÉGORIES |
|
I |
II |
III |
Prix nets. |
Prix
promotionnels
Catégorie I |
Prix
promotionnels
Catégorie I
- 10 % |
Prix
promotionnels
Catégorie I
- 20 % |
Ristournes maximales prévues
dans les CGV. |
17 % |
11,5 % |
Pas de
ristourne |
Les ristournes consenties aux distributeurs
grossistes
(catégories IV et V)
Sagissant des
grossistes de la catégorie IV (grossistes distributeurs
indépendants), les conditions commerciales 1995
ne prévoyaient aucune ristourne différée
(cf. cotes 887 et 888 du rapport).
Sagissant des grossistes de
la catégorie V (groupements de grossistes-distributeurs
et grossistes distributeurs indépendants disposant
dune représentativité nationale), les
conditions générales de vente prévoyaient
la signature dun contrat entre le grossiste et la société
Texas Instruments France et loctroi de trois ristournes
différées (cf. cotes 889 à 892
du rapport).
Les ristournes liées à la coopération
commerciale
243. En dernière
page des conditions commerciales calculatrices 1995-1996-1997
(sauf pour la remise dite de « livraison-saison »),
figure une rubrique « contrat de coopération
commerciale » sans quil soit précisé
à quelles catégories de distributeurs se rapporte
cette mention (cf. cote 893 du rapport).
244. Dans cette rubrique,
la société Texas Instruments France précise :
« Nos accords de coopération
commerciale sont directement liés aux conditions générales
dachat de nos clients. La variété et létendue
du nombre de prestations qui nous est proposé rendent
impossible létablissement dun barème
de rémunération de ces prestations. Seule la
livraison pré-saison, dont les modalités sont
décrites ci-dessous, fait lobjet dune rémunération
proportionnelle établie par nos soins.
Livraison pré-saison.
Pour tous les points de vente des
revendeurs de la catégorie I et II est proposée
une remise de pré-saison valable pour toute commande
effectuée en prévision de la rentrée
des classes, livrée et facturée entre le 1er
et le 30 juin 1995, dun montant de 2 %
sur le chiffre daffaires HT net de retour du mois de
juin 1995 réalisé par la société
Texas Instruments avec ce point de vente ou entrepôt/plate-forme.
Ce montant sera facturé par le distributeur ».
3.2. La mise en uvre
des conditions commerciales
de Texas Instruments France
a) Les tarifs promotionnels
pour la catégorie I
245. Le
7 août 1996, M. Pietri, directeur commercial
de la société Texas Instruments France, a déclaré :
« (...) le mode de calcul
de nos prix de cession à ces distributeurs (catégorie I),
qui aboutit à des prix coûtants TTC psychologiquement
attractifs, a été de notre part une adaptation
à ces pratiques de la grande distribution (pratiques
de prix coûtants) (...) » (cf. cote 827
du rapport).
246. Ces montant
TTC sont intitulés dans les tarifs de la société
Texas Instruments France « prix publics TTC gén.
constatés ».
SCOLAIRES |
1er OCTOBRE 1993 |
1er JUIN 1994 |
1er SEPTEMBRE
1995 |
1er MARS 1996 |
|
Prix
promo net
Cat. I |
Prix TTC |
Prix
promo net
Cat. I |
Prix TTC |
Prix
promo net
Cat. I |
Prix TTC |
Prix
promo net
Cat. I |
Prix TTC |
TI 9 GLXY |
83,47 |
99,00 |
83,47 |
99,00 |
83,47 |
99,00 |
82,09 |
99,00 |
TI 30X |
66,61 |
79,00 |
66,61 |
79,00 |
66,61 |
79,00 |
65,50 |
79,00 |
TI 40 GLXY |
|
|
108,77 |
129,00 |
108,77 |
129,00 |
106,96 |
129,00 |
TI 35X |
|
|
|
|
|
|
|
|
TI 67 GLXY |
193,08 |
229,00 |
193,08 |
229,00 |
193,08 |
229,00 |
165,00 |
199,00 |
TI 68 |
223,44 |
265,00 |
223,44 |
265,00 |
223,44 |
265,00 |
|
|
TI 81 |
420,74 |
499,00 |
420,74 |
499,00 |
420,74 |
499,00 |
330,84 |
399,00 |
TI 82 |
631,53 |
749,00 |
589,37 |
699,00 |
589,37 |
699,00 |
538,14 |
649,00 |
TI 85 |
834,74 |
990,00 |
834,74 |
990,00 |
715,85 |
849,00 |
703,98 |
849,00 |
b) La nature des ristournes
et rémunérations
Le principe
247. Le caractère
conditionnel de la ristourne de mise en linéaire (ou
ristourne de référencement), proposée
aux distributeurs des catégories I et II,
est énoncé très clairement par la société
Texas Instruments France dans les documents intitulés
« conditions commerciales calculatrices 1995 » :
« Ristourne de mise
en linéaire.
Sapplique pour tout revendeur
remplissant obligatoirement les conditions décrites
ci-dessous, qui seront vérifiées par notre force
de vente tout au long de la période. »
De la même façon, en 1994,
les conditions commerciales de la société Texas
Instruments France indiquaient : « (...)
le référencement obligatoire implique une présence
systématique de ces produits dans lensemble de
vos magasins ».
248. A cet égard,
M. Pietri, directeur commercial de la société
Texas Instruments France, a déclaré, lors de
son audition du 7 août 1996 (cf. cotes 825
à 832 du rapport) :
« (...) sagissant
plus particulièrement des conditions de ristournes
accordées à la catégorie I (...),
ces ristournes, et en particulier la ristourne de mise
en linéaire, également dénommée
ristourne de référencement, sont
des ristournes conditionnelles, subordonnées au respect
de ses engagements par le client. Nos commerciaux sont chargés
de veiller lors de leurs tournées au respect de ces
engagements et jen suis informé notamment au
moyen des rapports hebdomadaires qui me sont communiqués
chaque semaine par M. Freysz sur la base des rapports
des commerciaux. »
249. M. Pietri ajoute :
« (...) les documents
en cotes 38 et 46 du scellé 5 (cf. cotes 1019
et 1020 du rapport) sont des fax qui ont été
envoyés à Carrefour Centrale dachats pour
leur rappeler les prix de facturation en dessous desquels
leurs magasins ne devaient pas proposer nos produits, sauf
à se placer en revente à perte (...). Nous adressons
ce type de rappels à lordre à Carrefour
car nous estimons quils nont aucune possibilité
de vendre nos produits à un niveau inférieur
à notre prix de facturation, aucune ristourne nétant
acquise (...) le terme stock doit sentendre comme le
prix plancher de revente à perte en dessous duquel
ils ne doivent pas descendre (...). »
250. M Freysz, responsable
des ventes de la société Texas Instruments France,
a déclaré, lors de son audition du 9 juillet 1996 :
« (...) les indications
que je donnais à M. Altes de Carrefour, après
les mots préconisation de stock, correspondaient
en fait à lindication des prix de vente en dessous
desquels des problèmes de revente à perte pourraient
se poser (...) » (cote 1011 du rapport).
La pratique
251. De nombreuses
factures adressées à des clients du secteur
de la grande distribution alimentaire et figurant au dossier
font néanmoins mention de ces ristournes dites « conditionnelles »
sous le libellé « remise(s) inconditionnelle(s) »
à la société Auchan, à la société
Casino, à plusieurs magasins Leclerc, à plusieurs
magasins Carrefour (cf. cotes 908 à 988 du
rapport).
252. Sous ce libellé
de « remise(s) inconditionnelle(s) »,
figurent non seulement la ristourne dite de « référencement »
ou « de mise en linéaire » mais
également les ristournes classées, dans les
conditions générales de vente, dans la catégorie
« rémunération de services »
(livraison-facturation entrepôt et stockage permanent).
253. Interrogé
à ce sujet, M Pietri, directeur commercial de
la société Texas Instruments France, a expliqué
(cf. cotes 825 à 832 du rapport) :
« Ces ristournes, et
en particulier la ristourne de mise en linéaire
également dénommée référencement,
sont des ristournes conditionnelles (...). Le fait que cette
ristourne apparaisse sur certaines factures délivrées
à nos clients correspond néanmoins à
lengagement pris au départ par lacheteur
central ».
254. Dans une note manuscrite
adressée aux enquêteurs le 27 septembre 1996,
M. Pietri a ajouté, notamment (cf. cotes 993
et 994 du rapport) :
« Suite à votre
demande et à mes recherches, je vous confirme que la
remise de référencement négociée
et attribuée à Carrefour/France pour le nombre
de produits en rayon dans tous les magasins a été
payée intégralement au début de lannée
suivante à la centrale dachats.
Jai en effet considéré
que les instructions étaient données par cette
centrale sans que jaie à les sanctionner a posteriori.
Il est en effet impossible de contrôler
chacun des 117 magasins chaque mois.
Ma force de vente étant
réduite à six personnes, vous comprendrez aisément
cette impossibilité. »
255. Au sujet de ces ristournes,
M. Altes, du groupe Carrefour, a déclaré
(cf. cotes 1000 du rapport) :
« (...) Jestime
que les prix de vente mentionnés sur ma note constituent
des prix à marge avant nulle, et que la
seule marge faite sur ces produits vient des ristournes différées.
Il est vrai que la ristourne de référencement
accordée par la société Texas Instruments
pouvait être déduite de nos prix de vente, dans
la mesure où le référencement est déterminé
en début dannée. Mais, je nutilise
pas cette possibilité afin de garder toute liberté
quant à mon assortiment. »
256. Il ressort des documents communiqués
par la centrale CIM/Promodès que celle-ci a bénéficié
en 1995 dun taux de ristourne de volume/progression
supérieur à celui auquel la progression effective
de ses commandes lui donnait droit et que la garantie dune
reconduction de cette dérogation lui a été
donnée pour 1996 (cf. cotes 989 à 992 du rapport).
257. En effet, lavoir adressé
par la société Texas Instruments France à
la société CIM au titre de lannée 1995
mentionne « progression 3 % sur CA 6036059 »
et comporte un crédit de 181 081,77 F correspondant
effectivement au taux de 3 % (cote 989 du rapport).
258. Or, les pièces au dossier
montrent que la progression du chiffre daffaires réalisé
avec ce distributeur, entre 1994 et 1995, ne donnait droit
quà une ristourne de progression de 2 %
(cf. cotes 989 à 992 du rapport).
259. Entre 1994 et 1995, la société
Texas Instruments France a modifié les modalités
dapplication de la ristourne conditionnelle de référencement
pour renforcer son caractère conditionnel par ladjonction
dune seconde obligation relative à la mise en
linéaire.
260. En effet, ainsi que la
expliqué M. Freysz lors de son audition du 9 juillet 1996
reproduite au paragraphe 264, en 1994, la société
Texas Instruments France sest trouvée confrontée
au problème de la prise en compte par Leclerc, dans
la détermination de son prix de vente, des 3 %
correspondant à la ristourne de référencement.
261. Cette ristourne étant,
selon les déclarations des responsables de la société
Texas Instruments France aux enquêteurs, de principe
acquis, car correspondant à un engagement de référencement
en début de période, la société
Texas Instruments France ne pouvait pas, pour contraindre
Leclerc à ne pas vendre en dessous des prix promotionnels
sur facture, invoquer un prétendu caractère
conditionnel de ladite ristourne.
262. Aussi, en 1995, la société
Texas Instruments France a décidé dadjoindre
à lobligation de référencement
une obligation de mise en linéaire afin de conférer
à la ristourne attribuée en contrepartie du
respect de ces obligations, un caractère véritablement
conditionnel, cest-à-dire non répercutable
par le distributeur dans le prix de vente public.
263. Cette évolution est retracée
dans les déclarations de MM. Freysz et Pietri de la
société Texas Instruments France et par M. J.-L.
Barrier, responsable calculatrices au sein du Galec/Leclerc :
264. Ainsi, lors de son audition du
9 juillet 1996, M. Freysz a déclaré
(cf. cotes 1007 à 1017 du rapport) :
« Les documents 397
du scellé 12 et 569 du scellé 3 font état
du problème posé par lintégration
par Leclerc de leur ristourne de référencement
de 3 % dans les prix mentionnés pour nos produits
dans leur tract de rentrée des classes. Notre objectif,
dans ces cas-là, est déviter les problèmes
de boule de neige, par lesquels les distributeurs se livrent
à une surenchère génératrice de
reventes à perte ».
265. Lors de son audition du 7 août 1996,
M. Pietri a déclaré (cf. cotes 825
à 832 du rapport) :
« En 1994, Leclerc a
présenté sur son tract rentrée
des classes des produits TI à un prix correspondant
à notre prix facture diminué du montant (3 %)
dune ristourne de référencement liée
au nombre de produits. En effet, chez Leclerc, le référencement
dun fournisseur est global et lensemble de ses
produits sont considérés comme références.
A lépoque, notre ristourne de référencement
nimposait que le référencement dun
certain nombre de produits, après quoi elle pouvait
être considérée comme de principe acquis.
Cest en 1995 que nous avons assorti la ristourne de
référencement de la condition supplémentaire,
consistant en la mise en linéaire des produits (...).
Ces ristournes, et en particulier
la ristourne de mise en linéaire, également
dénommée ristourne de référencement,
sont des ristournes conditionnelles subordonnées au
respect de ses engagements par le client (...). »
266. Lors de son audition du 16 septembre 1996,
M. J.-L. Barrier, du Galec/Leclerc, a déclaré
(cf. cotes 688 à 693 du rapport) :
« En 1994, nous avons
répercuté, dans nos prix de revente des trois
produits présentés sur le catalogue, la RFA
de 3 % que nous accordait Texas Instruments. M. Pietri
mavait par la suite contacté pour me faire part
de son étonnement quant au niveau de nos prix de vente,
inférieurs aux prix pratiqués par lensemble
de nos concurrents, correspondant à ses prix facturés
TTC.
Lannée suivante, lors
de la négociation des conditions 1995, Texas Instruments
a supprimé la ristourne différée de 3 %
qui nous était accordée auparavant, afin déviter
que nous risquions de les mettre à nouveau en position
difficile vis-à-vis des autres enseignes.
Malgré notre souhait dobtenir
des ristournes inconditionnelles, nous navons pu obtenir
la compensation de cette ristourne que par des accords de
coopération commerciale ».
c) Les ristournes
effectivement accordées
267.
Daprès le tableau établi par la société
Texas Instruments France intitulé « Calculatrices
France. Analyse des marges nettes par circuit de distribution »
et daté de janvier 1996, les remises accordées
aux principaux clients sont les suivantes (cf. cote 1018 du
rapport) :
|
1995 |
CHIFFRES DAFFAIRES
(millions de francs) |
TAUX GLOBAL DES RISTOURNES
et des rémunérations de services
YEB (*) |
Catérogie I |
Auchan |
13 000 |
18 % |
|
Carrefour |
21 000 |
15 % |
|
Mammouth |
5 300 |
8 % |
|
Casino |
6 200 |
11 % |
|
Continent |
6 000 |
15 % |
|
Cora |
6 500 |
8 % |
|
Leclerc |
11 000 |
13 % |
Catégorie II |
Galeries Lafayette |
1 600 |
9 % |
Catégorie III |
FNAC |
15 200 |
3 % |
|
Darty |
6 800 |
3 % |
|
Interdiscount |
6 400 |
0 % |
|
Boulanger |
800 |
0 % |
|
Plein Ciel |
3 600 |
2 % |
|
Majuscule |
2 200 |
2 % |
Catégorie V |
Spicers |
3 700 |
3 % |
|
DA |
3 600 |
2 % |
Sociétés de vente
par correspondance |
Viking |
3 500 |
1 % |
|
CAMIF |
3 400 |
0 % |
|
3 Suisses |
2 200 |
2 %
|
(*) YEB signifie Year End Bonus, cest-à-dire
remise de fin dannée (cf. lettre du conseil
de la société Texas Instruments France
du 2 mars 2001). Dautres éléments
relatifs aux ristournes et rémunérations
effectivement accordées par la société
Texas Instruments France à ses clients figurent
dans le rapport denquête pages 52 à
65. |
3.3. Les prix de vente
publics minima
élaborés par la société Texas
Instruments France
a) Lélaboration
de prix publics
à lattention des distributeurs
268.
Les tableaux relatifs aux tarifs des années 1993 à
1996 de la société Texas Instruments France
détaillent les tarifs « promo »
nets accordés aux différentes catégories
de distributeurs et comportent, en outre, une colonne intitulée
« Prix public TTC GEN. CONSTATE » (cf.
paragraphe 246 de la présente décision).
269. M. Freysz, responsable des
ventes grand public de la société Texas Instruments
France, lors de son audition du 9 juillet 1996,
a précisé à cet égard (cf. cotes
1007 à 1017 du rapport) :
« Dune manière
générale, lors de mes contacts avec les centrales
de la grande distribution - comme tous nos clients -,
jétablis, à leur demande, des documents
sur lesquels ils trouveront, outre le tarif HT net qui leur
sera appliqué, des prix de vente TTC conseillés.
Ces prix sont, parfois, listés sous des libellés
tels que prix généralement constatés
ou prix TTC possibles. Dans tous les cas, il sagit
bien de lindication de prix de vente au détail
conseillés par Texas Instruments à des clients
qui lui en font la demande. »
270. Plusieurs documents montrent
que ces prix publics sont définis au sein de la société
avant toute commercialisation au stade du détail.
271. Ainsi un document présenté
lors du « Sales meeting » de janvier 1996
par M. Vincent Bastid, responsable marketing de la société,
concernant le prochain lancement dun nouveau modèle
de calculatrice, la TI 83, comporte lindication
du prix de 699 F (cf. annexe 42, cote 144 du
rapport denquête).
272. Si ce document ne mentionne pas
expressément un « prix public »,
cest toutefois ce chiffre de 699 F qui est indiqué
pour la TI 83, dans la colonne « Prix public
TTC GEN constate » du tarif au 1er mars 1996
(cf. cote 853 du rapport).
273. De la même façon,
le document intitulé « Proposition de sélection
Camif HT 96 » comporte la référence
du nouveau modèle de base TI 30 Xa, que la
société Texas Instruments France envisageait,
début 1996, de mettre sur le marché pour
la rentrée scolaire de la même année,
et, dans la colonne « PV TTC constate »,
le prix de 89 F quelle prévoyait de conseiller
pour la revente de ce produit (cf. cotes 868 du rapport).
b) Le niveau des prix
publics établis
par la société Texas Instruments France
274.
Concernant les prix conseillés établis par la
société Texas Instruments France, M. Pietri
a déclaré le 7 août 1996 :
« Les prix conseillés
qui apparaissent sur un certain nombre de documents saisis
dans notre société, du type proposition
de collections, sont établis par nous en fonction
de ce phénomène de prix coûtants de la
grande distribution : nous savons quen période
de rentrée scolaire et même le reste de lannée,
le prix de nos produits correspondra à nos prix de
cession à la grande distribution majorés de
la TVA » (cf. cote 827 du rapport).
275. Le tableau et les déclarations
de M. Pietri, figurant aux paragraphes 245 et 246
de la présente décision, font apparaître
que les « prix promo nets » facturés
aux distributeurs de la catégorie I (cest-à-dire
les prix coûtants) sont calculés pour correspondre
à des montants TTC psychologiquement attractifs (79,00 F-499,00 F...).
c) La diffusion des
prix publics
276.
Outre la proposition de tarif 1996 mentionnée au paragraphe 273,
faite par M. Freysz à la Camif et comportant une
colonne « PV TTC », dautres pièces
du dossier évoquent la diffusion de prix auprès
des distributeurs :
Une télécopie du 22 février 1991,
adressée par la société Texas Instruments
France à Major-Unidis/Comptoirs Modernes, sur laquelle
figure, parallèlement aux prix de cession portés
dans une colonne « PA HT », une autre
colonne « PV général constaté »
(cf. annexe 37, cotes 89 à 92 du rapport denquête) ;
Une lettre du 15 juin 1993,
adressée par la société Texas Instruments
France à La Redoute, comportant une « proposition
de produits pour catalogue printemps-été 1994 »,
où sont portés, en regard des prix dachat
HT nets, des « Prix vente TTC généralement
constatés » (cf. annexe 42, cotes 126
et 127 du rapport denquête) ;
Pour lannée 1993,
des documents titrés « Présélection »
ou « Proposition de collection » concernant
les distributeurs Auchan, Interdiscount, Intermarché,
Boulanger, Rallye et Mammouth, comportent des prix dachat
hors taxes nets, distincts selon la catégorie du distributeur,
mais des « PV TTC Cons. » toujours identiques ;
Pour lannée 1994,
des documents à lattention des distributeurs
La Redoute, Boulanger et Auchan (annexe 42, cotes 130
et 131, et annexe 43, cote 331) contiennent également
une colonne « Prix TTC cons ». Plus
particulièrement, sur le document destiné à
La Redoute apparaît lindication des coefficients
multiplicateurs résultant du rapport entre le « PA
HT net et le PV TTC cons » ;
Des documents relatifs à lannée 1995
et destinés aux groupes Galeries Lafayette, Mammouth,
Cora, Continent, comportant tous, en regard de la colonne
PA HT net une seconde colonne libellée « PV
TTC cons » (cf. annexe 37, cotes 38 et 39,
112 et 113, 136 et 141 du rapport denquête).
277. Par ailleurs, une télécopie
du 11 avril 1994, adressée par M. Freysz,
responsable des ventes de la société Texas Instruments
France, à M. Marc Altes, chef de produit de la
centrale dachat Carrefour, comporte les mentions suivantes
(cf. cote 875 du rapport) :
« Préconisation
de stock par magasin au niveau national à compter du
jeudi 21 avril :
TI 30 X = |
79 unités |
TI 40 GALAXY = |
129 unités |
TI 67 GALAXY = |
229 unités |
TI 82 = |
749 unités |
TI 85 = |
990 unités |
TI 81 = |
499 unités |
Merci de communiquer ceci à
lensemble de vos magasins. »
278. Questionné sur le
sens de ces indications, M. Freysz a indiqué,
le 9 juillet 1996 (cf. cotes 1007 à 1017
du rapport) :
« Le document, en cote
46 du scellé 5, est un fax que javais envoyé
à M. Altes, en labsence de M. Pietri,
à la suite dun entretien téléphonique
entre M. Altes et moi-même au cours duquel nous
avions évoqué le problème de reventes
à perte de la part de certains magasins Carrefour.
A cette date (11 avril 1994), les accords commerciaux
avec Carrefour pour 1994 navaient pas encore été
conclus et cest pour cette raison que je joignais à
ce fax un rappel de ce barème de ristournes. Les indications,
que je lui donnais après les mots préconisation
de stock , correspondaient en fait à lindication
des prix de vente en dessous desquels des problèmes
de revente à perte pouvaient se poser, puisque les
conditions commerciales pour lannée en cours
nétaient pas encore signées. Le maquillage
de ces informations était destiné à ne
pas éveiller les soupçons. »
279. Interrogé sur cette même
pièce, M. Altes, de la société Carrefour
France, a déclaré, le 9 août 1996
(cf. cote 999 du rapport) :
« Vous me présentez
la copie dune télécopie de M. Freysz,
non datée mais de 1994, faisant état dune
préconisation de stock par
magasin. Jai bien compris les indications chiffrées
de ce document comme les prix quil souhaitait voir pratiquer
sur ses produits. Je trouve cette manière de présenter
les choses ridicule et je pense navoir pris aucune mesure
particulière suite à ce message... »
280. Une autre télécopie
du 27 octobre 1995, adressée par M. Pietri,
de la société Texas Instruments France, à
M. Marc Altes, de la société Carrefour,
indiquait, à propos de la baisse du prix de la calculatrice
TI 81 (cf. annexe 36, cotes 34 et 35 du rapport denquête) :
« Objet : baisse
de prix TI 81.
« Au 1er novembre
1995 :
« Prix actuel : 420 HT
(stock 499).
« Nouveau prix : 336 HT
(stock 399).
« Merci davertir
chaque magasin (ce que nous ferons également de notre
côté).
« Stock au 1er novembre
par magasin (véritable) pour avoir de protection de
prix en novembre. »
281. Sur ce point, M. Pietri
a expliqué, le 7 août 1996 (cf. cote
829 du rapport) :
« Le terme stock doit
sentendre, comme dans le document en cote 46, comme
le prix plancher de revente à perte en dessous duquel
ils ne doivent pas descendre. M. Altes connaît
la signification de cet espèce de code que nous employons,
afin déviter que des concurrents ou magasins
puissent penser que nous donnons des directives de prix à
Carrefour. »
282. La circulaire relative à
la rentrée des classes, élaborée par
la société Plein Ciel Diffusion, en mai 1995,
à destination de ses clients, mentionne :
« (...) produits présentés
au journal rentrée des classes 1995 :
« Galaxy 9 ;
« TI 30 x ;
« TI 40 Galaxy ;
« TI 67 Galaxy ;
« TI 80 (nouveau) ;
« TI 81 ;
« TI 82 ;
« TI 85.
« Les prix publics du journal
seront les mêmes, quel que soit le réseau de
distribution (grandes surfaces, multispécialistes,
papeterie), ce qui ne pourra que crédibiliser le réseau
Plein Ciel aux yeux de vos clients. »
283. Un document manuscrit, communiqué
par les responsables de la société Plein Ciel
Diffusion, constituant un compte rendu dun appel téléphonique
daté du 20 mai 1996 de M. Tenaglia de
la société Texas Instruments France à
Mlle Valérie Gendron, responsable de marché
de la société Plein Ciel Diffusion (cote 1030
du rapport), comporte les mentions suivantes :
De Texas/M. Tenaglia pour Valérie
|
20 mai 1996
|
Prix public TTC
|
+ modif prix (fax du 14 mai) |
TI 106 |
= |
39,90 |
TI 80 passe à 201,68 F |
TI 9 Galaxy |
= |
99,00 |
au lieu de 235,42 F |
TI BOX |
= |
79,00 |
TI 82 passe à 370,32 F
au lieu de 430,50 F |
TI 40 |
= |
129,00 |
TI 67 |
= |
198,00 |
TI 80 |
= |
299,00 |
à partir du 1er juin |
TI 81 |
= |
399,00 |
|
TI 82 |
= |
549,00 |
souhaite recevoir état stock pour
protection stock - de son côté -par
fax |
TI 83 |
= |
699,00 |
TI 85 |
= |
849,00 |
TI 92 |
= |
1490,00 |
|
284. Le dossier contient
enfin une télécopie datée du 16 février 1993,
adressée par M. Freysz à M. Le Reverend,
responsable du groupe Distributeurs associés (cf. cote
1067 du rapport), qui contient les mentions suivantes :
« Proposition produit
opération 21/20 :
Produit : TI 40 Galaxy :
Prix dachat HT net :
DA : 63,85 F ;
Prix de vente généralement
constaté : 99 F TTC.
Ce produit fera lobjet dun
gros effort de communication de notre part (peut-être
télévisuelle).
Nota. - Pouvez-vous menvoyer
une liste des produits TI présents sur votre catalogue
général 1993 ou bien un exemplaire de ce catalogue ? »
285. Une lettre type (cf. cotes 1068
à 1078 du rapport) a, par la suite, été
adressée en août 1993 par chaque grossiste membre
du groupement Distributeurs associés à ses clients
détaillants, pour expliquer que : « dans
un marché des monnaies et des prix actuellement bouleversés,
nous vous conseillons vivement et vous demandons de rectifier
le prix de vente public de la calculatrice Texas TI 40 G
et de le porter à 99,50 F TTC (...).
Nous invitons à afficher dans votre magasin le prix
rectifié de 99,50 F TTC. »
286. Un exemplaire du texte de cette
lettre-type, datée du 6 août 1993,
figure au dossier (cf. cote 1077 du rapport). Elle comporte
la mention manuscrite « M. N. Pietri lettre
circulaire opération 21/20. Souhaitant bonne réception »
suivie de la signature de M. Bernard Le Reverend,
responsable du groupe Distributeurs associés. Enfin,
une lettre de M. Le Reverend, datée du 27 août 1993
et adressée à M. Pietri de Texas Instruments
France précise : « Comme convenu,
nous vous faisons parvenir pour information le courrier établi
par chaque distributeur associé à leurs clients
pour lopération 21/20. »
3.4. La surveillance par la société
Texas Instruments
France du respect des prix publics minima
287.
Un compte rendu de réunion commerciale trimestrielle
de la société Texas Instruments France, en date
doctobre 1994, fait état de « problèmes
de calculs » parmi lesquels est énoncé :
« Prix TI 30 x à 69 F »
(cf. cote 1079 du rapport).
288. Le même document fait état
de la présentation des « objectifs Q 3 »,
qui correspondent aux objectifs du troisième trimestre
et dans le cadre desquels figurent les mentions : « verrouillage
des prix (...). Bon maintien des prix malgré le
dérapage Leclerc (...) » (cf. cote
1082 du rapport).
289. Parmi les « Problèmes
Q 3 » mentionnés par le même
représentant en page suivante, est indiquée
la « perte de crédibilité commerciale
suite au non-respect des prix sur 3 références
BTS » (cf. cote 1083 du rapport). (BTS signifie
Back to school, soit rentrée des classes selon le glossaire
TI).
290. Dans un compte rendu de réunion
davril 1995 (cf. cote 1084 du rapport) figure la mention :
« ouverture de Darty = région entière
perturbée, TI 82 à 649 sur Avignon/aucune
remontée possible ».
291. Le compte rendu de réunion
commerciale de juillet 1995 mentionne, parmi les objectifs
pour le troisième trimestre 1995 (cf. cote 1087 du
rapport) :
« Contrôle des
prix plus actifs :
PBS sur TI 81, TI 85, Galaxy 40, TI 30 x. »
292. Enfin, le compte rendu hebdomadaire
de deux des commerciaux de la société pour la
semaine du 18 au 25 mars 1996 comporte les mentions
suivantes (cf. cote 1089 du rapport) :
« Darty, Auchan TI 30 :
69 F.
TI 40 : 116 F.
TI 80 : 325 F.
TI 82 : 625 F.
Certains Carrefours salignent
(ex. : caf. Lievin).
Cora ne suit pas, mais connaît
le dépositionnement.
Impossible de joindre Mme Dujols
(Darty Haubourdin) depuis une semaine malgré des appels
quotidiens. »
Sagissant
de la société Carrefour :
293. Le dossier comporte deux
télécopies retraçant un échange
entre le 4 et le 7 août 1995 entre MM. Pietri,
directeur commercial de la société Texas Instruments
France et Altes, de la société Carrefour, ainsi
que les suites données à cet échange.
294. La télécopie du
4 août 1995 adressée par M. Pietri
à M. Altes comporte le texte suivants :
« Marc,
Désolé de taccrocher
dès ton retour de vacances lundi 7 août, mais
il faut absolument faire un fax interne CF pour que tous les
magasins soient au minimum à leur prix dachat :
ce qui nest pas le cas !!!
Je tappelle lundi pour éviter
tout problème de vente à perte.
Cordialement.
Noël. »
295. Par télécopie
du 7 août 1995, M. Altes adressait aux
magasins Carrefour le texte suivant :
« Objet : prix
de vente calculatrices scolaires.
Fournisseur : Texas Instruments.
A partir du 8 août 1995
et afin de préparer la rentrée scolaire. Nous
vous demandons dappliquer les prix ventes suivants :
TI 30 x |
79 F TTC |
TI 9 Galaxy |
99 F TTC |
TI 40 Galaxy |
129 F TTC |
TI 67 Galaxy |
229 F TTC |
TI 80 |
349 F TTC |
TI 81 |
499 F TTC |
TI 82 |
699 F TTC |
TI 85 |
849 F TTC |
A partir du 9 août 1995
de nous remonter tous problèmes de prix rencontré.
Ces prix étaient basés
sur une TVA à 18,6 %, une remise spécifique
de 1,66 % sous forme de ristourne vous sera versée
en fin dannée et appliquée sur la période
du 1er juin 1995 au 31 décembre 1995.
Cordialement Marc
Altes ».
Sagissant
de la société Sapac magasins populaires, centrale
dachat des magasins à lenseigne Prisunic
et Escale :
296. Les pièces cotées
1055 et 1056 du rapport font état dun courrier
envoyé par télécopie, le 24 août 1994,
par M. Laurent Freysz, de la société Texas
Instruments France, à MM. Tasseau et More, de
la société Sapac magasins populaires, dont le
texte est reproduit ci-après :
« Urgent.
Objet : prix de vente TTC constaté
sur notre référence TI 30X sur votre tract rentrée
des classes.
Le prix de vente TTC relevé
sur notre référence calculatrice TI 30X paru
sur votre tract rentrée des classes est de 69,90 FF
TTC. Au vu de vos conditions dachat, cet article est
manifestement proposé par votre société
en vente à perte.
Nous vous demandons instamment de
communiquer un erratum à afficher dans tous vos points
de vente concernés par le tract, sans quoi nous serions
dans lobligation de saisir la direction départementale
de la concurrence et de la répression des fraudes,
en vertu de lordonnance no 86-1243 du
1er décembre 1986, articles 32
et 33. »
297. Le dossier contient également
une télécopie du 24 août 1994
envoyée par la société Sapac à
la société Texas Instruments France (cf. cote
1056 bis du rapport) :
« Objet : dépliant
rentrée des classes .
Une erreur dimpression sétant
glissée dans le grand dépliant page 10, et dans
le petit dépliant page 6, nous vous demandons de rectifier
immédiatement, pour des problèmes de légalité,
le PV de la calculatrice Texas Instruments TI 30.
PV initial : 69,90 F.
PV à pratiquer de suite :
76,50 F.
Dafficher de suite lerratum
dans votre rayon ».
298. Lors de son audition
du 9 juillet 1996, M. Freysz, de Texas Instruments
France, a déclaré : « Concernant
les documents en cotes 340 et suivantes du scellé 12,
ils concernent un problème rencontré avec Prisunic
qui avait, semble-t-il, par erreur, sur la base des données
de lannée précédente (le tarif
de la TI 30 ayant entre-temps été relevé),
présenté la TI 30 sur leur tract de rentrée
scolaire à un prix constitutif dune revente à
perte. Nous avons été amenés à
les rappeler à lordre, suite à des réclamations
de concurrents. »
299. Lors de laudition
du 11 septembre 1996, M. Tasseau, directeur
délégué à la direction des marchandises
générales de la société Sapac
Magasins populaires, et M. Bruneau, chef de marché
papeterie-loisirs de la même centrale, ont déclaré
(cf. cotes 1057 à 1061 du rapport) :
« Le prix dachat
de 58,15 F qui apparaît pour la TI 30 X
est notre prix dachat net duquel M. Morel (le chef
de marché concerné à lépoque,
ayant quitté la société depuis lors)
avait déduit le montant dun budget pub
de 3 %. Cest sur la base de ce prix quil
avait cru pouvoir déterminer un prix de revente à
69,90 F - prix qui a été ensuite remonté
à la demande de Texas Instruments. Notre pratique habituelle
est, en effet, de ne pas intégrer le montant des budgets
de coopération commerciale dans les prix de revente. »
300. Par ailleurs, sur
les factures de la société Texas Instruments
France du 11 mai 1994, (cf. cotes 1064 et 1065
du rapport) et des 21 et 30 juin 1994 (cf. annexe 214,
cotes 5452 et 5455 du rapport denquête), le modèle
TI 30 X est facturé au prix net de 58,15 F HT.
Sagissant
de la centrale dachats Casino-Rallye :
301. La pièce
cotée 1027 du rapport, saisie au siège de la
société Texas Instruments France, fait état
dun télex daté du 24 juin 1993
(cf. annexe 37, cote 149 du rapport denquête)
émanant de M. Laurent Freysz, responsable des
ventes grand public de la société Texas Instruments
France, à destination de MM. Gervais et Fraisse
de la centrale Casino-Rallye, ayant pour objet la confirmation
des conditions générales de vente des calculatrices
pour lannée 1993.
302. Sur ce télex
sont dactylographiées les conditions commerciales applicables
aux revendeurs de la catégorie I. Par ailleurs,
apparaissent également sur ce télex, en rouge,
les annotations manuscrites suivantes :
« Coop : 3 %
sur CA produits cata du 1/6 au 30/9
Occulte : 2 % de bonus
pour respect des prix BTS
Couverture dérapage sur
30 et 81 à hauteur de 2 %. »
303. A propos de ces annotations,
M. Freysz, responsable des ventes grand public de la
société Texas Instruments France, a déclaré
(cf. cotes 1007 à 1017 du rapport) :
« Ces annotations concernaient,
(...) sous le mot occulte qui traduit la confidentialité
vis-à-vis des autres distributeurs, un montant de 2 %
de bonus correspondant à la mise en place de produits
sous blister (BTS) en libre service dans ses magasins (...).
Un budget de 2 % est destiné à couvrir
les éventuelles différences de prix qui pouvaient
survenir à la rentrée des classes par rapport
aux prix quil escomptait. »
3.5. Les prix pratiqués
a) Les prix lors de
la rentrée des classes 1995
304. Le
tableau ci-après récapitule les prix de vente
des calculatrices TI, tels quils résultent
des prospectus édités à loccasion
de la rentrée scolaire 1995 par de nombreux distributeurs,
et notamment par les principaux groupes de la grande distribution
alimentaire :
RDS 1995 |
DATES |
TEXAS INSTRUMENTS |
Enseignes |
Début
validité |
Fin
validité |
TI 30 X |
TI 40 |
TI 80 |
TI 81 |
TI 82 |
TI 85 |
Cf.
cotes |
ANNEXES |
Auchan |
25/08 |
9/09 |
79 |
|
349 |
499 |
699 |
849 |
4 601 |
167 |
Carrefour |
23/08 |
9/09 |
79 |
|
349 |
499 |
699 |
|
1 304 |
56 |
Casino Géant |
16/08 |
26/08 |
79 |
|
349 |
|
699 |
|
4 813 |
176 |
Continent |
23/08 |
2/09 |
79 |
129 |
349 |
|
699 |
|
4 364 |
157 |
Cora |
23/08 |
2/09 |
79 |
|
349 |
|
699 |
|
3 288 |
121 |
Mammouth |
23/08 |
2/09 |
79 |
|
349 |
|
699 |
|
4 148 |
152 |
Interdiscount |
|
15/10 |
79 |
129 |
349 |
499 |
699 |
849 |
6 014 |
250 |
Leclerc |
23/08 |
2/09 |
79 |
129 |
349 |
|
|
|
2 395 |
80 |
Nouvelles Galeries |
20/08 |
16/09 |
|
|
349 |
|
|
|
5 329 |
210 |
Boulanger |
|
23/09 |
|
|
349 |
499 |
699 |
849 |
6 142 |
262 |
Plein Ciel |
22/07 |
16/09 |
80,30 |
131,20 |
354,9 |
507,4 |
710,8 |
863,3 |
6 525 |
274 |
305. En cotes
818 à 824 du rapport figurent 231 relevés de
prix effectués par les agents de la DGCCRF au cours
des mois doctobre et novembre 1995 ; ils font ressortir
une forte homogénéité des prix sur les
principaux modèles de calculatrices.
b) Les prix lors de
la rentrée des classes 1996
306. Le
dossier contient également les prospectus publicitaires
édités à loccasion de la rentrée
scolaire 1996 par les principales enseignes de la grande distribution :
Leclerc (cf. annexe 80, cotes 2397 à 2399),
Continent et Champion (cf. annexe 153, cotes 4262
et 4263), Carrefour (cf. annexe 56, cotes 1353 à
1363), Auchan (cf. annexe 321, cote 7461), Interdiscount
(cf. annexe 323, cote 7463), Casino (cf. annexe 322,
cote 7462), Plein Ciel Diffusion (cf. annexe 272,
cotes 6485 et 6509) du rapport denquête.
4. Les échanges
dinformations entre les sociétés
Texas Instruments France et Noblet
307. Lors
de lopération de visite et saisie du 2 avril 1996,
une note interne a été saisie dans le bureau
de M. Ocana, directeur du marketing de la société
Noblet. Cette note, datée du 19 février 1996,
comporte les mentions suivantes :
« Colombes,
le 19 février 1996.
De : M. Jean-Pierre
Noblet à MM. Ocana-Stenstad
Pour information : M. Luquet
*
* *
M. Pietri vient
de minformer lors dun entretien téléphonique
que le nouveau TI 30 ne serait pas mis sur le marché
avant fin 1996, si bien quil continue la commercialisation
du TI 30 actuel au prix de 79 F.
En outre, le prix du TI 80
pourrait être ramené de 349 FF à
299 FF.
Jai noté les autres
prix comme suit :
TI 92 : 1 490 FF TTC.
TI 85 : 849 FF.
TI 83 : 699 FF.
TI 82 : 649 FF.
Le TI 81 devrait progressivement
disparaître.
Jai indiqué aussi
que je regrette cette nouvelle mise en cause et que, de notre
côté, nous aviserions sur une décision
éventuelle de changement » (cf. cote 1093
du rapport). Il convient de rappeler que M. Pietri est
directeur commercial de la société Texas Instruments
France.
308. Lors son audition,
le 3 septembre 1996, M. J.-P. Noblet a indiqué,
au sujet de cette note : « Elle sinscrit
dans le cadre de rapports épisodiques que jentretiens
avec M. Pietri dans le cadre de la profession. (...) Pour
autant, nous ne nous communiquons jamais entre nous sur nos
projets de politique commerciale. Il ny a aucune concertation
de politique commerciale entre lui et nous. Je pense, ce jour-là,
avoir obtenu ces renseignements, à ma demande, de manière
exceptionnelle. Nous savions depuis quelque temps que Texas
allait mettre sur le marché une nouvelle TI 30,
à un prix supérieur, ce qui aurait permis à
notre FX 92 de redevenir le premier prix du marché.
Cest à ce problème que renvoie lexpression
nouvelle mise en cause. »
309. M. Ocana, responsable
du marketing Casio au sein de la société Noblet,
a expliqué, quant à lui (cf. cotes 1094
à 1097 du rapport) : « Sagissant
du document 185 du scellé 1, (la note du
19 février 1996) il faisait suite à
des informations qui mavaient été communiquées
par M. Luquet au retour du salon Consumer Electronic
de Las Vegas, concernant le lancement dun nouveau modèle
TI 30 XA chez Texas Instruments. Je pensais que
cette nouvelle machine serait commercialisée à
un prix supérieur à lactuelle, ne serait-ce
que pour la différencier. Dune manière
générale, nous avons des contacts épisodiques
avec Texas Instruments, pour étudier ensemble des problèmes
douaniers par exemple, ou encore vis-à-vis de Nielsen
auprès de laquelle nous sommes co-acheteurs dun
panel. Il nest toutefois pas dans nos habitudes de nous
communiquer mutuellement des informations de ce type.
(...) En lespèce,
cest moi-même qui avais demandé à
M. Noblet dessayer dobtenir des renseignements
sur ce point. Concernant la nouvelle mise en cause
évoquée en fin de ce document, je ne vois pas
précisément quel était le sens de cette
expression, sinon la référence à labandon
du lancement de cette nouvelle machine en 1996. Jessaierai
de retrouver et vous communiquerai la note relative au lancement
de la nouvelle TI 30 que javais préparée
sur la base des informations de M. Luquet (...). »
310. Le 4 septembre 1996,
la société Noblet a adressé au service
denquêtes la copie dune note en date du
15 février 1996, adressée par M. Ocana
à M. Noblet, dont la note du 19 février 1996
reproduite au paragraphe 307 serait la réponse
(cf. cotes 1100 et 1101 du rapport). Cette note fait
état dinformations qui auraient été
obtenues par M. Luquet, directeur des marques Japon-USA,
de la société Noblet, lors dun salon à
Las Vegas aux Etats-Unis, et qui sont relatives au lancement
en Europe par la société Texas Instruments France
de nouveaux modèles, la TI 83 et la TI 30 XA,
nouvelle version de la TI 30 X.
Il est indiqué, notamment,
à propos de ce dernier modèle :
« Ce produit serait
plus performant et, compte tenu des niveaux de prix proposés
aux US, ce nouveau produit serait plus cher que lancienne
TI 30 X.
Toutefois, nous ne savons pas si
ce produit sera disponible pour la France en juillet.
Il serait dommage que Texas ne puisse
pas la proposer à la rentrée car son prix plus
élevé nous permettrait sans doute de reprendre
des parts de marché (...).
« Vous serait-il possible,
dans le cas où vous auriez des contacts avec M. Pietri,
dessayer dobtenir quelques informations sur la
nouvelle TI 30 xa ? »
311. Lors de lopération
de visite et saisie du 2 avril 1996, était
saisie dans le bureau de M. Freysz, responsable des ventes
de la société Texas Instruments France, une
télécopie datée du 20 février 1996
adressée par M. Pietri, directeur commercial de
la société Texas Instruments France, à
deux de ses clients grossistes et dans laquelle il leur explique
(cf. cote 1105 du rapport) :
«Vélizy le 20 février 1996.
ATTN : M. Lazare/M. Brachman
Société : DIFAP/GRAMMA
De : Noël Pietri
Attention !
* Le prix de TI 30 X pour
1996 reste identique au prix actuel, soit 50,95 F/HT. (grossiste).
* La TI 30 xa
est repoussée au 1er décembre 1996,
donc lannée et la RDC 96 se font avec le
produit actuel au prix actuel.
Merci de la noter ! !
Et de changer les contrats détaillants
* Bien cordialement Noël
Pietri ».
312. Lors de la même
opération du 2 avril 1996, était également
saisie dans le bureau de M. Ocana, directeur marketing
de la société Noblet, une note interne datée
du 22 mars 1996, adressée par M. Ocana
à M. Noblet, ayant pour objet le « prix
de la FX 92 Collège III »
pour la rentrée des classes 1996 et qui comporte les
mentions suivantes (cf. cotes 1102 à 1104 du rapport) :
« Objet : Prix
RdC de la FX 92 Collège III
(...) lanalyse ci-dessous tente
dexpliquer notre baisse des ventes, en particulier dans
la FX 92 (...).
(...) La baisse régulière
de Casio et la progression de Texas ne serait-elle pas due
à un écart de prix significatif ?
4. Les quantités
de ventes prévues pour la rentrée des classes
1996 tenaient compte dun prix de 89 F par Texas
(...).
6. Il serait, je pense,
préférable de baisser le prix de la FX 92
que daugmenter les marges clients sur ce produit (...).
Il semble également que pour
ce type de produit, le niveau de prix soit important (exemple
de la progression des produits à 49 F).
Si nous mettons la FX 92 collège
III à 79 F public, nous travaillerions avec une
marge de 38,5 % (...) ».
C. - LES
GRIEFS NOTIFIÉS
313. Sur
la base des constatations qui précèdent, les
griefs suivants ont été notifiés :
314. A la société
Noblet : « davoir mis en place un
dispositif ayant pour objet et pour effet dobtenir de
ses clients distributeurs quils pratiquent tous, sur
lensemble du territoire national, les mêmes prix
de vente préalablement déterminés par
elle.
Ce dispositif a consisté :
- à élaborer
des conditions de vente qui théoriquement empêchent
les distributeurs de pratiquer des prix publics inférieurs
à un seuil artificiellement élevé déterminé
par la société Noblet, sauf à se trouver,
selon ce producteur, en situation de revente à perte ;
- à déterminer
et à diffuser auprès de lensemble des
distributeurs des prix de vente publics correspondant à
ce seuil minimum artificiellement élevé, en
dessous duquel la société Noblet considère
quils ne peuvent pas fixer leurs prix de vente ;
- à obtenir
des distributeurs quils adhèrent à cette
politique de prix minimum de revente ;
- à organiser
une surveillance du respect de ces prix publics minima par
des interventions auprès des distributeurs ».
315. A la société
Texas Instruments France : « davoir
mis en place un dispositif ayant pour objet et pour effet
dobtenir de ses distributeurs quils pratiquent
tous, sur lensemble du territoire national, les mêmes
prix de vente préalablement déterminés
par elle.
Ce dispositif a consisté :
- à maîtriser
les prix de revente des distributeurs ayant traditionnellement
une politique de prix agressive (cest-à-dire
les hypermarchés) par lélaboration de
conditions de vente spécifiques qui les empêchent
théoriquement de pratiquer des prix inférieurs
à un seuil artificiellement élevé déterminé
par la société Texas Instruments France, sauf
à se trouver, selon ce producteur, en situation de
revente à perte ;
- à déterminer
et diffuser auprès de lensemble des distributeurs
des prix publics de vente correspondant au seuil minima en
dessous duquel la société Texas Instruments
France considère que les grandes surfaces ne peuvent
fixer leurs prix de vente ;
- à obtenir
des distributeurs, autres que les hypermarchés, quils
adhèrent à cette politique de prix minimum de
revente (alors même que les tarifs sur facture que leur
consent la société Texas Instruments France
les autorisent à pratiquer des prix inférieurs),
en leur garantissant que la grande distribution alimentaire
ne commercialisera pas les produits Texas Instruments en dessous
des prix publics de vente ;
- à organiser
une surveillance du respect des prix minimum par des interventions
auprès des distributeurs ».
316. Aux sociétés
Texas Instruments France et Noblet : « de
sêtre concertées et notamment davoir
échangé des informations stratégiques
relatives à leur politique de prix de vente publics
des calculatrices à usage scolaire.
La note du 19 février 1996
qui révèle lentente entre les deux opérateurs
montre que les informations échangées à
cette occasion ne sont quun des volets dune concertation
plus vaste ayant pris naissance antérieurement ».
317. A la société
Carrefour :
- davoir
participé activement au système de seuil minimum
de prix de revente mis en place par la société
Noblet et ainsi davoir renoncé à fixer
ses prix de manière autonome ;
- davoir participé
activement au dispositif de seuil minimum de prix de revente
mis en place par la société Texas Instruments
France et ainsi davoir renoncé à fixer
ses prix de manière autonome ».
318. A la centrale dachats
Casino-Rallye : « davoir participé
activement au système de seuil minimum de prix de revente
mis en place par la société Texas Instruments
France et ainsi davoir renoncé à fixer
ses prix de manière autonome ».
319. A la société
Sapac Magasins populaires : « davoir
participé activement au dispositif de seuil minimum
de prix de revente mis en place par la société
Texas Instruments France et ainsi davoir renoncé
à fixer, de manière autonome, les prix des magasins
à enseigne Prisunic et à enseigne Escale, notamment ».
320. A la société
Plein Ciel diffusion :
- « davoir
participé activement au système de seuil minimum
de prix de revente mis en place par la société
Noblet et ainsi davoir renoncé à fixer
ses prix de manière autonome ;
- davoir participé
activement au dispositif de seuil minimum de prix de revente
mis en place par la société Texas Instruments
France et ainsi davoir renoncé à fixer
ses prix de manière autonome ».
321. A la société
Majuscule : « davoir participé
activement au système de seuil minimum de prix de revente
mis en place par la société Noblet et ainsi
davoir renoncé à fixer ses prix de manière
autonome ».
322. A la société
Sodalfa : « davoir participé
activement au système de seuil minimum de prix de revente
mis en place par la société Noblet et ainsi
davoir renoncé à fixer ses prix de manière
autonome ».
323. A la société
Distributeurs Associés : « davoir
participé activement au dispositif de seuil minimum
de prix de revente mis en place par la société
Texas Instruments France et ainsi davoir renoncé
à fixer ses prix de manière autonome ».
324. Au stade du rapport,
le grief notifié à la société
Casino Guichard Perrachon a été abandonné
par le rapporteur. Les autres griefs ont été
maintenus.
325. Cependant, larticle 36,
alinéa 2, du décret du 30 avril 2002
fixant les conditions dapplication du livre IV
du code de commerce prévoit que : « Le
rapport soumet à la décision du Conseil de la
concurrence une analyse des faits et de lensemble des
griefs notifiés ». Il appartient, en
conséquence, au Conseil dexaminer le bien-fondé
de tous les griefs notifiés.
D. - LA
PROCÉDURE RELATIVE À LA MISE EN UVRE
DE LARTICLE L. 464-2-II DU CODE DE COMMERCE
326. Les
sociétés Texas Instruments France et Distributeurs
associés ont sollicité le bénéfice
des dispositions de larticle L. 464-2-II du code
de commerce selon lesquelles : « lorsquun
organisme ou une entreprise ne conteste pas la réalité
des griefs qui lui sont notifiés et sengage à
modifier ses comportements pour lavenir, le rapporteur
général peut proposer au Conseil de la concurrence
qui entend les parties et le commissaire du Gouvernement sans
établissement préalable dun rapport, de
prononcer la sanction pécuniaire prévue au I
en tenant compte de labsence de contestation. Dans ce
cas, le montant maximum de la sanction encourue est réduit
de moitié ». Ces dispositions ont été
mises en uvre par deux procès-verbaux des 5 octobre 2001
et 11 janvier 2002 signés par le rapporteur
général du Conseil, dune part, et respectivement,
les représentants des sociétés Texas
Instruments France et Distributeurs associés,
dautre part. Dans ces procès-verbaux, ces sociétés
ont déclaré qu« en raison
de circonstances [qui leur étaient propres], [elles
ne souhaitaient pas] contester la réalité
des griefs qui [leur] ont été notifiés » ;
elles ont, en conséquence, formellement renoncé
à une telle contestation, ce dont il convient de prendre
acte, sous réserve de lexamen des engagements
également pris par ces sociétés.
II. - DISCUSSION
A. - LA PROCÉDURE
1. Sur les moyens tirés de la
prescription
327. Les
sociétés Noblet, Casino Guichard-Perrachon et
Sapac magasins populaires opposent quaucun acte tendant
à la recherche, à la constatation ou à
la sanction des faits poursuivis na été
effectué dans les trois années suivant la lettre
de saisine du 6 août 1997 du ministre de léconomie,
des finances et de lindustrie. Elles exposent, sur ce
point, que les demandes de renseignements adressées
par le rapporteur, le 3 juillet 2000, aux sociétés
Texas Instruments France et Noblet, et relatives aux conditions
de vente des années 1997 et 1998, auraient eu pour
seul objet dinterrompre artificiellement la prescription.
328. La société
Noblet ajoute, pour sa part, que les demandes de renseignements
du 3 juillet 2000 portent sur des faits postérieurs
à la saisine et nont donc pas pu interrompre
le cours de la prescription. Elle fait valoir, à cet
égard, en premier lieu, que le rapporteur a agi hors
du cadre de la saisine, en deuxième lieu, quil
était, par analogie avec la procédure pénale,
incompétent pour enquêter sur des faits postérieurs
à la saisine et, enfin, que des demandes de renseignements
portant sur des faits postérieurs à ceux dénoncés
par la saisine ne sauraient interrompre le cours de la prescription
de ces faits.
329. Aux termes des dispositions
de larticle L. 462-7 du code de commerce « le
Conseil ne peut être saisi de faits remontant à
plus de trois ans sil na été fait
aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation
ou leur sanction ».
330. En lespèce,
la saisine du ministre a été enregistrée
au Conseil de la concurrence le 6 août 1997
et précise « (...) Une enquête
effectuée par mes services a révélé
que les sociétés Noblet SA et Texas Instruments
France SA ont mis en uvre des pratiques ayant pour objet
le maintien des prix des calculatrices à usage scolaire
à un niveau artificiellement élevé (...).
Pour lensemble des réseaux de distribution, les
prix de cession sont des prix nets ; toutes les remises
et ristournes susceptibles dêtre obtenues par
les revendeurs sont réputées conditionnelles.
Lenquête a amplement démontré le
caractère factice de la conditionnalité de ces
remises (...). » Le 3 juillet 2000,
le rapporteur a adressé aux sociétés
Noblet et Texas Instruments France une lettre leur demandant,
notamment, de lui faire « (...) parvenir lintégralité
des tarifs et conditions de vente [de calculatrices] (...)
pour les années 1997 et 1998 (...) ».
331. Dans un arrêt
du 17 juin 1992, Compagnie générale
de vidéocommunication, la cour dappel de Paris
a jugé que : « (...) Aux termes
de larticle 11 de lordonnance du 1er décembre
1986, le conseil doit examiner si les pratiques dont il est
saisi entrent dans le champ des articles 7 et 8 (...).
A loccasion de cet examen, en fonction de lanalyse
du marché et des investigations auxquelles a procédé
le rapporteur, le conseil a pu sans excéder les limites
de sa saisine, se prononcer sur les griefs (...) dès
lors que (...) les pratiques examinées se situent sur
le même marché, quelles sont antérieures
à lacte de saisine, se rattachent aux comportements
économiques dénoncés, visent au même
objet ou quelles peuvent avoir le même effet (...). »
332. Le Conseil relève,
en premier lieu, que les demandes du rapporteur relatives
aux « tarifs et conditions de vente »
pour les années 1997 et 1998 visaient à rechercher,
dune part, si les pratiques dénoncées
par la saisine sétaient poursuivies pendant les
sept premiers mois de lannée 1997 qui étaient
compris dans la saisine datée du 6 août 1997
et, dautre part, si elles sétaient continuées
au-delà de la date de la saisine. Dès lors,
ces actes, relatifs à des pratiques visant le même
marché, se rattachant aux comportements économiques
dénoncés et visant, pour partie au moins, une
période antérieure à la saisine, et,
pour le surplus, une éventuelle pratique continue,
ont bien été effectués par le rapporteur,
dans le cadre de celle-ci, et ne sauraient donc être
écartés des débats.
333. En second lieu, ainsi
quil résulte dune jurisprudence constante,
rappelée notamment par la cour dappel de Paris
dans larrêt du 17 juin 1992, précité,
le Conseil est saisi « in rem » des
comportements susceptibles dêtre imputés
aux entreprises dans leur ensemble et pour lensemble
de la période couverte par cette saisine.
334. En conséquence,
dès lors quun acte tendant à la recherche,
à la constatation ou à la sanction de ces comportements,
même sil ne concerne quune des entreprises
incriminées ou une partie seulement des faits commis
pendant la période visée par la saisine, est
intervenu avant le terme du délai légal de trois
ans suivant le dernier acte interruptif, la prescription se
trouve interrompue par leffet de cet acte à légard
de toutes les entreprises concernées et pour lensemble
des faits dénoncés.
335. Ainsi, les courriers
adressés par le rapporteur le 3 juillet 2000,
qui tendaient à la recherche et à la constatation
de comportements anticoncurrentiels, qui auraient pu être
commis, pour partie tout au moins, pendant la période
visée par la saisine, ont interrompu le cours de la
prescription qui avait commencé à courir le
6 août 1997, date de lenregistrement
au Conseil de la saisine du ministre.
2. Sur les moyens relatifs
à la durée de la procédure
336. Les
sociétés Noblet, Casino Guichard-Perrachon,
Carrefour et Sapac magasins populaires opposent que la durée
de la procédure ne peut sexpliquer par la complexité
du dossier, quelle est excessive et constitue une violation
de larticle 6 de la Convention européenne
de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés
fondamentales, dans la mesure où lancienneté
des faits a empêché les sociétés
mises en cause dassurer correctement leur défense.
337. La société
Sapac magasins populaires expose à cet égard
que lensemble des responsables de la société
Sapac, à lépoque des faits, sont aujourdhui
retraités et que lentreprise a connu des restructurations
et des déménagements successifs.
338. La société
Noblet soutient, quant à elle, que la tardivité
de la notification de griefs a retardé, de façon
injustifiée et attentatoire aux droits de la défense,
louverture dun débat contradictoire, en
violation des dispositions de larticle 6, paragraphe 3,
de la Convention européenne de sauvegarde des droits
de lhomme et des libertés fondamentales, qui
disposent que la personne mise en cause doit pouvoir « être
informée dans le plus court délai (...) de la
nature et de la cause de laccusation portées
contre (elle) ».
339. Aux termes de larticle 6,
paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde
des droits de lhomme et des libertés fondamentales,
toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai
raisonnable.
340. Les pratiques, pour
lesquelles des griefs ont été notifiés,
remontent à une période comprise entre 1992
et 1996, dont le Conseil de la concurrence a été
saisi, par le ministre de léconomie, le 6 août 1997.
Les représentants des sociétés Noblet
et Texas Instruments France ont répondu à une
demande de renseignements du rapporteur avant lissue
du délai de prescription des faits et la notification
de griefs a été adressée, aux parties,
le 9 juillet 2001.
341. Si la notification
de griefs est intervenue cinq années après la
commission des faits, cette durée sexplique par
la complexité du dossier concernant des pratiques dentente
à la fois verticales et horizontales, ainsi que par
le nombre important de pièces (plus de 7 000)
recueillies par les enquêteurs.
342. Par ailleurs, les
sociétés susvisées ne démontrent
pas, autrement que par de simples affirmations, quelles
auraient été dans limpossibilité
de faire valoir leurs moyens de défense ou de rassembler
les éléments de preuve susceptibles dêtre
opposés aux indices retenus à leur encontre.
343. Enfin, il résulte
dune jurisprudence constante que la sanction qui sattacherait
à la violation de lobligation, pour le Conseil
de la concurrence, de se prononcer dans un délai raisonnable
résultant du texte précité, consisterait
non pas dans le prononcé dun non-lieu, mais dans
la réparation du préjudice résultant
éventuellement de la durée excessive de la procédure
(cf. cour dappel de Paris, 26 septembre 2000,
recours contre décision du Conseil no 99-D-65
du 2 novembre 1999). En conséquence, le moyen
doit être écarté.
3. Sur le moyen relatif
à limprécision
de la notification des griefs
344. La société
Noblet soutient que la notification des griefs est incomplète
et ne permet pas dassurer un débat pleinement
contradictoire dans la mesure où les griefs articulés
à son encontre ne font pas référence
à la date des faits sur lesquels ils sappuient.
Elle considère quelle nest donc pas en
mesure de présenter utilement et valablement sa défense,
ne sachant pas précisément sur quels faits (tarifs
et conditions de vente en particulier) se fonde le rapporteur.
345. Il ressort cependant
explicitement de la notification de griefs que les griefs
retenus à lencontre de la société
Noblet portent sur des pratiques commises de 1992 à
1996. En effet, le rapporteur a précisé, dans
la partie de la notification de griefs consacrée à
lanalyse et à la qualification des pratiques :
« Il ressort de nombreuses
pièces du dossier que, contrairement à ce quont
déclaré les responsables de la société
Noblet au cours de lenquête administrative, celle-ci
a mis en place depuis 1992 au moins une stratégie visant
à déterminer et à diffuser les prix publics
minima quelle entend voir pratiquer par ses distributeurs
en contrepartie de loctroi des ristournes arrière.
La note manuscrite de M. Karmes relative
à la rentrée des classes 1993 est révélatrice
de cette politique (...). » (cf. notification
de griefs page 127.)
346. Par ailleurs, la notification
de griefs comporte à de nombreuses reprises lanalyse
des comportements de la société Noblet pour
les années 1992 à 1996, notamment en pages 67
à 69 et 123 (pages identiques dans le rapport).
347. Il résulte
de ces éléments que la société
Noblet était précisément informée
des pratiques qui lui étaient reprochées et
des périodes concernées par ces pratiques. Le
moyen doit donc être écarté.
4. Sur la recevabilité
de létude économique produite
après le rapport par la société Texas
Instruments France
348. A
la suite de la réception du rapport du rapporteur,
la société Texas Instruments France a produit,
à lappui de ses observations, une étude
économique tendant à démontrer que les
pratiques qui lui ont été reprochées
nont pas eu leffet retenu par le rapporteur et
quen conséquence, dune part, ces pratiques
nont pas de caractère de gravité et, dautre
part, le dommage à léconomie ainsi que
le préjudice subi par le consommateur ne sont pas établis.
349. Lors de la séance,
le commissaire du Gouvernement et le rapporteur ont considéré
que lattitude de la société Texas Instruments
France à cet égard était ambiguë
et que les termes de létude économique
produite revenaient à contester la réalité
des griefs.
350. Aux termes des dispositions
de larticle L. 464-2-II du code de commerce, la
mise en uvre du dispositif de transaction suppose que
les entreprises le sollicitant ne contestent pas la réalité
des griefs notifiés. La société Texas
Instruments France a, dailleurs, pris cet engagement
auprès du rapporteur général du Conseil
de la concurrence, par procès-verbal du 5 octobre 2001.
351. Il résulte
des dispositions précitées que, lorsquelles
se sont engagées à ne pas contester les griefs,
les entreprises nont pas la possibilité dapporter
des éléments destinés à démontrer
que les griefs ne sont pas constitués. Toutefois, il
leur est loisible de présenter au conseil des éléments
tendant à démontrer que les griefs dont elles
ne contestent pas la réalité nont pas
de caractère de gravité et nont pas causé
de dommage à léconomie.
352. En lespèce,
lauteur de létude économique précise
en page 12 :
« En application de
la procédure prévue à larticle
L. 464-2-II du code de commerce, la société
Texas Instruments France a décidé de ne pas
contester les griefs énoncés par le rapporteur,
et notamment celui selon lequel elle aurait mis en uvre
des pratiques destinées à uniformiser les prix
de vente. Nous avons cependant été invités,
pour parfaire linformation du conseil, à évaluer
luniformité effective des prix et, si les prix
ont varié, à déterminer si les prix pratiqués
par les hypermarchés étaient les plus bas. »
353. En lespèce,
si létude en cause comporte, à certains
passages, quelques mentions relatives aux effets qui pourraient
être interprétées comme une contestation
de la qualification des griefs, elles ne sont toutefois pas
reprises par la société Texas Instruments France
dans son mémoire en réponse. Par ailleurs, la
démarche tendant à démontrer labsence
de gravité dune pratique peut conduire à
aborder la question de labsence ou de lintensité
des effets de cette pratique sur le marché. En conséquence,
il convient de ne pas écarter létude économique
produite par la société Texas Instruments France
en tant seulement quelle peut concerner la gravité
des pratiques et leurs effets sur le marché.
B. - LES PRATIQUES
I. - LES PRATIQUES
DENTENTE VERTICALES
a) Les pratiques mises
en uvre par la société Noblet
avec les distributeurs de son réseau
354. Il
résulte des éléments cités aux
paragraphes 84 à 107 que la société
Noblet a, à partir de lannée 1994, mis
en place des conditions de vente reposant à la fois
sur des ristournes de répartition et de progression
dont loctroi était conditionné, dune
part, par les volumes de commande et leur progression et,
dautre part, par les services rendus par les distributeurs.
355. Or, ainsi que le démontrent
les éléments relevés aux paragraphes 112
à 147, de nombreuses dérogations aux conditions
doctroi de ces ristournes ont été accordées
par la société Noblet en 1994, aux grossistes
de façon générale (paragraphes 112
à 116) et aux distributeurs détaillants (cf.
paragraphes 118 à 150), tels que Darty, Auchan,
Carrefour, Promodès-Continent, FNAC, Leclerc, Alsatia
(cf. paragraphes 125 à 140). Par ailleurs, pour
lannée 1995, une note datée du 30 novembre 1995,
adressée par le secrétaire général
commercial de cette société aux agents commerciaux
(cf. paragraphe 134) mentionne la décision de
la société daccorder à tous ses
clients la ristourne maximum de 8 % tant pour la rentrée
scolaire que pour la rentrée universitaire (cf. paragraphe 135).
356. Parallèlement
à la mise en uvre de ces dérogations,
la société Noblet a élaboré des
tarifs comportant des prix qualifiés par elle de « publics »,
calculés pour correspondre, après application
du taux de TVA, à des montants psychologiquement attractifs
pour le consommateur (cf. paragraphes 148 à 162)
et diffusé ces prix (cf. paragraphes 163 à
174) aux distributeurs (cf. paragraphe 176) et à
ses clients de la grande distribution.
357. En outre, comme le
démontrent les éléments cités
aux paragraphes 176 à 202, la société
Noblet est intervenue à de nombreuses reprises auprès
de ses distributeurs, afin que ceux-ci appliquent les prix
tels quils avaient été fixés leur
faisant valoir que des prix inférieurs aux montants
communiqués encourraient la qualification de prix de
revente à perte.
358. Enfin, il résulte
des données évoquées aux paragraphes 203
à 205 que les prix diffusés par la société
Noblet ont été appliqués par les distributeurs
de façon quasi généralisée.
359. Ainsi, il ressort
de lensemble de ces éléments que :
Les tarifs spécifiques dits
« promotionnels » établis par
la société Noblet pour les périodes de
rentrée des classes sont, depuis 1994 au moins, calculés
pour correspondre, après application du taux de TVA,
à des montants psychologiquement attractifs, qui se
trouvent être les prix publics diffusés par Noblet ;
Lintégralité de
la marge des distributeurs est constituée par des ristournes
arrières qui ont, selon la société Noblet,
un caractère conditionnel, cest-à-dire
quelles ne peuvent être prises en compte par le
distributeur dans le calcul de son prix de vente public, mais
ce caractère conditionnel est artificiel.
1. Sur le caractère
conditionnel des ristournes
360. La
société Noblet oppose que les conditions générales
de vente nont pas eu pour objet la fixation dun
seuil artificiel de revente à perte dans la mesure
où :
- les ristournes
différées accordées par la société
Noblet ont, contrairement à ce que soutient le rapporteur,
un caractère conditionnel « dans la mesure
où il résulte bien des courriers définissant
les conditions de vente applicables lors de la rentrée
des classes que les ristournes accordées dépendent
bien de critères définis tels que le nombre
de gammes référencées (facteur assortiment),
lévolution des achats (facteur progression),
la mise en avant des produits » ;
- les mesures commerciales,
qua été contrainte de prendre la société
Noblet en 1994 et 1995, du fait de ruptures de stocks sur
certains modèles (1994) et en raison de la baisse générale
du marché des calculatrices scientifiques scolaires
(1995), nont pas remis en cause le caractère
conditionnel des ristournes différées ;
- les éléments
de fait, recueillis au cours de lenquête, ne permettent
pas de démontrer que la société Noblet
aurait garanti a priori à ses distributeurs
un taux de ristourne déterminé quel que soit
le chiffre daffaires réalisé, dans la
mesure où les « extraits de documents
utilisés par le rapporteur sont contredits par dautres
éléments du dossier ».
361. Pour sa part, la société
Carrefour fait valoir que les ristournes étaient effectivement
conditionnelles, quelle navait aucune certitude
concernant leur taux et quil nexiste pas dentente
sur les prix entre Carrefour et la société Noblet,
encore moins de « participation active »
de la société Carrefour à cette prétendue
entente.
362. Cependant, les éléments
relevés aux paragraphes 112 à 133 et 136 à
147 établissent que, pour la rentrée des classes
1994, les grossistes ainsi que dimportants revendeurs
détaillants ont obtenu la ristourne différée
à son taux maximum de 8 %, alors quils
navaient pas atteint les objectifs qui y donnaient droit
et les éléments cités aux paragraphes 134
à 147 établissent aussi que, de la même
façon, pour la rentrée des classes 1995, la
société Noblet a décidé daccorder
à tous ses clients la ristourne maximum de 8 %.
363. Il ressort également
des pièces du dossier visées aux paragraphes 136
à 147 que, contrairement à ce que soutient la
société Noblet, les dérogations accordées
pour les rentrées des classes 1994 et 1995 nétaient
pas accordées a posteriori, mais que les
distributeurs avaient obtenu de la société Noblet,
avant les périodes de rentrée des classes, la
garantie de bénéficier dun taux de ristourne
déterminé, même sils ne remplissaient
pas les conditions posées par la société
Noblet dans ses conditions de vente.
Sagissant
du groupe Carrefour :
364. Les mentions citées
au paragraphe 136 « OK pour garantir 6,5
si 94 = 93 en volume » et au paragraphe
137 « 1995 - garantie du palier de 8 % »
démontrent que, pour les années 1994 et
1995, cette société a bénéficié
de dérogations aux conditions doctroi des ristournes
et que ces dérogations ont été « garanties »
bien avant la période de la rentrée des classes.
365. Par ailleurs, les
termes de la lettre adressée le 23 décembre 1994
par la société Noblet à la société
Carrefour France (cf. paragraphe 124) établissent
que, pour lannée 1994, le groupe Carrefour a
obtenu la ristourne maximale de 8 %, alors quainsi
quil a été relevé au paragraphe 125,
aucune pièce ne démontre quelle remplissait
les conditions doctroi de ce montant de ristourne.
366. Sagissant de
lannée 1995, il résulte des éléments
relevés au paragraphe 126 que la société
Carrefour a bénéficié dune dérogation
aux conditions théoriques de calcul du taux de la ristourne
différée de Noblet, dont lapplication
stricte aurait entraîné, la concernant, une ristourne
nulle.
367. Enfin, les déclarations
du chef de rayon du magasin Carrefour de Langueux, citées
au paragraphe 127, selon lesquelles, en 1995, il avait fixé
un prix en tenant compte du caractère certain de la
ristourne accordée par Noblet, confortent le caractère
acquis des dérogations accordées.
368. La société
Carrefour oppose que les documents cités aux paragraphes
136 et 137 ne sont pas datés et ne sauraient constituer
une preuve.
369. Toutefois, le conseil
relève que le document manuscrit de 1994 est extrait
dun cahier à spirale saisi dans le bureau de
M. Baratte, directeur commercial chargé de la
grande distribution de la société Noblet, et
lui appartenant. Compte tenu des dates des pages antérieures,
notamment la pièce cotée 109 de lannexe 7
du rapport denquête datée du 14 mars 1994
et des dates des pages postérieures, notamment la pièce 113
de lannexe 7 du rapport denquête datée
du 15 avril 1994, il peut être affirmé
que cette note manuscrite a été rédigée
entre le 14 mars et le 15 avril 1994.
Dès lors, et contrairement à ce que soutient
la société Carrefour, cette pièce peut
être datée à une période en tout
état de cause antérieure dau moins quatre
mois à la période de rentrée des classes
1994.
370. En ce qui concerne
la mention manuscrite de 1995, qui est, elle aussi, extraite
dun cahier à spirale saisi dans le bureau de
M. Baratte et lui appartenant, la page antérieure
à celle où figure la mention reprise au paragraphe 137
est datée du 31 janvier 1995, et lune
des pages postérieures est datée du 16 février 1995.
En conséquence, cette note manuscrite a été
rédigée entre le 31 janvier 1995 et
le 16 février 1995 (cf. annexe 6,
cotes 39 et 43 du rapport denquête).
En tout état de cause, cette mention manuscrite est
donc antérieure dau moins six mois à la
rentrée des classes 1995.
371. Par ailleurs, en ce
qui concerne les annotations manuscrites susvisées,
M. Baratte a déclaré par procès-verbal
(cf. audition de M. Baratte du 7 juin 1996,
cotes 608 à 615) : « (...) cette
annotation doit être comprise comme une demande de Carrefour
au cours de lentretien (...) de même linscription
garantie de palier 8 % doit être comprise
comme une demande formulée par Carrefour au cours dun
autre entretien (...) ».
372. Lensemble de
ces éléments montrent que les ristournes en
cause nétaient pas conditionnelles et que la
société Carrefour avait reçu de la société
Noblet lassurance de les obtenir plusieurs mois avant
la rentrée des classes.
373. Toutefois, il ressort
de la pièce cotée 1004 que M. Altes,
chef de produits de la société Carrefour, considère
quil ne peut vendre les produits TI (et les produits
Casio) en dessous de son prix dachat facturé
+ TVA, sauf à se trouver en dessous des seuils
de revente à perte : « (...) Toutes
les grandes enseignes de la grande distribution présentent
ce type de produits (les calculatrices) sur catalogue de rentrée
des classes au prix facturé taxé (TVA) :
en effet, le prix porté sur la facture est net (Texas
Instruments et Casio), sans remise, ce qui explique luniformité
des prix de vente au détail à cette période,
aucune enseigne ne pouvant se permettre de marger ces produits
à la rentrée des classes. »
374. De même, M. Altes
a déclaré : « Notre politique
de détermination des prix de vente est toujours le
prix le plus bas possible, soit pour chacun des deux fournisseurs,
le prix dachat facturé majoré de la TVA.
Cette question est sans objet dans nos discussions avec ces
fournisseurs, puisque la particularité de ce secteur
est la vente à prix coûtant en période
de rentrée des classes » (cf. pièce
cotée 999).
375. Dès lors, le
fait que M. Altes affirme quil ne peut vendre en
dessous du prix facturé par le fournisseur alors même
quil ressort des pièces du dossier précitées
quil avait la garantie dobtenir les ristournes
prétendument conditionnelles, démontre lexistence
dun accord de volontés entre la société
Carrefour et la société Noblet pour commercialiser
les produits Casio au niveau des prix publics élaborés
par ce fournisseur.
Sagissant
de la centrale Continent/Promodès :
376. Les documents
manuscrits, visés au paragraphe 138 dont M. Baratte,
directeur commercial de la société Noblet, a
déclaré quils constituaient son compte
rendu dune entrevue avec Continent en date du 22 février 1994,
comportent, sous la liste de la gamme Casio pour la rentrée
des classes 1994, la mention suivante : « Proposition
incond. 6 % », qui témoigne
de la garantie donnée par M. Baratte que la ristourne
différée serait accordée à ce
distributeur au minimum à hauteur de 6 %,
quelles que soient les commandes effectuées lors de
la rentrée des classes 1994, et jusquà 8 %
si les résultats le justifiaient.
Sagissant
du groupe Leclerc :
377. Les notes de M. Baratte
reprises aux paragraphes 139 et 140 et relatives aux négociations
menées entre novembre et décembre 1994 avec
M. Barrier, acheteur des calculatrices au Galec, qui
comportent notamment les mentions suivantes : « (...) Pb.
de conditionnalité des ristournes (...). Offre
occulte (...). 5 % garanti (...). Vu JPN le 7.12.
OK pour 8 % garanti », établissent
quune garantie de 8 % de remise a été
accordée.
378. Ceci est confirmé
par les déclarations de M. Barrier aux enquêteurs,
selon lesquelles la société Noblet lui a garanti
le bénéfice de ce taux maximum, ainsi que par
les déclarations dun des chefs de rayon du centre
Leclerc de Bernay et celles du chef de rayon bazar de lhypermarché
Leclerc de Neufchâteau, selon lesquelles la remise de
8 % était inconditionnelle (cf. déclarations
citées au paragraphe 140).
Sagissant
de la société Plein Ciel Diffusion :
379. La circulaire,
adressée aux membres du groupe Plein Ciel intitulée
« rentrée des classes 1993 Casio »
et reprise au paragraphe 141, démontre que la
société Plein Ciel Diffusion a reçu lassurance,
dès le mois de mai 1993, que lors de la rentrée
des classes 1993, les grandes surfaces ne vendraient pas les
produits Casio en dessous des prix minima établis par
Noblet, quelle bénéficierait (pour ses
clients) dune remise dau moins 9 %, et quaucune
importation parallèle ne serait faite pour les produits
Casio mis en avant par Plein Ciel dans son « journal
rentrée des classes ».
380. Il convient de relever
que cette note de Plein Ciel Diffusion a été
saisie par les enquêteurs dans le bureau de M. Karmes,
secrétaire général commercial de la société
Noblet, qui lavait reçue par télécopie,
le 9 juillet 1993, de la part de M. Paumier,
directeur commercial du réseau traditionnel de la société
Noblet.
381. La circulaire interne
adressée au printemps 1995 aux membres du groupement
Plein Ciel Diffusion pour la préparation des commandes
de rentrée des classes 1995 Casio et citée au
paragraphe 42, de même que la circulaire marketing
du 21 mai 1996, citée au paragraphe 143,
démontrent de la même façon quune
garantie de « remise rétroactive (...)
de 12 % du chiffre daffaires (...) réalisé »
a été a priori accordée.
382. A cet égard,
les affirmations de M. Frankel, directeur dexploitation
de la société Plein Ciel Diffusion, reprises
au paragraphe 146, selon lesquelles, lorsque le montant
des commandes effectuées ne permettait pas dobtenir
le taux maximum de remises de la société Noblet,
il effectuait « (...) les commandes nécessaires
pour y parvenir (...) » sont contredites par
les récapitulatifs des commandes du groupement Plein
Ciel évoqués au paragraphe 146 qui révèlent
une diminution très sensible du nombre de machines
commandées en 1995 (34 169, en intégrant
les commandes dun membre affilié en cours dexercice,
contre 43 300 en 1994), ainsi que par les déclarations
de M. Perhaut, responsable grands comptes de la société
Noblet, reprises au paragraphe 146, selon lesquelles
Plein Ciel « a bénéficié,
comme tous les autres en 1995 de la ristourne différée
à son taux maximum de 8 % ».
383. La note du 1er juillet
1995 reproduite au paragraphe 144, adressée par
M. Karmes, secrétaire général commercial
de la société Noblet, à ses représentants
et portant sur lannonce faite par Plein Ciel Diffusion
à certains de ses clients dune remise sur facture
de 8 % sur la base des prix nets rentrée scolaire
de Noblet, vient confirmer que, du point de vue de la société
Noblet, loctroi de cette ristourne à son taux
maximum était préalablement acquis à
Plein Ciel Diffusion.
384. Cette garantie ressort
enfin des déclarations de M. Gabet, chef de marché
bureautique et informatique de la société Plein
Ciel Diffusion, citées au paragraphe 145, et selon
lesquelles le taux de remise de 12 % était acquis
au moment de la commande.
Sagissant
de la société Majuscule :
385. La « Lettre des
achats Majuscule » du 17 mai 1995, adressée
par le groupement Majuscule à ses adhérents
conjointement à leur bon de commande de produits Casio
pour la rentrée des classes 1995, indique : « Vous
trouverez ci-joint le bon de commande rentrée des classes
Majuscule/Casio. Ce bon reprend les machines à calculer
scientifiques, programmables et graphiques pour la rentrée,
appuyé des prix de vente TTC conseillés (...).
Sur ces prix de vente conseillés, il vous sera reversé
par la centrale 12 %, sous forme davoir courant
décembre. » (cf. cotes 800 à
801 du rapport.)
386. Compte tenu des prix
de cession consentis par le groupement Majuscule à
ses adhérents, identiques à ceux figurant sur
le bon de commande rentrée des classes soumis par Noblet
à lensemble de ses clients, lengagement
pris de leur reverser une ristourne de 12 % implique
que le groupement Majuscule avait lui-même obtenu de
la société Noblet lassurance de bénéficier
de la ristourne assortiment-progression à son taux
maximum (une rémunération de 4 % complémentaire
étant prévue dans les mêmes conditions
que pour le groupement Plein Ciel).
387. Ainsi, il résulte
des éléments qui précèdent que
les ristournes consenties par la société Noblet
à ses distributeurs, et plus précisément
au groupe Carrefour, à la centrale Continent Promodès,
au groupe Leclerc, à la société Plein
Ciel et à la société Majuscule, navaient
pas, à tout le moins pour les années 1994 et
1995, de caractère conditionnel. En revanche, leur
présentation sous la forme conditionnelle permettait
dempêcher les distributeurs de les répercuter
sur leurs prix de revente aux consommateurs et conférait,
ainsi, aux prix nets facturés par la société
Noblet la qualité dun prix artificiellement élevé.
2. Sur lélaboration
et la diffusion
de prix publics minima
388. La
société Noblet conteste avoir mis en place une
stratégie commerciale visant à déterminer
et à diffuser des prix publics de vente minima. Elle
expose quelle sest vue contrainte dadapter
sa stratégie commerciale à la pratique de prix
coûtants initiée par la grande distribution et
cité à cet égard les déclarations
de plusieurs représentants de la grande distribution
recueillies par les enquêteurs en 1995 et 1996.
389. Cependant, il ressort
de nombreuses pièces du dossier que, contrairement
à ce quont déclaré les responsables
de la société Noblet au cours de lenquête
administrative (cf. paragraphes 148 à 150), celle-ci
a mis en place, depuis 1992 au moins, une stratégie
visant à déterminer et à diffuser les
prix publics minima quelle entendait voir pratiquer
par ses distributeurs en contrepartie de loctroi de
ristournes arrière.
En premier lieu, la note manuscrite
de M. Karmes, secrétaire général
de la société Noblet, datée de « Pâques
1993 » et relative à la rentrée des
classes 1993, citée au paragraphe 175, et qui
précise « Rentrée des classes
Casio. Stratégie : reconduire la politique 1992
(...). (E) Respect des prix publics sinon pas de marge arrière »
est révélatrice de cette pratique.
390. En deuxième
lieu, la lettre du 4 juillet 1995, adressée
par la société Noblet à tous ses distributeurs
à loccasion du relèvement de la TVA en
août 1995, reprise au paragraphe 160, et qui indique
que la décision « (...) de porter le
taux de TVA à 20,60 % à dater du début
août 1995 (...) aura pour conséquence une augmentation
des prix publics minima, taxes comprises (...) »,
confirme lélaboration et la diffusion de prix
publics minima.
391. En troisième
lieu, plusieurs documents émanant de la société
Noblet comportent les termes de « prix publics
minima » :
Dans le tableau communiqué
par la société Noblet, les prix figurant dans
la colonne « prix publics TVA 20,6 % »
ne correspondent pas exactement au prix facturé + TVA,
mais sont arrondis de plusieurs centimes et de plusieurs dizaines
de centimes dans certains cas, par rapport au montant précis
résultant de lapplication du nouveau taux de
TVA (cf. paragraphe 159).
Dans les tarifs et des prix publics
pour les années 1992 à 1995 (avant le changement
de TVA) et pour lannée 1996 (cf. paragraphes 152
et 153).
Dans la note manuscrite de M. Ocana,
directeur marketing Casio, à M. J.-P. Noblet du
31 janvier 1995 relative au calcul prévisionnel
des marges pour la rentrée 1995 : « (...)
veuillez trouver ci-joint le nouveau calcul prévisionnel
des marges Casio pour la rentrée scolaire. Les prix
publics sont modifiés comme vous lavez demandé
au cours de la réunion du 27 janvier 1995
(...) » (cf. paragraphe 156).
392. Par ailleurs, il ressort
des éléments figurant aux paragraphes 163
à 174 que les distributeurs avaient connaissance
des prix de vente publics minima déterminés
par la société Noblet.
3. Le respect des prix
publics élaborés
et fixés par la société Noblet
393. La
société Noblet oppose quil nest
pas démontré que les distributeurs auraient
adhéré à la politique de prix minimum
de revente qui lui est reprochée. Elle indique à
cet égard que le prix public TTC mentionné sur
les bons de commande correspond au prix TTC des produits achetés ;
que les distributeurs ont toujours conservé une complète
maîtrise de leur politique tarifaire et que les alignements
de prix constatés sur le marché résultent
de la politique commerciale des acteurs de la grande distribution
et donc du jeu normal du marché.
394. Le respect par les
distributeurs des prix publics élaborés et fixés
est toutefois attesté par plusieurs éléments
du dossier :
Sagissant de la société
Plein Ciel Diffusion les éléments énoncés
aux paragraphes 177 à 179 démontrent
que M. Gabet, de la société Plein Ciel
Diffusion, est intervenu en 1993 auprès de la société
Noblet afin que celle-ci fasse remonter le prix de la FX 92
pratiqué par les magasins Maxicoop, au niveau des prix
conseillés. Cette intervention a effectivement été
suivie dune rectification des prix par les magasins
Maxicoop.
Sagissant de la société
Majuscule, les pièces saisies dans le bureau de M. Perhaut,
de la société Noblet, et reprises au paragraphe 147,
témoignent de laccord existant entre le groupement
Majuscule et la société Noblet sur la teneur
des bons de commande, puisque M. Panaville, de la société
Majuscule, a transmis à M. Perhaut, par télécopie
du 11 mai 1995 (cf. cote 801 du rapport), le projet
manuscrit de la lettre des achats susvisée, quil
sapprêtait à envoyer à ses adhérents,
dans lequel il leur indique : « Vous trouverez
ci-joint le bon de commande rentrée des classes Majuscule/Casio.
Ce bon reprend les machines à calculer scientifiques,
programmables et graphiques pour la rentrée, appuyé
des prix de vente TTC conseillés (...). »
395. Par ailleurs,
il résulte des pièces citées aux paragraphes
183 à 186 que le groupement Majuscule a demandé,
en septembre 1994, à la société Noblet
dintervenir auprès du grossiste Sodalfa, afin
quil cesse de proposer à ses clients les machines
Casio aux prix promotionnels nets de Noblet, assortis dune
remise de 10 %. En effet, cette mention dune remise
sur facture donnait la possibilité aux détaillants
de vendre en dessous des prix publics établis par la
société Noblet. Lintervention ainsi effectuée
a été suivie dun arrêt de la politique
appliquée par Sodalfa.
Sagissant de la société
Sodalfa, léchange de lettres et de télécopie
entre ce grossiste et la société Noblet relatives
au problème soulevé par lannonce, en 1993,
par la société Noblet de laugmentation
de ses tarifs, démontre que le grossiste Sodalfa na
pas déterminé ses prix de vente de manière
autonome, mais en accord avec la société Noblet.
396. En effet, lexistence
dun accord est confirmé par :
- les termes explicites
de la lettre du grossiste Sodalfa adressée à
la société Noblet : « Vous
constaterez que nous avons respecté les prix que vous
nous aviez communiqués pour la FX 92 Collège
et la FX 6800 » (cf. paragraphe 198) ;
- les termes du courrier
adressé ultérieurement par le grossiste Sodalfa
à ses clients : « Bien quun
texte en page 2 du magazine stipule que les prix sont
indicatifs, Casio nous a demandé de bien vouloir, pour
lui éviter et vous éviter tout problème
ultérieur, dencarter un erratum dans chaque magazine »
(cf. paragraphe 201) ;
- les termes de la
lettre adressée par M. Noblet au directeur général
de Sodalfa, repris au paragraphe 202.
4. Les effets des pratiques
397. Outre
les éléments relevés à légard
de chaque distributeur dans les paragraphe qui précèdent,
le dossier contient, pour les années 1995 et 1996,
de nombreux prospectus publicitaires édités
par un nombre significatif de distributeurs à loccasion
de la rentrée des classes et notamment des prospectus
publiés par la plupart des groupes de la grande distribution
à dominante alimentaire, lesquels révèlent
que les prix publics élaborés par la société
Noblet sont très largement adoptés par ses clients,
comme en témoigne le tableau reproduit au paragraphe 203
de la présente décision.
398. Les seules exceptions
sont dues au problème provoqué par le relèvement
du taux de la TVA à compter du 1er août
1995 que les distributeurs Boulanger et Plein Ciel Diffusion
ont répercutée sur le prix de vente.
399. Les relevés
de prix, effectués par des agents de la DGCCRF au cours
des mois doctobre et novembre 1995 dans de nombreux
points de vente répartis sur 41 départements
et concernant les enseignes de la grande distribution, les
grands magasins et les magasins spécialisés
tels que Plein Ciel, la FNAC, Gibert, le Furet du Nord...
(au total, 56 enseignes), montrent une homogénéité
toujours forte des prix pratiqués, même si quelques
écarts, concernant pour lessentiel des prix supérieurs
aux prix publics définis par la société
Noblet, apparaissent chez certains revendeurs (cf. paragraphe 204).
400. Les prospectus publicitaires,
édités à loccasion de la rentrée
scolaire 1996 par les enseignes de la grande distribution
et quelques magasins spécialisés, ne comportent
aucune exception quant au principe de la revente des calculatrices
scolaires Casio au niveau des prix publics TTC établis
par la société Noblet (cf. paragraphe 205).
5. Sur la mise en uvre
par la société Noblet
dune surveillance du respect des prix publics
401. La
société Noblet fait valoir quil nest
pas démontré quelle aurait organisé
une surveillance du respect des prix publics minima par des
interventions auprès des distributeurs. Elle expose,
à cet égard, que les interventions relevées
sont très peu nombreuses et quelles révéleraient
tout au plus lexistence dactions isolées
et ponctuelles permettant didentifier les cas de revente
à perte. Elle fait valoir, en effet, quelle a
estimé légitimement que ses distributeurs navaient
pas la faculté de vendre à un niveau inférieur
au prix de facturation, compte tenu de ce quaucune ristourne
nétait acquise et que les quelques actions relevées
nont eu dautre but que de pouvoir répondre
aux interrogations des distributeurs eux-mêmes. Elle
ajoute que les éléments du dossier nétablissent
pas quelle avait accédé systématiquement
à la demande des distributeurs se plaignant de ce que
dautres distributeurs pratiquaient des prix jugés
par eux illicites.
402. Cependant, les éléments
figurant aux paragraphes 175 à 202 montrent que le
respect des prix publics par les distributeurs est un objectif
stratégique de la société Noblet depuis
1992 au moins et que cette société est intervenue
pour faire remonter les prix de vente de certains distributeurs
au niveau des prix publics, en mettant en avant, dans certains
cas, la législation sur la revente à perte.
403. En effet, il résulte
des paragraphes 177 à 179 que la société
Noblet est intervenue à la demande de la société
Plein Ciel diffusion, pour faire remonter les prix de la FX 92
Collège pratiqués par le distributeur Maxicoop.
404. De la même façon,
la société Noblet est intervenue :
- en septembre 1993
auprès de la papeterie A3 à Nice, adhérente
à la coopérative Plein Ciel, à la demande
de la papeterie Jean-Jaurès à Nice (cf. paragraphes
180 à 182) ;
- en septembre 1994
auprès du groupement Sodalfa-Plein Ciel Diffusion,
à la demande du groupement Majuscule (cf. paragraphes
183 à 186) ;
- en septembre 1995
auprès du magasin Carrefour de Langueux, à la
demande du magasin Leclerc de Plerin (cf. paragraphes 187
à 191),
- en septembre 1995
auprès du groupe Comptoirs Modernes (cf. paragraphes
192 à 195).
405. Si la société
Noblet invoque la législation française interdisant
la revente à perte pour justifier les pratiques qui
lui sont reprochées, il convient de noter dune
part, que cette interdiction, effectivement sanctionnée
sur le plan pénal, concerne au premier chef les distributeurs
et non les fournisseurs ou les fabricants, dautre part,
et surtout, quun tel argument ne peut, en tout état
de cause, être accepté dans le cas où
ces seuils de revente à perte ont été,
comme en lespèce, artificiellement établis
par le biais de soi-disant remises « conditionnelles »
qui étaient en fait garanties.
406. Il résulte
de lensemble de ces éléments que la société
Noblet a mis en place un dispositif ayant pour objet et pour
effet dobtenir des distributeurs de calculatrices Casio
quils pratiquent tous, sur lensemble du territoire
national, les mêmes prix de vente préalablement
déterminés par elle, à un niveau ne résultant
pas du jeu de la concurrence et que les sociétés
Carrefour, Plein Ciel diffusion, Sodalfa et Majuscule ont
adhéré et mis en uvre cette pratique dentente :
pour les années 1994 et 1995 en ce qui concerne la
société Carrefour, les années 1993, 1995
et 1996 en ce qui concerne la société Plein
Ciel, pour les années 1993 et 1995 pour la société
Majuscule et pour lannée 1993 pour la société
Sodalfa.
407. Cette pratique ayant
eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence
entre les différents distributeurs de calculatrices
Casio est prohibée par les dispositions de larticle
L. 420-1 du code de commerce.
b) Les pratiques mises
en uvre par la société
Texas Instruments France avec les
distributeurs de son réseau
1. Les
conditions de vente aux grandes surfaces
408. Il
ressort des déclarations citées aux paragraphes
206 à 218 et des éléments mentionnés
au paragraphe 245 que la société Texas Instruments
France, partant du constat de ce que les hypermarchés
vendaient ses produits à prix coûtants, cest-à-dire
aux prix de cession majorés de la TVA, a, à
partir de 1994 au moins, dune part, déterminé
pour ce type de distributeurs, des prix de cession élevés
et, dautre part, consenti lintégralité
des marges sous forme de ristournes arrières, auxquelles
elle conférait un caractère conditionnel.
Les prix de cession
409. Ainsi
que la exposé M. Pietri, lors de son audition
du 7 août 1996, les tarifs « promotionnels »
établis par la société Texas Instruments
France pour les périodes de rentrée des classes
sont calculés pour correspondre, après application
du taux de TVA, à des montants psychologiquement attractifs,
qui se trouvent être les prix publics diffusés
par la société Texas Instruments France.
410. Par ailleurs, il ressort
des conditions de vente élaborées par la société
Texas Instruments France, telles quelles sont rappelées
aux paragraphes 219 à 228 que les calculatrices « scientifiques »
sont facturées à la grande distribution à
des prix plus élevés denviron 20 %
et 10 %, que ceux pratiqués respectivement à
légard, dune part, des distributeurs multispécialistes
et détaillants traditionnels (Darty, FNAC, Plein Ciel...)
et, dautre part, des supermarchés et grands magasins.
411. Il résulte
des éléments cités aux paragraphes 209
à 218 que, pour justifier ces différences tarifaires
très importantes, la société Texas Instruments
France a considéré que ses clients distributeurs
devaient être classés en cinq catégories
en fonction des services quils rendent aux consommateurs
et au producteur, les distributeurs rendant le plus de services
se voyant attribuer les tarifs promotionnels les plus intéressants.
412. Toutefois, lanalyse
concrète des différenciations tarifaires par
catégorie de revendeurs révèle, derrière
lobjectif de rémunération des services
rendus affiché par la société Texas Instruments
France, une discrimination opérée à lencontre
des distributeurs de la catégorie I, cest-à-dire
vente en libre service sans vendeur spécialisé.
413. Ainsi, les distributeurs
de vente par correspondance bénéficient des
conditions tarifaires les plus avantageuses (tarifs inférieurs
de 26,4 à 36,5 % par rapport à la catégorie I),
alors quils ne rendent aucun des services exigés
des distributeurs des catégories II et III pour bénéficier
de ces tarifs et auraient dû être assimilés
aux distributeurs de la catégorie I.
Le caractère
conditionnel des ristournes
414. Il
ressort des éléments, cités aux paragraphes
247 à 250, que lintégralité de
la marge des distributeurs de la catégorie I était
constituée par des ristournes arrières qui,
selon la société TexasInstruments France, avaient
un caractère conditionnel, cest-à-dire
quelles ne pouvaient être prises en compte par
le distributeur dans le calcul de son prix de vente public.
415. Dans ce cadre, les
éléments repris aux paragraphes 287 à
303 démontrent que les responsables de la société
Texas Instruments France ont, à plusieurs reprises,
rappelé à lordre les distributeurs qui
tentaient de vendre au-dessous du prix de facturation, en
faisant valoir quils seraient en infraction avec les
règles relatives à la revente à perte.
Le caractère conditionnel des ristournes pour la société
Texas Instruments France ressort également du comportement
de ce producteur, lors du passage de la TVA de 18,6 %
à 20,6 % le 1er août 1995.
416. Or il ressort des
pièces mentionnées dans les constatations précédentes,
que ces ristournes apparaissent sur de nombreuses factures
à des clients de la catégorie I sous le libellé
« remises inconditionnelles » (cf. paragraphes
251 et 252) et correspondent, selon M. Pietri, directeur commercial
de la société Texas Instruments France, à
« un engagement pris au départ par lacheteur
central » (cf. paragraphe 253), ce dernier reconnaissant
être dans limpossibilité de vérifier
la réalisation des obligations conditionnant loctroi
de ces ristournes (cf. paragraphe 254).
417. Par ailleurs, il résulte
des éléments cités au paragraphe 236
que le service, consistant pour le distributeur à limiter
les points de livraison et de facturation, était, selon
quil sagissait de distributeurs de la catégorie
I ou de la catégorie III, rémunéré
sous forme de ristourne conditionnelle pour les uns et sur
facture, dans le prix promotionnel attractif, pour les autres,
et que certains distributeurs obtenaient les ristournes, alors
même quils navaient pas rempli les obligations
auxquelles elles étaient théoriquement conditionnées
(cf. paragraphes 256 à 258).
418. Enfin, il ressort
des déclarations de M. Pietri, directeur commercial
de Texas Instruments, aux enquêteurs, citées
au paragraphe 265, quavant 1995, la ristourne de référencement,
pourtant présentée aux distributeurs comme ayant
un caractère conditionnel, « pouvait
être considérée comme de principe acquis »,
mais que certains distributeurs tels que Leclerc (cf. paragraphe
266), ayant tenu compte de cette ristourne pour déterminer
leur prix de vente, la société Texas Instruments
France a décidé de conditionner cette ristourne
à une nouvelle obligation consistant dans la mise en
linéaire dun certain nombre de produits, obligation
dont M. Pietri a reconnu être dans limpossibilité
de vérifier la réalisation effective pour les
magasins Carrefour notamment (cf. paragraphe 254).
419. Lensemble de
ces éléments démontre le caractère
faussement conditionnel des ristournes proposées par
la société Texas Instruments France.
420. Par ailleurs, la comparaison
et lanalyse des prix ainsi que des ristournes consenties
aux différentes catégories de distributeurs,
tels quils figurent au paragraphe 242, permettent de
constater que, dans la pratique, les différences de
prix entre les diverses catégories de distributeurs
étaient compensées par les montants de ristourne,
de sorte que, comme le démontre le tableau suivant,
ce que le distributeur de la catégorie I (par
rapport à celui de la catégorie III) nobtenait
pas en marge avant, il lobtenait en marge arrière.
Inversement, ce que le distributeur de la catégorie
III obtenait en marge avant (+ 20 % par rapport
à la catégorie I), il ne lobtenait pas
en marge arrière.
|
CATÉGORIES |
|
I |
II |
III |
Prix nets. |
Prix
promotionnels
Catégorie I |
Prix
promotionnels
Catégorie I
- 10 % |
Prix
promotionnels
Catégorie I
- 20 % |
Ristournes théoriques maximales. |
17 % |
11 % |
Pas de
ristourne |
421. En conséquence,
les différences importantes entre les tarifs sur facture
des différentes catégories de distributeurs,
que la société Texas Instruments France légitime
par le type de distribution et limportance plus ou moins
grande des services qui y sont rendus, étaient en partie
anéanties par les fortes ristournes accordées
aux distributeurs obtenant les prix « promo »
les plus élevés et par labsence de ristournes
arrières pour les distributeurs ayant déjà
été « servis » sur facture
par lobtention de prix « promo »
très attractifs.
422. Lensemble de
ces éléments, auxquels sajoutent la modification
par la société Texas Instruments France, à
partir de 1995, des conditions de ristournes accordées
au Galec/Leclerc, afin dempêcher cette société
de réduire son prix de revente en tenant compte de
la ristourne de 3 % liée au référencement
(paragraphes 265 et 266), démontre le caractère
artificiellement élevé des prix tarifs sur facture
consentis à la grande distribution.
423. Ainsi, le mécanisme
mis en place par la société Texas Instruments
France lui a permis de conférer au prix tarif facturé
au distributeur le caractère de seuil artificiel de
revente à perte et, par suite, de déterminer
des prix publics de vente uniformes et élevés
pour tous les distributeurs de la catégorie I, cest-à-dire
ceux de la grande distribution.
2. Lélaboration
et la diffusion de prix publics minima
424. Il
ressort des éléments constatés aux paragraphes
268 à 286 que la société Texas Instruments
France a élaboré et diffusé auprès
de lensemble des distributeurs des prix de vente publics.
425. En effet, les documents
tarifaires internes, cités aux paragraphes 268
à 273, démontrent que la société
Texas Instruments France a élaboré, pour les
modèles de sa gamme scolaire, lors de chaque modification
de ses tarifs ou du lancement de nouvelles références,
des prix publics de vente aux consommateurs, désignés
par les termes « prix généralement
constatés ».
426. Les nombreux documents
du type « proposition de collection »,
établis à lattention des distributeurs
et cités aux paragraphes 268 et suivants, montrent
que ces prix publics ont été communiqués
à ceux-ci, simultanément aux références
et aux prix de cession des différents modèles
de la gamme. Ce constat est confirmé par les termes
de la télécopie adressée, le 11 avril 1994
(cf. paragraphe 277), au groupe Carrefour par M. Freysz,
de la société Texas Instruments France, qui
indiquait, sous les termes codés de « préconisation
de stock », les prix publics des différents
modèles de la gamme à communiquer à lensemble
des magasins, ou le compte rendu de lappel téléphonique
du 20 mai 1996 de M. Tenaglia, communiqué
par les responsables de la société Plein Ciel
Diffusion (cf. paragraphe 283). Lutilisation par
la société Texas Instruments France de termes
codés pour désigner les prix de vente à
ses distributeurs (cf. paragraphes 283 et suivants) témoigne
de la conscience quavait cette société
de lillicéité de ses pratiques.
427. La réalité
dune telle diffusion a, de plus, été reconnue
par les responsables de la société Texas Instruments
France, comme en témoignent les déclarations
de MM. Freysz et Pietri, de la société
Texas Instruments France, citées aux paragraphes 278
et 281, ou le message adressé par les mêmes
personnes à M. Marc Altes, de la société
Carrefour, cité aux paragraphes 277 et 280.
428. Les documents tarifaires
(cf. paragraphe 246) démontrent, enfin, que ces
prix publics ont été déterminés
à un niveau correspondant, dans tous les cas, au prix
coûtant de la grande distribution alimentaire (revendeurs
de la catégorie I) auquel est ajoutée la
TVA.
3. Ladhésion
des distributeurs
au dispositif de la société Texas Instruments
France
429. Les
sociétés Carrefour, Casino Guichard Perrachon,
Sapac Magasins Populaires et Plein Ciel diffusion contestent
que les ristournes aient été artificiellement
conditionnelles et avoir appliqué les prix diffusés
par la société Texas Instruments France. En
conséquence, elles soutiennent quil nest
pas démontré quelles auraient adhéré
à la pratique mise en uvre par cette société.
La société Carrefour
430. La société
Carrefour expose que la déclaration dun de ses
salariés ne saurait, à elle seule, établir
la preuve du caractère artificiellement conditionnel
des ristournes.
431. Elle expose, de surcroît,
que son comportement ayant été identique à
celui dautres distributeurs, non visés par les
poursuites, celles diligentées à son égard,
devraient être abandonnées.
432. Cependant, il ressort
des pièces, citées au paragraphe 255, que
les représentants de la société Carrefour
considéraient eux-mêmes la ristourne de référencement
comme nayant pas de caractère conditionnel et
quelle pouvait donc être répercutée
dans les prix de vente.
433. Par ailleurs, les
factures, établies par la société Texas
Instruments France pour plusieurs magasins Carrefour et citées
aux paragraphes 251 et suivants, mentionnent lensemble
des ristournes qualifiés de « conditionnelles »
par les responsables de la société Texas Instruments
France sous le libellé de « remises inconditionnelles ».
434. En outre, il résulte
des termes des télécopies des 4 et 7 août 1995,
citées aux paragraphes 294 et 295, que la
société Carrefour a rectifié ses prix
de vente, pour les augmenter au niveau des prix publics déterminés
par son fournisseur, dès lintervention de ce
dernier auprès delle.
435. Enfin, les termes
de la télécopie du 11 avril 1994,
adressée par M. Freysz (de la société
Texas Instruments France) à M. Altes (Carrefour)
et citée au paragraphe 277 ainsi que les déclarations
de M. Altes, reprises au paragraphe 279, démontrent
quen avril 1994 M. Freysz a communiqué
à M. Altes les « (...) prix de vente
en dessous desquels des problèmes de revente à
perte pouvaient se poser (...) » alors que
« (...) les conditions commerciales pour lannée
en cours nétaient pas encore signées (...) ».
436. Les termes de
la télécopie adressée le 27 octobre 1995
par M. Pietri à M. Altes (cf. paragraphe 280)
démontrent quà cette date M. Pietri
a communiqué à la société Carrefour
le nouveau prix de revente de la calculatrice TI 81,
en priant Carrefour de transmettre ce nouveau prix à
chaque magasin.
437. Il résulte
de lensemble de ces éléments que la société
Carrefour, bien que connaissant le caractère artificiellement
conditionnel des ristournes octroyées par la société
Texas Instruments France, ne les a pas répercutées
dans ses prix de revente, quelle a eu communication,
de la part de la société Texas Instruments France,
en 1994, des prix de vente minima auxquels elle devait
vendre ses produits et en 1995, du prix minimal auquel
elle devait vendre la calculatrice TI 81 et quelle
a appliqué les tarifs en cause.
438. Par ce comportement,
la société Carrefour a adhéré,
au moins pour les années 1994 et 1995, à
la pratique mise en uvre par la société
Texas Instruments France.
Sagissant
de la centrale dachats Casino-Rallye :
439. La société
Casino Guichard-Perrachon fait valoir que la pièce
sur laquelle a été fondé le grief ne
peut démontrer que la centrale dachats Casino
a adhéré de manière active au système
de seuil minimum de prix de revente mis en place par la société
Texas Instruments France.
440. Comme il a été
expliqué aux paragraphes 301 à 303, la pièce
sur laquelle se fonde le rapporteur est un télex adressé
le 24 juin 1993 à la centrale dachats
Casino-Rallye, saisi dans les locaux de la société
Texas Instruments France et sur lequel figurent dune
part, dactylographiées, les conditions commerciales
pour 1993 et dautre part, à lencre
rouge de la main de M. Freysz de la société
Texas Instruments, les annotations reprises au paragraphe 302.
441. Il apparaît
que ces annotations, figurant sur un télex et non pas
sur une télécopie, nont pas pu être
envoyées aux acheteurs de Casino, MM. Fraisse
et Gervais, tout au moins par le télex du 24 juin 1993.
442. Dans la mesure où
aucune autre pièce du dossier ne permet de rapporter
la preuve que les acheteurs de Casino ont obtenu, dune
part, une rémunération de 2 % du chiffre
daffaires en contrepartie du respect, lors de la rentrée
scolaire 1993, des prix publics définis par la société
Texas Instruments et, dautre part, la couverture du
coût de lalignement sur déventuels
prix inférieurs des concurrents par un budget de même
montant, le grief établi à lencontre de
la centrale dachats Casino-Rallye doit être abandonné,
ainsi que le rapporteur la proposé dans son rapport.
La société Sapac magasins populaires
443. La société
Sapac magasins populaires soutient quil ny a eu
aucune concertation sur la fixation des prix de revente entre
elle et la société Texas Instruments France,
mais simplement une erreur commise par la société
Sapac qui aurait à tort tenu compte dune ristourne
de coopération commerciale pour calculer son prix de
vente TTC ; quen réalité, le vrai
prix auquel la société Texas Instruments France
avait vendu ce produit à la société Sapac
était de 59,95 F et non pas 58,15 F.
444. La société
Sapac magasins populaires soutient également que si,
sur les factures établies par la société
Texas Instruments France à lattention de la société
Sapac, le prix unitaire dachat de la TI 30 X
est de 58,15 F, cest aussi parce que la société
Texas Instruments France a commis une erreur en déduisant
le « budget pub » de 3 %.
445. La société
Sapac magasins populaires ajoute quaucune pièce
du dossier ne confirme que les prix pratiqués par les
magasins Escale aient été ceux transmis par
la société Texas Instruments.
446. Les factures no 84170183
et 84170184, datées du 11 mai 1994 (cf. cotes 1064
et 1065 du rapport), mentionnent un prix facturé
par la société Texas Instruments France de la
calculatrice TI 30 X de 58,15 F HT. Cependant,
un document, coté 1063 au rapport, comporte, ainsi
que le fait observer la société Sapac magasins
populaires dans une rubrique intitulée « Informations
pour le fournisseur », la mention suivante :
« PA = 59,95
Budget pub 3 %
PR 58,15 »
447. Par ailleurs,
les tarifs de la société Texas Instruments France,
pour lannée 1994 (cf. cotes 859 à 861
du rapport), comportent un « prix Promo net »
de la TI 30 X fixé à 59,95 F HT.
448. Dès lors, il
nest pas exclu quune erreur ait pu être
commise tant par la société Sapac que par la
société Texas Instruments France et dans ces
conditions, il ne peut être considéré
comme établi que la société Sapac magasins
populaires aurait adhéré aux pratiques mises
en uvre par la société Texas Instruments
France.
La société Plein Ciel Diffusion
449. Il ressort
de la circulaire relative à la rentrée des classes
1995, élaborée par la société
Plein Ciel Diffusion à destination de ses clients,
citée au paragraphe 282, que dès le mois
de mai 1995, ce groupement était assuré
que les prix publics TTC, quil communiquait à
ses clients et qui correspondaient aux prix publics diffusés
par la société Texas Instruments France, seraient
les prix pratiqués par lensemble des distributeurs
pendant la période de rentrée des classes.
450. Or les conditions
de vente, exposées aux paragraphes 242, démontrent
pourtant que la société Plein Ciel, distributeur
de catégorie III, avait la possibilité
de déterminer des prix de vente très largement
inférieurs aux prix publics diffusés par la
société Texas Instruments France, puisquelle
bénéficiait de tarifs promotionnels inférieurs
de 20 % à ceux de la grande distribution.
451. Par ailleurs, le document,
cité au paragraphe 283, établit quau mois
de mai 1996, M. Tenaglia de la société
Texas Instruments France a transmis à Mlle Valérie
Gendron, responsable de marché de la société
Plein Ciel Diffusion, la liste des « prix publics
TTC » de 11 types de calculatrices et lui
a signalé la modification du prix de deux dentre
eux.
452. La mention « souhaite
recevoir état stock pour protection stock de son côté »
doit, enfin, être interprétée dans le
sens expliqué par M. Pietri le 7 août 1996
(paragraphe 283) cest-à-dire « (...)
comme le prix plancher de revente à perte en dessous
duquel ils (les distributeurs) ne doivent pas descendre ».
Ainsi analysée, cette mention démontre que la
société Texas Instruments France demandait à
la société Plein Ciel Diffusion de lui communiquer
les prix planchers auxquels elle revendait les calculatrices,
ce qui pouvait ainsi lui permettre dassurer le contrôle
des prix pratiqués.
453. Il résulte
de lensemble de ces éléments que la société
Plein Ciel Diffusion a adhéré, en 1995 et en
1996, à la pratique mise en uvre par la société
Texas Instruments France.
Le groupement des grossistes Distributeurs
associés (DA)
454. Les
éléments, cités aux paragraphes 284
à 286, démontrent que la télécopie
adressée par M. Freysz, responsable des ventes
de la société Texas Instruments France, à
M. Le Reverend, du groupe Distributeurs associés,
le 16 février 1993, a informé ce dernier
de la mise en uvre dune opération promotionnelle
intitulée « 21/20 » dans le cadre
de laquelle la calculatrice TI 40 Galaxy devait être
vendue 99 F TTC et quà la suite de
cette télécopie, une lettre type a été
adressée par tous les grossistes membres du groupement
à leurs clients détaillants pour leur demander
de « rectifier le prix de vente (...) et de
le porter à 99,50 F TTC ».
455. Cette lettre type
a été transmise une première fois dès
le début du mois daoût, par le responsable
du groupement DA à M. Pietri, directeur commercial
de la société Texas Instruments France, puis,
une seconde fois le 27 août, afin que ce dernier
soit informé « comme convenu »
de ce que le prix fixé par sa société
pour le produit en cause avait bien été transmis
par lintermédiaire des grossistes, aux détaillants.
456. Il résulte
donc de lensemble de ces éléments que
le groupement des grossistes Distributeurs associés
a participé et adhéré, en 1993, à
la pratique mise en uvre par la société
Texas Instruments France.
4. Les effets des pratiques
457. Outre
les éléments relevés à légard
de chaque distributeur dans les paragraphes qui précèdent,
le dossier contient plusieurs prospectus édités
à loccasion de la rentrée des classes
1995 par de nombreux distributeurs dont les prix ont été
retranscrits dans le tableau figurant au paragraphe 304.
Lexamen de ces données démontre que les
prix publics, élaborés par la société
Texas Instruments France, ont été appliqués
de façon quasi générale par les distributeurs,
à lexception du groupe Plein Ciel Diffusion qui
a répercuté sur ses prix de vente le relèvement
de 18,6 % à 20,6 % du taux de la TVA à
compter du 1er août 1995.
458. Par ailleurs, les
relevés de prix, effectués par des agents de
la DGCCRF au cours des mois doctobre et novembre 1995
dans de nombreux points de vente répartis sur 41 départements
et concernant les enseignes de la grande distribution, les
grands magasins et les magasins spécialisés
tels que Plein Ciel, la FNAC, Gibert, le Furet du Nord...
(au total, 56 enseignes), montrent une homogénéité
toujours forte des prix pratiqués, même si quelques
écarts, concernant pour lessentiel des prix supérieurs
aux prix publics définis par la société
Texas Instruments France, apparaissent chez certains revendeurs
(cf. paragraphe 305).
459. Cette identité
générale de prix est également constatée
sur les prospectus publicitaires édités à
loccasion de la rentrée des classes 1996 par
les enseignes de la grande distribution et quelques magasins
spécialisés (cf. paragraphe 306).
460. Sappuyant sur
une étude économique produite aux fins de démontrer
que les pratiques dentente avec ses distributeurs qui
lui sont reprochées nont causé ni dommage
à léconomie ni préjudice au consommateur,
la société Texas Instruments France oppose,
notamment, que ces pratiques nont pas engendré
duniformité des prix entre les différents
circuits de distribution et que, dans la majorité des
périodes étudiées, les hypermarchés
ne pratiquaient pas les prix les plus bas.
461. Toutefois, cette étude
ne comporte pas de données relatives aux périodes
de juin 1992 à janvier 1993, de juin à
septembre 1993, de février à mai 1994, ainsi
quà la rentrée des classes 1996, cest-à-dire
les données essentielles des rentrées des classes
1992, 1993 et 1996. Ceci, alors même quil résulte
des pièces du dossier que les opérateurs réalisent
plus de 80 % de leur chiffre daffaires lors de
la période de rentrée des classes.
462. Par ailleurs, létude
précitée conclut que lanalyse des données
Nielsen, qui se basent « sur les ventes réelles
effectuées dans 2 781 magasins sélectionnés
pour donner une représentativité de lensemble
du marché est plus démonstrative que lenquête
de la DGCCRF qui ne couvrait que 50 magasins ».
463. Il convient, cependant,
de relever que les données du dossier reprises dans
les paragraphes 203 à 205 (Noblet) et 304 à
306 (Texas Instruments France) ne se limitent pas à
des relevés effectués dans cinquante magasins
mais sont basées sur les éléments suivants :
- les prospectus
nationaux établis par toutes les enseignes de la grande
distribution qui réalisent plus de 50 % des ventes
de calculatrices et pour quelques grands magasins et magasins
spécialisés, pour la rentrée des classes
1995 et la rentrée des classes 1996 ;
- les prospectus
nationaux établis par le groupe Carrefour de 1991 à
1996. Les prix figurant dans ces catalogues étaient
applicables dans tous les magasins Carrefour de France, ainsi
quil résulte de la mention figurant à
la dernière page desdits catalogues, et selon laquelle
« ce catalogue est valable dans tous les magasins
Carrefour ». « Les prix sont valables
du 27 août au 12 septembre ».
Pour mémoire, on rappellera quen 1991, le groupe
Carrefour possédait 77 magasins à son enseigne
en France et que Carrefour était, à lépoque
des faits, le plus gros client de la société
Texas Instruments France (20 millions de francs de chiffre
daffaires en 1994) et de la société Noblet ;
- un tableau récapitulant
des relevés de prix réalisés par les
enquêteurs de la DGCCRF dans toute la France en octobre
et en novembre 1995, qui contient des relevés de prix
réalisés dans 231 magasins, répartis
sur 41 départements. Ces magasins couvrent toutes
les enseignes de la grande distribution, les grands magasins
et des magasins spécialisés tels que Plein Ciel,
la FNAC, Gibert, le Furet du Nord (au total 56 enseignes),
(tableau cotes 819 et suivantes du rapport).
464. Par ailleurs, interrogé
en séance, lauteur de ce rapport na pas
pu apporter de réponse à la question de savoir
si les prix relevés par les données Nielsen
étaient des prix moyens simples ou pondérés
par les quantités vendues. Cette imprécision
rend difficile la comparaison de ces prix avec ceux relevés
lors de lenquête.
465. En conséquence,
la société Texas Instruments France ne saurait
soutenir que létude produite remet en cause leffet
des pratiques tel quil a été relevé
et, par voie de conséquence, lexistence dun
dommage à léconomie.
466. Il résulte
de lensemble des éléments qui précèdent
que la société Texas Instruments France a, à
partir de 1993, mis en place un dispositif consistant, en
premier lieu, à maîtriser les prix de revente
des distributeurs ayant traditionnellement une politique de
prix agressive (cest-à-dire les hypermarchés)
et représentant plus de 50 % de ses ventes, par
linstauration de différences de prix et de ristournes,
lui permettant de déterminer et diffuser auprès
de lensemble de ses distributeurs des prix publics de
vente correspondant au seuil minimal en dessous duquel la
société Texas Instruments France considérait
que les grandes surfaces ne pouvaient fixer leur prix de vente.
467. En deuxième
lieu, ce dispositif a consisté à obtenir des
distributeurs, autres que les hypermarchés, quils
adhèrent à cette politique de prix minimal de
revente, alors même que les tarifs sur facture que leur
consentait la société Texas Instruments France
les autorisaient à pratiquer des prix inférieurs
en leur garantissant que la grande distribution alimentaire
ne commercialiserait pas les produits en dessous des prix
publics de vente.
468. En troisième
lieu, ce dispositif a consisté à organiser une
surveillance du respect des prix minima par des interventions
auprès des distributeurs.
469. Il est, par ailleurs,
établi que les sociétés Carrefour, en
1994 et 1995, Plein Ciel, en 1995 et 1996 et Distributeurs
associés, en 1993, ont participé à la
mise en uvre de cette pratique qui a eu pour objet et
pour effet de fausser le jeu de la concurrence et qui est
donc prohibée par les dispositions de larticle
L. 420-1 du code de commerce.
II. - LA PRATIQUE DE CONCERTATION
HORIZONTALE REPROCHÉE AUX SOCIÉTÉS TEXAS
INSTRUMENTS FRANCE ET NOBLET
470. Les termes
de la note citée au paragraphe 307 démontrent
que, le 19 février 1996, M. Pietri,
directeur commercial de la société Texas Instruments
France, a communiqué téléphoniquement
à M. Noblet, président du conseil dadministration
de la société Noblet, son principal concurrent,
le prix de la calculatrice TI 30, la baisse probable
du prix de la calculatrice TI 80, ainsi que les prix
de quatre autres calculatrices.
471. Par ailleurs, M. Pietri
a informé son interlocuteur de ce quune nouvelle
version du produit TI 30, attendue sur le marché,
ne serait pas mise en vente avant la fin de lannée
1996.
472. En réaction,
M. Noblet a émis des regrets au sujet de « cette
nouvelle mise en cause » et indiqué que
sa société allait « aviser (...)
sur une décision éventuelle de changement ».
473. La société
Noblet soutient que ce document ne saurait constituer la preuve
dune concertation anticoncurrentielle entre elle-même
et la société Texas Instruments France. Elle
fait valoir que M. Noblet, président du conseil
dadministration de la société Noblet et
M. Ocana, responsable marketing de la société
Noblet, ont précisé aux enquêteurs quils
ne procédaient pas à des échanges dinformation
et quil résulte des termes de la note précitée
ainsi que de celle du 15 février 1996 (cf.
paragraphe 310) que les informations transmises par M. Pietri
concernaient des décisions déjà prises
par sa société.
474. Cependant, ainsi quil
a été relevé au paragraphe 307, les termes
de la note du 19 février 1996 démontrent,
de manière irréfutable, que des échanges
dinformations ont eu lieu, au moins à la date
du 19 février 1996, sur les prix de vente
de six types de calculatrices ainsi que sur certains projets
commerciaux des sociétés Texas Instruments France
et Noblet, consistant dans le retard de la mise sur le marché
du nouveau modèle de la calculatrice TI 30, le
maintien de la commercialisation du modèle dit « ancien »
de cette calculatrice au prix de 79 F, et la réduction
du prix du modèle de la calculatrice TI 80, amené
à disparaître progressivement.
475. Par ailleurs, la phrase
de M. Noblet selon laquelle « Jai
indiqué aussi que je regrette cette nouvelle mise en
cause et que de notre côté nous aviserons sur
une décision éventuelle de changement »
démontre que léchange dont témoigne
la note na pas été isolé mais sest
inscrit dans le cadre dun accord entre les deux sociétés
qui se trouvait ainsi remis en cause.
476. Lobjet de cet
accord ressort des termes de la note adressée le 22
mars 1996, soit postérieurement à la note précédemment
analysée, par M. Ocana à M. Noblet,
et citée au paragraphe 312. En effet, sagissant
du modèle baptisé FX 92 Collège III,
modèle équivalent à la TI 30, qui
fait notamment lobjet de la note du 19 février 1996,
M. Ocana indiquait que « La baisse régulière
de Casio et la progression de Texas ne serait-elle pas due
à un écart de prix significatif ? »
et que « (...) les quantités de ventes,
prévues pour la rentrée des classes 1996 tenaient
compte dun prix de 89 F par Texas (...) ».
Enfin, M. Ocana concluait « (...) il serait,
je pense, préférable de baisser le prix de la
FX 92 que daugmenter les marges clients sur ce
produit (...) ».
477. Il apparaît
ainsi que la « mise en cause »
regrettée, en lespèce, par M. Noblet,
concerne bien le report de la mise sur le marché du
nouveau modèle de la calculatrice TI 30 au prix
de 89 F qui aurait permis à la société
Noblet soit de hisser le prix de la FX 92 comme le laisse
envisager la note analysée ci-dessus, soit à
la calculatrice « (...) FX 92 de redevenir
le premier prix du marché (...) » ainsi
que la déclaré, lors de son audition par
lenquêteur, M. Noblet (cf. paragraphe 308).
478. La société
Noblet oppose que les informations, données par M. Pietri
à M. Noblet par la note interne du 19 février 1996,
concernaient des décisions qui étaient déjà
prises par la société Texas Instruments et en
déduit que cette note ne peut donc constituer un indice
démontrant une entente illicite entre les deux sociétés,
une concertation étant, par essence, préalable
à une prise de décision.
479. Elle fait valoir,
à cet égard, dune part, que traditionnellement,
la société Texas Instruments France publie ses
tarifs revendeurs avant ceux de la société Noblet
et quen tout état de cause, elle aurait eu connaissance,
dès le mois de mars, des tarifs de son principal concurrent,
dautre part, que la note du 15 février 1996,
adressée par M. Ocana à M. Noblet
(cf. paragraphe 310) démontre quau regard
de la seule connaissance du marché, M. Ocana avait
déduit que la société Texas Instruments
France envisageait de baisser le prix de la TI 80 et
que compte tenu de lancienneté de ce modèle,
un réaménagement de la gamme était à
létude chez Texas Instruments France.
480. Le Conseil relève
cependant, que léchange dinformation reproché
aux entreprises précède la publication, dailleurs
non démontrée, des tarifs de la société
Texas Instruments France et quainsi quen témoigne
la télécopie adressée le 20 février 1996,
par M. Pietri de la société Texas Instruments
France à MM. Lazare et Brachman, clients grossistes
de cette société (cf. paragraphe 311),
ce nest que le lendemain de léchange dinformation
entre M. Pietri et M. Noblet que la société
Texas Instruments France a fait connaître à ses
clients que le prix de la TI 30 X demeurait identique
au prix actuel.
481. Sagissant de
la note du 15 février 1996 (cf. paragraphe 310),
le Conseil relève quelle démontre que
si M. Ocana, responsable marketing de la société
Noblet, y fait état dun certain nombre de suppositions,
sagissant du modèle TI 80, il ny exprime
toutefois, contrairement à ce que soutient la société
Noblet, aucune certitude et que, de surcroît, il demande
à son interlocuteur, M. Noblet : « (...)
vous serait-il possible, dans le cas où vous auriez
des contacts avec M. Pietri, dessayer dobtenir
quelques informations sur la nouvelle TI 30 xa ?
(...) ».
Les effets des pratiques sur le marché
482. Ainsi
quil résulte des éléments cités
aux paragraphes 21 à 24, il a été
constaté une progression de 16,3 % du prix moyen
des calculatrices scientifiques simples entre 1992 et 1995
alors que, dans le même temps, la progression constatée
sur les modèles scientifiques programmables était
beaucoup plus faible, le prix moyen des modèles scientifiques
graphiques ayant baissé dans une proportion de 9,5 %
et celui des autres calculatrices, (4 opérations,
imprimantes, organiseurs, etc.) hors scolaire, ayant diminué
de 26,1 %.
483. Ainsi, les pratiques
dententes verticales visant les prix de vente des calculatrices
à usage scolaire, caractérisées précédemment,
de même que les échanges dinformation établis
entre les sociétés Texas Instruments France
et Noblet ont eu pour effet non seulement de fausser le jeu
de la concurrence sur le marché, mais aussi de permettre
une augmentation des prix des calculatrices scientifiques
simples, alors que le prix des autres calculatrices, comme
dailleurs celui de beaucoup dautres produits électroniques
a baissé sur la période.
484. La société
Noblet fait valoir, sur ce point, que cette augmentation du
prix moyen aurait été la conséquence
de la hausse du yen ainsi que de limportant progrès
technique connu dans le secteur.
485. Toutefois, si le yen
a effectivement connu entre 1993 et 1995 une forte augmentation,
cette variation monétaire ne saurait être la
seule cause de laugmentation du prix des calculatrices
à usage scolaire (2,4 % en moyenne et 16,3 %
pour le segment des calculatrices scientifiques simples) alors
que, dans le même temps, le prix des calculatrices scientifiques
graphiques baissait de 9,5 % et celui de lensemble des
calculatrices concernant le secteur hors scolaire diminuait
de 26,1 %.
486. De même, le
progrès technique du secteur ne saurait expliquer la
hausse des prix moyens dans la mesure où les augmentations
ont été constatées sur les modèles
de calculatrices visés par les pratiques, cest-à-dire
les plus simples techniquement alors que, durant la même
période, les calculatrices les plus complexes telles
que les programmables graphiques ont connu une baisse des
prix dans la proportion de 9,5 %.
487. A cet égard,
le Conseil rappelle les déclarations de M. Belloeil,
président de lAssociation des professeurs de
mathématiques de lenseignement public, en date
du 19 janvier 2001, citées au paragraphe
14 et selon lesquelles « leffet pervers
du système est quen réalité les
professeurs nont pas la maîtrise des produits
mis sur le marché. On a constaté notamment quaprès
avoir lancé certaines calculatrices et constaté
quelles correspondaient aux besoins des professeurs
et des élèves, les producteurs décidaient
de supprimer les modèles les moins chers pour en fait
imposer lachat dun modèle à peine
plus performant, mais beaucoup plus cher (...) ».
488. Sappuyant
sur létude économique déjà
mentionnée au paragraphe 460, la société
Texas Instruments France oppose quil existe une différence
considérable entre les pratiques tarifaires des deux
fabricants concernés.
489. Il convient toutefois,
outre les réserves déjà formulées
à lencontre des données utilisées
par cette étude, aux paragraphes 461 et suivants, de
relever que le tableau 5-1 de létude produite
permet de procéder aux constatations suivantes :
- sagissant
des calculatrices scientifiques, les prix des produits Casio
ont augmenté constamment pour finir par converger au
niveau des prix des produits TI qui, eux, sont restés
stables ;
- sagissant
des calculatrices programmables, on observe une évolution
des prix moyens rigoureusement parallèle ;
- sagissant
des calculatrices graphiques, lévolution prix
des produits des deux offreurs est quasi semblable, avec une
tendance à la baisse qui saffirme sur la dernière
période ;
- sur ce dernier
segment, alors que, selon les données figurant dans
létude, la société Noblet perd
des parts de marchés et que Texas Instruments France
en gagne, aucune réaction sur les prix de la société
Noblet nest observable alors quil sagirait
de la réaction concurrentielle la plus efficace pour
reprendre les parts de marché perdues.
490. Ainsi, il résulte
de ce qui précède que les sociétés
Texas Instruments France et Noblet ont mis en place des dispositifs
dentente verticale avec certains de leurs distributeurs.
Labsence de concurrence, ainsi assurée à
lintérieur de chacun de leurs réseaux
respectifs, nétait pas compensée par lexistence
dune forte concurrence « intermarques »
puisque, dune part, les deux opérateurs, en quasi-duopole
sur le marché concerné, se livraient à
des pratiques verticales restrictives et que, dautre
part, une pratique de concertation horizontale entre elles,
portant sur leur stratégie commerciale et leurs prix,
a également été établie.
491. Par ailleurs, sagissant
des effets produits par lensemble des pratiques relevées,
la société Noblet fait valoir quil ne
saurait lui être reproché davoir mis en
place une politique de préconisation, alors que ses
concurrents sont libres dadopter une démarche
identique et que laccès au marché nest
entravé par aucune barrière artificielle. Il
convient, toutefois, de relever que cette politique de préconisation
na pu quamplifier les effets des pratiques dentente
verticale et horizontale relevées.
492. En effet, ainsi quil
a été précisé aux paragraphes 51
à 81, eu égard au contenu des programmes scolaires
et au rôle de prescripteur joué par les professeurs,
les sociétés Texas Instruments et Noblet ont
mis en place des stratégies marketing à destination
des professeurs, ayant pour objectif dobtenir la prescription
de leur produits auprès des élèves.
493. Ces stratégies,
qui consistent en des actions de communication mais aussi
de formation et doctroi de conditions commerciales spécifiques
aux enseignants, sont dun coût non négligeable.
Elles sont chiffrées à 3,8 millions de
francs en 1996 pour les calculatrices Casio distribuées
en France par la société Noblet (cf. paragraphes
57, 63 et 64).
494. Ces actions, qui permettent
une fidélisation des enseignants prescripteurs, ont
abouti, ainsi que le démontrent les citations de déclarations
figurant aux paragraphes 65 à 69, à ce que les
calculatrices Casio et Texas Instruments soient vendues dans
le secteur scolaire de façon quasi exclusive au détriment
des deux autres sociétés qui se partagent les
11 % restant du marché, les sociétés
Hewlett-Packard France et Sharp, ceci en dépit de la
qualité de leurs produits et du caractère compétitif
de leurs prix (cf. paragraphes 70 à 81).
495. En outre, ainsi quil
résulte des déclarations de distributeurs reprises
aux paragraphes 65 à 69 et des éléments
relatifs aux enseignants cités aux paragraphes 10 à
15, les enseignants ne préconisent quun ou deux
types de calculatrices, voire une ou deux marques, ce qui
implique que leffort que devait fournir une entreprise
souhaitant entrer sur le marché serait bien plus important
que celui représenté par les coûts actuellement
engagés par les entreprises Noblet et Texas Instruments
France.
496. Ces pratiques, qui
ont eu pour objet et pour effet de fausser le jeu de la concurrence
et qui émanent de deux sociétés détenant
ensemble plus de 89 % des parts du marché concerné,
sont prohibées par les dispositions de larticle
L. 420-1 du code de commerce.
III. - SUR
LES SUITES À DONNER
497. Il
ressort dune jurisprudence constante, et notamment de
larrêt Enichem Anic du tribunal de première
instance des Communautés européennes du 17 décembre 1991,
que lorsque lexistence dune infraction est établie,
il convient de déterminer la personne physique ou morale
qui était responsable de lexploitation de lentreprise
en cause au moment où linfraction a été
commise, afin quelle réponde de cette infraction.
498. En cas de fusion ultérieure
de la société responsable de lexploitation
avec une autre société, cette fusion, qui peut
résulter soit de la création dune société
nouvelle soit de labsorption de la société
responsable par une autre société, entraîne
la dissolution sans liquidation des sociétés
qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine,
actif et passif, aux sociétés bénéficiaires,
dans létat où il se trouve à la
date de réalisation définitive de lopération.
Dès lors, en application de la jurisprudence précitée,
la société nouvelle ou la société
absorbante doit répondre des infractions commises antérieurement
à cette date par la société partie à
la fusion.
499. Lorsque entre le moment
où linfraction a été commise et
le moment où lentreprise en cause doit en répondre,
la personne responsable de lexploitation de cette entreprise
a cessé dexister juridiquement, sans que cette
disparition se soit accompagnée de la transmission
universelle de ses droits et obligations à une autre
personne, il convient de localiser, dans un premier temps,
lensemble des éléments matériels
et humains ayant concouru à la commission de linfraction
pour identifier, dans un second temps, la personne qui est
devenue responsable de lexploitation de cet ensemble,
afin déviter quen raison de la disparition
de la personne responsable de son exploitation au moment de
linfraction, lentreprise ne puisse pas répondre
de la commission de celle-ci.
500. En lespèce,
en application des principes énoncés ci-dessus,
les pratiques mises en uvre par la centrale dachats
Casino-Rallye, exploitée par la SNC Casino-France ont
fait lobjet de griefs notifiés à la société
Casino-Guichard-Perrachon qui avait absorbé par fusion
la SNC Casino-France et qui est mise hors de cause (cf. paragraphe 442).
501. Par ailleurs, la société
Sodalfa a fait lobjet, en 1993, dune opération
de dissolution confusion, qui a entraîné lapport
de son fonds de commerce à la société
Plein Ciel Diffusion et a été ensuite radiée
du registre du commerce et des sociétés.
502. En application des principes
rappelés ci-dessus, la société Plein
Ciel Diffusion doit donc répondre des pratiques mises
en uvre par la société Sodalfa.
IV. - SUR
LES SANCTIONS
503. Les
infractions retenues ci-dessus ont été commises
antérieurement à lentrée en vigueur
de la loi no 2001-420 du 15 mai 2001
relative aux nouvelles régulations économiques.
Par suite, et en vertu du principe de la non-rétroactivité
de la loi répressive plus sévère, les
dispositions introduites par cette loi à larticle
L. 464-2 du code de commerce, en ce quelle sont
plus sévères que celles qui étaient en
vigueur antérieurement, ne leur sont pas applicables.
504. Aux termes de larticle
L. 464-2-II du code de commerce dans sa rédaction
applicable avant lentrée en vigueur de la loi
du 15 mai 2001 : « le Conseil
de la concurrence peut ordonner aux intéressés
de mettre fin aux pratiques anticoncurrentielles dans un délai
déterminé ou imposer des conditions particulières.
Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable
soit immédiatement soit en cas de non exécution
des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées
à la gravité des faits reprochés, à
limportance du dommage causé à léconomie
et à la situation de lentreprise ou de lorganisme
sanctionné et de façon motivée pour chaque
sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une
entreprise, de 5 % du montant du chiffre daffaires
hors taxe réalisé en France au cours du dernier
exercice clos (...). »
505. Sagissant de
la gravité des faits, il y a lieu de rappeler que les
ententes et actions concertées, ayant pour objet et
pour effet dempêcher le jeu de la concurrence
en faisant obstacle à la fixation des prix par le libre
jeu du marché et en favorisant artificiellement leur
hausse, font partie des pratiques que le Conseil de la concurrence
estime particulièrement graves car gravement préjudiciables
au bon fonctionnement du marché, et donc aux avantages
que peuvent en attendre les consommateurs.
506. Dans son rapport dactivité
pour lannée 1987, notamment, le Conseil
de la concurrence avait expliqué dans un chapitre consacré
aux « ententes sur les prix et les marges »
quil était « très attaché
à ce que soit préservée sur les marchés
où saffrontent différents producteurs
ou différents distributeurs lindépendance
de chacun des opérateurs dans ses décisions
de prix. Cette indépendance dans les décisions
est en effet une condition nécessaire à lémergence
dune compétition sur les prix, qui, pour nêtre
que lune des formes par laquelle la concurrence joue,
nen constitue pas moins un des éléments
déterminants en ce quelle oblige chacun des opérateurs
à faire lutilisation la plus économique
possible des ressources quil mobilise ».
507. De la même façon,
la Commission européenne, dans une décision
du 29 juin 2001, sagissant des accords tarifaires
entre la société Volkswagen et son réseau
de concessionnaires, a considéré que les pratiques
en cause « visaient à supprimer ou, au
moins, à restreindre la concurrence par les prix, qui
constitue lun des facteurs les plus importants du jeu
de la concurrence. Les pratiques en cause représentent
par conséquent une altération particulièrement
profonde de la concurrence, de sorte quelles constituent
par nature une infraction très grave aux règles
de la concurrence ».
508. Les pratiques en cause sont encore
aggravées au cas particulier, dans la mesure où
elles sont le fait de deux opérateurs qui détenaient
ensemble, pour les années 1994 et 1995, plus de 89 %
en volume du marché des calculatrices « scientifiques »
ou à « usage scolaire » (et presque
92 % en valeur) et chacun, des parts de marché
importantes.
509. Le dommage à léconomie
causé par les pratiques relevées résulte
de ce que, compte tenu de la part de marché détenue
par les sociétés Texas Instruments et Noblet,
ces pratiques ont eu pour effet de neutraliser toute concurrence
sur le marché en cause.
510. En effet, ces pratiques anticoncurrentielles
ont été mises en uvre sur un marché
de préconisation.
511. Sur ce marché, face à
une offre duopolistique qui a largement fidélisé
les prescripteurs, cest-à-dire le corps enseignant,
la demande est atomisée, vulnérable et captive,
car elle est constituée principalement par les élèves
des collèges et des lycées qui, ainsi que cela
a été relevé aux paragraphes 25 et 26
et 65 à 69, se trouvent dans lobligation dacquérir
des calculatrices et se sont systématiquement orientés
vers les calculatrices Casio ou Texas Instruments.
512. Les pratiques en cause sont,
enfin, particulièrement graves et dommageables lorsquelles
sont le fait de la grande distribution. En effet, les distributeurs
en cause se présentent comme des enseignes ayant une
politique de prix agressive, pratiquant notamment la vente
à prix coûtant sur un certain nombre de produits
lors de la rentrée des classes, comme la précisé
M. Altès, de la société Carrefour :
« Notre politique de détermination des
prix de vente est toujours le prix le plus bas possible, soit
pour chacun des deux fournisseurs, le prix dachat facturé
majoré de la TVA. Cette question est sans objet dans
nos discussions avec ces fournisseurs, puisque la particularité
de ce secteur est la vente à prix coûtant en
période de rentrée des classes. »
513. A cet égard, le conseil
relève que les hypermarchés représentent
60 % du chiffre daffaires de la société
Noblet et 52 % de celui de Texas Instruments France et
que la société Carrefour est le client le plus
important des sociétés Noblet et Texas Instruments
France, avec un chiffre daffaires de plus de 20 MF
avec chacun des offreurs, en 1995.
En
ce qui concerne les sociétés Texas Instruments
France et Distributeurs associés :
514. La société Texas
Instruments France a, dans le procès-verbal de mise
en uvre de larticle L. 464-2-II du code de
commerce en date du 5 octobre 2001, souscrit les
engagements suivants :
« 1. Sagissant
du grief dentente horizontale avec la société
Noblet relatif aux échanges dinformations stratégiques
concernant les politiques de prix de vente publics des calculatrices
à usage scolaire de ces deux opérateurs, la
société Texas Instruments France sengage
à ne procéder à aucune concertation avec
ses concurrents dans le secteur des calculatrices à
usage scolaire susceptible de constituer une infraction des
dispositions de larticle L. 420-1 du code de commerce,
notamment par échange dinformations stratégiques
relatives à leurs politiques de prix de vente publics.
La société Texas Instruments
France rappellera systématiquement les termes et limportance
de cet engagement à tous ses responsables et à
tous les membres de ses forces de vente qui seraient susceptibles
de se trouver en contact avec ses concurrents. Cette information
pourra être faite notamment, mais pas uniquement, à
loccasion des entretiens dembauche de ces divers
membres du personnel de la société Texas Instruments
France.
A cet égard, la société
Texas Instruments France tient également à porter
à la connaissance du rapporteur général
que le directeur commercial, responsable de la politique commerciale
de lactivité « calculatrices scientifiques »
en France menée à lépoque des faits,
nassume plus de responsabilités opérationnelles
depuis le 1er mars 1999 (à
la préretraite depuis cette date, il ne rend plus que
des services occasionnels à la société
et partira définitivement à la retraite le 1er janvier 2002).
2. Sagissant du grief dentente
verticale, la société Texas Instruments France
sengage à ne pas mettre en place de dispositif
ayant pour objet et pour effet dobtenir des distributeurs
quils pratiquent tous les mêmes prix de ventes
et à ne diffuser aucun tarif public de vente présenté
comme obligatoire pour les distributeurs, dans des conditions
contraires aux dispositions de larticle L. 420-1
du code de commerce.
A cet effet, la société
Texas Instruments France sengage à modifier la
structure de ses tarifs et de ses conditions générales
de vente selon les principes suivants :
A lépoque des faits,
la société Texas Instruments France distinguait
cinq catégories de distributeurs (revendeurs non spécialisés,
revendeurs disposant dun rayon et de vendeurs spécialement
affectés à la vente de calculatrices, revendeurs
disposant dun rayon et de vendeurs spécialisés,
grossistes-distributeurs, groupements de grossistes-distributeurs
et grossistes-distributeurs indépendants disposant
dune représentativité nationale).
Compte tenu de lévolution
des méthodes de présentation et de commercialisation
des produits, la société Texas Instruments France
a déjà accompli un pas significatif vers la
simplification de ses conditions générales de
vente, puisque la classification actuellement appliquée
est tripartite, distinguant entre revendeurs (détaillants),
distributeurs scolaires et grossistes (la vente à distance
demeurant, en tout état de cause, une catégorie
à part).
La société Texas Instruments
France sengage à adopter désormais une
classification bipartite, ne distinguant quentre détaillants
dune part, et grossistes dautre part (la vente
à distance demeurant à part), les conditions
applicables à chacune dentre elles étant
conformes à la loi, la réglementation et la
jurisprudence applicables.
La société Texas Instruments
France sengage dune part, à ce que figurent
dans ses conditions générales de vente tous
les avantages que la loi, la réglementation et la jurisprudence
applicables définissent comme des réductions
de prix (dans la mesure où ces avantages seraient proposés
par la société Texas Instruments France), seule
la rémunération des services spécifiques
rendus par ses distributeurs pouvant faire lobjet dune
facturation séparée de la part de ces derniers
et dautre part, à ne traiter et à ne présenter
comme conditionnelles, dans le cadre de sa pratique de facturation
auprès des distributeurs, que les seules réductions
de prix qui remplissent sur ce point les critères fixés
par la loi, la réglementation et la jurisprudence applicables.
Ces engagements, relatifs aux pratiques
verticales, correspondent aux caractéristiques actuelles
du marché. Ils sinscrivent, en outre, dans le
cadre législatif et réglementaire existant à
la date du présent procès-verbal, tel que ce
cadre est interprété et appliqué par
les autorités de concurrence et juridictions françaises
et communautaires. Ils devraient par conséquent être
reconsidérés si une évolution significative
et pertinente du marché et/ou du cadre législatif
et réglementaire, ainsi que de la pratique décisionnelle
et de la jurisprudence des autorités de concurrence
et des juridictions précitées, venait à
le commander. La société Texas Instruments France
tiendra le rapporteur général informé,
pendant une durée de cinq ans, de toute décision
prise de ne pas appliquer les engagements tels que souscrits
à ce jour en raison dune telle évolution. »
515. La société Distributeurs
associés (DA), par procès-verbal de mise en
uvre de larticle L. 464-2-II du code de commerce
en date du 11 janvier 2002, a, pour sa part, souscrit
les engagements suivants :
« La société
Distributeurs associés, en qualité de centrale
de référencement, sengage à analyser
de son mieux les propositions qui peuvent lui être faites
par tous fournisseurs candidats à être référencés
en ce compris leurs conditions générales de
vente, et à sabstenir dentrer en matière
au cas où Distributeurs associés constaterait
ou aurait raisonnablement connaissance de conditions exigées
par lesdits fournisseurs et dont lobjet ou leffet
serait de ne pas garantir la liberté de la détermination
de ses prix de gestion par ladhérent de la centrale.
Ce qui précède sappliquant notamment aux
cas visibles davantages indirects faisant lobjet
dune facturation séparée sans correspondre
à la rémunération de services effectifs
rendus auxdits fournisseurs par ses adhérents distributeurs.
Il est entendu que Distributeurs associés aura la faculté
doffrir à ses adhérents des conditions
commerciales proposées par les fournisseurs (ristourne,
barème décarts, etc.) dans la mesure où
ces pratiques proposées sont conformes à lordre
communautaire et national. »
516. Au vu des engagements souscrits
par Texas Instruments France et par Distributeurs associés,
le rapporteur général a, par les mêmes
procès-verbaux, décidé « (...)
de proposer au Conseil de la concurrence daccorder [à
ces deux sociétés] le bénéfice
des dispositions de larticle L. 464-2-II du code
de commerce et de proposer que la sanction pécuniaire,
le cas échéant encourue, soit réduite
de 50 % ».
517. Lors de la séance, la
société Texas Instruments France a confirmé
les engagements quelle avait pris lors de la signature
du procès-verbal précité et précisé
que la classification des catégories de distributeurs
avait déjà été simplifiée
par linstauration de trois catégories au lieu
de cinq et quelle envisageait de réduire encore
ces catégories à deux.
518. Elle a ajouté quelle
avait dores et déjà exécuté
lengagement de faire figurer dans ses conditions générales
de vente tous les avantages que la loi, la réglementation
et la jurisprudence applicables définissent comme des
réductions de prix, et par ailleurs, de ne traiter
et présenter comme conditionnelles, dans le cadre de
sa pratique de facturation auprès des distributeurs,
que les seules réductions de prix qui remplissent sur
ce point les critères fixés par la loi, la réglementation
et la jurisprudence.
519. Par courrier adressé
à la présidente du Conseil de la concurrence
enregistré le 28 mai 2003, la société
Distributeurs associés a confirmé lengagement
quelle avait pris lors de la signature du procès-verbal
précité.
520. Il y a lieu pour le
conseil de prendre acte de ces engagements, qui ont été
confirmés devant lui et denjoindre aux sociétés
de les respecter.
521. Sagissant des
sanctions, il convient de relever que larticle L. 464-2-II
du code de commerce qui prévoit que, lorsquil
est mis en uvre « le montant maximum de
la sanction encourue est réduit de moitié »,
a pour objet de garantir aux entreprises intéressées
que si le conseil accepte les engagements quelles ont
pris, le plafond légal applicable aux sanctions quil
édicte, est divisé par deux par rapport au régime
de droit commun. Toutefois, ces dispositions ne font pas obstacle
à ce que, dans la limite de ce nouveau plafond, le
Conseil apprécie le montant de la sanction qui aurait
été encourue par chaque entreprise et y applique
le taux de réfaction quil retient, compte tenu
des propositions faites par le rapporteur général.
522. En lespèce,
le rapporteur général a proposé que la
sanction encourue soit diminuée de moitié. Le
conseil considère, toutefois, que la gravité
des pratiques, leur étendue et leur durée, justifient
quun taux de réfaction moindre soit appliqué.
523. Le chiffre daffaires
de la société Texas instruments France réalisé
en France au cours de lexercice clos le 31 décembre
2002 sélève à 133 129 391 Euro
et le plafond légal de 5 % normalement applicable
est de 6 656 470 Euro, ramené à
3 328 235 Euro par suite de lapplication
de larticle L. 464-2-II du code de commerce.
524. En fonction des éléments
généraux et individuels tels quils sont
appréciés ci-dessus, le montant de la sanction
pécuniaire infligée à cette société
aurait été fixé par le conseil à
1 331 294 Euro. Par application des dispositions
de larticle L. 464-2-II du code de commerce, ce
montant sera ramené à 1 065 000 Euro.
525. Le chiffre daffaires
de la société Distributeurs associés
réalisé en France au cours de lexercice
clos le 31 décembre 2001, sélève
à 2 159 599 Euro et le plafond légal
de 5 % normalement applicable est de 107 980 Euro
ramené à 53 990 Euro par suite de
lapplication de L. 464-2-II du code de commerce.
En fonction des éléments généraux
et individuels tels quils sont appréciés
ci-dessus, le montant de la sanction pécuniaire infligée
à cette société aurait été
fixé par le conseil à 5 398 Euro.
Par application des dispositions de larticle L. 464-2-II
du code de commerce, ce montant sera ramené à
4 300 Euro.
En
ce qui concerne la société Noblet :
526. Le chiffre daffaires
de la société Noblet, réalisé
en France au cours de lexercice clos le 31 décembre
2002, sélève à 47 489 937 Euro.
En fonction des éléments tels quils sont
appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger
une sanction pécuniaire de 474 800 Euro.
En
ce qui concerne la société Carrefour France :
527. Le chiffre daffaires
de la société Carrefour France, réalisé
en France au cours de lexercice clos le 31 décembre
2002, sélève à 421 770 245 Euro.
En fonction des éléments tels quils sont
appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger
une sanction pécuniaire de 2 108 000 Euro.
En
ce qui concerne la société Majuscule :
528. Le chiffre daffaires
de la société Majuscule, réalisé
en France au cours de lexercice clos le 31 décembre
2001 sélève à 87 257 821 Euro.
En fonction des éléments tels quils sont
appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger
une sanction pécuniaire de 218 000 Euro.
En
ce qui concerne la société Plein Ciel :
529. Par lettre en date
du 9 mai 2003, Me Valliot, administrateur
judiciaire, a informé le rapporteur de ce que par jugement
en date du 25 juin 2001, le tribunal de commerce de Paris
avait ouvert une procédure de redressement judiciaire
à légard de la société Plein Ciel
diffusion SA et que, par jugement du 8 octobre 2001,
le tribunal avait arrêté un plan de redressement
par voie de cession de lentreprise exploitée
par la société Plein Ciel diffusion SA au profit
de la société Spicers France.
530. En application des
dispositions de larticle 1844-7, septième
alinéa du code civil, la société Plein
Ciel diffusion SA a été dissoute de plein droit
du fait du plan de cession. Mais, en application des dispositions
du troisième alinéa de larticle 1844-7,
septième alinéa du code civil, la personnalité
morale de la société subsiste pour les besoins
de sa liquidation, jusquà la clôture de
celle-ci. Au cas présent, cette clôture nest
pas intervenue et la société Plein Ciel diffusion
na pas été radiée du registre du
commerce. Toutefois, compte tenu de la situation de cette
entreprise, il ny a pas lieu de prononcer de sanction
pécuniaire à son égard ni à lencontre
de la société Sodalfa dont la société
Plein Ciel a reçu le fonds de commerce par une opération
de dissolution confusion (cf. point 502).
En
ce qui concerne la publication :
531. Il y a lieu de porter
à la connaissance des consommateurs et des enseignants
les pratiques des sociétés Texas instruments
France et Noblet et des distributeurs en cause, ainsi que
les engagements prix par les sociétés Texas
instruments France et Distributeurs associés, en ordonnant
la publication de la partie II de la présente
décision dans la magazine Que Choisir et dans
le quotidien Le Monde, dans un délai de trois
mois à compter de la notification de la présente
décision.
Décision :
Art. ler. - Il
est établi que les sociétés Noblet, Carrefour
France, Plein Ciel, Sodalfa et Majuscule ont enfreint les
dispositions de larticle L. 420-1 du code de commerce.
Art. 2. - Il
est établi que les sociétés Texas Instruments
France, Carrefour France, Plein Ciel et Distributeurs associés
ont enfreint les dispositions de larticle L. 420-1
du code de commerce.
Art. 3. - Il
est établi que les sociétés Noblet et
Texas Instruments France ont enfreint les dispositions de
larticle L. 420-1 du code de commerce.
Art. 4. - Il
nest pas établi que les sociétés
Casino-Rallye et Sapac magasins populaires ont enfreint les
dispositions de larticle L. 420-1 du code de commerce.
Art. 5. - Il
est pris acte des engagements souscrits par les sociétés
Texas Instruments France et Distributeurs associés,
tels quils sont mentionnés aux paragraphes 520
et 521 et il leur est enjoint de sy conformer en tous
points.
Art. 6. - Sont
infligées les sanctions pécuniaires suivantes :
1 065 000 Euro à la société
Texas Instruments France ;
474 800 Euro à la société
Noblet ;
2 108 000 Euro à la société
Carrefour France ;
218 000 Euro à la société
Majuscule ;
4 300 Euro
à la société Distributeurs associés.
Art. 7. - Dans
un délai de trois mois à compter de la notification
de la présente décision, les sociétés
Texas Instruments France, Noblet, Carrefour France, Majuscule
et DA feront publier la partie II de la présente
décision, à frais communs et à proportion
des sanctions pécuniaires prononcées à
leur encontre, dans une édition de la revue Que
Choisir et dans le quotidien Le Monde. Cette publication
sera précédée de la mention « décision
no 03-D-45 du 25 septembre 2003 du Conseil
de la concurrence relative à des pratiques mises en
uvre dans le secteur des calculatrices à usage
scolaire ».
Délibéré, sur
le rapport oral de Mme Daudret-John, par Mme Hagelsteen,
présidente, Mme Pasturel, vice-présidente,
M. Nasse, vice-président, Mme Behar Touchais
et MM. Bidaud, Flichy et Gauron, membres.
La secrétaire de séance,
C. Charron
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La présidente,
M.-D. Hagelsteen
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