<< sommaire du BOCCRF n° 2005-09

C 2004-45 - Lettre du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en date du 19 mars 2004 aux conseils de la société Maersk Logistics relative à une concentration dans le secteur des services de logistique.

NOR : ECOC0500184Y

Maîtres,

Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 13 février 2004, vous avez notifié l'acquisition par la société Maersk Logistics France SAS (ci-après « Maersk ») de la totalité *du capital et des droits de vote de la société LTI SA et de ses sept filiales [1] (ci-après « LTI »). Cette acquisition a été formalisée par un contrat de cession d'actions en date du 9 janvier 2004.

I  -   Les entreprises concernées et l'opération

Maersk Logistics France SAS est une filiale de Maersk France SA, elle-même détenue par la société AP Moller-Maersk A/S, société mère du groupe Moller-Maersk. Ce dernier est notamment actif dans le transit maritime et aérien et dans les services de logistique [2] et a réalisé, en 2002, un chiffre d'affaires total consolidé, calculé conformément à l'article 5 du règlement n° 4064/89 du 21 décembre 1989 modifié relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, de 20 milliards d'euros dont 92 millions en France.

Le groupe LTI a pour activités le transit aérien et maritime, les services de logistique, le regroupage et l'entreposage, les transactions d'agence maritime et les services de commissionnaire en douane et de consignataire. LTI a réalisé, en 2002, un chiffre d'affaires total consolidé, calculé conformément à l'article 5 du règlement CE n° 4064/89 du 21 décembre 1989 modifié relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, de 20 millions d'euros dont 18 millions en France.

Cette opération constitue une concentration au sens de l'article L. 430-1 du code de commerce. Elle ne revêt pas une dimension communautaire telle que définie dans le règlement (CE) n° 4064/89 du 21 décembre 1989. Compte tenu des chiffres d'affaires précités, elle est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatives à la concentration économique.

II  -   La définition des marchés

Les parties sont actives dans les services de transit maritime et les services de logistique. Comme l'a indiqué la Commission [3], la distinction entre ces services est difficile à réaliser. Les deux catégories ont en effet pour objectif un acheminement rapide des marchandises conforme aux différentes réglementations existant en la matière. Les acteurs spécialisés dans le transit sont d'ailleurs de plus en plus actifs dans les services de logistique, qui sont externalisés de manière croissante par les entreprises.

Il convient, cependant, de remarquer que les services de logistique concernent l'ensemble des moyens et des méthodes relatifs à l'acheminement de marchandises (manutention, stockage, transport, conditionnement), alors que les services de transit sont davantage axés sur le « passage » des marchandises (autorisation des douanes, services au sol etc.). La Commission, aux termes de la décision précitée, a d'ailleurs estimé qu'à la différence du transit les services de logistique ont pour caractéristique de gérer, avant toute chose, le flux des marchandises pour les clients. Une distinction entre services de logistique et services de transit est donc pertinente.

Les services de transit maritime

La Commission européenne a défini les services de transit comme étant les services permettant « l'organisation du transport d'objets (pouvant inclure des activités accessoires telles que l'autorisation des douanes, l'entreposage, les services au sol) au nom des clients et selon leurs besoins » [4]. Elle a distingué, aux termes de cette même décision, le transit maritime du transit aérien et du transit terrestre en s'appuyant sur le fait que les acteurs ont tendance à diviser leurs départements autour de cette distinction ainsi qu'en raison de la rapidité et de la structure des prix des différents services.[5]

Au sein du transit maritime coexistent différentes catégories d'acteurs. Les « chargeurs », tout d'abord, sont les entreprises qui font appel aux transitaires et transporteurs pour l'acheminement de leurs marchandises. Les « transitaires et commissionnaires de transport » [6], ensuite, représentent le segment principal des transitaires, qui, dans la plupart des cas, ne sont pas propriétaires de navires et font appel aux services de transporteurs pour acheminer les marchandises. Ils assurent transit et logistique. Les « armateurs logisticiens » [7], quant à eux, sont à l'origine des armateurs qui décident de développer une activité de logistique et de transit pour faire face à la concurrence des transitaires et commissionnaires de transport. Enfin, les « entreprises de manutention »[8], dont le cour de métier est de réaliser toutes les manouvres de port, développent de plus en plus de services de logistique.

Les services de logistique

Le ministre a défini les services de logistique comme « associant différents maillons d'une chaîne d'approvisionnement de marchandises entre un point d'origine et un point d'arrivée, et ce afin de gérer de manière optimale le flux et le stockage desdites marchandises » [9].

Il s'agit, tant pour le ministre que pour la Commission, d'un marché distinct [10]. La possibilité de segmenter ce marché en fonction des produits transportés a été laissée ouverte par la Commission. En tout état de cause, il n'est pas nécessaire de s'interroger en l'espèce sur la pertinence de segmenter le marché des services logistiques, les conclusions de l'analyse demeurant inchangées.

Marchés géographiques

La Commission et le ministre considèrent que le marché des services logistiques a une dimension nationale [11]. L'existence de flux de marchandises transfrontaliers de plus en plus importants peut cependant arguer en faveur d'une délimitation supranationale. La question de la dimension géographique de ce marché peut toutefois être laissée ouverte puisque, en tout état de cause, les conclusions de l'analyse demeureront inchangées.

L'activité de transit présente quant à elle des caractéristiques qui permettent d'envisager une dimension géographique nationale, dans la mesure où l'essentiel des clients se tournent vers des transitaires implantés sur leur territoire national. La question de la dimension géographique du marché des services de transit peut cependant également être laissée ouverte, les conclusions de l'analyse demeurant inchangées.

III  -   L'analyse concurrentielle

Les parties disposent, sur le marché national, de très faibles parts de marché, inférieures à [0‑10] % chacune, en ce qui concerne tant les services de transit que les services de logistique. Le nouvel ensemble est, en outre, confronté à la pression concurrentielle de groupes disposant d'importantes capacités financières et de parts de marché supérieures à celles de la nouvelle entité.

Les principaux groupes actifs dans les services de transit maritime sont Panalpina, Danzas, Exel, Kühne & Nagel et Bolloré. Les principaux groupes actifs dans les services logistiques sont Geodis, STEF TFE, Gefco, Norbert Dentressangle, Giraud, Exel et Danzas.

En conclusion, l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.

Je vous prie d'agréer, Maîtres, l'expression de ma considération distinguée.

Pour le ministre et par délégation :

Le directeur général de la concurrence,
de la consommation
et de la répression des fraudes,

Benoît Parlos

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Nota. - A la demande des parties notifiantes, des informations relatives au secret des affaires ont été occultées et la part de marché exacte remplacée par une fourchette plus générale.

Ces informations relèvent du « secret des affaires », en application de l'article 8 du décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les conditions d'application du livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence.

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Erreur matérielle : Lire « 70 % » au lieu de « la totalité ».

[1] Les sept filiales du groupe LTI sont les sociétés AT2I, AT2L, AT2M, Paristrans, Broker Services, Boss, et Pamatrans.

[2] Le groupe Moller-Maersk est également actif dans l'exploration et la production de pétrole et de gaz, la construction navale, l'aéronautique, l'industrie, la grande distribution et les services de technologie de l'information.

[3] Décision M.1895 Ocean Group / Exel en date du 3 mai 2000, point 7.

[4] Décision M. 1794 Deutsche Post / Air Express International en date du 7 février 2000, point 8 : « Freight forwarding can be defined as the organisation of transportation of items (possibly including ancillary activities such as customs clearance, warehousing, ground services etc.), on behalf of customers according to their needs ».

[5] Décision M. 1794 Deutsche Post / Air Express International en date du 7 février 2000, point 9 : « In its investigation, the Commission found that a number of distinctions as regards relevant product markets can be made : (.) between land, air and sea freight forwarding, mainly because forwarders tend operationally to split their departments to focus on each element of transport and because of speed and tariff structures of the services concerned ».

[6] Les groupes Khüne et Nagel et LTI appartiennent à la catégorie des « transitaires et commissionnaires de transport ».

[7] Les groupes Maersk et Bolloré appartiennent à la catégorie des « armateurs logisticiens ».

[8] Il s'agit le plus souvent des ports de commerce eux-mêmes.

[9] Lettre d'autorisation de l'opération Norbert Dentressangle / Stockalliance en date du 22 novembre 2002 et publiée au BOCCRF n° 8 en date du 11 juillet 2003.

[10] Décision M. 2831 DSV / TNT Logistics / DSV Logistics en date du 27 juin 2002. Lettre d'autorisation de l'opération Norbert Dentressangle / Stockalliance en date du 22 novembre 2002 et publiée au BOCCRF n° 8 en date du 11 juillet 2003.

[11] Décisions M. 1895 Ocean Group / Exel en date du 3 mai 2000, M. 2831 DSV / TNT Logistics / DSV Logistics en date du 27 juin 2002 et de la lettre d'autorisation de l'opération Norbert Dentressangle / Stockalliance en date du 22 novembre 2002 et publiée au BOCCRF n° 8 en date du 11 juillet 2003. La Commission a avancé comme arguments le fait que les clients se tournent vers des opérateurs présents sur leur territoire national et le fait que les parts de marché des offreurs de taille européenne varient sensiblement d'un pays à l'autre.