NOR : ECOC0300074S
Le Conseil de
la concurrence (section III A),
Vu la lettre enregistrée le
13 août 1999, sous le numéro F 1163,
par laquelle le ministre de léconomie, des finances
et de lindustrie a saisi le Conseil de la concurrence
de la création, par les groupes Cora et Casino-Guichard-Perrachon,
de la centrale de référencement Opéra ;
Vu le livre IV du code de commerce
relatif à la liberté des prix et de la concurrence,
le décret no 86-1309 du 29 décembre 1986
modifié fixant les conditions dapplication de
lordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986
et le décret no 2002-689 fixant les
conditions dapplication du livre IV du code de
commerce ;
Vu les observations présentées
par le commissaire du Gouvernement et par les sociétés
Opéra, Casino et Cora ;
Vu les autres pièces du dossier ;
La rapporteure, la rapporteure générale
adjointe, le commissaire du Gouvernement, les représentants
des sociétés Casino-Guichard-Perrachon, Cora
et Opéra entendus au cours de la séance du 3 décembre 2002,
Adopte la décision suivante :
I. - CONSTATATIONS
I. - Les entreprises concernées
Opéra
1. Opéra
est une centrale de référencement commune, créée
le 28 avril 1999 par les groupes Casino et Cora
qui en détiennent le capital à parité.
Elle référence les fournisseurs et négocie,
pour le compte de ses mandants, les conditions commerciales,
la nature et le montant des avantages accordés. La
centrale référence tous les fournisseurs pour
les catégories de produits qui lui ont été
confiées, tant pour les produits communs à lensemble
des enseignes que pour les produits spécifiques à
certaines enseignes. Opéra référence
les fournisseurs de produits nationaux, régionaux et
locaux. Elle est compétente en France, dans les DOM-TOM,
les principautés dAndorre et de Monaco, en Belgique
et au Luxembourg.
2. Compte tenu de divergences qui
sont survenues en 2001 entre les sociétés Cora
et Casino, le mandat dagent commercial donné
à Opéra a été dénoncé
avec effet au 31 décembre 2002. Les activités
commerciales et opérationnelles dOpéra
ont cessé depuis le 16 septembre 2002.
Casino
3. Le groupe
Casino-Guichard-Perrachon est une société anonyme
à directoire et conseil de surveillance. La majorité
du capital est détenue par le groupe Rallye qui possédait
51,89 % du capital le 31 décembre 1998
et 52,83 % le 30 juin 1999. Les résultats
du groupe Casino ont atteint 99 853 MF en 1999,
année de la création de la centrale Opéra.
4. En France, le groupe Casino, qui
a développé son activité dans le secteur
de la vente au détail de produits de grande consommation,
est principalement implanté dans le Sud-Est. Le groupe
est présent dans différents formats de distribution :
grandes surfaces (hypermarchés et supermarchés),
magasins de proximité en libre service, magasins de
discompte, restauration par le biais de cafétérias.
Le groupe possède par ailleurs des sociétés
spécialisées dans dautres secteurs tels
que la photographie et linformatique. Casino exploite,
en outre, le site de vente par internet c-online.
5. Le groupe Casino exploite directement,
ou par lintermédiaire de filiales ou de franchisés :
112 hypermarchés Géant (dont 96,4 %
sont intégrés à la société
Casino France), 473 supermarchés Casino (dont
61,3 % sont exploités en location-gérance
ou en franchise), 2 230 supérettes Petit
Casino, 435 magasins Franprix, 301 magasins Leader
Price, Spar et Vival.
6. Plusieurs sociétés
sont affiliées au groupe Casino, notamment les coopératives
de Normandie-Picardie (société coopérative
anonyme de consommateurs à capital variable, qui exploite
205 magasins aux enseignes Maxicoop, Point Coop, et Coin
chaud), Monoprix-Prisunic (société anonyme à
directoire et conseil de surveillance qui exploite 322 magasins
en France, dont 79 en région parisienne parmi lesquels
53 à Paris), et Francap qui est une centrale de référencement
alimentaire fournissant 5 700 supérettes,
libres-services et supermarchés (aux enseignes Coccinelle,
Coccimarket, G20, Topco, Viveco, Nodis, Mag, Diagonal, Sanac,
Eureka, Ma Droguerie, Panier Sympa, Halte Epicerie, Francap
Distribution).
7. La société Casino
a des participations notamment dans le capital des sociétés
suivantes : Unigros (50 %), Sud distribution (50 %),
SNC Gesfica (100 %), Hyper-Rocade (50 %), Lion de
Toga (50 %), Pacam (50 %), Poretto (50 %),
Fogata (50 %), Sodico (50 %), Sudis (50 %),
Prodis (50 %), Groupement montilien de commerçants
GMC (100 %), SCI les Beguines (93,27 %), SCI Draio
de la Mar (100 %), Donus SNC (100 %), Gelase (100 %),
Floréal (100 %), SARL les Sylènes (100 %),
Astiyage (100 %), SA les Magasins économiques
de Noisy-le-Sec (100 %) et SCI la ZAC du Roubaud-Saint-Jean
(100 %).
8. Avant la création de la
centrale dachat Opéra, le référencement
des fournisseurs était assuré directement par
Casino France, structure caractérisée par une
forte centralisation des achats et de la distribution.
Cora
9. Le groupe
Cora est une société anonyme qui a pour activité
la vente au détail de produits de grande consommation.
La société de droit belge Ransart détient
50,78 % de son capital.
10. Il exploite notamment les enseignes
Cora, Match, Animalis, Truffaut et Duca shop. En 1999, le
chiffre daffaires du groupe Cora sest élevé
à 29 119 664 135 FF HT.
11. En France, le groupe Cora exploite
283 magasins aux enseignes Cora (69 hypermarchés)
et Match (214 supermarchés). Il possède
45 jardineries Truffaut dont 20 sont franchisées,
2 animaleries Animalis et 58 cafétérias
Resto Time.
12. Cinq sociétés sont
affiliées au groupe Gmb-Cora-Match : la société
Primistères Reynoid, qui est une centrale dachat
régionale pour les magasins Cora implantés en
Martinique, Guyane et Guadeloupe ; lUnion des coopérateurs
dAlsace, société coopérative anonyme
qui exploite 225 magasins sous les enseignes : Point
Coop, Supermarché Coop, Maxi Coop, le Mutant, Rond
Point ; la SA Maximo qui vend à distance des produits
surgelés et des produits alimentaires ; la société
Migros France qui exploite trois hypermarchés dans
lAin et le Calvados. Ces affiliés ont passé
avec le groupe Cora une convention dapprovisionnement
qui leur permet dadhérer aux centrales dachat
du groupe.
13. Avant la création dOpéra,
le groupe Cora possédait deux centrales dachat :
Loceda pour les produits alimentaires, et Hypersélection
pour les produits de bazar, lélectroménager
et le textile.
La répartition géographique
et le poids économique
des sociétés Cora et Casino
14. Au niveau
national, la part de marché détenue par les
enseignes Casino, Géant, Cora et Match était
de 9,5 %, au moment de la création dOpéra.
En incluant Monoprix/Prisunic, affilié au groupe Casino
et donc inclus dans le périmètre dOpéra,
cette part de marché sélève à
11,6 %.
15. Le groupe Casino est principalement
implanté dans le sud et louest du pays, alors
que le groupe Cora est essentiellement présent dans
le nord et lest de la France. La clientèle commune
aux deux groupes est limitée : environ 10 %
des clients Géant sont également clients chez
Cora, et 15 % des clients Cora fréquentent également
Géant. Les groupes Cora et Casino détiennent
des parts de marché significatives, mais néanmoins
inférieures à 30 % des surfaces de vente
ou du chiffre daffaires réalisé, dans
sept zones de chalandise.
16. Selon une étude Xerfi réalisée
en octobre 1999, près de 17 % des hypermarchés
et 25,6 % des supermarchés étaient exploités
par Cora et Casino.
17. La part de marché par rayon
détenue par les cinq principaux groupements présents
sur le marché français est précisée
dans le tableau suivant :
|
OPÉRA |
AUCHAN |
INTERMARCHÉ |
LUCIE |
CARREFOUR-
PROMODÈS |
Epicerie |
11,1 |
12 |
14,4 |
23,4 |
23,8 |
Liquides |
12,8 |
14,3 |
10,8 |
21,2 |
24,8 |
Entretien |
11,3 |
13,1 |
13,8 |
24,5 |
25,9 |
Hygiène/beauté |
14,1 |
14,2 |
12,4 |
24,1 |
27,3 |
Crémerie |
11,1 |
11,8 |
14 |
22,5 |
23,7 |
Surgelés |
11,4 |
14 |
13,1 |
21,2 |
23,9 |
Traiteur LS |
14,3 |
12,7 |
10,3 |
20,5 |
26,6 |
Saucisserie |
12,7 |
14,8 |
11,7 |
21 |
25,6 |
Fromages LS |
11,4 |
11,5 |
13,8 |
22 |
23,2 |
Charcuterie LS |
11 |
12,5 |
2,1 |
20,3 |
23,9 |
(Source référenseigne
Univers GMS (hypers + supers + HD + supérettes
+ bad) panels conso. = 91 % de la consommation des
ménages.)
2. Les pratiques dénoncées
18. Créée
le 28 avril 1999, la société Opéra
a organisé, à compter du 1er juin 1999,
des réunions avec les principaux fournisseurs des groupes
Cora et Casino. Au total, Opéra avait, au 18 janvier 2000,
référencé 4003 fournisseurs. Trente-quatre
dentre eux, représentant 80 % du chiffre
daffaires des produits dont la négociation a
été confiée à Opéra, ont
été interrogés ou ont communiqué
des éléments lors de linstruction de la
présente saisine. Il ressort de leurs déclarations
que plusieurs demandes ont été formulées
par les acheteurs dOpéra : - la renégociation
des contrats commerciaux en cours pour lannée
1999 ; - lharmonisation
des conditions commerciales accordées sur les conditions
estimées les plus favorables, avec effet rétroactif
au 1er janvier 1999 ; - une participation
financière, au titre de la massification des achats
ou reconnaissance dOpéra, de lordre de
2 % du chiffre daffaires réalisé.
Certains fournisseurs ont, de plus,
déclaré que leurs produits avaient été
déréférencés, à la suite
du refus quils avaient opposé aux demandes ainsi
présentées. Lors des négociations relatives
à lannée 2000, qui se sont déroulées
à partir de décembre 1999, la centrale de référencement
a confirmé ses demandes précédentes et
a adressé des factures dacomptes sur cette base.
La renégociation des conditions commerciales, leur
harmonisation, la compensation des différences et les
demandes liées à la création dOpéra
19. M. Joly, directeur denseignes
alimentaires de la société Perrier Vittel, a
affirmé : « Le premier rendez-vous
avec Opéra en présence des acheteurs respectifs
de Cora et de Casino sest déroulé le 7 juin 1999
au siège de Cora. On nous a demandé un réalignement
sur les conditions les plus favorables accordées à
Casino selon eux à partir de la création dOpéra.
En contrepartie, Opéra nous proposait une unification
des services achetés (...). Le plan de vente chez Casino
était plus développé (opérations
prospectus plus fréquentes) par rapport à Cora. »
20. M. Psarski, directeur denseignes
de la société Entremont, a déclaré :
« Nous avons été convoqués
pour la première fois par Opéra début
juin 1999 (...). On nous a présenté la
structure Opéra et lobjectif de cette structure.
(...) Fin juin, un second rendez-vous a eu lieu chez Locéda
en présence des représentants de Locéda
et de Casino. On nous a demandé au titre de la massification
des achats 2 % sur le chiffre daffaires total Casino
+ Locéda + les affiliés des deux entités
rétroactif au 1er janvier 1999.
Nous avons refusé (...). Fin août, début
septembre une nouvelle réunion a eu lieu chez Casino
en présence seul de lacheteur Casino se présentant
au titre dOpéra. Les demandes dOpéra
ont évolué : on a cessé de nous
demander lalignement sur les conditions les plus favorables
(0,70 %) et la demande de 2 % sur la massification
des achats sest transformée en une demande valeur
absolue de 4 millions de francs couvrant également
les 0,70 %. Nous avons demandé quelles étaient
les contreparties proposées par Opéra. Nous
navons eu aucune réponse à ce sujet (...). »
21. M. Seizelard, directeur commercial
de la division chocolat de Nestlé France, a indiqué :
« Le premier rendez-vous avec Opéra a
eu lieu le 23 juin 1999 chez Cora en présence
des acheteurs habituels de Cora et de Casino. On nous a demandé
2 % au titre de la reconnaissance dOpéra
et lalignement des conditions sur Casino. Nous avons
refusé ces demandes. Le 1er juillet 1999,
un second rendez-vous a eu lieu chez Cora en présence
des directeurs dachat épicerie de Cora et de
Casino. La demande est réitérée, le refus
également. A la suite de plusieurs rendez-vous, un
accord a été trouvé avec Opéra
sur une perspective de 2 ans (1999-2000) (...). »
22. Selon M. Lauden, directeur
des opérations commerciales de la société
Lesieur : « En ce qui concerne les négociations
commerciales 1999, elles ont été finalisées
en octobre 1998 avec Locéda et en mai 1999 avec
Casino (...). Nous avons été convoqués
par les acheteurs de Cora et de Casino courant juin. Le premier
rendez-vous a eu lieu chez Cora. On nous a annoncé
quOpéra allait se substituer aux centrales dachat
de Casino et de Cora. Cette substitution a été
effective à partir de septembre. Les deux acheteurs
de Cora et de Casino se sont échangé les conditions
commerciales que nous leur accordions respectivement. Ils
nous ont demandé un alignement sur les conditions commerciales
quils considéraient comme les plus favorables,
cest-à-dire sur les conditions accordées
à Cora-Match. Cette demande concernait la totalité
des rémunérations (...). Ils nous ont également
demandé 2 % au titre de la massification des achats
sur la totalité des chiffres daffaires des deux
groupes. Les demandes des acheteurs ont été
présentées comme systématiques et en
tant que telles exigées auprès de tous les fournisseurs.
Nous avons refusé ces demandes. Elles ont été
réitérées et sont toujours dactualité
même si elles se manifestent sous dautres formes (...). »
Un courrier du 7 juillet 1999,
adressé à Opéra par la société
Lesieur, constate : « Nous faisons suite
aux différents entretiens que nous avons menés
tout dernièrement concernant la création de
votre centrale de référencement Opéra
et aux demandes qui en découlent : - au titre de
la comparaison des conditions 1999 négociées
séparément avec Casino et Cora, vous valorisez
à dessein des écarts justifiant à vos
yeux une demande de compensation financière, sans contrepartie
réelle, avec rétroactivité au 1er janvier 1999. - au titre de la
reconnaissance dOpéra, vous justifiez
une demande à hauteur de 2 % du CA des 2 entités,
sans autre contrepartie que la massification de vos CA, avec
rétroactivité au 1er mai 1999.
Nous avons déjà eu loccasion
de vous faire part de notre profond désagrément
quant à ces demandes qui nous apparaissent comme non
justifiées, en dehors de la réalité économique,
sans parler des sanctions évoquées en cas de
non-réponse favorable de notre part, ce qui serait
pour le moins contraire à lesprit de bonne collaboration
qui prévaut entre nos sociétés.
A cette fin, nous vous rappelons notre
position quant aux points cités plus haut : (...)
Concernant la reconnaissance dOpéra,
la discussion quant à un accord additionnel à
ceux déjà signés respectivement avec
chacune de vos sociétés pour lexercice 1999
ne pourrait se faire quau titre de prestations de service
additionnelles, assorties de contreparties réelles
(...). »
23. M. Buiret, directeur denseignes
de la société Kraft Jacob Suchard France, a
déclaré : « Nous avons reçu
un courrier dOpéra nous demandant un rendez-vous
qui a eu lieu courant juin à Croissy-Beaubourg. Très
rapidement, dautres rendez-vous ont eu lieu au cours
desquels la négociation véritable a commencé.
Elle a été finalisée le 15 juillet 1999
pour le café (...) et le 22 novembre 1999
pour la confiserie. (...) Opéra sest substituée
aux deux entités précédentes et a demandé :
dune part une harmonisation des conditions accordées
aux deux entités et dautre part une demande de
coopération commerciale dans la mesure où les
contreparties seraient également harmonisées.
Dans les cas où les contreparties ne pouvaient être
harmonisées en 1999 du fait de la date tardive des
accords, nous avons obtenu des contreparties supplémentaires
aux accords initialement traités (...) Nous avons refusé
la coopération additionnelle telle quelle était
demandée par Opéra (environ 2 %), nous
nous sommes contentés dun geste commercial :
nous avons étendu une gamme de bonbons La Vosgienne
pour 972 000 F. Pour le café, nous avons
harmonisé 0,12 % du chiffre daffaires des
deux premiers trimestres dans le domaine de la coopération
commerciale. Nous avons également versé 810 000 F
chez Casino pour une extension de produits dans certains de
leurs circuits (...). »
24. M. Puech, directeur commercial,
et Mme Auger, chargée de mission, de la société
Luissier Bordeau Chesnel ont indiqué que : « Lors
de ces rendez-vous, les négociateurs dOpéra
avaient en leur possession les accords de Casino et les accords
Locéda et ils ont demandé lharmonisation
des conditions sur la base des conditions les plus favorables.
Ils demandaient, en outre, quon reconnaisse Opéra
en lui accordant un budget de coopération commerciale
de 2 % au titre de la massification des achats et de
laugmentation de lactivité quelle
entraînera. »
25. M. Guengant, directeur de
clientèle, et M. Livet, de la direction juridique
de la société Bonduelle, ont déclaré :
« Avec la création dOpéra,
une demande nous a été faite à hauteur
de 2 % : nous avons demandé que ces 2 %
aient des contreparties réelles (...) Par ailleurs,
les conditions de coopération 1999 Casino et Locéda
ont fait lobjet dune demande dalignement
à hauteur de 27 % ; cette différence
étant due aux prévisions de chiffres daffaires
(...). »
26. Selon M. Guillet, directeur
denseignes de la société Cogesal Miko :
« Les premiers contacts avec Opéra ont
eu lieu en septembre 1999 à Croissy-Beaubourg
chez Cora en présence des acheteurs habituels de Casino
et de Cora. Ils se sont présentés comme agissant
au titre dOpéra (...). » M. Guillet
ajoute : « Au titre des négociations
1999, Opéra nous a demandé un réalignement
sur les conditions commerciales les plus favorables et 2 %
damélioration des conditions commerciales, ce
que nous avons refusé. »
27. M. Crabot, directeur commercial
off trade, et M. Bregy, directeur denseignes de
la société Triodis, ont déclaré :
« Le premier rendez-vous avec Opéra a
eu lieu le 13 septembre 1999 (...). On nous a demandé
2 % au titre de la massification des achats. Nous avons
refusé au motif que les accords étaient déjà
conclus pour lexercice en cours (...). En contrepartie,
Opéra nous a proposé le référencement
de nouveaux produits sur les 3 derniers mois de lannée,
mais ce référencement était déjà
prévu chez Casino. »
28. M. Monnot, directeur
commercial de la société Barilla France, expose :
« On nous a parlé dOpéra,
à partir de juin 1999, et nous avons été
convoqués à un rendez-vous commun avec les acheteurs
pâtes Locéda et Casino, à Croissy-Beaubourg.
Il ny a pas eu de convocation pour les biscuits, non
référencés chez Casino. Il ny a
pas eu non plus de convocation pour les sauces, déréférencées
par Casino au 1er septembre 1999,
suite à un litige commercial propre à la négociation
commerciale Casino. Lors du rendez-vous commun sur les pâtes,
il y a eu une demande dalignement des conditions Locéda
sur Casino et une demande liée à Opéra.
Casino bénéficiait de conditions supérieures
à celles de Locéda denviron 3,5 points
liées à des contreparties inférieures
offertes par Locéda. La demande dalignement portait
sur lensemble de lannée 1999. La demande
liée à Opéra était de 2 %
au titre de la massification des achats. Pour nous massification
des achats consistait à travailler sur lensemble
de nos 3 catégories avec lensemble des sociétés
constituant le groupe Casino et Locéda. Comme la création
dOpéra na pas abouti à ce que nous
soyons présents en biscuits et sauce chez Casino, et
en biscuits et en sauce chez Match (une enseigne de Locéda),
nous navons pas trouvé daccord sur cette
demande de 2 %. Nous avons trouvé un accord le
13 juillet 1999, concernant la revalorisation de
laccord Locéda, en échange dune
troisième opération de revente nationale chez
Cora (...). »
29. M. Hannebicque, directeur
commercial de la société Herta, déclare :
« Le premier rendez-vous au titre dOpéra
a eu lieu le 8 juin 1999 en présence des
acheteurs charcuterie de Cora et de Casino au siège
de Cora (...). Un second rendez-vous a eu lieu le 22 juin 1999,
à Saint-Etienne, en présence de nouveaux interlocuteurs
se présentant comme appartenant à Opéra
(...). Un troisième rendez-vous a eu lieu le 13 juillet 1999,
à Croissy-Beaubourg chez Cora (...). Opéra nous
demandait un réalignement des conditions commerciales
sur lenseigne quil considérait de leur
point de vue comme la mieux traitée à savoir
Cora. Cette demande nétait pas assortie de contreparties.
Dans leur esprit, cette demande était rétroactive
au 1er janvier 1999. »
Lintéressé indique que, le 14 septembre 1999 :
« Nous avons rencontré M. Desheraut
directeur des achats frais dOpéra. Nous nous
sommes engagés verbalement sur une somme (...). »
Le compte rendu dune réunion qui sest
tenue le 13 juillet 1999 entre les sociétés
Herta et Opéra constate : « 1o
Demande de valorisation de lécart. (...) Nous
leur répondons que nous ne sommes toujours pas daccord
pour partir sur la base des conditions Cora et les appliquer
à Match, UCA, Casino, Franprix, Primo, Francap (...). »
Le compte rendu dune réunion qui sest
tenue le 14 septembre 1999 indique : « M. Golotvine
(dOpéra) présente les divergences de point
de vue sur le comparatif Locéda/Casino. Leur demande : - application du
meilleur accord Cora à toutes les entités de
Locéda et du groupe Casino : - validation
de laccord triple net de Cora comme servant de base
à la négociation 2000 ; - règlement
des écarts constatés soit 6,5 MF ; - reconnaissance
dOpéra non encore formulée en termes de
coût.
Nous leur rappelons notre position : - comparaison
des deux entités Locéda et Casino en prenant
en compte le mixe CA de chaque entité soit pour nous
un écart de 0,14 % au profit de Locéda ; - Opéra
nexiste que depuis mai 1999 et la demande ne peut
se faire que sur sept mois ; - pas
de reconnaissance Opéra puisque les autorités
françaises et européennes nont pas encore
donné leur accord.
De plus nous leur expliquons que
nous ne souhaitons pas régler décart sur
Francap, Baud, UCA, Primo car les contreparties ne sont pas
les mêmes et quils nont aucun lien capitalistique
sauf entre Casino et Baud (...).
Nous leur proposons de leur régler :
1 000 kF sur 1999 ;
900 kF sur 2000 ;
Avec comme indice de négociation
2000 : 64.73.
Accord de M. Desheraut et fin
de lentretien. » .
30. M. Leclair,
directeur commercial de la société Chupa Chups
France, affirme que, lors des rencontres avec la centrale
de référencement, qui ont commencé en
août 1999 : « Opéra a comparé
les conditions commerciales accordées à chacune
des deux enseignes séparément. Daprès
Opéra, Cora bénéficiait des contrats
de coopération les plus avantageux. Pour nous, la différence
résultait des prestations différentes accordées.
On nous a demandé une augmentation de la coopération
commerciale accordée à Casino (...). Nous avons
accepté cette augmentation en contrepartie dun
élargissement de la gamme et de mise en avant. »
31. M. Albertelli,
directeur de clientèle GMS écriture, et M. Tupin,
directeur commercial écriture, de la société
Bic ont exposé que les négociations commerciales
relatives à lannée 1999 avaient été
finalisées avec Casino, le 29 décembre 1998
et le 20 novembre 1998 avec Cora. Ils déclarent :
« Nous avons été convoqués
la première fois par Opéra chez Cora le 15 juin 1999
en présence de deux acheteurs de Casino et dun
acheteur de Cora. On nous a demandé de comparer les
accords respectifs de Casino et de Cora. Il résultait
de cette comparaison que les conditions commerciales maximales
proposées étaient très proches. Lorsquon
incluait les budgets gérés par notre force de
vente dans les magasins Cora, Casino bénéficiait
faiblement de ces budgets du fait de sa structure très
centralisée. Dans le cadre de ce rendez-vous, seul
le périmètre Cora-Casino a été
évoqué avec Opéra (pas de référence
aux affiliés). Une double demande a été
formulée : dune part 2 % au titre dOpéra
pour lannée 1999 sur le CA 1999 Cora + Casino
et dautre part 0,6 % au titre du réalignement
(selon eux) sur Cora quils estimaient mieux traité
au niveau commercial. Nous avons refusé ces demandes
dans leur globalité. »
32. Selon M. Massa et M. Thuriot,
responsables compte clé de la société
Reckitt et Colman : « En ce qui concerne
lactivité soin & beauté :
les premiers entretiens ont eu lieu le 1er juin 1999,
à Croissy-Beaubourg (...). Nous avons été
reçus par M. Correa, de Locéda et Mme Gord,
de Casino. Selon ces personnes, des écarts avaient
été observés entre les accords Cora et
Casino, évalués à 6,07 % de notre
chiffre daffaires, dont le règlement nous en
était demandé. En outre, il était demandé
le versement dune somme égale à 2 %
de notre chiffre daffaires pour Opéra et 0,25 %
pour Casino, au titre de léquivalent du service
de paiement centralisé de Cora. Nous avons refusé
cette demande (...). Le deuxième rendez-vous a eu lieu
le 15 juin également à Croissy-Beaubourg
(...) Opéra a accepté que la négociation
porte sur un budget de coopération comportant des contreparties.
Reckitt a fait plusieurs propositions (élargissement
des gammes dépilatoires dans certaines enseignes, opérations
spéciales supplémentaires, référencement
de produits absents de certains linéaires etc.) pour
un budget global de 850 000 F. Le troisième
rendez-vous sest tenu le 28 juin (...) les
représentants dOpéra ont refusé
les propositions de Reckitt, considérées comme
insuffisantes en valeur et trop exigeantes en ce qui concerne
les contreparties. En outre était maintenue lexigence
dun investissement supplémentaire à verser
à Opéra, sans précision de taux (...)
Le cinquième rendez-vous a eu lieu le 18 novembre (...)
nous avons fait les mêmes propositions portant sur le
même budget et les mêmes contreparties (...) à
laquelle sajoutait lacceptation de trois opérations
spéciales (...) rémunérées à
0,5 % du chiffre daffaires (...). Cette proposition
a été acceptée par Opéra (...). »
Sagissant de la gamme des
produits dentretien, ce fournisseur déclare :
« Le premier rendez-vous a eu lieu le 1er juin 1999
à Croissy-Beaubourg (...) lécart considéré
comme injustifié par nos interlocuteurs et dont la
compensation était demandée était de
4,04 % de notre chiffre daffaires. En outre, le
versement de 2 % du chiffre daffaires était
demandé. Nous avons contesté cette analyse et
refusé de verser les sommes demandées. Le deuxième
rendez-vous sest tenu le 15 juin (...) nous
avons fait savoir que nous nentendions négocier
que sur la base de contreparties en échange de nouveau
budgets. »
33. Selon M. Minvielle,
directeur général, et M. Pirot, directeur
commercial division grand public France-Bénélux,
de la société Pennel Industries : « Le
23 juin nous avons été convoqués
par téléphone chez Casino, à Saint-Etienne
en présence de lacheteur habituel de Casino et
du responsable du bazar chez Cora. On nous a annoncé
que Casino et Cora souhaitaient reparler des négociations
commerciales 1999. On nous a demandé de présenter
sur un tableau les conditions commerciales 1999 accordées
à Cora et à Casino, malgré la mention
du contrat Casino linterdisant. Au terme de cette comparaison,
leur demande était de 2,2 millions de francs (HT)
environ sur le prix facturé en plus de toutes les remises
soit 1,34 % du chiffre daffaires division grand
public de Pennel. Nous avons refusé cette demande.
Plusieurs fois au cours de lentretien on nous a menacé
de nous déréférencer. Le rendez(-vous)
sest achevé sans accord. (...) Dans un courrier
du 21 septembre 1999, nous avons fait une proposition
à Opéra avec des contreparties réelles. »
34. M. Meuter,
directeur de clientèle de la société
Kimberly Clark, a déclaré : « Nous
avons décidé de reconduire les conditions générales
de vente de 1999 jusquà fin mars 2000 pour
des raisons pratiques. En ce qui concerne les négociations
commerciales 1999 avec Locéda nous avons signé
un accord le 17 août 1999. Ce contrat a été
signé avec M. Bouckaert, acheteur de Locéda.
Opéra nest pas intervenu dans cette négociation
commerciale car les contreparties négociées
avec Locéda ne concernaient en rien Casino. En ce qui
concerne les négociations commerciales de 1999 avec
le groupe Casino, nous sommes tombés assez rapidement
sur un accord qui a été confirmé le 27 mai 1999
par notre société. Le 17 mars 1999,
Casino nous avait fait parvenir plusieurs propositions que
nous navons pas acceptées. Jai reçu
un contrat cadre de coopération commerciale non signé
et non daté de Casino France représenté
par Opéra au titre des négociations commerciales
1999. Je ne me souviens pas de la date à laquelle ce
contrat a été envoyé. » M. Meuter
indique également : « Nous avons
été convoqué la première fois
par Opéra en juin au siège de Saint-Etienne
en présence des acheteurs habituels de Casino et de
Locéda. On nous a annoncé que les négociations
2000 se feraient avec un interlocuteur unique. Durant lété
nous avons eu plusieurs rendez-vous à Croissy-Beaubourg
avec les deux acheteurs de Casino et Locéda au titre
dOpéra. Opéra nous a demandé 2 %
au titre de la massification des achats, demande que nous
avons refusée. Ils ont rapidement fait machine arrière.
La création dOpéra na eu aucune
incidence sur les négociations 1999. »
35. M. Ecrepont, directeur
général, et M. Riaud, directeur commercial
grande distribution, du groupe Frémaux ont indiqué :
« Nous avons été convoqués
par Opéra le 5 juillet 1999 (jusquà
présent, il était possible de démarcher
les magasins Cora). Opéra nous a demandé un
réalignement sur les conditions commerciales les plus
favorables sans tenir (compte) des différences de chiffres
daffaires réalisés. Nous avons refusé.
Ils nous ont demandé :
Réalignement de 1 %
sur le CA Cora hors MDD (marque distributeur) au titre
de la remise sur facture soit 15 000 F à
lépoque ;
1,65 % au profit de Casino au
titre des écarts de coopération commerciale,
soit 355 000 F.
Ils nous ont précisé
quil(s) demandai(en)t à chaque fournisseur 2 %
au titre de la massification des achats mais, étant
donné ce quils nous avaient déjà
demandé, ils nous ont demandé 1 % soit
260 000 F. Lensemble de ces demandes représentait
630 000 F sur le CA déclaré. Jai
refusé tout en bloc au motif quaucune contrepartie
nétait proposée. Finalement, ils ont renoncé
au pourcentage sur la massification des achats en nous précisant
que pour lannée 2000 une réunion
se tiendrait en octobre 1999 et que la massification
serait alors demandée et des taux de remise plus élevés.
La réunion sest achevée sans quun
accord soit trouvé. Le 15 juillet, jai adressé
une proposition écrite à Opéra. Cette
proposition a été jugée inacceptable
par Opéra. Opéra na jamais confirmé
ses demandes par écrit alors que nous navons
pas cessé de leur demander.(...) jai été
convoqué le 22 septembre 1999 où on
ma demandé dexpliquer la proposition du
15 juillet. Ils ont refusé les 52 000 F
proposés et ont demandé respectivement 70 000 F
pour Cora et 190 000 F pour Casino. Nous avons refusé
au motif quaucune contrepartie nétait proposée.
Nous leur avons précisé que nous souhaitions
engager les négociations 2000 et ne pas revenir
sur les négociations 1999 qui étaient déjà
finalisées (...) Finalement, nous avons proposé
0,7 % du CA global sans contrepartie en acceptant de
le payer seulement si Opéra nous le réclamait
par écrit fin octobre, soit 195 000 F (...). »
36. M. Vicard,
directeur national des ventes GMS de la société
DIM, a déclaré que « la demande
dOpéra consistait en un nivellement des accords
Casino/Cora, rétroactivement au 1er janvier 1999,
en une garantie de la ristourne de performance maximale sur
lannée 1999 et en une coopération
commerciale de 2 % de reconnaissance dOpéra.
Nous avons refusé de satisfaire à cette demande
en expliquant que seule une amélioration réelle
et tangible de notre position dans lune ou les deux
enseignes pouvait motiver une amélioration de notre
coopération commerciale (...). Plusieurs entretiens
ont suivi au cours desquels nous avons cherché à
trouver une position acceptable pour les deux, cest-à-dire
de réelles contreparties supplémentaires justifiant
une amélioration de nos conditions de coopération
commerciale ».
37. M. Fenart, directeur
commercial, et M. Dexmier, directeur juridique adjoint
du groupe LOréal, ont indiqué, au nom
de la société Lascad, que : « Au
titre de 1999, nous avons négocié un accord
légèrement supérieur chez Casino que
chez Locéda. Après la création dOpéra,
les négociateurs nationaux (Cora et Casino) nous ont
convoqués pour nous demander de compenser lécart
constaté en la défaveur de Cora sur le CA de
Cora. Notre première réponse fut négative
et après discussion et négociation de nouvelles
contreparties (...) nous avons accepté le principe
de cette compensation. »
38. M. Cangelosi,
directeur dactivité consumer média, et
M. Lefebvre, responsable juridique de la société
Sony, ont déclaré : « Lors
de cette réunion du 12 juillet 1999, les
acheteurs nous ont demandé de présenter les
conditions accordées à chaque enseigne et les
ont comparées. Les conditions commerciales les plus
favorables étaient accordées à Cora ce
qui se justifiait par des contreparties différentes
pour les deux enseignes (...) Casino qui réalisait
un chiffre daffaires plus grand mais qui ne réalisait
pas le même effort de progression estimait mériter
une compensation. On nous a demandé 1 % sur le
chiffre daffaires Casino rétroactif au 1er janvier 1999
sans quune contrepartie effective ne soit proposée
en échange. (...) la non-acceptation dune telle
proposition pouvait entraîner une perte de chiffre daffaires
conséquente sur lannée suivante (...).
Pour débloquer la situation, nous avons fait une proposition
écrite le 13 juillet 1999 envoyée
à Cora agissant pour le compte dOpéra
dans laquelle nous acceptions la requête en contrepartie
dun accroissement de chiffre daffaires au cumul
des deux enseignes (...). »
39. Selon M. Périnet,
directeur national des ventes, et M. Benkaroun, directeur
centrales nationales et développement des ventes, de
la société Jeux Ravensburger : « En
ce qui concerne les négociations commerciales 1999
avec Casino, elles ont été finalisées
le 16 mars (...). Nous avons été contactés
par Opéra fin juin 1999. Nous avons été
convoqués à Saint-Etienne, où les conditions
commerciales accordées respectivement à lune
et à lautre enseignes ont été comparées.
Opéra nous a demandé le paiement de 390 000 F
justifiés selon eux par un écart dinvestissement
entre Cora et celui de Casino. Cora bénéficiait
des conditions commerciales les plus avantageuses ceci était
lié à la présence de produits sur 3 catalogues
contre 1 chez Casino. Il sagissait dune demande
de réalignement rétroactive sur 1999 denviron
2 % du chiffre daffaires. Nous avons refusé
cette demande considérant quOpéra navait
aucune validation juridique. Nous navons pas de service
juridique interne à la société, nous
avons donc pris les conseils du syndicat professionnel. Un
deuxième rendez-vous a eu lieu en juillet 1999
toujours chez Casino (...). La demande dOpéra
a été réitérée. Par un
courrier du 27 août 1999, nous avons à
nouveau refusé cette demande. Un troisième rendez-vous
en septembre sest tenu dans les locaux dOpéra
en présence dun seul interlocuteur Opéra.
La demande a été réexprimée dans
une nouvelle problématique des négociations 2000.
Nous avons maintenu notre position (de) départ. Cette
demande ne faisait lobjet daucune contrepartie. »
Dans un courrier du 27 août 1999,
la société Ravensburger-Nathan a déclaré :
« Nous prenons note de votre demande stipulée
lors de notre second entretien, dalignement du taux
dinvestissement Catalogue fin dannée Casino
à hauteur de celui de Cora représentant un montant
de 390 000 F. Nous vous rappelons que votre investissement
est basé sur la présence renforcée sur
3 catalogues de lenseigne Cora répartis
sur le dernier trimestre 1999. Nous relevons que cette
demande dalignement à effet rétroactif
au 1er janvier 1999 ne saccompagne
daucune possibilité de contreparties réelles
sur 1999 de la part du groupe Casino, ce qui est, de toute
évidence, la base de nos points de désaccord. »
40. M. Weissend, directeur
commercial, M. Farnier, directeur de clientèle,
et M. Gutlé, directeur juridique, des brasseries
Heineken, ont indiqué : « Nos deux
accords spécifiques ont été comparés.
Après analyse, nos interlocuteurs ont décidé
de ne pas modifier ces contrats pour lannée 1999. »
41. M. Bazin, directeur de division
grande consommation de la société Petit Bateau,
a précisé : « Nous avons
remis un comparatif des conditions commerciales estimées
1999 Casino et Cora. Les conditions accordées étaient
relativement similaires. En conséquence, aucune demande
de réalignement na été formulée. »
42. Sagissant de la demande
relative à la « reconnaissance dOpéra »,
dont la plupart des fournisseurs ont indiqué quelle
sélevait, dans un premier temps, à 2 %
du chiffre daffaires réalisé avec Opéra,
M. Charret, directeur général dOpéra,
a déclaré, le 27 janvier 2000 :
« La direction dOpéra na
jamais donné de directive pour exiger un quelconque
pourcentage au titre de la création de la société.
Lors de discussions informelles avec des industriels, jai
pris connaissance quun certain nombre de demandes de
ce type avaient été exprimées par certains
membres de léquipe Opéra sans que cette
pratique soit généralisée. Jai
immédiatement demandé de faire cesser cette
pratique. De toute façon, aucune somme na été
facturée et perçue à ce titre. »
Les négociations relatives
à lan 2000
43.
M. Delcamp, directeur des marchés nationaux, et
M. Psarski, directeur denseignes de la société
Entremont, ont déclaré : « Les
négociations 2000 avec Opéra ont débuté
le 7 décembre. On nous a fait une triple demande :
Une demande dalignement sur
les conditions du plus offrant qui pour Opéra était
Locéda ;
La récurrence du budget alloué
pour les mises en place de déréférencement
(2 millions) ;
2,5 à 3 % supplémentaires
de coopération commerciale sans contrepartie (...).
A la date, nous avons refusé
toutes ces exigences. Nous avons proposé un projet
enseigne par enseigne au motif que la DGCCRF et le Conseil
de la concurrence nont pas pris position sur lexistence
dOpéra (...).
Nous ne négocions pas en direct
les taux des accords avec les affiliés. Cest
Opéra qui sen charge (...). Nous avons eu des
demandes dacomptes dOpéra au titre de Casino. »
44. M. Facon, directeur relation
clientèle, M. Zeller, directeur administratif
et financier, et M. Lauden, directeur des opérations
commerciales, de la société Lesieur ont indiqué :
« Dans le cadre des négociations 2000,
nous pensons que la hauteur de la demande initiale inclut
les 2 % non octroyés en 1999. »
45. Selon M. Guillet, directeur
denseignes, et M. Roche, responsable clients nationaux
de la société Cogesal Miko : « Les
premiers contacts avec Opéra ont eu lieu en septembre 1999
(...). Nous avons repris contact avec les deux interlocuteurs
des enseignes Casino et Locéda début octobre
pour proposer dacheter de nouveaux services. Dans une
télécopie du 27 octobre 1999 nous
avons confirmé notre proposition qui a été
acceptée. Ces prestations ont été réalisées
en 2000 et facturées en 2000. » Dans
le même procès-verbal, il est affirmé
que : « Les négociations commerciales 2000
avec Opéra ont débuté en décembre,
mais nont pas encore abouti à ce jour. Elles
se déroulent avec un acheteur glaces Opéra et
un acheteur surgelés (...). La publicité de
la saisine du Conseil de la concurrence à propos de
la centrale dachat a contribué à modérer
les demandes. »
46. M. Guengant, directeur de
clientèle de la société Bonduelle, a
affirmé : « Sur 1999, les négociations
avec Opéra nont pas abouti. Nous navons
pas payé les 2 % au titre de la massification
des achats (...). Nous sommes à lheure actuelle
en pleine négociation 2000 avec Opéra. Nous
leur avons proposé des accords de coopération
de 28,5 % du CA global Locéda-Casino avec un point
damélioration au titre de la massification des
achats. Et de lélargissement des gammes à
lintérieur des différentes enseignes.
Aucun document nest finalisé. »
47. MM. Weissend, Farnier et
Gutlé, des brasseries Heineken, ont déclaré
que : « Les négociations 2000
ont commencé au siège dOpéra fin
septembre, début octobre 1999 (...). Un accord de principe
a été rapidement conclu et porte sur un accord
de coopération commerciale en contrepartie de services
spécifiques à chaque entité du groupe
Opéra (...). Labsence de formalisation des négociations 2000
résulte du cadre juridique incertain de la constitution
dOpéra et de la saisine du Conseil de la concurrence
sur ce sujet. »
48. M. Minvielle et M. Pirot,
de la société Pennel industrie, ont indiqué,
sagissant du déroulement des négociations
relatives à lannée 2000 : « Dans
un courrier du 21 septembre 1999, nous avons fait
une proposition à Opéra avec des contreparties
réelles. Un second courrier du 21 septembre 1999
vient compléter le courrier du 21 septembre. Le
4 janvier 2000, Opéra nous reçoit
à nouveau : une seule acheteuse Opéra est
présente. Cette acheteuse nous annonce navoir
jamais reçu le courrier du 25 octobre et nous
annonce une demande supplémentaire de 2 % du chiffre
daffaires 1999 au titre de la centralisation des
achats sans aucune contrepartie. Le rendez-vous sest
achevé sans accord. Le 13 janvier 2000, nouveau
rendez-vous : réitération des demandes
de 1,3 % + 2 %, nouveau refus (...). Le 22 février 2000
(...) début de négociation au titre de 2000
mais maintien de 1,3 % du chiffre daffaires net
hors TVA 1999 + 1 % de la centralisation des achats
sur le chiffre daffaires net hors TVA 1999 + 2 %
du chiffre daffaires 2000 net hors TVA de la centrale
Opéra représentant les enseignes Cora et Casino. »
49. M. Meuter, directeur de clientèle
de la société Kimberly Clark, a déclaré :
« Pour linstant, les négociations
commerciales 2000 nont pas commencé. Ce
qui est inhabituel pour Locéda et Casino, qui généralement
commençaient les négociations dans le dernier
trimestre de lannée. Il faut souligner que ce
phénomène est général dans la
grande distribution cette année. Nous avons reçu
courant janvier 2000 un contrat-cadre de coopération
commerciale dOpéra qui nous a précisé
que ce serait le document type quils souhaiteraient
utiliser pour 2000. »
Un document intitulé « Contrats
de référencement et de coopération commerciale »
émanant dOpéra, qui a été
remis par le représentant de la société
Kimberly Clark, mentionne : « Lors de nos
négociations, nous avons convenu des services de coopération
commerciale, des budgets, et échéanciers de
paiement. Il semblerait que vous ayez omis de nous retourner
les contrats qui vous ont alors été soumis.
La formalisation des règles qui président à
nos relations et à nos intérêts communs
est pour nous le gage de relations équilibrées
et transparentes. Si nous pouvons envisager de les aménager
sur certains points pour tenir compte de spécificités
dans les relations, nous ne pouvons sans discrimination accepter
que certains de nos fournisseurs sy soustraient. Par
ailleurs, nous attirons votre attention sur le fait quil
est impératif que notre contrat de coopération
commerciale soit signé rapidement, labsence de
contrat écrit nous plaçant en infraction par
rapport à larticle 33 de lordonnance
de 1986, nos deux sociétés étant coresponsables.
Nous vous invitons donc à nous adresser les contrats
ci-joints, complétés selon les conditions résultants
de nos négociations, dûment signés et
paraphés par vos soins, cela par retour du courrier
(...). »
50. M. Périnet et M. Benkaroun,
de la société des jeux Ravensburger, qui a refusé
dans un premier temps de satisfaire les exigences de la centrale
de référencement, ont déclaré :
« Un troisième rendez-vous en septembre
sest tenu dans les locaux dOpéra en présence
dun seul interlocuteur Opéra. La demande a été
réexprimée dans une nouvelle problématique
des négociations 2000. Nous avons maintenu notre position
(de) départ. Cette demande ne faisait lobjet
daucune contrepartie. » Selon les représentants
de cette société : « Le préalable
aux négociations 2000 était le paiement
des 220 000 F demandés, nous avons validé
cette demande le 22 décembre 1999 ».
Les factures dacompte
51.
M. Hannebicque, directeur commercial de la société
Herta, a déclaré : « Opéra
a émis au titre de 2000 un certain nombre de factures
que nous avons refusé de payer dans la mesure où
les négociations 2000 ne sont pas finalisées.
Nous avons renvoyé ces factures. Sur les factures,
aucun taux nest précisé et les libellés
ne correspondaient à aucune prestation que nous sommes
capables dévaluer. » Dans une
lettre adressée à Opéra le 14 février 2000,
la société Herta expose : « Nous
venons de recevoir de votre part 32 factures au titre
de la coopération Opéra 2000 pour un montant
total de 1 517 666,00 francs HT. Nous nous
permettons de vous rappeler quà ce jour, nous
navons signé aucun contrat de prestations de
services permettant le règlement de facture au titre
de la coopération 2000. A ce titre, nous ne sommes
pas en mesure de régler des prestations dont la nature
et le montant nont pas été fixés
de manière conjointe et nous vous demandons de bien
vouloir faire annuler dans les meilleurs délais les
factures mentionnées en annexe ci-après (...). »
Les factures dacompte dont le
règlement est exigé sont datées du 26 janvier 2000
et concernent des prestations commerciales notamment libellées
dans les termes suivants : « 520 D
tention nationale ; 510 linéaire supplémentaire ;
512 media cosmos ; 504 pr sence prodt sup pub ;
505 op trade marketing ; 508 nx produit (pat.
Tarte pb) ; 501 négo centralis ; 531 diffusion
tous r seaux (...). »
La référence « 501
négo centralis » rémunère
la centralisation des négociations assurée par
Opéra.
Les montants TTC indiqués sur
les factures remises sont les suivants :
61 506,00 FF.
48 741,70 FF.
25 224,00 FF.
19 999,10 FF.
10 854,00 FF.
13 767,70 FF, soit un total
de 180 092,50 F (TTC).
52. M. Seizelard, directeur commercial,
et M. Le Diraison, adjoint au secrétaire
général de Nestlé France, ont déclaré :
« Pour lexercice 2000, nous avons
reçu un certain nombre de demandes dacomptes
dOpéra. Nous avons refusé de les payer
compte tenu de labsence daccord finalisé
pour 2000 et du fait que ces acomptes sont calculés
sur la base dun chiffre daffaires annuel estimé
(CA 2000) (...). Juridiquement, nous estimons quon ne
peut régler des acomptes sur des prestations indéterminées.
Des acomptes ne peuvent être payés que lorsque
la nature et la masse globale des prestations est convenue
entre les parties (...). »
Par lettre du 14 février 2000,
Opéra a demandé à Nestlé de payer,
au titre de janvier 2000, 3 488 744,54 F
dacomptes pour des prestations commerciales désignées
par 503 IPC, 504 animation produits, 510 linéaire
supplémentaire, 520 PPC, 521 devant caisse,
531 coopération file, 532 média pub,
533 coopération commerciale, 535 accueil
nouveaux produits, 541 trade marketing NF. La société
Nestlé a contesté ces factures par courriers
adressés à Opéra les 11 février 2000,
22 février 2000 et 23 février 2000.
La société Nestlé considère que
ces factures ne correspondent à aucune contrepartie
réelle.
53. M. Lecart, directeur
des clients nationaux, et M. Joly, directeur denseignes
alimentaires de la société Perrier-Vittel ont
déclaré, le 28 février 2000 :
« Nous avons abordé les négociations
2000 qui nont pas été finalisées
à ce jour. Nous avons reçu, au titre de lannée 2000,
plusieurs factures Opéra (...) sous forme dacomptes
provisionnels sur la base des accords 1999 (...). Opéra
négocie pour Cora, Casino et tous leurs affiliés.
En ce qui concerne les affiliés, il sagit juste
dun accord cadre, les contreparties sont ensuite négociées
enseigne par enseigne. »
La société Perrier-Vittel
a reçu 44 factures dacomptes établies
le 31 janvier 2000 et le 16 février 2000
pour un montant global TTC de 13 158 962,70 F.
Ces factures sont libellées, notamment « budget
publi promo, linéaire supplémentaire, lancement
de nouveaux pro, extension, media cosmos, coopération
commerciale ». Plusieurs factures dacomptes
portent la mention manuscrite : « 1er acompte 2000 ».
Les accords passés entre Perrier-Vittel
et Locéda représentaient 212 943 383 F
en 1999 et ceux passés avec Casino, 528 136 190 F,
soit 741 079 573,00 F pour lensemble
des enseignes relevant de la compétence dOpéra.
Le montant global des factures dacompte demandé
pour le 1er trimestre 2000
représente donc 0,51 % du chiffre daffaires
global de 1999, soit un total de 2,05 % sur lannée,
proche des 2 % exigés par Opéra au
titre de sa « reconnaissance ».
54. MM. Crabot et Bregy,
de la société Triodis, ont déclaré :
« Le premier rendez-vous au titre des négociations
2000 a eu lieu le 7 janvier 2000 (...). (Lors
de ces entretiens), nous avons trouvé un accord pour
les spiritueux et les effervescents qui na pas été
validé par écrit par Opéra. Nous avons
reçu un certain nombre de factures dacomptes
dOpéra en date du 5 et du 21 février concernant
le budget publi-promo, en continuité de ce qui se passait
chez Casino en 1999 mais pas chez Cora. Nous souhaitons revoir
Opéra au sujet de ces factures car je souhaiterais
savoir à quoi elles correspondent et je souhaiterais
modifier la construction de laccord 2000. »
Le montant global demandé
à Triodis par Opéra est de 1 932 815,20 F TTC.
Les factures sont libellées « 504 budget
publi-promo » ou « 505 budget
publi-promo » ; à lexception
dune facture, chaque montant figure sur deux factures
différentes.
55. Laccord commercial
passé pour lannée 2000 entre les sociétés
Opéra et Cédilac prévoit : « Les
demandes dacomptes émises à compter du
1er janvier 2000 jusquà
la fin de la période de négociation des conditions
commerciales 2000 le sont dans le cadre de la prorogation
des accords antérieurs, selon les termes des accords
1999. En effet, le contrat de référencement
1999 prévoyait la prorogation automatique de lensemble
des contrats 1999, pour couvrir la période des négociations
de lannée suivante. Le cadre contractuel existant
pour Casino sapplique pour le groupe Cora (...). »
Opéra a adressé à
Cédilac, le 26 janvier 2000, 46 factures
dun montant global de 8 293 041 F TTC,
puis 46 factures, en février, dun montant
global de 8 243 841 F TTC, et 62 factures,
en mars, dun montant global de 8 662 981,50 F TTC.
Ces factures sont libellées : « 504 budget
publi-promo TG », « 505 budget
PP animation », « 506 budget publi-promo
tracts », « 510 MEA Reno-ouverture »,
« 512 média cosmos », « 513 high
co », « 531 coopération
services », « 544 budget pp stop
rayon », « 503 diffusion gamme »,
« 520 preco merchandising ».
56. Par trois lettres datées
du 14 avril 2000, Opéra a réclamé
à Sodiaal International Fromageries Riches Monts le
règlement des acomptes mentionnés sur des factures
émises le 29 février 2000 pour des
montants de 300 294 F, 148 338 F et 101 304 F,
soit une somme totale de 549 936 F. Les accomptes
concernent des prestations désignées par « 503 coop
gamme diffusion », « 504 publi-promo
prospectus », « 520 centralisation »,
« 522 coop développement ».
57. Opéra a également
transmis à Chupa Chups des factures dacomptes
libellées « 503 coopération
IPC », « 578 BPP trade market »,
« 522 tronc assortiment commun »
émises les 26 janvier 2000, 16 février 2000
et 16 mars 2000, pour un montant global de 244 311,90 F TTC.
Les acomptes ainsi exigés représentent 2 %
du chiffre daffaires annuel réalisé avec
ce fournisseur.
58. Dans un courrier en
date du 28 février 2000 adressé à
la société Bestfoods, Opéra affirme :
« Malgré notre précédent
courrier, nous navons pas enregistré le règlement
des demandes dacompte pour le mois de janvier 2000 (...).
A défaut vos créanciers, nos mandants les groupes
Casino et Cora ne pourront que procéder à leur
compensation et facturer des intérêts au taux
légal pour retard de paiement. » Par
lettre du 7 mars 2000, Bestfoods conteste devoir
payer ces acomptes et soutient que : « Ces
demandes dacomptes sont basées sur les achats
de prestations effectuées en 1999 auprès de
la société Casino, hors Médias Cosmos.
Toutefois, elles se réfèrent à des contrats
2000 qui nexistent pas. Nous sommes toujours en négociation
et nous navons pas finalisé les achats de prestations
2000. Bien entendu, nous ne sommes pas opposés à
une prorogation des achats de services effectués en
1999 auprès de la société Casino, mais
cette question na pas été évoquée.
En effet, la prorogation ne peut senvisager quau
cas par cas en fonction des prestations considérées
et de leur réalisation à venir sur lannée
2000. De plus, ces demandes font état déchéances
à dates (31 janvier et 16 février
2000). Là encore, nous navons défini aucun
échéancier. Enfin, un paiement de prestation
de service par acompte ne peut senvisager quen
fonction de chacune des prestations achetées. Par courrier
du 28 février 2000, vous nous relancez sur
le paiement de ces demandes en envisageant de demander à
votre mandant de procéder à une compensation.
Nous attirons votre attention sur le fait quune telle
compensation serait totalement illégale (...). »
Un courrier identique a été adressé pour
les factures dacomptes émises au bénéfice
du groupe Cora.
La société Bestfoods
a, notamment, reçu une facture no F00020CEAF
établie le 31 mars 2000 par Casino France
dun montant de 417 669,16 F TTC pour
des prestations réalisées en 1999 et qui sont
libellées « Nouvelle Calédonie »
et « La Réunion ». Or,
les relations commerciales de Bestfoods et Casino excluent
ces deux départements où les conditions commerciales
sont négociées directement par les agents locaux
de Besfoods.
Les déréférencements
de produits
59. M.
Guengant, directeur de clientèle de la société
Bonduelle, a déclaré : « Avec
la création dOpéra, la relation commerciale
se complique avec deux demandes supplémentaires :
1. Alignement des conditions
avec rétroactivité au 1er janvier
1999, sans contreparties (alignement des conditions de Cora
sur Casino soit un écart de 13,30 %).
2. Demande de reconnaissance
Opéra : 3 % du CA total.
En réponse à ces demandes,
nous avons adressé un courrier à Locéda
en date du 23 juillet 1999 (...). Nous avons constaté
au mois de juillet 1999 larrêt de commandes de
18 références chez Cora (...). Ce constat
ainsi que lobligation de maintenir la relation commerciale
et notre chiffre daffaire avec les deux opérateurs,
nous a conduits à faire des propositions (...). »
Le 27 septembre 1999, la
société Bonduelle a accepté lalignement
des conditions commerciales consenties « à
compter du 1 juillet 1999 auquel sajoutent
988 kF réglé comme suit :
1 contrat global 1999 avec
3 échéances :
300 kF au 1er décembre 1999 ;
300 kF au 30 juin 2000 ;
388 kF au 15 décembre 2000 »,
et a versé 300 kF au titre doptimisation
des gammes, pour permettre le « retour des 19
références stoppées en juin au 1er octobre 1999 »,
et le « retour des 3 références
stoppées en mars au 1er octobre 1999 »,
ainsi que le « référencement
de lépinard haché crème 750 grs
dans tous les HM SM et SM à compter du 1er octobre 1999 ».
60. La société
Luissier Bordeau Chesnel a reçu « en
octobre 1999, un courrier recommandé dOpéra
daté du 13 octobre 1999, dans lequel ils
nous informent que 10 de nos références ne font
plus partie de leur assortiment. Aux termes de ce courrier,
ils ne gardaient que deux références sur lensemble
de notre gamme. Ayant une activité significative avec
Casino, nous avons essayé de trouver un accord et avons
adressé un fax le 12 novembre 1999, lun
à Cora, lautre à Casino. Notre proposition
porte sur 2000 et concerne un budget de coopération
commerciale de 1 %. Nous navons pas eu de réponse
écrite ».
61. MM Facon,
Zeller et Lauden, de la société Lesieur, considèrent
que le « refus de souscrire aux demandes dOpéra
pour 1999 et 2000 a eu pour conséquences :
1. Des menaces de déréférencement
en 1999 non suivies deffet (cf. courrier du 10 septembre 1999)
mais appliquées en 2000 (cf. fax 3 janvier 2000).
Nous avons demandé à Casino et à Cora
de nous confirmer lassortiment actuel ce quils
nont jamais fait (courrier du 19 janvier 2000).
2. Pour 2000, un arrêt
des opérations de revente sur les 5 premiers mois de
lannée ».
Une télécopie datée
du 3 janvier 2000, qui émane de la plate-forme
Cora de Ludres, indique que neuf produits Lesieur ont été
déréférencés « suite
à une décision de notre centrale merci de ne
plus me livrer les produits suivants (...) ».
Par lettre du 10 septembre 1999, la société
Lesieur a été informée que le groupe
Casino avait déréférencé deux
produits dhuile dolive, et que lhuile « Giralda
ne sera plus présente quen Géant ».
62. Dans un courrier du
23 mars 2000, adressé par la centrale de
référencement à la société
Bestfoods, il est indiqué : « Suite
à nos différents entretiens au cours desquels
nous nous sommes exprimé nos besoins respectifs concernant
notre collaboration 2000, il savère que nous
ne sommes pas en mesure de trouver un terrain daccord.
En effet, après vous avoir présenté toutes
les possibilités de développement 2000, les
conditions commerciales clairement définies par votre
société savèrent inadaptées.
En conséquence, nous vous informons de notre décision
de mettre fin à notre collaboration à compter
du 1er juillet 2000 (...). »
63. Le représentant
de la société Jeux Ravensburger, qui a refusé
de verser 390 000 F destinés à compenser
la différence entre les conditions commerciales accordées
à Cora et celles accordées à Casino,
a déclaré : « Un nouveau
rendez-vous a eu lieu en novembre. Au préalable, Opéra
nous avait envoyé un courrier précisant les
référencements permanents pour 2000, référencements
en forte diminution (pas de référencement pour
les puzzles dans les petites structures de magasins, ce qui
fait partie de nos gammes importantes en permanent, notamment
sur cette période). Nous sommes leader sur le marché
du puzzle. Ce courrier a été suivi deffet
dans la confirmation du référencement 2000.
Cette absence de référencement des puzzles a
eu un impact sur le chiffre daffaires mensuel en janvier
2000 (...). Lors du rendez-vous du 2 novembre 1999,
nous avons pris un accord verbal de principe : nous avons
proposé à Opéra 220 000 F au
lieu des 390 000 F demandés en contrepartie
dun catalogue en puzzle en janvier chez Cora et dun
retour possible de notre gamme puzzle en référencement
permanent. Opéra était daccord sur le
principe mais ils ont indiqué après coup que
le délai était trop court pour réactualiser
auprès des magasins le dossier de référencement
permanent (dossier métier). Nous navons
pas payé les 220 000 F. En revanche, nous
avons obtenu avec Cora la parution dans son catalogue Bonne
année les prix la mise en avant de puzzle adulte.
Ce catalogue est paru du 6 au 21 janvier. Nous avons
signé pour ce catalogue un contrat de coopération
commerciale uniquement avec Cora le 20 décembre 1999
pour 75 000 FHT (...). Le préalable aux négociations
2000 était le paiement des 220 000 F demandés,
nous avons validé cette demande au 22 décembre 1999
(...). »
64. Enfin, le procès-verbal
du conseil dadministration dOpéra du 1er septembre 1999
précise : « suite à la saisine
par le ministre du conseil de la concurrence et des enquêtes
de la DGCCRF, nécessité :
Formation Opéra à assurer ;
Suivi des enquêtes à
faire ;
Action presse (suite à larticle
du Monde) ? »
II. - Les
griefs notifiés
65. Sur
la base des constatations rapportées ci-dessus, il
a été fait grief à la société
Opéra, à la société Casino Guichard-Perrachon,
et à la société Cora, de sêtre
délibérément concertées pour obtenir
des fournisseurs des avantages supplémentaires en labsence
de contreparties réelles, objectives, et préalablement
convenues, et pour imposer : - la renégociation
et lharmonisation des conditions commerciales consenties
aux sociétés Casino Guichard-Perrachon et Cora,
voire leurs affiliés, sur les conditions estimées
les plus favorables, indépendamment des raisons objectives
justifiant ces différences ; et exiger une compensation
rétroactive voire antérieure à la création
de la société Opéra des différences
commerciales consenties aux sociétés Cora dune
part, et Casino-Guichard-Perrachon, dautre part ; - le versement dune
participation au titre de la reconnaissance de la société
Opéra ou massification des achats, pratique dite de
« la corbeille de la mariée »,
forfaitairement fixée à 2 % pour lensemble
des fournisseurs ; - en confirmant toutes
les exigences formulées par Opéra, et en les
introduisant comme préalable aux négociations
relatives à lan 2000 ; en adressant aux
fournisseurs, notamment au cours du 1er
trimestre 2000 des factures dacompte relatives
à des prestations de coopération commerciale
virtuelles dont les montants incluent les exigences de la
société Opéra, relatives notamment à
la compensation des différences commerciales et à
« la corbeille de la mariée » ; - ces exigences ont
été au surplus assorties de menaces de déréférencements
en cas de refus, le cas échéant suivies deffet,
puisque des fournisseurs ayant refusé de satisfaire
les exigences dOpéra ont fait lobjet de
déréférencements partiels et boycottages.
III. - Discussion
Sans
quil soit besoin de se prononcer sur les moyens de procédure
présentés par les sociétés mises
en cause.
66. Aux termes de larticle
L. 464-6 du code de commerce : « Lorsquaucune
pratique de nature à porter atteinte à la concurrence
sur le marché nest établie, le Conseil
de la concurrence peut décider, après que lauteur
de la saisine et le commissaire du Gouvernement ont été
mis à même de consulter le dossier et de faire
valoir leurs observations, quil ny a pas lieu
de poursuivre la procédure. »
67. Le libre choix
de lacheteur est un des ressorts majeurs de la concurrence
et le principal moyen par lequel le commerce stimule, chez
les producteurs, la productivité, lamélioration
de la qualité des produits et des services ainsi que
labaissement des prix. En vertu de ce principe, la négociation
des accords de référencement et des conditions
commerciales dont ils sont assortis, ou au contraire le refus
de référencer, comme le déréférencement,
sont licites et ne constituent pas en eux-mêmes des
pratiques anticoncurrentielles même sil apparaît
que les offres des fournisseurs sont conformes aux usages.
Les accords de référencement sont fréquemment
lobjet de renégociations conduisant à
une modification des accords initiaux. En effet, pour un distributeur,
lintérêt économique dun accord
avec un fournisseur dépend pour partie des conditions
que ce même fournisseur aura accordées à
dautres distributeurs, conditions qui ne sont pas connues
avec précision lors de la négociation de laccord
mais qui peuvent se révéler en cours dapplication
de celui-ci. De même, pour un fournisseur, lintérêt
dun accord de référencement dépend
pour partie de la stratégie commerciale des distributeurs
regroupés dans la centrale et des conditions octroyées
par les autres fournisseurs, éléments qui, eux
aussi, ne sont pas connus lors la négociation initiale.
La renégociation de ces accords nest donc pas
en soi illicite, dès lors quelle nest pas
assortie de la mise en uvre de pratiques anticoncurrentielles.
68. Même si les accords
et pratiques susmentionnés aboutissent à des
transferts de ressources des producteurs vers les distributeurs
dont la puissance dachat sest accrue par le biais
de la création dune centrale commune de référencement,
ces accords et pratiques ne peuvent être qualifiés
au regard des dispositions du livre IV du code de commerce
que dans le cas où il est établi quils
ont pour objet ou peuvent avoir pour effet de limiter la concurrence
soit sur les marchés des produits en cause, en portant
atteinte à la présence des producteurs sur ces
marchés, soit entre le distributeur qui a bénéficié
de ces transferts et dautres distributeurs. Ainsi, le
fait, pour les distributeurs qui ont créé la
centrale Opéra, de faire savoir à lensemble
des fournisseurs quils entendent, en raison de laccroissement
de la puissance dachat générée
par cette création, renégocier les conditions
dachat consenties, ou conditionner la poursuite des
relations commerciales déjà nouées à
lacceptation de conditions supplémentaires, sans
contreparties réelles, par rapport à celles
qui avaient déjà été convenues
et acceptées, pourrait être visé par les
dispositions de larticle L. 420-1 du code de commerce,
si ces demandes avaient pour objet ou pour effet de restreindre
le jeu de la concurrence sur un marché. Une telle pratique
pourrait également apparaître comme prohibée
par les dispositions de larticle L. 420-2 du code
de commerce, si elle émanait dune entreprise
détenant une position dominante ou tenant dans sa dépendance
les fournisseurs considérés et était
susceptible daffecter le fonctionnement ou la structure
de la concurrence sur un marché.
Sur
lexistence dune position dominante et dun
état de dépendance économique :
69. Les marchés
susceptibles dêtre affectés par les pratiques
dénoncées ci-dessus sont, dune part, les
marchés locaux de vente au détail de biens de
consommation courante, et, dautre part, les marchés
nationaux de lapprovisionnement de ces mêmes biens.
Sur le marché national de la distribution au détail
de produits de consommation courante, les parts de marché
des sociétés mères étaient, en
juillet 2000, de 9,7 % pour Casino, et de 6 %
pour Cora. Au plan local, les groupes Cora et Casino ne sont,
le plus généralement, pas implantés dans
les mêmes secteurs géographiques et ne sont en
situation dominante dans aucune zone de chalandise.
70. La part de marché
détenue par Opéra sur les différents
groupes de produits variait de 11 % pour les produits
de charcuterie à 14,1 % pour les produits dhygiène/beauté.
Par comparaison avec les parts de marché détenues
par les principaux concurrents, la part de marché dOpéra
sur le marché de lapprovisionnement en biens
de consommation courante était limitée. La société
Casino fait valoir que selon les lignes directrices de la
Commission européenne sur lapplicabilité
de larticle 81 du traité CE aux accords
de coopération horizontale, « dans la
plupart des cas, il est improbable quun tel pouvoir
de marché existe si les parties à laccord
détiennent une part cumulée inférieure
à 15 % tant sur le marché des achats que
sur ceux des ventes ».
71. Il apparaît,
dans ces conditions, quaucune des sociétés
mises en cause ne peut être considérée
comme détenant une position dominante sur lun
des marchés affectés par lopération.
72. La centrale de référencement
et ses mandants opposent, par ailleurs, que les fournisseurs
entendus lors de lenquête ne sont pas en situation
de dépendance économique à leur égard,
compte tenu de la taille des sociétés concernées
et de la notoriété des marques quelles
commercialisent, incontournables pour Opéra. Aucun
élément au dossier ne permet, en effet, de considérer
quun ou plusieurs des fournisseurs cités ci-dessus
seraient en état de dépendance économique
vis-à-vis dOpéra.
Sur
les demandes présentées au titre de lalignement
sur les conditions les plus favorables et au titre de la « massification
des achats », ainsi que sur leur reconduction en
2000, éventuellement au moyen de factures dacompte :
73. Il résulte
des déclarations de vingt-sept fournisseurs, quà
loccasion de sa création, Opéra a renégocié
les contrats commerciaux conclus pour lannée
1999. Vingt-et-un de ces fournisseurs affirment que les représentants
de la centrale, le cas échéant, accompagnés
dacheteurs des sociétés Cora et/ou Casino,
leur ont demandé une compensation financière
rétroactive, au 1er janvier 1999,
au motif que lun des distributeurs bénéficiait
de conditions dachat plus favorables que lautre.
Deux fournisseurs déclarent quaucune demande
na été formulée puisque les conditions
dachat des deux groupes étaient déjà
identiques. Dix-neuf fournisseurs ont indiqué quune
participation financière leur avait été
demandée au titre de la « reconnaissance »
dOpéra ou « massification des achats ».
Parmi eux, quinze affirment que la demande formulée
représentait 2 % du chiffre daffaires réalisé.
Sept fournisseurs ont déclaré que les exigences
dOpéra avaient été confirmées,
voire introduites comme préalable aux négociations
de lan 2000 et que les factures dacompte
quils ont reçues, au début de lannée
2000, en tenaient compte.
74. Si certaines de ces
demandes initiales, eu égard à leur caractère
forfaitaire ou rétroactif, ne peuvent être considérées
comme étant accompagnées de contreparties précises,
en termes de réduction des coûts de transaction,
de progression des ventes ou de services visant à la
promotion des produits, il résulte cependant de la
plupart des déclarations que ces demandes ont fait
lobjet de négociations, portant en particulier
sur la nature précise des contreparties. Ainsi, les
sociétés Kraft Jacob Suchard et Triodis ont
obtenu une extension de la gamme de produits distribués
(cf. § 23 et 27 ci-dessus). La société
Nestlé déclare quà la suite de
plusieurs rendez-vous, un accord a été trouvé
(cf. § 21 ci-dessus). La société
Barilla France a trouvé un accord, le 13 juillet 1999,
concernant la revalorisation de laccord Locéda,
en contrepartie dune troisième opération
de revente nationale chez Cora (cf. § 28 ci-dessus).
Après négociation, la société
Herta est parvenue à un accord, le 14 septembre 1999
(cf. § 29 ci-dessus). La société
Chupa Chups France a accepté une augmentation en contrepartie
dun élargissement de la gamme et de mise en avant
(cf. § 30 ci-dessus). La société
Reckitt et Colman a, au cours dune réunion tenue
le 18 novembre 1999, fait des propositions sur le
budget et les contreparties à laquelle sajoutait
lacceptation de trois opérations spéciales
rémunérées à 0,5 % du chiffre
daffaires, propositions acceptées par Opéra
(cf. § 32 ci-dessus). La société
DIM déclare quelle a cherché à
trouver une position acceptable pour les deux parties, « cest-à-dire
de réelles contreparties supplémentaires justifiant
une amélioration de nos conditions de coopération
commerciale » (cf. § 36 ci-dessus).
Après une première réponse négative,
des discussions et la négociation de nouvelles contreparties,
la société LOréal a accepté
le principe dune compensation (cf. § 37
ci-dessus). La société Sony a accepté
la demande qui lui était faite en contrepartie dun
« accroissement de chiffre daffaires au
cumul des deux enseignes » (cf. § 38
ci-dessus).
75. Par ailleurs, plusieurs
fournisseurs font état de négociations toujours
en cours à la date de leur audition par la DGCCRF (Kimberly
Clark, § 34 ; Pennel Industries, § 33 ;
Lesieur, § 44 ; Bonduelle, § 46 ;
Cogesal Miko, § 45).
76. En ce qui concerne
les factures dacompte adressées à sept
fournisseurs au début de lannée 2000,
les sociétés Casino, Cora et Opéra font
valoir quen labsence de négociations finalisées
pour lan 2000 il sagissait dune simple reconduite
des accords passés en 1999. Elles ajoutent quà
lépoque des faits ces pratiques étaient
courantes dans la profession. La société Casino
fait valoir que ces demandes permettent aux fournisseurs détaler
dans le temps des prestations commerciales récurrentes,
les acomptes étant modulés en fonction des prestations
réalisées et réajustés lors de
la conclusion dun nouveau contrat, les acomptes déjà
payés pouvant faire lobjet dun avoir. En
tout état de cause, aucune des sociétés
ayant reçu ces factures dacompte, pour des montants
non négociés, na déclaré
les avoir réglées.
77. Seules deux sociétés
déclarent avoir accepté des majorations sans
contrepartie. La société Frémaux déclare
ainsi : « Finalement, nous avons proposé
0,7 % du CA global sans contrepartie en acceptant de
la payer seulement si Opéra nous le réclamait
par écrit fin octobre, soit 195 000 F. »
La société Ravensburger affirme également :
« La demande a été réexprimée
dans une nouvelle problématique des négociations
2000. Nous avons maintenu notre position (de) départ.
Cette demande ne faisait lobjet daucune contrepartie.
Le préalable aux négociations 2000 était
le paiement des 220 000 F demandés, nous
avons validé cette demande le 22 décembre 1999. »
78. A supposer que ces
négociations et leurs résultats sécartent
dun comportement commercial normal, ce qui nest
pas clairement établi par les éléments
du dossier, et indépendamment de leur éventuelle
qualification au regard des dispositions de larticle
L. 442-6 du code de commerce dont lapplication
échappe à la compétence du Conseil de
la concurrence, lobtention de compensations financières
sans contreparties réelles ne revêt pas, en lespèces,
un caractère de généralité suffisant
pour pouvoir être considérée comme ayant
eu pour objet ou pour effet de limiter, restreindre ou fausser
le jeu de la concurrence sur un marché, et comme étant
prohibée par les dispositions de larticle L. 420-1
du code de commerce.
Sur
les déréférencements :
79. Cinq fournisseurs
ont constaté la réduction de la gamme de leurs
produits référencés chez Opéra,
après avoir refusé les demandes qui leur avaient
été adressées (Bonduelle, § 59 ;
Bordeau Chesnel, § 60 ; Lesieur, § 61 ;
Bestfoods, § 62 ; Ravensburger, § 63).
La société Bonduelle déclare que :
« (...) Nous avons constaté au mois de
juillet 1999 larrêt de commandes de 18 références
chez Cora (...). Ce constat ainsi que lobligation de
maintenir la relation commerciale et notre chiffre daffaire
avec les deux opérateurs, nous a conduits à
faire des propositions (...). » Le 27 septembre 1999,
la société Bonduelle a accepté lalignement
les conditions commerciales consenties « à
compter du 1er juillet 1999
auquel sajoutent 988 KF réglé comme
suit :
1 contrat global 1999 avec 3 échéances ;
300 kF au 1er décembre
1999 ;
300 kF au 30 juin 2000 ;
388 kF au 15 décembre
2000 »,
et a versé 300 kF au titre doptimisation
des gammes, pour permettre le « retour des 19
références stoppées en juin au 1er octobre
1999 », et le « retour des 3 références
stoppées en mars au 1er octobre
1999 », ainsi que le « référencement
de lépinard haché crème 750 g
dans tous les HM SM et SM à compter du 1er octobre
1999 ».
80. Casino précise,
à cet égard, que les marques du groupe Bonduelle,
soit Bonduelle et Cassegrain, bénéficient dune
forte notoriété et que ce groupe se présentait,
dans son rapport annuel pour 1999, comme « le
premier conserveur de légumes en Europe ».
Au total, le chiffre daffaires réalisé
par Bonduelle avec Casino et Cora sest élevé
à 3,9 % de son chiffre daffaires global.
Sagissant de la société Lesieur, Opéra
constate que, depuis le rachat dAstra, Lesieur est le
principal fournisseur dhuile des groupes Cora et Casino
et constitue le seul intervenant national sur le marché.
En ce qui concerne Ravensburger, Casino fait valoir que ce
fournisseur détient une position très forte
sur le marché des jeux éducatifs, notamment
depuis lacquisition des jeux Nathan, en 1999, et réalise
moins de 10 % de son chiffre daffaires avec Opéra.
81. Par ailleurs, les sociétés
Opéra, Casino et Cora soutiennent que les déréférencements
en cause ne sont pas abusifs et sont limités à
des réassortiments de gamme. Elles font également
valoir que le chiffre daffaires de la société
Bonduelle a augmenté de 6 % en 2000. De même,
en ce qui concerne la société Luissier Bordeau
Chesnel, la société Casino observe que, malgré
la crise générée par la découverte
de Listeria dans certaines charcuteries industrielles,
le chiffre daffaires de cette société
a fortement augmenté au cours du premier semestre
2001, et Opéra soutient que le déréférencement
de 10 produits qui avait été annoncé
na pas eu lieu. Selon Opéra, les produits de
la société Lesieur ont fait lobjet dun
réassortiment mais le cur dassortiment
en produits Lesieur na jamais été touché.
Enfin, sagissant de la lettre adressée le 23 mars 2000
par la société Casino à la société
Bestfoods pour linformer dun déréférencement,
la société Opéra produit une lettre du
23 septembre 2002 de la société Bestfoods
attestant des bonnes relations avec ce distributeur et de
la croissance significative du chiffre daffaires réalisé
avec lui, et la société Casino affirme quil
ny a pas eu de rupture des relations commerciales avec
ce fournisseur dont le chiffre daffaires réalisé
avec Opéra a augmenté de 4 % en lan
2000.
82. Il ressort ainsi des
éléments du dossier que les déréférencements
qui auraient été mis en uvre en tant que
moyens de pression dans le cadre des négociations dénoncées
nont concerné que quelques fournisseurs, détenteurs
de marques de forte notoriété, et pour un nombre
limité de références. Par ailleurs, il
nest nullement démontré quils ont
porté atteinte à la capacité daccès
des fournisseurs aux consommateurs. Ils ne sont donc pas susceptibles
davoir eu pour objet, ou pu avoir pour effet, de restreindre
le jeu de la concurrence sur lun des marchés
concernés et échappent, dès lors, à
lapplication de larticle L. 420-1 du code
de commerce.
Sur
la saisine de la commission des pratiques commerciales :
83. Larticle
L. 440-1 du code de commerce dispose : « Une
commission dexamen des pratiques commerciales est créée
(...). La commission a pour mission de donner des avis ou
formuler des recommandations sur les questions, les documents
commerciaux ou publicitaires, y compris les factures et contrats
couverts par un secret industriel et commercial, et les pratiques
concernant les relations commerciales entre producteurs, fournisseurs
et revendeurs qui lui sont soumis (...). La commission est
saisie par le ministre chargé de léconomie,
le ministre chargé du secteur concerné, le président
du Conseil de la concurrence (....). »
84. Les pratiques décrites
ci-dessus, constatées à loccasion de la
création dune centrale de référencement
commune par deux groupes de distribution, et qui ne tombent
pas sous le coup dune qualification de pratiques anticoncurrentielles,
peuvent relever de la compétence de la commission,
tant en ce qui concerne leur conformité à dautres
branches du droit quen tant quillustration de
lévolution des pratiques commerciales que cette
commission a pour mission dobserver. Il apparaît,
en conséquence, au conseil que sa présidente
pourrait envisager lopportunité de saisir la
commission dexamen des pratiques commerciales du présent
dossier.
Décision :
Article unique. - Il
nest pas établi que les sociétés
Casino-Guichard-Perrachon, Cora et Opéra ont enfreint
les dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2
du code de commerce.
Délibéré, sur
le rapport oral de Mme Nguyen-Nied, par Mme Hagelsteen,
présidente, Mme Pasturel, vice-présidente,
M. Nasse, vice-président, Mme Renard-Payen,
MM. Bidaud et Flichy, membres.
Le secrétaire de séance,
Thierry Poncelet
|
La présidente,
Marie-Dominique Hagelsteen
|
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