Avis de la Commission de sécurité des consommateurs en date du 2 avril 2003 relatif à la sécurité des sucettes de puériculture

NOR :  ECOC0300154V

    La Commission de la sécurité des Consommateurs,
    Vu le code de la consommation, notamment ses articles L. 224-1, L. 224-4, R. 224-4 et R. 224-7 à R. 224-12 ;
    Vu les requêtes no 02-056 et no 02-071 ;
    Considérant que :

I.  -  les requêtes

    La Commission a été saisie de deux requêtes mettant en cause la sécurité de certaines sucettes de puériculture :
    1.  La Confédération syndicale des familles (CSF) a saisi la Commission le 29 avril 2002 de l’accident dont a été victime, le 21 mars 2002, une fillette alors âgée de 4 mois. Celle-ci a coincé dans sa bouche une sucette de puériculture « Spécial nuit », conçue pour nourrisson de 0 à 6 mois, de marque Bébé Confort. Fort heureusement, les points d’aération de la collerette lui ont permis de respirer et l’enfant est sorti indemne de l’accident.
    Alerté par la CSF, le distributeur du produit en cause, la société Auchan a pris la décision de le retirer des rayons de ses 118 magasins ainsi que, par précaution, les autres sucettes « nuit » d’autres marques (Tigex, Nuk). La société Hyper U, autre distributeur, a pris la même mesure. La société Ampafrance, éditeur de la marque Bébé Confort, estimant que le produit est conforme à la norme française NF S 54-003 de mars 1985 fixant les exigences de sécurité mécaniques et physiques des sucettes, n’a pas jugé opportun de le retirer du marché. Un rapport d’essais daté du 4 avril 2002 attestant de la conformité du produit à la norme française a été transmis à la Commission par le directeur de la société Bébé & Co, filiale de la société Ampafrance. La sucette mise en cause a été prélevée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en vue d’une expertise par un laboratoire agréé. Les résultats des essais ont montré que cet article était conforme à la norme française.
    Selon la CSF, cet accident, qui aurait pu avoir des conséquences tragiques, pose le problème de l’inadaptation du dispositif normatif existant ou en projet : « Si la norme prévoit en son point 6.6 un essai sur l’introduction de la sucette en position verticale à travers une plaque découpée, elle ne prévoit rien en cas d’introduction de la collerette de biais. Cela nous semble constituer une insuffisance de la norme qui explique l’incident survenu au bébé de notre adhérente. Nous aimerions que ce point puisse être examiné par la Commission de la sécurité des consommateurs afin de mieux connaître les risques encourus et d’envisager les aménagements de cette norme, d’autant qu’une norme européenne sur les sucettes semble être en préparation. » (cf. note 1) .
    Cette requête a été enregistrée sous le no 02-056.
    2. Une deuxième requête concerne le défaut de fixation de la téterelle sur une sucette 2e âge de marque Bebisol. Comme l’indique une mention sur l’emballage : « La téterelle de cette sucette est en pur silicone, ce qui la rend douce et extrêmement souple ». La mère d’un nourrisson de 21 mois met en cause cette extrême souplesse : « Cette sucette a toujours été la même depuis plus d’un an. Il y a deux mois, j’ai dû changer sa sucette car elle l’avait trouée. J’ai racheté cette sucette toujours dans le même point de vente qui est une pharmacie. A peine un mois après j’ai remarqué que cette sucette s’était déchirée au niveau du point d’attache (entre la tétine silicone et le support d’attache sur le plastique). J’ai l’ai changé immédiatement puis, 15 jours à peine après la première sucette, j’ai constaté la même chose. Je ne pense pas que cela soit normal. De plus elle peut s’étouffer en avalant le bout de silicone qui, une fois déchiré, se détache très facilement (j’ai tiré dessus et tout le bout en silicone s’est déchiré). »
    A la demande de la Commission la société Pharmygiène-Scat, distributeur du produit, a transmis deux rapports des laboratoires Wolff datés des 24 décembre 1999 et 4 janvier 2001 attestant de la conformité du produit à la norme NF S 54-003.
    Cette requête a été enregistrée sous le no 02-071.

II.  -  les auditions de la commission

    La Commission a entendu les représentants des deux sociétés concernées :

    M. A., directeur de la société Bébé and Co

    Mme T., directeur marketing de la société Pharmygiène-Scat.

1.  Présentation de Bébé and Co

    La société Bébé and Co a été créée en 1992 pour le compte d’Ampafrance, dont elle est une filiale à 99 %, spécialisée dans la petite puériculture. Elle réalise un chiffre d’affaires de 30,5 M Euro, ce qui représente 18 % du chiffre d’affaires d’Ampafrance (cf. note 2) .
    60 % des ventes se font en France, 40 % à l’export (essentiellement en Europe, Espagne, Belgique, Portugal, mais aussi dans le sud-est asiatique).
    Les sucettes de la société Ampafrance sont commercialisées sous la marque Bébé Confort. Depuis 1993, elles sont également commercialisées en exclusivité sous les marques des distributeurs (MDD) : pour Auchan sous la marque In Extenso, pour Intermarché sous la marque Pommette, pour Leclerc sous la marque Repère (en 2003), pour Carrefour sous la marque Tex et pour Cora sous la marque Cora. Les plus importants distributeurs sont Auchan et Intermarché, qui représentent plus de 3 M Euro de chiffre d’affaires chacun. Le prix de vente public de ces sucettes est de 3 Euro les deux (les sucettes sont vendues par blisters de 2, pour des raisons de coût du packaging) (cf. note 3) .

2.  Présentation de Pharmygiène-Scat

    La société Pharmygième-Scat est un laboratoire pharmaceutique qui commercialise différents produits destinés aux pharmacies et para-pharmacies (environ 15 000 points de vente en France) :
      sous la marque Bébisol : sucettes de puériculture, biberons, tétines, anneaux de dentition, accessoires de toilette, de bains et de repas de l’enfant, ampoules de jus de fruits, produits d’hygiène ;
      sous la marque Protical : produits de diététique minceur ;
      sous la marque Solens : produits de confiserie pharmaceutique ;
      sous la marque Sanodiane : coutellerie ;
      sous la marque Innoxa : maquillage et cosmétiques ;
      sous la marque Bergasol : produits solaires ;
      sous la marque Parapoux : produits antipoux ;
    Les sucettes sont les articles de marque Bébisol les plus vendus. Il existe une trentaine de références : « 1er âge », de 0 à 6 mois, « 2e âge », de 6 mois à 36 mois, sachant qu’il est déconseillé aux enfants d’utiliser des sucettes au-delà de 36 mois en raison d’éventuelles déformations dentaires. Le modèle le plus vendu est une sucette en silicone incolore. Environ 70 % des références Bébisol sont en silicone, 30 % en caoutchouc.

III.  -  Le marché des sucettes et les risques identifiés
    A.  -  Le marché

    Les chiffres ont été communiqués par la société Bébé and Co, filiale d’Ampafrance. Ils sont issus de recoupements car il n’existe pas de statistiques officielles.
    Sur le marché français, il existe 3 réseaux de distribution :
      hypermarchés, supermarchés (60 % du marché) ;
      magasins spécialisés en articles de puériculture (10 % du marché) ;
      pharmacies (30 % du marché).
    Les principaux vendeurs sont :
      pour les hypermarchés :
          Allègre Puériculture (no 1, 65 % du marché avec Tigex - 25 % du marché - et Nuk - 40 % du marché). Allègre a été racheté il y a 8 ans par Nuk (entreprise allemande), qui fait partie du groupe Hutchinson, le premier distributeur mondial de produits en caoutchouc (Spontex, gants Mapa...). Nuk est le no 1 mondial.
          Ampafrance (35 % du marché avec Bébé Confort et les marques des distributeurs)
          Chicco (5 %) ;
      pour les pharmacies :
          Doddie (Johnson & Johnson) : 1,5 million de sucettes vendues par an ;
          Pharmygiène (Bébisol) : 1,5 million également.
      pour les magasins spécialisés :
          Ampafrance (Bébé Confort) ;
          Allègre Puériculture (Nuk) ;
          Remond (surtout pour les tétines de biberons).
    Il se vend environ 5 millions de sucettes par an. Chez Ampafrance, les sucettes représentent 10 % du chiffre d’affaires de Bébé & Co.

B. - Les descriptions des produits

    Les différents types de sucettes :
    Les sucettes sont des articles utilisés pour satisfaire aux besoins non nutritifs de succion des enfants. Elles sont composées de 4 éléments principaux (cf. note 4)  :
      la téterelle : tétine flexible constituant la partie de la sucette qui est conçue pour être mise en bouche ;
      la collerette : structure située en arrière de la téterelle, destinée à réduire le risque d’aspiration de la sucette en entier dans la bouche de l’enfant ;
      le bouchon : dispositif situé dans le talon de la téterelle servant à fixer cette dernière à la collerette ;
      l’anneau ou le bouton : structure adjacente à la collerette ou située sur celle-ci, destinée à faciliter la manipulation de la sucette.

    Il y a 2 types de matières pour les sucettes : le latex et le silicone.
    Le latex :
    Le latex désigne l’émulsion de caoutchouc naturel qui provient de l’Hevea brasiliensis, arbre à caoutchouc. Cet arbre représente 99 % de la production de caoutchouc naturel. Il est recueilli en Malaisie, en Indonésie, au Vietnam ou en Thaïlande. Les sucettes de Bébé & Co sont fabriquées en Allemagne et en Thaïlande.
    A titre d’exemple des « faiblesses » du caoutchouc la société Pharmygiène a dû retirer du marché une série de sucettes Disney qui s’étaient détériorées par suite d’une trop longue exposition sur des étalages pharmaceutiques. Passés environ trois ans dans des conditions d’exposition quasi permanentes à la chaleur ou à la lumière, le caoutchouc vieillit mal. Des instructions ont été données depuis ces incidents par Pharmygiène aux distributeurs pour qu’ils stockent les sucettes à l’abri de la lumière et de la chaleur, recommandation qui vaut aussi pour le consommateur. La Commission pense que l’apposition d’une date de péremption sur ce type de sucette (environ trois ans) serait à envisager.
Le silicone :
    Le silicone est un produit de synthèse. Il est apparu il y a environ une quinzaine d’années. Le silicone utilisé par Bebisol est fabriqué en majeure partie par la société allemande Bayer. Chaque téterelle porte un numéro d’homologation du silicone utilisé. Contrairement au caoutchouc, le silicone ne subit pas de variations dans le temps, ne craquèle pas sous l’effet de la chaleur et de la lumière. Son aspect n’est pas altéré à l’issue d’opérations d’aseptisation.
    Pour la téterelle, qu’il s’agisse des modèles en latex ou en silicone, il existe trois tailles qui correspondent à la longueur de la téterelle, selon l’âge du bébé. Il y a également trois formes de téterelles :
      bout rond (auquel correspond une collerette de forme ronde également, avec anneau) :

      bout anatomique (une partie arrondie et une partie droite, auquel correspond une collerette dont le haut comporte un creux pour le nez et le bas est rond, avec anneau) :

      bout réversible (auquel correspond une collerette dont les deux côtés comportent un creux, sans anneau). Ce modèle sans anneau est conçu pour ne pas gêner l’enfant lorsqu’il dort (protubérance de l’ensemble) et également pour la tenue de la sucette en main sans contact avec la téterelle :

    L’anneau ne sert pas à récupérer la sucette si, malencontreusement, celle-ci est gardée en bouche par l’enfant. L’anneau des deux premiers modèles est fait pour attacher la sucette par une chaînette ou un velcro d’une attache sucette, afin que le bébé puisse retrouver sa sucette. Le modèle réversible sans anneau est appelé spécial nuit, car, quand l’enfant dort, le risque majeur est l’étranglement avec l’attache sucette. En conséquence, pour la nuit, on ne prévoit pas d’attacher la sucette par une attache sucette.
    La collerette est conçue pour que la sucette n’entre pas dans la trachée-artère de l’enfant, pas pour éviter qu’elle entre dans sa bouche.
    L’assemblage des différents composants d’une sucette Bebisol s’effectue par microsoudures et non par collage. Il existe chez Bebisol un prototype de sucette expérimental monobloc mais son lancement n’est pas actuellement à l’ordre du jour.

C.  -  Les risques identifiés

    S’agissant d’ingestion de petits objets, il n’existe pas de statistiques proprement dites, mais les articles de presse et les accidents signalés à la Commission indiquent qu’il faut les prendre en compte et d’identifier le risque d’accident lié à ce produit qui n’est pas négligeable.
    Le risque majeur est le risque d’étouffement, qui peut avoir deux origines (cf. note 5)  :
      la collerette reste bloquée au fond de la gorge de l’enfant, effet traumatisant pour la famille et désagréable pour l’enfant ;
      la téterelle rompue, fragilisée, peut entraîner un vrai danger.
    Un autre risque est celui de l’allergie au latex, pour les sucettes en latex.
    1.  Le blocage de la collerette au fond de l’arrière-gorge de l’enfant :
    Selon la société Bebe and Co, le risque principal n’est pas l’avalement de la sucette mais la désolidarisation de la téterelle. L’essai de traction de 90 newtons (9 kg de traction) prévu dans la norme est suffisant, mais par précaution, Bebe Confort se donne une exigence interne à 120 newtons.
    Pour certains montages des sucettes, s’il s’agit de soudure haute fréquence, il peut être envisagé qu’il se produise une micro-coupure lors de la soudure. La résistance du caoutchouc peut être différente selon le moment où il a été récolté (en janvier, la sève est plus puissante, le caoutchouc est plus dur qu’en octobre, par exemple, où la sève est plus souple). Ce qui fait qu’un lot peut avoir une souplesse différente, dans les sucettes prélevées pour partir au laboratoire d’essais. Le colorant utilisé pour la bague de fixation peut également modifier les résultats du test de traction. En effet, avec le blanc, la téterelle se clipse bien. Avec le jaune, il y a une mauvaise rétraction du plastique. C’est pourquoi Bebe and Co n’utilise jamais de bague jaune.
    En outre, le test de conformité doit être fait après vieillissement à l’étuve. Or, aucun professionnel n’est équipé pour le faire, seuls les laboratoires disposent de ces équipements. Bebe & Co dispose d’un laboratoire interne pour faire les tests de traction, mais il les fait sans étuve. Les mises sur le marché s’effectuent donc après l’accord d’un laboratoire agréé.
    Selon Bebe and Co, le risque vraiment majeur n’est pas que l’enfant avale la téterelle, c’est l’étouffement. C’est pourquoi la norme a prévu des trous, dont le diamètre a d’ailleurs évolué dans la nouvelle norme. Le rapporteur ne partage pas ce point de vue, car si la téterelle ou une partie de la téterelle entre dans la trachée-artère de l’enfant, il peut y avoir un risque d’asphyxie.
    Lors de l’incident signalé par Mme I., il y avait, selon elle, un problème de dimension de la collerette, or celle-ci est déterminée par la norme par des dimensions minimales dépendantes des matériaux et de la forme de celle-ci.
    A la suite de l’accident dont a été victime l’enfant de Mme I., la France a demandé que la nouvelle norme en projet soit plus sévère et indique dans les obligations de marquage : « au cas où la sucette resterait coincée dans la bouche, ne pas s’affoler car elle ne peut pas avoir été avalée ». Dans le dernier état du projet, adopté depuis, la rédaction est « ne pas s’affoler car elle ne peut pas être avalée ». Ce qui ne constitue qu’une pétition de principe.
    2.  La rupture de la téterelle : un vrai danger, surtout pour les téterelles en silicone :
    Le vrai danger des sucettes provient de la rupture à la soudure entre la téterelle et la collerette ou d’une déchirure de la téterelle qui, de par sa petite taille, peut provoquer l’étouffement.
    Les normes française et européenne prévoient un essai de traction de 90 newtons. Cette force semble à Mme T., de la société Pharmygiène, amplement suffisante pour garantir la bonne fixité de la téterelle, la force moyenne d’une mère de famille étant de 40 newtons. Toute augmentation de la force n’apporte aucune garantie supplémentaire.
    En revanche, la présence d’un trou dans la téterelle (même une petite entaille) est de nature à fragiliser la fixation de la téterelle. Il suffit parfois de tirer fortement et, le trou aidant, la téterelle se détache de la collerette en son entier puisque la rupture se produit au niveau de la partie supérieure. Le problème est que la présence du trou n’est pas forcément visible et seule une traction de la téterelle permet de l’identifier.
    Même s’il existe des tests de résistance de la téterelle à la morsure aucun test ne pourra empêcher un enfant « qui fait ses dents » de trouer le silicone. Le cas dont la Commission a été saisie est « un cas d’école » parfaitement connu de Mme T. puisqu’elle a reçu de nombreuses requêtes de ce type. Selon elle, il n’existe pas à ce jour de solution technique car il faut que la téterelle conserve une certaine souplesse pour le confort de l’enfant sans quoi l’on créerait des téterelles « en béton », ce qui irait à l’encontre de la fonction même du produit. La Commission se demande néanmoins si une solution technique de substitution au latex et au silicone ne pourrait pas être recherchée après étude sur la résistance du matériau qui compose la téterelle.
    Seule une vigilance parentale permet d’éliminer le risque. En premier lieu il faut que les parents aient conscience qu’une sucette a une durée de vie limitée : trois mois environ. Mme T. est ainsi très étonnée que la mère de l’enfant qui a saisi ait pu confier la même sucette à son enfant pendant un an. En second lieu, et cela même s’il s’agit d’une sucette neuve, les parents ne doivent pas confier de sucette à un enfant qui subit une poussée dentaire sans surveillance de leur part. Une information des parents sur ces règles élémentaires serait souhaitable.
    En ce qui concerne les sucettes Bebisol, Mme T. va ajouter sur l’emballage du produit une mention conseillant aux parents de tirer régulièrement et avec une force raisonnable (cf. note 6)  sur la téterelle pour vérifier qu’elle ne se détache pas en partie ou qu’elle ne se désolidarise pas de la collerette.
    Ceci n’a pas été jugé suffisant par la Commission, qui a, sur ce point, demandé un test au Laboratoire national d’essais (LNE), analysée en partie 6.
    3.  L’allergie au latex, un danger pas toujours facile à identifier :
    S’agissant de sucettes en latex, un risque existe, celui de l’allergie. La Commission l’a déjà évoqué dans son avis du 7 mars 2001 sur les allergies alimentaires. Dans sa partie 5.5, « Combien de temps dure une allergie ? », l’avis évoquait le problème des allergies croisées en indiquant :
    « Certains pollens ont dans leur structure des parties identiques ou ressemblantes à celles de fruits qui ne font pas forcément partie de la même famille botanique. Par exemple :
    [...]
      le latex (issu de l’hévéa) croise surtout avec banane, avocat, châtaigne, kiwi et autres fruits exotiques. »

    Les parents se trouvent donc en face d’une difficulté complexe, car leur enfant peut manifester non seulement une allergie au latex de la téterelle, mais, plus tard, une allergie aux fruits indiqués dans l’avis précité. Une consultation chez un allergologue peut s’avérer indispensable. L’avis du 7 mars 2001 précisait : « Contrairement à une idée reçue, il n’est pas nécessaire d’attendre que les jeunes enfants aient atteint un certain âge pour pratiquer sur eux des tests cutanés fiables. On peut - on doit même - tester les enfants le plus tôt possible dès que les symptômes suspects apparaissent. On teste sans aucun problème les nourrissons dès 3 mois avec des résultats tout aussi fiables que chez le grand enfant - et souvent avec plus d’efficacité que par les dosages sanguins. »

IV.  -  Les avis antérieurs de la Commission

    La Commission s’est déjà penchée à deux reprises sur les problèmes de sécurité des sucettes de puériculture.
    L’avis du 18 mars 1988 :
    En 1988, elle a été saisie du même problème que celui évoqué dans la requête 02-071. Une requérante signalait qu’elle avait constaté que la partie en caoutchouc pouvait se détacher facilement du reste de la sucette en matière plastique, risquant de provoquer l’étouffement de son enfant. Le produit en cause avait été retiré de la vente par le distributeur. A l’initiative de la CSC, des tests effectués par le Laboratoire national d’essais (LNE) sur différentes marques de sucettes avaient révélé des points de non-conformité à la norme sur les sucettes NF S 54-003 de mars 1985. En particulier 99 % des modèles ne résistaient pas aux essais de traction après vieillissement en eau bouillante (le seuil de 90 N prévu par cette norme n’étant pas atteint).
    Dans son avis, la Commission avait préconisé :
      que les exigences essentielles de sécurité auxquelles doivent satisfaire les sucettes de puériculture et qui sont prises en compte par la norme précitée fassent l’objet d’une réglementation permanente ;
      que cette réglementation soit notifiée à la CEE et que les administrations compétentes proposent l’élaboration de textes communautaires sur les articles de puériculture.
    L’avis du 4 février 1998 :
    Cet avis avait été émis à la suite de plusieurs requêtes semblables à la requête 02-056. Des enfants de 5 à 18 mois avaient ingéré des sucettes qui étaient restées bloquées dans leur arrière-gorge.
    Dans son avis, la Commission avait fait les préconisations suivantes :
    «   la conception des sucettes devrait permettre une extraction facile en cas d’ingestion et de blocage dans l’oropharynx. De ce point de vue, un anneau est nécessaire et il doit dépasser de la collerette. Cette exigence devrait être reprise dans le projet de norme européenne ;
      pour éviter l’ingestion des sucettes, la taille des collerettes ainsi que leur forme devraient mieux prendre en compte les différences de taille de la bouche des enfants, en fonction de l’âge. Lorsque ces dimensions seront recensées, la norme européenne pourrait être adaptée afin de déterminer un ou plusieurs gabarits relatifs à la taille des sucettes en fonction de l’âge des enfants (cf. note 7) . [...] ; dès à présent, l’attention des parents et éducateurs devrait être attirée par des marquages sur l’emballage des sucettes :
      indication de l’âge conseillé pour l’utilisation (cf. note 8)  ;
      nettoyage et remplacement fréquent de la sucette (2) ;
      nécessité de laisser libres les trous dans la collerette car ils sont indispensables pour laisser passer l’air en cas d’ingestion (2) ;
      ne pas attacher la sucette avec un lien passé autour du cou de l’enfant (2) ;
      utiliser un attache-sucette prévu à cet effet (pour un usage de jour uniquement). »

V.  -  La réglementation et normalisation applicables
en France
A.  -  La réglementation
Au niveau européen

    La directive 88/373/CEE du 3 mai 1988 relative à la sécurité des jouets :
    Les sucettes de puériculture sont expressément exclues du champ d’application de la directive 88/373/CEE du 3 mai 1988 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la sécurité des jouets (modifiée par la directive 93/68/CEE du 22 juillet 1993), dans son annexe 1.
    La directive 92/59/CE du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits et la directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 :
    Ces directives posent le principe de l’obligation générale de sécurité. Dans leur article 3 (du chapitre II : Obligation générale de sécurité), les directives des 29 juin 1992 et 3 décembre 2001 indiquent que « Les producteurs sont tenus de ne mettre sur le marché que des produits sûrs. »
    La décision de la Commission européenne du 7 décembre 1999 :

    Dans sa décision du 7 décembre 1999 « adoptant des mesures qui interdisent la mise sur le marché de jouets et d’articles de puériculture destinés à être mis en bouche par des enfants de moins de trois ans, fabriqués en PVC souple contenant une ou plusieurs des substances dites di-iso-nony (phtalate[DINP]), di(2-éthylhexyl) phtalate (DEHP), dibutyl phtalate (DBP), di-iso-décyl phtalate (DIDP), di-n-ocryl phtalate (DNOP) et butyl-enzyl phtalate (BBP) », la Commission des Communautés européennes indique, notamment, que « les autorités françaises ont adopté le 5 juillet 1999 une mesure portant suspension de la mise sur le marché de la production, de l’importation et de l’exportation et ordonnant le retrait de certains jouets et articles de puériculture destinés à être mis en bouche par des enfants de moins de trente-six mois, fabriqués en PVC souple contenant du DINP, du DIDP, du DEHP, du DBP, du DNOP et du BBP ; en outre, elles ont informé la Commission, dans le cadre de la directive 98/34/CE d’un projet de mesure portant interdiction de l’utilisation du DINP, du DIDP, du DEHP, du DBP, du DNOP et du BBP dans les jouets et articles de puériculture destinés à être mis en bouche par des enfants de moins de trois ans ». Dans son article 3, cette décision stipule que « les Etats membres interdisent la mise sur le marché des jouets et articles de puériculture visés à l’article 1er (8) ».

Au niveau français

    L’obligation générale de sécurité :
    Comme tous les produits, les sucettes de puériculture sont soumises à l’obligation générale de sécurité posée par l’article L. 221-1 du code de la consommation selon lequel : « Les produits et les services doivent, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes. »
    Le décret no 91-1292 du 20 décembre 1991 relatif à la prévention des risques résultant de l’usage des articles de puériculture :

    Les sucettes de puériculture ne sont pas soumises aux dispositions de ce décret (ceci est spécifié par la circulaire du ministère de l’économie et des finances en date du 29 juillet 1992 relative au champ d’application du décret no 91-1292 du 20 décembre 1991 relatif à la prévention des risques résultant de l’usage des articles de puériculture :
    « II.  -  Les produits exclus :
    A.  -  Produits relevant d’autres réglementations :
      les tétines ;
      les sucettes ;
      les anneaux de dentition. »
    
En effet, les sucettes de puériculture relèvent du décret no 92-631 du 8 juillet 1992 relatif aux matériaux et objets destinés à entrer en contact avec les denrées, produits et boissons pour l’alimentation de l’homme ou des animaux.
    Le décret no 92-631 du 8 juillet 1992 relatif aux matériaux et objets destinés à entrer en contact avec les denrées, produits et boissons pour l’alimentation de l’homme ou des animaux.
    Dans son article 1er, ce décret stipule qu’il « s’applique également aux sucettes destinées aux enfants en bas âge ».
    L’objet essentiel de ce décret est décrit dans son article 3 : « Les matériaux et objets doivent être inertes à l’égard des denrées alimentaires. En particulier, ils ne doivent pas céder à ces denrées, dans les conditions normales ou prévisibles de leur emploi, des constituants dans une quantité susceptible de présenter un danger pour la santé humaine ou animale ou d’entraîner une modification inacceptable de la composition des denrées alimentaires ou une altération de leurs caractères organoleptiques ». Il décrit en outre les procédures de déclaration par les fabricants des composants des produits ainsi que les marquages nécessaires.
    En conclusion, force est de constater que la seule réglementation applicable aux sucettes de puériculture est celle posant l’obligation générale de sécurité, ainsi qu’un décret concernant uniquement leur composition chimique. Les seuls textes décrivant spécifiquement les caractéristiques et les exigences de sécurité des sucettes sont une norme française et un projet de norme européenne qui va bientôt remplacer la norme française.

B.  -  La normalisation

    La norme française NF S 54-003 de mars 1985 s’applique aujourd’hui. Une nouvelle norme européenne, en trois parties, dont le projet définitif date d’avril 2002 et a été adopté par le CEN (Comité français de normalisation) en juillet 2002, est soumise au vote formel des différents Etats membres de l’Union européenne et devrait entrer en vigueur à la fin de l’année 2003 et remplacer la norme française. Il s’agit de la norme :
      pr EN 1400-1 : articles de puériculture. - Sucettes pour nourrissons et jeunes enfants. - Partie 1 : exigences générales et informations relatives au produit ;
      pr EN 1400-2 : articles de puériculture. - Sucettes pour nourrissons. - Partie 2 : exigences mécaniques et essais ;
      pr EN 1400-3 : articles de puériculture. - sucettes pour nourrissons et jeunes enfants. - Partie 3 : exigences chimiques et essais.
    
    Le tableau suivant permet de comparer les principales exigences physiques et mécaniques contenues dans la norme française et dans la norme européenne :

PrEN 1400 : avriL 2002NF S 54-3 : mars 1985
6.1 (-2) Préparation des échantillons...
6.1.2 (-2) Tous les échantillons doivent être immergés dans l’eau bouillante pendant 10 min (une seule fois).
6.1.1 (-2) : Seuls des échantillons directement prélevés chez le fabricant avant leur mise sur le marché doivent être vieillis artificiellement pendant 7 jours à 70 oC.
6.1 Essai d’immersion en eau bouillante.
6.2 Essai de vieillissement artificiel à l’étuve.
Un lot de sucettes est immergé à 10 reprises dans de l’eau bouillante pendant 10 min.
Un autre lot de sucettes doit séjourner 10 jours à 70 oC.
6 (2) Essais.
Un échantillon utilisé pour un essai ne doit pas être utilisé pour un autre essai.
Pas de nombre minimal de sucettes requis pour chaque essai.
6 Essais.
Chaque lot de sucettes doit passer successivement l’ensemble des essais.
Chaque lot doit comporter 12 sucettes.
5.1 (-2) + 6.2.1 (-2) : Résistance au choc.6.3 Résistance au choc
Essai similaire mais suivi d’un essai de traction à 90 N en EN (suivi de l’ensemble des autres essais en NF S)
1.2 (-2) + 6.2.2 (-2) Résistance à la perforation.
La force nécessaire pour percer complètement une face de la téterelle doit être supérieure à 30 N.
 
1.3 (2) + 6.2.3 (-2) Résistance à la déchirure.
La sucette complètement perforée est soumise à un essai de traction à 90 N.
 
1.4 (2) + 6.2.4 (2) Rétention du bouton.
La téterelle étant coupée, compression à 90 N sur le bouton... depuis le côté téterelle
 
1.5 (-2) + 6.2.5 2) Résistance à la morsure.
Mâchoires en EN et NF S de conception différente.
Application des mâchoires entre la collerette et la téterelle.
50 cycles de charge entre 200 N et 400 N.
Essai suivi d’une traction à 90 N.
6.4 Essai de morsure.
Mâchoires en EN et NF S de conception différente.
Application des mâchoires à chaque élément de la sucette (téterelle, collerette, bouton, anneau).
Un cycle de charge à 220 N pendant 10 s.
Essai suivi de l’ensemble des autres essais.
 6.5 Essai de compression.
Compression de la sucette entre 2 plateaux, sous une charge de 100 N pendant 30 s.
1.6 (-2) + 6.2.6 (-2) Résistance à la rotation.
Essai applicable aux sucettes dont un élément de la téterelle peut effectuer une rotation de 360o sous un couple de 1 Nm.
La collerette étant maintenue fixe, on fait tourner le bouton... 250 fois dans un sens, puis 250 fois dans l’autre.
Essai suivi d’un essai de traction à 90 N.
 
1.7 (-2) + 6.2.7 (-2) Intégrité.
Essais de traction à 90 N complémentaires pour les éléments non examinés lors des autres essais.
6.7 Essais de traction.
Essai de traction à 90 N :
de la téterelle parallèlement à l’axe principal ;
de la téterelle perpendiculairement à l’axe principal ;
sur l’anneau perpendiculairement à l’axe principal.
Chaque sucette ne subit qu’un seul type d’essai de traction.
 6.8 Essai sur les particules de remplissage des collerettes.
6 (-1) Emballage de vente.7 marquage.
7 (-1) Informations relatives au produit 
Exigences d’informations plus nombreuses en EN qu’en NF S.

    Les notices d’emploi (en 7.3 du projet de norme européenne) doivent comporter les avertissements suivants :
    « Les avertissements suivants doivent être donnés sous la forme indiquée :
    Pour la sécurité de votre enfant :
    Avertissement.  -  Ne jamais attacher de ruban ou cordon à la sucette, car votre enfant pourrait s’étrangler ;
    Avertissement.  -  Avant chaque utilisation, examiner soigneusement la sucette, en particulier lorsque l’enfant a ses dents. Tirer sur la sucette dans tous les sens. La jeter au moindre signe de détérioration ou de fragilité.
    Les avertissements suivants doivent être donnés, dans la mesure où ils s’appliquent. Ils peuvent être formulés différemment.
    AVERTISSEMENT.  -  Ne jamais exposer la sucette à la lumière solaire directe ou à la chaleur et ne jamais la laisser dans un produit désinfectant (solution microbicide) plus longtemps que la durée recommandée car cela pourrait fragiliser la téterelle.
    AVERTISSEMENT.  -  Maintenir la protection amovible de la téterelle hors de portée des enfants pour éviter tout risque d’étouffement.
    Les instructions suivantes doivent être données sous la forme ci-après ou formulées différemment. D’autres instructions peuvent également être indiquées :
      avant la première utilisation, maintenir la sucette immergée dans l’eau en ébullition pendant 5 minutes, la laisser refroidir, puis presser la téterelle pour faire sortir l’eau qu’elle contient éventuellement. Ceci pour des raisons d’hygiène ;
      nettoyer avant chaque utilisation ;
      ne jamais tremper la téterelle dans des substances sucrées ou dans des médicaments, étant donné le risque de carie dentaire ;
      remplacer la sucette au bout de deux mois d’utilisation pour des raisons de sécurité et d’hygiène ;
      au cas où la sucette resterait coincée dans la bouche de l’enfant, ne pas s’affoler ; elle ne peut avoir été avalée et elle est conçue pour qu’il soit possible de remédier à ce genre d’incident. La retirer de la bouche avec précaution en procédant aussi doucement que possible. »
    
De l’analyse de ces deux normes, il ressort que :
    Le gabarit servant à simuler l’arrière-gorge d’un enfant est quasi identique dans les deux normes. Il s’agit d’une plaque prédécoupée de 43 mm de dimension largement supérieure (de près de 12 mm) au gabarit habituellement utilisé pour la définition des petits éléments pouvant être ingérés dans les jouets et les articles imitant des denrées alimentaires (cylindre tronqué de diamètre égal à 31,7 mm). Les conditions d’essais prévues dans la future norme sont plus exigeantes en terme de sécurité mais laisseront plus de part à la subjectivité de l’opérateur : bords, mouillage de la sucette, gabarit favorisant un éventuel passage grâce à l’utilisation d’une matière plus glissante. En tout état de cause, les tests prévus dans les deux normes ne prévoient pas une introduction de biais de la collerette :
    A.  -  Pour la norme française, en 6.6, « Essai sur la collerette : » :
    6.6.1.  Essai sur la face antérieure :
    Passer la téterelle à travers la plaque découpée [...] en la centrant dans l’ouverture.
    La collerette est orientée par rapport à l’ouverture dans la position la moins favorable.
    Appliquer progressivement (vitesse de déplacement [25 ± 5] mm/min) sur la partie de la téterelle qui ressort de l’autre côté de la plaque, un effort de traction dans la direction de l’axe principal jusqu’à atteindre une force de 10 N. Maintenir l’effort à ce niveau pendant 10 secondes.
    Au cours de cet essai, la sucette ne doit pas pouvoir passer complètement au travers de l’ouverture pratiquée dans la plaque.
    6.6.2.  Essai sur la face postérieure :
    L’essai est effectué comme indiqué en 6.6.1 mais en passant, à la place de la téterelle, la poignée ou l’anneau de la sucette dans l’ouverture. »
    
B.  -  Pour le projet de norme européenne pr EN 1400-1, en 5.2.3.2, « Essai sur la collerette : » :
    « Utiliser un gabarit de vérification en PTFE (cf. note 9) soutenu de manière à rester fixe et horizontal pendant toute la durée de l’essai. Les dimensions et la forme de ce gabarit doivent être celles indiquées sur la figure 12.
    Positionner la sucette humide en plaçant la face antérieure de la collerette contre l’arête arrondie de l’ouverture pratiquée dans le gabarit horizontal de manière à ce que l’axe principal de la sucette passe par le point d’intersection des axes marqués sur le gabarit. Appliquer progressivement une force de traction de (10 ± 0,5) N à la téterelle dans l’axe principal. Appliquer la charge maximale pendant (10 ± 0,5) s (...).
    Sectionner la téterelle et répéter l’essai en inversant la sucette sur le gabarit de vérification. La force est appliquée vers le bas par une tige centrée sur le trou laissé par la téterelle et le long de l’axe principal. Cette tige doit avoir un diamètre un peu plus grand que la taille du trou laissé par la téterelle. »
    
C’est pourquoi la commission a demandé au Laboratoire national d’essais d’effectuer des tests selon le protocole prévu par la norme française, mais « collerette de biais » et à l’envers (ce qui est prévu par les deux normes) sur les différentes sucettes commercialisées sur le marché français.
    Le projet de norme européenne introduit des essais de résistance à la perforation, à la déchirure de la téterelle et de rétention du bouton qui ne sont pas prévus dans la norme française et dont l’intérêt a été identifié lors des auditions des sociétés BEBE & Co et PHARMYGIENE pour répondre au risque d’avalement par un enfant d’une téterelle qui, ayant été déchirée, en devient plus fragile et peut se désolidariser de la collerette. La commission a demandé au Laboratoire national d’essai de faire des essais selon le 5.3 du projet de norme européenne sur un échantillon de sucettes :
    « 5.3.  Résistance à la déchirure :
    La sucette doit être soumise à essai comme décrit en 6.2.3. Lors de l’essai de résistance à la déchirure décrit en 6.2.3.1, la téterelle ne doit ni se casser ni se séparer au cours de l’essai de résistance à la traction. [...]. »
    « 6.2.3.  Essai de résistance à la déchirure :
    6.2.3.1.  Essai de résistance à la déchirure de la téterelle :
    Utiliser une sucette neuve, complète, et placer l’indenteur (cf. note 10) , dont la forme et les dimensions sont indiquées à la figure 8, avec le côté mesurant 3 mm centré au-dessus et à angle droit de l’axe principal de la sucette et à (7,5 ± 0,5) mm de la face de la collerette.
    Appliquer une charge telle que l’indenteur coupe les deux faces de la téterelle et s’enfonce d’environ 1 mm dans la planche à découper.
    A l’issue de ce traitement, soumettre la sucette à un essai de traction en maintenant la collerette dans un dispositif de fixation approprié et en appliquant une force de (90 ± 5) N à la téterelle perpendiculairement à l’axe principal de la sucette selon le 6.2.7.1. La collerette doit être maintenue de sorte que le trou le plus haut réalisé par l’indenteur soit orienté vers le haut, c’est-à-dire qu’il soit soumis à la force de déchirement maximale. »

VI.  -  les résultats des tests et analyse du lne

    La commission a demandé au LNE de faire deux types d’essais sur un échantillon de 10 sucettes représentatives du marché actuel. Les sucettes choisies sont aussi bien en silicone qu’en latex, l’échantillon est le suivant :
      2 sucettes IN EXTENSO achetées chez AUCHAN, en latex, pour enfant de 0 à 6 mois, dont une physiologique et une à bout rond ;
      1 sucette BEBE & Co achetée chez ENVOG/S.C. GALEC, à bout anatomique, pour enfant de 3 mois et plus, en silicone ;
      1 sucette AVENT achetée chez NATALYS, pour enfant de 6 mois et plus en silicone ;
      1 sucette ARTISANA S.P.A. achetée chez CASINO, à bout anatomique premier âge, pour enfant dès la naissance ;
      2 sucettes AMPAFRANCE SA achetées chez BEBECONFORT, pour enfant de 0 à 6 mois, dont une à bout anatomique et une réversible ;
      1 sucette du groupe Hutchinson achetée chez Tigex, sucette physiologique pour enfant de 6 mois et plus ;
      1 sucette In Extenso achetée chez Auchan, en silicone, physiologique, pour enfant de 0 à 6 mois ;
      1 sucette Nuk achetée chez Auchan, en latex, physiologique, pour enfant de 0 à 6 mois.
    Les deux essais réalisés sont les suivants :
      pour l’introduction de la collerette, un essai selon le mode opératoire décrit ci-dessus au 6.6 de la norme française avec, en plus, un essai d’introduction de la collerette de biais ;
      pour les tests de résistance à la déchirure, un essai selon le mode opératoire décrit ci-dessus au 5.3 du projet de norme européenne.
    1.  Le premier essai :
    Ayant suivi scrupuleusement le protocole prévu par la norme NF S 54-003, le LNE a constaté que les sucettes Auchan « latex physiologiques » et Bébé Confort « bout anatomique » ne satisfont pas aux exigences de la norme car elles sont entrées face postérieure dans le gabarit d’essai. Ce résultat est logique, car il s’agit des mêmes sucettes, en fait : l’une sous la marque Bébé Confort, et l’autre sous la marque distributeur d’Auchan. Informé de ces résultats, le directeur de la société Bébé & Co a transmis à la Commission copie de rapports d’essais de ces sucettes établis en 2001 et 2002 par les laboratoires Pourquery Analyses industrielles conformément à la méthode d’essais prévue par la norme NF S 54-003. A l’inverse du LNE, aucune anomalie liée à l’introduction de ces sucettes en face postérieure n’a été relevée. En accord avec la Commission, la société Bébé & Co a fait procéder en mars 2003 à un nouvel examen des sucettes par un troisième laboratoire, le laboratoire SGS qui, à l’instar des laboratoires Pourquery, n’a pas décelé d’anomalie.
    2.  Le deuxième essai :
    Après avoir respecté scrupuleusement le protocole prévu par le projet de norme européenne, en particulier le processus de vieillissement accéléré à l’étuve, le LNE a constaté que toutes les sucettes passaient les tests de conformité à l’essai 5.3 du prEN 1400.
    La Commission ne peut que s’étonner d’un tel résultat. En effet, sur les sucettes en silicone (cf. note 11) , un essai sommaire manuel fait apparaître que, lorsque la téterelle n’est trouée que d’un côté, il suffit d’effectuer une légère traction manuelle pour que la téterelle se déchire, alors que si elle est percée au centre, comme prévu dans le projet de norme européenne, la même traction ne suffit pas à déchirer la téterelle. C’est pourquoi la Commission ne peut que s’interroger sur la pertinence des essais de déchirure et de perforation du projet de norme européenne, en particulier sur le fait que le protocole prévoit que l’indenteur perce la téterelle au centre et de part en part,

                    Emet l’avis suivant :
    Considérant que la Commission a déjà été, par deux fois, saisie des risques liés à l’usage des sucettes de puériculture ;
    Considérant que l’une des saisines démontre que les risques d’étouffement demeurent, et que, même si les trous dans la collerette évitent que ce risque soit mortel, ceci ne doit pas être un prétexte à ce que la vigilance soit relâchée dans la conception des sucettes de puériculture ;
    Considérant que, sur ce point, le Laboratoire national d’essais a constaté que les sucettes de marque Auchan « latex physiologiques » et Bébé Confort « bout anatomique » ne satisfont pas aux exigences de la norme française NF 54-003 de mars 1985 dès lors que les collerettes de ces sucettes ont pu être introduites dans le gabarit représentant l’arrière-gorge d’un enfant « faces postérieures » ;
    Considérant que, même si deux autres laboratoires n’ont constaté aucune anomalie sur ce point par rapport aux dispositions de la norme, la CSC estime surprenantes de telles divergences d’interprétation, qui risquent de s’accentuer compte tenu des conditions d’essai d’introduction de la collerette plus contraignantes dans la future norme européenne ;
    Considérant que la norme française actuellement applicable ainsi que le projet de norme européenne ne prévoient pas de passage de la collerette de biais dans le gabarit, alors qu’il s’agit d’un risque raisonnablement prévisible ;
    Considérant que les risques d’inhalation de tout ou partie de la téterelle d’une sucette de puériculture est un risque mortel ;
    Considérant que les tests de perforation et déchirure des sucettes prévus dans la future norme sont conçus de telle sorte qu’ils ne tiennent pas compte de l’usage raisonnablement prévisible d’un enfant perforant la téterelle de la sucette sur le côté de celle-ci, et non en son milieu comme le prévoit la norme ;
    Considérant que, dans cette hypothèse, une simple manipulation manuelle, notamment des téterelles en silicone, montrent que celles-ci se déchirent très facilement en deux ;
    Considérant que la sucette de marque Bébisol, objet d’une des requêtes, était utilisée depuis plus d’un an, alors que, de l’avis des professionnels, ces produits ne sont pas prévus pour un usage aussi prolongé ;
    Considérant que, comme tous les produits en latex, certaines sucettes de puériculture sont susceptibles de provoquer des allergies et, partant, qu’il convient d’en informer les parents pour qu’ils soient vigilants ;
    Considérant qu’un stockage trop prolongé des produits en rayon en altère les qualités essentielles ;
    Après avoir entendu M. A., dirigeant de la société Bébé & Co,

    La Commission recommande :
    1.  Aux pouvoirs publics :
      de réunir les représentants des laboratoires français en charge des tests de sécurité des sucettes de puériculture afin d’harmoniser les conditions de réalisation des tests d’introduction des collerettes de sucettes dans les gabarits d’essai normalisés ;
      d’insister auprès du Comité européen de normalisation sur la nécessité d’engager une réflexion sur l’intérêt de prendre en compte :
          un test de passage de la collerette de biais dans le gabarit ;
          la réalisation de tests de perforation et de déchirure de la téterelle sur l’un des côtés de celle-ci et non au milieu, pour vérifier que la téterelle ne se déchire pas à la suite d’une traction ;
    2.  Aux fabricants et aux distributeurs :
      de rechercher si un matériau plus solide ne pourrait pas avantageusement remplacer le silicone et le latex ;
      d’apposer une date de péremption sur l’emballage des sucettes en latex ;
      d’informer les parents déjà propriétaires de la nécessité de vérifier et de surveiller ces conditions de stockage ainsi que les problèmes éventuels d’allergie en cas d’achat de sucettes en latex.
    3.  Aux parents :
      de surveiller attentivement l’état des sucettes pendant la période de poussée dentaire de leur enfant. La CSC rappelle que la succion prolongée des sucettes, comme du pouce, peut provoquer une déformation importante de la dentition et donc la nécessité de traitements orthodontiques ultérieurs des utilisateurs de sucettes. La CSC recommande donc, si possible, de ne pas imposer cet objet à un enfant qui n’en manifesterait pas la nécessité ;
      de veiller à vérifier que leur enfant n’est pas allergique au latex. En particulier, de consulter un médecin s’il y a des antécédents familiaux, et au moindre signe suspect :
      de lire attentivement la notice, notamment en ce qui concerne la nécessité de :
          veiller à ne pas donner la même sucette à leur enfant pendant plus de deux mois et de vérifier périodiquement leur hygiène, mais néanmoins de ne pas mettre la sucette en contact avec des produits lessiviels agressifs et en particulier en machine à laver ;
          de ne pas transmettre une sucette déjà utilisée à un autre enfant.

    Adopté au cours de la séance du 2 avril 2003 sur le rapport de M. Georges Garcia-Bardidia, assisté de Mme Odile Finkelstein et de M. Patrick Mesnard, conseillers techniques de la Commission, conformément à l’article R. 224-4 du code de la consommation.

NOTE (S) :

(1) La norme a été adoptée par le CEN (Comité européenne de normalisation) en juillet 2002.

(2) Le président d’Ampafrance est également le Président de Bébé and Co.

(3) Le prix d’une sucette vendue en pharmacie est une fois et demi plus cher qu’en grande surface.

(4) Ces définitions sont celles du projet de norme européenne analysé plus bas en partie 5.

(5) Les risques de la sucette de puériculture ne proviennent pas de sa composition chimique. A titre d’exemple, la teneur en nitrosamines est réglementée même si, dans le cadre des discussions en cours dans le cadre de la directive européenne, certaines voix s’élèvent pour exiger le maintien d’un certain niveau de taux de nitrosamines, tout abaissement de ce taux pouvant fragiliser la solidité de la fixation de la téterelle en ce qui concerne le caoutchouc. Comme tous les produits en latex, la sucette peut provoquer chez le nourrisson des allergies au niveau de la peau, des yeux ou des voies respiratoires, ce qui implique une vigilance des parents.

(6) Dans les précautions d’emploi, la norme NF S 54-003 prévoit « quelques tractions » pour les sucettes démontables afin de vérifier un montage correct. On peut s’interroger sur les inconvénients d’une préconisation si générale, qui entraînerait une accélération de la fragilisation et une force raisonnable peut être variable en fonction de l’utilisateur.

(7) Cet avis a été suivi d’effet sur ce point.

(8) L’article 1er reprend la liste des phtalates cités dans le titre, qui sont interdits à une dose supérieure à 0,1 % dans les jouets ou articles de puériculture destinés à être mis en bouche par des enfants de moins de trois ans.

(9) PTFE : plastique à base de fluor qui se caractérise surtout par une résistance élevée à la température ainsi qu’une stabilité thermique entre - 200 oC et + 260 oC. En outre, il dispose d’une haute constance chimique, d’une bonne fonction isolante et antiadhérente.

(10) La figure 8 indique les dimensions de l’indenteur : cet appareil reproduit une dent. Il a une forme en pointe et sert à la fois aux tests de déchirure et de perforation.

(11) Les sucettes en latex offrent sur ce point une bonne résistance.

© Copyright Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Emploi - DGCCRF - 16/07/2003