Décision no 2000-D-47 du Conseil de la concurrence en
date du 22 novembre 2000 relative aux pratiques mises en uvre par EDF et sa
filiale Citélum sur le marché de léclairage public
NOR : ECOC0000448S
Le Conseil de la concurrence (formation
plénière),
Vu la lettre du 4 mai 1995, enregistrée sous le
numéro F 760, par laquelle le ministre de léconomie a saisi le Conseil
de la concurrence des pratiques de létablissement public Electricité de France et
de sa filiale Citélum dans le domaine de léclairage public ;
Vu la lettre du 4 avril 1997, enregistrée sous le
numéro F 956, par laquelle le ministre délégué aux finances et au commerce
extérieur a saisi le Conseil de la concurrence du comportement de la société Citélum
lors de lobtention dun marché déclairage public lancé par la ville de
Geugnon, et où il fait référence à la saisine précédente du 4 mai 1995 et
précise que cette nouvelle saisine complète les informations déjà portées à la
connaissance du Conseil ;
Vu le livre IV du code de commerce et le décret no 86-1309
du 29 décembre 1986 modifié pris pour lapplication de lordonnance
du 1er décembre 1986 ;
Vu les observations présentées par le commissaire du
Gouvernement, par EDF et par les sociétés Citélum et Architecture Lumière
Conseil ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Le rapporteur, le rapporteur général, le commissaire du
Gouvernement et les représentants dEDF et de la société Citélum entendus, au
cours de la séance du 12 septembre 2000 ;
Adopte la décision fondée sur les constatations (I) et sur les
motifs (II) ci-après exposés :
I. - CONSTATATIONS
A. - Les marchés et les entreprises
La loi no 46-628 du
8 avril 1946 sur la nationalisation de lélectricité et du gaz a confié
à Electricité de France (EDF), établissement public national à caractère industriel
et commercial, la production, le transport, la distribution, limportation et
lexportation délectricité. En 1993, EDF a produit 423,8 milliards de
kWh, soit 96,6 % de lélectricité produite en France. En 1998, EDF a assuré
94 % de la production nationale délectricité, 100 % du transport et
95 % de la distribution.
Le réseau de distribution appartient aux communes et syndicats de
communes ; EDF en est le concessionnaire dans 95 % des cas, le solde étant
géré par des régies municipales. Pour EDF, le service local de distribution est assumé
par 102 centres spécialisés, les centres EDF-GDF Services (ou EGS) qui
dépendent dune direction commune à EDF et GDF, appelée EDF-GDF Services. En 1993,
EDF disposait dune clientèle de 28,9 millions dabonnés, dont
3,6 millions de professionnels. Son chiffre daffaires a atteint
183,6 milliards de francs. En 1997, il sest élevé à 186,5 milliards de
francs.
Ainsi, en amont du marché de léclairage public, et à
lépoque des faits, EDF est en situation de quasi-monopole pour la production et la
distribution délectricité et détient le monopole du transport de
lélectricité.
Léclairage public consiste, dune part, dans
léclairage des voies et des lieux publics pour des raisons de sécurité,
dautre part, dans lillumination de lieux, de monuments, de bâtiments ou de
tout autre élément public ou privé du patrimoine culturel. Ces illuminations peuvent
être permanentes, saisonnières ou encore liées à des manifestations particulières.
Les réseaux déclairage public sont constitués des luminaires et de leurs supports
(candélabres, consoles) et de circuits dalimentation (conducteurs aériens, câbles
souterrains, accessoires) qui peuvent soit être indépendants du réseau de distribution
publique délectricité, soit faire partie de ce réseau.
Les prestations déclairage public sont classées par la
profession en quatre catégories qui, dans les marchés passés avec les collectivités
publiques, sont répertoriées dans quatre postes distincts dénommés de G 1 à
G 4. Le poste G 1 concerne la fourniture de lénergie et la prise en
charge de la gestion du contrat de fourniture délectricité pour les installations
déclairage. Le poste G 2 concerne la maintenance préventive et
correctrice des installations déclairage, à savoir la surveillance et la
détection des défauts de fonctionnement des foyers et des détériorations du matériel
sy rattachant, des travaux de dépannage et dentretien curatif tels que les
changements des lampes et des appareillages électriques défectueux ou hors dusage
et, dune manière générale, la répartition de tous défauts de fonctionnement,
des travaux dentretien préventif tels que le remplacement systématique des lampes,
le nettoyage des luminaires, la vérification du bon état électrique et mécanique des
matériels. En général, la convention prévoit que le prestataire doit être en mesure
dintervenir 24 heures sur 24.
Les prestations regroupées dans les postes G 1 et
G 2 constituent ce que la profession appelle lentretien maintenance ; la
durée de ces contrats est généralement de trois à cinq ans, soit que le contrat
prévoie précisément une telle durée, soit que le contrat initial prévoie une durée
annuelle, avec possibilité de reconduction, avec une durée maximale de trois à cinq
ans.
Au-delà de lentretien-maintenance, la collectivité
publique peut envisager des investissements damélioration afin daméliorer
son réseau déclairage public. Elle peut ainsi faire procéder à de grosses
réparations, regroupées dans le poste G 3. Elle peut aussi faire procéder à
la rénovation ou à lextension de son réseau, ces prestations relevant du
poste G 4. De telles prestations impliquent des travaux importants et des
investissements onéreux, et les conventions qui regroupent ainsi les postes G 3 à
G 4 sont appelées « marchés de gestion déléguée ». Compte tenu de
leur importance, la durée de ces marchés est plus longue, de cinq à quinze ans, parfois
davantage.
Lessentiel de la demande émane des communes mais, pour les
illuminations, il peut sagir de départements ou de lEtat. La commune peut
soit gérer elle-même, en régie, son éclairage public, soit en confier la gestion par
contrat à une entreprise. En entretien-maintenance, de très nombreux marchés sont de
faible valeur et sont donc négociés directement par les communes avec le prestataire de
leur choix, après consultation informelle de plusieurs prestataires. En revanche, les
collectivités plus importantes mettent en uvre la procédure de lappel
doffres lorsque le montant du marché limpose. En gestion déléguée,
limportance des prestations et la durée des engagements impliquent le recours à
lappel doffres.
Loffre émane aussi bien de PME, en général spécialisées
en électricité, que de sociétés plus importantes, soit indépendantes, soit
appartenant à de grands groupes dont lactivité est orientée vers les services aux
collectivités locales. A lépoque des faits, les offreurs les plus importants
étaient le groupe EDF, la Générale des eaux, dont lactivité déclairage
public était répartie entre des filiales régionales, la Lyonnaise des eaux,
représentée par sa filiale ELYO, le groupe Bouygues, avec ETDE, et la société
Spie-Trindel.
EDF était présente sur le marché de léclairage public
depuis sa création soit parce que les réseaux de léclairage public étant à
lorigine communs avec ceux de la distribution publique délectricité, la
convention régissant la distribution délectricité incluait lentretien et la
maintenance de léclairage public, soit parce que, dans les petites communes, la
faible valeur de la gestion de léclairage public nintéressait pas les
entreprises du secteur privé.
Jusquen 1992, EDF confiait son activité relative à
léclairage public aux centres EDF-GDF Services. Sur les 102 centres existants,
35 navaient aucune activité déclairage public tandis que 14 centres,
ayant chacun un chiffre daffaires supérieur à un million de francs, réalisaient
96 % de lactivité totale dEDF dans ce secteur. A la fin de 1992, EDF a
créé en plus une filiale spécialisée en éclairage public à qui les contrats des
centres EDF-GDF Services ont été progressivement transférés. Du fait de ces transferts
progressifs, lactivité des centres ne représentait plus, à la fin de 1997,
quun chiffre daffaires de 9 940 KF, soit 3,3 % du chiffre
daffaires réalisé en 1993. En outre, une partie des contrats détenus
antérieurement par les centres a été perdue, soit parce que des communes ont changé de
prestataire, soit parce quelles ont procédé à une mise en concurrence pour
lattribution du nouveau contrat. La société Citélum a communiqué létat de
ces pertes au 1er mars 1998, date à laquelle EDF, sur un total de
546 contrats en 1992, en détenait encore 419 119 de ces contrats arrivant à
échéance nont pas fait lobjet de propositions de transfert direct à
Citélum, auprès de la commune. Pour les 300 contrats restant, un transfert à
Citélum a été proposé aux communes mais celles-ci ont refusé et décidé de remettre
ces contrats en jeu par un appel à la concurrence.
La société Citélum a été créée aux fins de constituer la
filiale spécialisée du groupe EDF dans les domaines de léclairage public, de la
signalisation lumineuse tricolore et des illuminations. Elle est une filiale à 100 %
de la société holding Synergie Développement et Services (SDS), elle-même filiale à
100 % dEDF. Son directeur général a été recruté en juin 1993 et, en
janvier 1994, ont été embauchés des salariés extérieurs au groupe. Jusquà
cette date, le suivi commercial et matériel des contrats avait été assumé par les
centres EDF-GDF Services. En septembre 1994, Citélum employait 29 salariés. En
1997, son effectif atteignait 161 personnes. Entre 1994 et 1997, lactivité de
Citélum passait de 3 à 29 contrats en gestion complète, de 16 à 156 en
entretien-maintenance, son chiffre daffaires passant de 3 036 KF à
105 042 KF, du fait notamment du transfert des contrats antérieurement gérés
par les centres EDF.
Le groupe EDF est également présent sur le marché de
léclairage public au sein du GIE Eurec constitué avec la société ELYO et
Citélum dont la répartition du capital est de 50 parts pour Citélum, 45 parts
pour ELYO et 5 parts pour EDF. Lactivité dEurec est limitée à Paris et
Argenteuil pour la gestion de léclairage ; accessoirement le GIE réalise
ponctuellement des illuminations pour diverses communes proches de Paris ou encore des
prestations dingénierie en éclairage public. Eurec a réalisé un chiffre
daffaires de 169 151 KF en 1994 et de 127 700 KF en 1997. Au
cours de cette même période, lactivité consolidée déclairage public du
groupe EDF était en recul, passant de 299 466 KF à 242 682 KF entre
1993 et 1997, du fait principalement de la perte de contrats non transférés des centres
EDF-GDF à Citélum, perte qui nétait compensée que pour partie par les nouveaux
contrats obtenus par Citélum.
Sil nexiste pas de statistiques précises relatives au
marché de léclairage public, des estimations ont été établies par la profession
ainsi que par un organisme dépendant du ministère de lintérieur, le Cetur. Selon
ces estimations, le marché global hors énergie sélèverait à environ
6 milliards de francs si lon inclut les régies municipales, et à
3 milliards de francs hors régies. Sur la base de ces chiffres, la part de marché
du groupe EDF en éclairage public serait passée de 5 % en 1993 à 4 % en 1997
régies incluses, de 10 à 8 % hors régies. EDF se situerait ainsi en deuxième
position derrière le groupe Spie qui, selon la prise en compte ou non des régies,
détiendrait 7 % ou 14 % du marché. Le cumul des parts de marché des cinq
grands groupes présents sur ce secteur atteint seulement 15 % (régies incluses) et
30 % hors régies et, sur six ans, les parts de marché ont peu évolué. Au surplus,
la part du groupe EDF est susceptible de se réduire encore puisque les 419 contrats
dont étaient encore détenteurs les centres en 1998 nont pas été transférés à
Citélum et devront faire lobjet dune mise en concurrence pour leur
attribution.
B. - Les pratiques constatées
1. La mise à disposition de moyens par EDF au profit de Citélum
Des documents commerciaux détenus par la
société Citélum exposent les conditions de ses relations avec les centres EDF-GDF
Services, conditions qui ont évolué dune étroite participation de ces centres
vers une séparation formalisée dans le courant de lannée 1994.
Le document intitulé « Plate-forme Marketing Eclairage
public » (courrier EDF du 20 mai 1998 adressé au rapporteur), joint à
une circulaire du 20 juillet 1993, détermine les objectifs dEDF dans le
domaine de léclairage public et la stratégie à mettre en uvre. Ainsi la
rubrique relative à la stratégie dEDF signale quEDF vise à
« (...) renforcer son activité principale de distributeur
délectricité » et « amorcer des développements dans des
activités nouvelles. Ces développements ont pour premier objectif de consolider les
relations dEDF avec ses clients, notamment les collectivités locales. » Il
est, en outre, précisé que « les objectifs sont avant tout dintervenir
sur ce marché comme partenaire choisi par la commune, même si la fourniture de service
ne représente que quelques pour cent du chiffre daffaires, déviter la
conclusion de contrats globaux avec un autre opérateur qui assurerait sur une longue
période la totalité des prestations de fourniture dénergie, dentretien et
de travaux. ». A la rubrique offre commerciale, il est souligné que lune
des forces dEDF consiste dans sa « notoriété et réputation. (...)
Limage institutionnelle dont nous bénéficions largement repose sur notre éthique
de service public, nos compétences techniques reconnues. ». Des tableaux de
présentation des cibles en éclairage public soulignent encore, parmi les facteurs
favorables à EDF auprès des communes, son image et ses « ...compétences
disponibles à proximité. ». La rubrique « Relations des SA avec les
Centres » définit la répartition des rôles qui induit une forte implication des
centres auprès de la filiale. Ainsi : « Les centres prennent en charge le
démarchage et le suivi commercial de la clientèle. Les SA sont titulaires des contrats
signés avec les clients. (...) Elles sappuient pour les tâches dingénierie
sur des centres possédant un pôle de compétence. (...) Lexécution des contrats
est confiée aux centres, qui sont prestataires et/ou délégataires de la SA (...) Afin
de garantir au niveau opérationnel la cohérence entre les actions de la SA et les
stratégies des centres vis-à-vis des collectivités locales, toute offre de la SA (cas
ou les centres nont pas de délégation) devra obtenir lagrément du centre
concerné. (...) La SA et le centre auront à se mettre daccord sur les éléments
clés de leur coopération », notamment le niveau de prix de loffre et le
partage des risques et des marges.
La circulaire du 20 juillet 1993 (courrier EDF du
20 mai 1998 adressé au rapporteur), accompagnant ce document, note que la SA a
été constituée fin 1992 sous le nom de Citélum et quelle est opérationnelle
depuis mi-1993, et elle précise que laction des centres et de Citélum doit se
concrétiser dans le cadre de la « Plate-forme Marketing Eclairage public ».
Un document intitulé « point règles de vie no 2 »
du 2 juillet 1993 (procès-verbal de la société Citélum du
29 août 1994), diffusé auprès des centres et de Citélum, fait état des
premiers outils qui faciliteront la commercialisation de loffre
dexploitation-maintenance par les centres. Une nouvelle note datée du
29 novembre 1993 relative au « guide marketing » (procès-verbal de
la société Citélum du 29 août 1994), reprise dans le « point règles
de vie no 9 », souligne que « Le développement de Citélum
repose sur la parfaite synergie de ses structures avec les centres EDF-GDF Services. Cet
appui et cette démarche conjointe permettront dassurer la cohérence des choix des
centres et des entités Citélum, et la cohésion des équipes qui devront les mettre en
uvre ».
Une note dEDF du 28 décembre 1993 dite
GEM 154 relative au « Développement de léclairage public »
(procès-verbal de la société Citélum du 29 août 1994) permet de relever de
nouveau que la démarche dEDF a pour objectif, au travers de léclairage
public, de fidéliser les communes pour la concession de la distribution
délectricité : « Lengagement renouvelé du groupe EDF dans
léclairage public est dabord une illustration de notre volonté
dapprofondissement de loffre autour de lusage de lélectricité
pour léclairage : il a pour objectif de pérenniser avec des contrats de
longue durée la relation contractuelle avec la collectivité cliente pour la fourniture
délectricité dans cet usage en offrant un service meilleur que celui dun
autre opérateur. Cette offre dun service dans le champ concurrentiel enrichit aussi
nos liens avec la collectivité concédante et contribue ainsi à sa fidélité au contrat
de concession de distribution délectricité. »
Aux rubriques « Les intervenants et les moyens » et
« Rôles et relations des acteurs », il est clairement rappelé que les
centres « (...) contribuent à la commercialisation des offres de services et
participent à la production du service ; suivant la complexité des
produits - services offerts, ils assurent ou participent à leur gestion. Ils
assurent la relation avec les villes clientes. Le centre en mesure de sengager dans
lactivité fera valider par Citélum son programme dactions et définira avec
cette société ses objectifs et, suivant la nature des cibles et des services proposés,
le mode daction choisi. »
Cette étroite collaboration est de nouveau affirmée dans un
message EDF du 15 février 1994 envoyé à chacun des centres : « ... pour
notre crédibilité, je vous demande instamment de vérifier que laction commerciale
éventuelle sur votre centre est conforme aux principes de la GEM 154 du
28 novembre 1993 : toutes les offres de service doivent être remises sous
le contrôle de Citélum et de ses responsables régionaux. Dans le cas où des offres au
nom dEDF, déjà remises, devraient être prochainement dépouillées par une
collectivité prospectée, nous vous prions de donner les informations correspondantes à
Citélum. » (Courrier EDF, direction des activités nouvelles, du
7 septembre 1994.)
Le « Point Règles de vie no 29 »,
intitulé « Traitement des affaires » (procès-verbal de la société Citélum
du 29 août 1994), élaboré par Citélum et diffusé dans les centres, daté du
2 mai 1994, précise que le centre assume la détection commerciale,
lastreinte et le dépannage en sous-traitance ainsi que la gestion et le pilotage du
contrat, tandis que Citélum assure la commercialisation des offres et la direction des
contrats et, si les conditions économiques le permettent, la gestion et le pilotage.
Entendu le 12 septembre 1994, M. Hautier, directeur
de la région Sud-Est de Citélum, déclarait : « Léclairage public
fait partie des services proposés par le groupe EDF aux collectivités. Depuis le
3 mars, nous ne savons pas ce qui nous sera autorisé ou interdit. Actuellement, nous
sommes en attente, mais nous répondons à la demande. Commercialement, nous ne faisons
plus de prospection... Depuis les instructions de la GEM 154 du
28 décembre 1993, toutes les activités éclairage public et illuminations
doivent passer par Citélum. Les agents membres des centres EDF décrivent aux
collectivités les services, parmi lesquels léclairage public ; si cette
collectivité est intéressée, laffaire est confiée à Citélum. Il existe une
règle écrite selon laquelle les centres assurent la relation avec les villes clientes,
cest-à-dire que les contacts entre Citélum et les collectivités se font en
présence des centres. Par exemple pour lappel doffres de Trèbes, nous avons
remis une offre le 20 septembre 1993, certains renseignements complémentaires
demandés lors de lappel à candidature ont été fournis par le centre Vallée
dAude, Citélum nétant pas encore en fonction. »
Une note dEDF du 19 septembre 1994 (procès-verbal
de M. Oulès du 23 novembre 1994), destinée aux directeurs des centres,
précise que, désormais, les activités du champ concurrentiel sont conduites par des
filiales avec leurs moyens matériels, humains et commerciaux propres, que les centres
EDF-GDF Services ne doivent pas assurer leur action commerciale et que les prestations
effectuées par des centres pour les filiales doivent être facturées à un prix
reflétant la réalité des coûts.
Par note du 12 mai 1995 (courrier EDF du
20 mai 1998), le directeur général dEDF adresse à ces mêmes directeurs
copie des engagements pris auprès des ministres de tutelle, dans le cadre des règles
définies par le Conseil de la concurrence dans son avis du 10 mai 1994 et par
le Conseil dEtat dans un avis du 7 juillet 1994. Cette note est
accompagnée dun document daté du 13 avril 1995, intitulé :
« Dispositions relatives aux activités complémentaires en France
dElectricité de France en marché concurrentiel » qui prévoit que chaque
filiale aura son personnel propre entièrement rémunéré par elle-même, ses moyens
mobiliers et immobiliers propres, le recours, par exception, aux moyens et aux
infrastructures des centres EDF-GDF Services devant se faire en toute transparence et dans
des conditions non discriminatoires, que limage dEDF ne sera pas mise en
avant, que les informations détenues par EDF dans lexercice de ses missions,
lorsquelles concernent les clients et leurs installations, ne peuvent être
divulguées aux filiales à des fins de démarchage sur les marchés concurrentiels, sauf
à garantir laccès à ces informations à tous les acteurs économiques, que les
agents dEDF-GDF Services ne seront plus associés, de quelque manière que ce soit,
à lactivité commerciale des filiales.
Le 18 mars 1998, le directeur général de Citélum
déclarait : « ... Dès avril 1994, le débat sur la
diversification étant déjà largement entamé, EDF en a tenu compte et a commencé à
désengager largement les centres, de façon à ce que Citélum soit seule impliquée sur
ce marché. Toutefois, les centres ont pu rester présents, mais en transparence, pour des
prestations limitées, au moyen de contrats de sous-traitance, susceptibles
dailleurs dêtre proposés à dautres intervenants que Citélum.
Aujourdhui, cest encore le cas. »
Pour sa part, le directeur dEDF-GDF Services a
déclaré : « ... En ce qui concerne le désengagement des centres en
éclairage public, le transfert des contrats ou marchés détenus par les centres a été
effectué vers Citélum, dès lors que la collectivité contractante ne sy opposait
pas... Ces transferts ont pu se réaliser en 1995-1996 pour lessentiel. Actuellement
lactivité des centres en ce domaine se limite à des sous-traitances susceptibles
dêtre consenties tant à Citélum quà tout autre opérateur qui le
souhaiterait. Les centres ne font plus de prospection commerciale en ce domaine. »
2. Le marché déclairage de la ville de Tourcoing
Le 28 juin 1991, la ville de Tourcoing a
conclu une convention dentretien de léclairage public avec le centre EDF-GDF
Services Lille Métropole. Cette convention stipule que : « Dans le cadre de
lobtention par EDF de la concession de distribution publique délectricité de
la ville de Tourcoing, les prestations de la présente convention seront exécutées
moyennant une redevance annuelle de maintenance dun montant forfaitaire (...) de
875 000 F HT. » (Courrier ville de Tourcoing du 1er juillet 1998.)
Le compte rendu de la séance du conseil municipal du
27 juin 1991 (courrier ville de Tourcoing du 1er juillet 1998)
indique que la distribution de lélectricité, jusqualors assurée en régie,
présente des inconvénients financiers et génère des pertes de recettes ainsi
quune insuffisance des investissements et une dégradation de la qualité du service
et que, pour y remédier, il est proposé de constituer une entité juridique distincte.
Parmi les solutions envisagées, sont écartées la régie personnalisée et la société
déconomie mixte. Pour celle-ci, le compte rendu note : « (...) Dans
une telle structure, la ville se doit dêtre majoritaire. Malgré plusieurs appels
tant à EDF quà la Compagnie Générale des Eaux, le groupe Genest et le Crédit du
Nord, seul le groupe Ufiner (Lyonnaise des eaux) a présenté une offre de laquelle il
résulte que : son apport est de 20 MF en capitaux directs -,
lemprunt contracté pour la construction du nouveau siège... est à la charge de la
ville -, la dette actuelle est à la charge de la nouvelle SEM -, lactif
apportable est pris en charge par la nouvelle SEM qui le paie à la ville en contractant
un emprunt de 45 MF maximum, destiné également au financement de la constitution
dun fonds de roulement. »
Sur la solution de la concession à EDF, il est, notamment,
exposé : « La réputation de lentreprise nationalisée nest
plus à faire. (...) Une agence sur Tourcoing commune au gaz et à lélectricité
sera créée pour rapprocher la clientèle gaz et électricité et accroître ainsi la
qualité et la rapidité du service. » A la rubrique « Aspects
financiers », sont relatées les propositions dEDF qui consistent en :
« a) Remboursement aux clients par EDF
des avances sur consommation encaissées par le SMET (environ
5 000 000 F) ; b) prise en charge par EDF à compter
du 1er janvier 1992 du service de la dette (110 200 000 F)
en sus de lintégration du personnel statutaire ; c) prise en
charge par EDF du coût salarial du personnel de la régie (900 000 F)
aujourdhui payé par la ville ; d) virement dans les caisses
du receveur municipal, dès la signature de la convention, de la somme de
61,5 millions de francs représentant la valeur des biens apportables ; e) prise
en charge de la maintenance et de lentretien de léclairage public au quart de
sa valeur annuelle, soit 875 000 F hors taxes pendant une durée de
dix ans. »
En conclusion, le compte rendu expose les motifs du choix
dEDF : « (...) Le peu dengouement du secteur privé quant à une
éventuelle association au sein dune SEM démontre sa circonspection à
légard dune structure où les perspectives de rentabilité savèrent
aléatoires. Les premiers dividendes hypothétiques ne sont prévus quà
lissue de 7 ans seulement ! De plus, cest la nouvelle SEM où notre
collectivité détiendrait 51 % des actions qui doit payer à la ville les biens
apportables. (...) Seule la proposition dEDF apporte des garanties : 1o Sur
le plan de la qualité du service, avec un programme de modernisation
important, (...) avec la prise en compte de techniques modernes issues des études
menées à léchelon national par lentreprise. (...) 3o Financières
pour la municipalité, par le versement immédiat du produit de laliénation des
biens apportables ; de plus, la collectivité naura plus à financer la
trésorerie du SMET. Enfin, le service de la dette est assumé par la structure nationale
qui supporte aussi le coût des personnels de la régie aujourdhui payés par la
ville. »
Le 28 juin 1991, la ville a signé deux conventions,
lune concédant à EDF pour trente ans à compter du 1er janvier
1992 la distribution délectricité, lautre lui confiant pour dix ans
lentretien de léclairage public pour un montant annuel de 875 000 F
(courrier ville de Tourcoing du 1er juillet 1998).
La convention relative à léclairage public prévoit que
les installations concernées comprennent les appareils déclairage public
proprement dits tels que, en son article 1er, lanternes, lampes,
projecteurs et leurs accessoires, lensemble des dispositifs de commande et de
protection tels que horloges, relais, cellules photoélectriques, contacteurs,
interrupteurs, fusibles, les divers organes de raccordement des appareils lumineux aux
lignes qui les alimentent. En revanche, en sont exclus les circuits dalimentation de
léclairage public et les branchements qui en sont issus, ainsi que les supports,
candélabres, mâts et fûts. De la sorte, les circuits dalimentation et leurs
branchements, ainsi que les supports, supposés communs à la distribution
délectricité, ne relèvent pas du marché. En outre, les prestations prévues à
la convention consistent dans le remplacement des lampes, les visites périodiques des
installations, le nettoyage des lanternes, réflecteurs et vasques, la vérification du
bon état de fonctionnement des appareils et de leurs accessoires, la fourniture du
matériel remplacé et les travaux de dépannage et de réparation à la demande de la
commune. En revanche, le contrat ninclut pas la gestion de la fourniture de
lénergie.
Le directeur adjoint du centre EDF-GDF Services de Lille a
déclaré à propos de cette convention (procès-verbal de M. Desurmont du
29 septembre 1994) : « Pour Tourcoing la distribution
délectricité et la gestion déléguée déclairage public étaient
effectuées par le service municipal délectricité de Tourcoing. En 1992, la
distribution a été reprise par EDF en même temps que léclairage public, ce qui
explique le caractère spécifique de cette convention. La redevance ne reflète pas les
prix moyens appliqués aux autres communes car son niveau était lié par lobtention
par EDF de la concession de distribution publique délectricité de la ville de
Tourcoing. Cette ville possède environ 8 000 points lumineux. EDF a fait un
effort commercial sur le prix de léclairage public puisquelle obtenait
lobtention de la concession, le maire ayant insisté pour avoir une offre
intéressante. » Le chiffre daffaires par point lumineux ressort ainsi à
115,48 F.
Six autres communes ont confié lentretien de leur
éclairage au même centre EDF pour des prestations comparables avec des chiffres
daffaires par point lumineux supérieurs, séchelonnant de 157,50 F à
190,10 F pour cinq communes dont le nombre de points lumineux va de 552
à 1 154, et 323,49 F pour la ville de Lille qui compte
13 379 points lumineux (procès-verbal de M. Desurmont du 29 septembre
1994). Une synthèse du marché, établie à partir de données dun organisme du
ministère de lintérieur, le Cetur, communiquée aux enquêteurs en
janvier 1995 par la société Spie-Trindel, signale que le coût moyen de
fonctionnement-maintenance par point lumineux saccroît avec la densité de la
population, donc avec la taille de la commune et le nombre de points lumineux. Ainsi, le
coût est de 158 F pour les communes de 500 à 2 000 habitants, de
235 F pour les communes de 2 000 à 10 000 habitants, de 429 F
pour les villes de 50 000 à 100 000 habitants comme Tourcoing qui en
compte 93 765. Pour sa part, la « Plate-Forme Marketing Eclairage
public » dEDF signale, à la rubrique « Ratios
Caractéristiques », que : « La durée annuelle de fonctionnement de
léclairage public croît généralement avec limportance de la
commune. » Plus loin, ce même document comporte un tableau, établi
daprès une enquête de 1992, qui fait ressortir les dépenses budgétaires par
habitant et par an où la dépense par habitant ressort à 23 F hors énergie pour
les communes de moins de 2 000 habitants, contre 36 F pour les communes
comptant entre 20 000 et 100 000 habitants.
3. Le marché déclairage de la commune de
Rieupeyroux
Le 16 avril 1992, la commune de
Rieupeyroux a passé avec le centre EDF-GDF Services Aveyron-Lozère une convention de
partenariat qui prévoit, notamment, quEDF sengage à assurer le diagnostic de
lensemble des installations déclairage public. Le coût de cette prestation
est estimé à 30 000 F, mais la convention précise : « La
commune de Rieupeyroux étant la première du centre EDF-GDF Services Aveyron-Lozère à
confier la gestion de ses ouvrages déclairage public à Electricité de France,
cette dernière prend à sa charge le coût du diagnostic. » (Courrier EGS
Aveyron-Lozère du 2 novembre 1994.)
Cette convention fait référence, dune part, au contrat
passé pour lexploitation et lentretien des ouvrages déclairage public
entre la commune et le syndicat intercommunal délectricité de lAveyron et,
dautre part, au fait quEDF a été désigné par la commune elle-même pour
lentretien et lexploitation de ses ouvrages déclairage. Le syndicat est
constitué de quatre communes, Rieupeyroux, qui compte 2 348 habitants,
Montrozier, 1 210, Campuac, 496 et Vabre-Tizac, 492.
Un autre contrat, passé entre EDF et le syndicat, précise, en
préambule, que le syndicat agit « sur délibération prise par les assemblées
municipales concernées » et, dans son article 1er, que : « Il
reste précisé que lintervention sur une commune demeure et demeurera conditionnée
par lacceptation préalable de lassemblée municipale concernée,
matérialisée par la signature dune convention particulière entre la commune et le
syndicat départemental et après accord de lentreprise. » (Courrier EGS
Aveyron-Lozère du 2 novembre 1994.)
4. La durée de certaines conventions déclairage
public
Les entreprises interrogées au cours de
linstruction ont indiqué que la durée des contrats dentretien-maintenance
déclairage public était limité réglementairement. A lépoque des faits, le
maximum était de cinq ans. Le document EDF intitulé « Plate-Forme Marketing
Eclairage public » (cf. B. 1 ci-dessus) présente un tableau intitulé
« Forme juridique contractuelle » qui, à propos de lexploitation
maintenance, indique : « Contrat de un à trois ans reconductible sur
une période ne pouvant excéder cinq ans. »
Pour les contrats en gestion complète, les postes G 3 et
G 4 supposent des travaux et des investissements dimportance variable. En
fonction de cette importance et selon ses capacités de financement, les communes
acceptent des durées pouvant aller de cinq à quinze ans, parfois vingt ans. Le
document précité dEDF signale des durées de dix à quinze ans pour les
contrats de gestion complète.
A Tourcoing, le marché déclairage public, dont les
prestations sont limitées au simple entretien et remplacement des lampes et du matériel,
a été conclu pour une durée de dix ans en juin 1991 (courrier ville de Tourcoing
du 1er juillet 1998).
Le centre EDF-GDF Services de Lille a conclu avec quatre
municipalités de simples contrats dentretien-maintenance pour une durée de dix ans
(procès-verbal de M. Desurmont du 29 septembre 1994). Le montant annuel de ces
marchés est de 657 000 F pour 1 157 points lumineux à Saint-André,
de 258 000 F pour 531 points lumineux à Emmerin, de 34 800 F
pour 81 points lumineux à Englos, de 121 200 F pour 229 points
lumineux à Vendeville. Les prestations prévues au contrat consistent dans la gestion du
contrat de fourniture de lénergie, le simple entretien et dépannage des
installations, assortis de visites de contrôle périodiques, limitées à une par mois,
aucun visite nayant lieu en juin, juillet et août pour trois communes, en juin et
août pour la quatrième. Les travaux sont exclus de la convention de base et font
lobjet dune facturation supplémentaire.
Le centre EDF-GDF Services de Douai a conclu des contrats
dentretien-maintenance dune durée de dix ans avec onze municipalités
(procès-verbal de M. Trotez du 19 septembre 1994). Le montant annuel de ces
marchés est de 17 025 F à Beaumetz-lès-Cambrai, 48 325 F à
Coutiches, 36 934 F à Croisilles, 25 077 F à Esquerchin,
196 100 F à Flers-en-Escrebieux, 148 690 F à Ostricourt,
155 703 F à Pecquencourt, 62 233 F à Rieulay, 95 070 F à
Sainghin-en-Mélantois, 131 700 F à Sainghin-en-Weppes, 145 387 F à
Santes.
Pour neuf de ces communes (Beaumetz-lès-Cambrai, Esquerchin,
Flers-en-Escrebieux, Ostricourt, Pecquencourt, Rieulay, Sainghin-en-Weppes, Santes et
Croisilles), les conventions, conclues en termes identiques, concernent, en premier lieu,
la gestion courante des équipements, qui consiste dans le suivi périodique des
consommations, le remplacement des éléments défectueux, lorganisation et la
conduite des interventions dentretien, de réglage, dinspection et de
dépannage, la mise à jour des fichiers de matériel sous contrat et
ladministration générale du service. En ce qui concerne la mise en place
déquipements plus performants ou plus modernes, il est prévu quelle
impliquera des modifications financières du contrat, après accord entre la commune et
EDF. En second lieu, ces conventions portent sur la conduite, le réglage et
lentretien courant des équipements, prestations qui comprennent les essais de
fonctionnement, le contrôle des isolations, la mise à lheure des horloges, la
vérification du bon fonctionnement des appareils, le nettoyage des lampes réflecteurs et
de la verrerie, le remplacement systématique des lampes et accessoires qui ont dépassé
leur durée normale de fonctionnement et le remplacement des pièces défectueuses. La
« garantie totale » prévue dans ces contrats consiste dans lengagement
de maintenir linstallation en bon état et en fonctionnement continu, et dans
lobligation de réparer ou remplacer tout matériel déficient ayant subi une usure
normale ou anormale par un matériel de caractéristiques et de performances
équivalentes. Cette garantie sapplique limitativement aux lanternes et luminaires,
aux appareillages complets ou platines, aux câbles de branchement des luminaires. Les
matériels plus importants et les travaux de plus grande envergure sont exclus de la
convention, sauf à faire lobjet dun avenant. Ainsi le dépannage ne comprend
pas le remplacement des câbles dalimentation ni le remplacement complet
dappareillages. De même, sont exclus de la garantie totale et restent à la charge
de la commune les matériels non compris dans la liste limitative ci-dessus, ainsi que les
ouvrages enterrées ou aériens damenée délectricité, le gros uvre et
les ouvrages de génie civil, les candélabres, les armoires de commande, poteaux et
consoles.
Pour les communes de Coutiches et Sainghin-en-Mélantois les
stipulations de la convention concernant la gestion courante, lentretien courant et
le dépannage sont identiques aux précédentes, y compris les exclusions de travaux et
matériels plus importants. En revanche, bien quil y soit fait référence dans
larticle 8, cette convention ne comporte pas lexposé détaillé de la
garantie totale. Ledit article 8 concerne lexclusion des prestations non
courantes : « Les travaux dextension, de renforcement des
installations et les travaux, services et prestations non repris au titre de la Garantie
Totale feront lobjet de devis et seront intégralement financés par la
commune. »
Les contrats conclus entre le centre EDF-GDF Services Manche
et 40 communes de ce département stipulent que leur durée est de six ans pour des
prestations de simple entretien-maintenance (courrier EGS Manche du 3 novembre 1994).
Pour 16 de ces communes, soit Agon-Coutainville, Glatigny, Gouville-sur-Mer, Gratot,
La Feuillie, Lithaire, Mortain, Orval, Neville-sur-Mer, Millières, Montmartin-sur-Mer,
Regneville, Saint-Jores, Saint-Nicolas-de-Pierrepont, Tocqueville et Tourville-sur-Sienne,
il est prévu quau terme des six ans le contrat sera reconduit tacitement
dannée en année, sauf dénonciation par lune ou lautre des parties par
lettre recommandée avec préavis de 18 mois. Pour les 24 autres communes, soit
Angoville-sur-Ay, Anoville, Baupte, Besneville, Biville, Bolleville, Bricquebec,
Contrières, Denneville, Grosville, Hérenguerville, Hyenville, La Ronde-Haye,
Lingreville, Milly, Montaigu-la-Brisette, Quettreville-sur-Sienne, Quettetot, Rocheville,
Saint-Pierre-lEglise, Saint-Symphorien-le-Valois, Savigny, Trelly et Yquelon, ce
même préavis est de 12 mois.
Le montant annuel de ces contrats séchelonne de 588 F
à 64 230 F. Ils portent sur la maintenance, définie comme lobligation
dassurer le bon fonctionnement de lallumage et de la sécurité électrique,
et inclut un rôle de conseil tarifaire et technique, des études et un bilan des
installations, la gestion administrative, le dépannage, défini comme le remplacement des
équipements mis hors dusage par accident, lentretien, défini comme le
remplacement des éléments défectueux, le contrôle de loxydation des supports et
le graissage des verrouillages des lampadaires, les réparations de petite serrurerie.
Sont exclus, ou doivent faire lobjet dune facturation hors contrat, les
travaux les plus importants : la réparation des conduits souterrains, le
remplacement des supports, le déplacement de points lumineux ou de câbles, la
substitution de câbles souterrains aux câbles aériens, la pose et la dépose des
illuminations de fin dannée.
Le centre EDF-GDF Services Nice-Alpes-dAzur a conclu avec
les municipalités dAnnot, Lucéram, Saint-André, La Turbie,
Touët-de-lEscarène et Touët-sur-Var des contrats pour une durée de cinq ans
renouvelables par tacite reconduction par périodes de cinq ans (procès-verbal de
M. Lenoir du 19 octobre 1994). La dénonciation doit être formulée au minimum
un an avant la date de chaque échéance. Ces conventions visent : « la
surveillance, le dépannage, lentretien, lexploitation ainsi que certains
petits travaux ponctuels ». Il sagit du remplacement systématique tous
les deux ans des lampes avec nettoyage, la création et la maintenance dun fichier
informatique et dune cartographie des installations, la recherche et la réparation
des défauts des câbles, la réparation des sinistres, la surveillance des installations,
la réfection des fils et le remplacement des lampes défectueuses, lentretien des
postes de commande et lastreinte. Les tournées de surveillance sont variables selon
les conventions : deux fois par an à Annot, Touët-de-lEscarène et
Touët-sur-Var, cinq fois par an à Lucéram, chaque mois à Saint-André et La Turbie.
Font lobjet dune facturation à part les études relatives à
lamélioration et à la réalisation de léclairage, le dépannage et la
réparation définitive des installations suite à des sinistres. Par ailleurs, toutes les
fournitures ne sont pas incluses dans les forfaits dintervention des différentes
prestations définies à la convention, et certaines sont facturées en sus sur la base
des prix figurant au bordereau joint au contrat. Enfin, sont exclus de la convention les
travaux de remise en état après dégradations dues à des tiers ou après tempête.
5. La convention passée entre Citélum et la société
Architecture Lumière
La société Citélum a conclu, le
20 octobre 1993, une convention avec la société Architecture Lumière
spécialisée, notamment, dans la production dimages infographiques réalisant la
représentation graphique automatique de données déclairage ou
dillumination, permettant la comparaison entre plusieurs projets de mise en lumière
(procès-verbal de M. Guilhot du 26 décembre 1994).
En préambule, la convention situe les activités et les objectifs
respectifs des deux partenaires. En ce qui concerne Architecture Lumière, il est
mentionné quelle a pour objet, notamment, la conception de léclairage,
linstallage déclairage et de systèmes de lumière. Son gérant a conçu un
logiciel de simulation de mises en lumière par images infographiques. Architecture
Lumière « (...) propose à ses clients potentiels, grandes entreprises,
collectivités locales, etc. des simulations infographiques
personnalisées (...) lui permettant dassurer, le cas échéant, la maîtrise
duvre du projet, voire éventuellement linstallation technique ou encore
porter assistance au maître douvrage ». Ainsi, à côté de la
réalisation dimages infographiques, Architecture Lumière procède, comme Citélum,
à linstallation et la maîtrise duvre déclairages et
dilluminations.
Le document EDF intitulé « Plate-forme Marketing Eclairage
public » (cf. B.1 ci-dessus) notait que : « Pour les grands monuments,
les architectes de lumière constituent une concurrence sérieuse. »
La convention indique que Citélum souhaite développer et
améliorer ses relations avec les communes, départements ou régions, et se positionner
comme un véritable partenaire de ces collectivités locales, partenariat qui doit lui
permettre de développer un courant déchanges avec les élus et les collectivités
locales en leur présentant des projets de mise en lumière pour leurs places, façades,
ponts, universités, etc. La convention, dont la durée est fixée à quatre ans,
comporte, notamment, les stipulations suivantes :
« La société Architecture Lumière sengage
expressément à sorganiser pour être à même de produire et de fournir Citélum,
sur sa demande, ce que Citélum accepte expressément, entre 75 et 120 simulations
infographiques personnalisées par an (...) ;
« La société Architecture Lumière sengage à ne pas
proposer ses services et à ne pas démarcher de sa propre initiative les collectivités
locales dont la liste est jointe en annexe aux présentes et avec lesquelles Citélum
souhaite développer un contact privilégié. Si Architecture Lumière est contactée
directement par lune de ces collectivités locales, elle sengage à en
informer la société Citélum et à la présenter auprès de ladite collectivité comme
son partenaire. Architecture Lumière ne devra en aucun cas facturer directement aux dites
collectivités locales ses prestations infographiques ;
« Dans lhypothèse où Architecture Lumière serait
contactée par une société concurrente de Citélum aux fins de réaliser une ou des
simulations infographiques destinées à des collectivités locales figurant sur la liste
jointe en annexe, Architecture Lumière soblige, de manière strictement
confidentielle, à en informer immédiatement Citélum qui sengage à ne pas
révéler sa source dinformation aux tiers ;
« Corrélativement, Architecture Lumière conserve le droit
de proposer seule ses services et tout particulièrement ses simulations infographiques et
de réaliser les montages lumière quelle aura conçus au moyen de son système
infographique sans le concours et la participation préalable de Citélum à toutes
collectivités locales autres que celles visées dans la liste ci-jointe en annexe et à
tout client autre que les entités du groupe EDF ;
« Afin de respecter lesprit de partenariat et de
collaboration existant entre les parties sans gêner la société Architecture Lumière
pour la réalisation de son activité (...), lorsque Citélum aura demandé à
Architecture Lumière de réaliser pour son compte une simulation infographique pour une
collectivité locale quelle quelle soit, Architecture Lumière ne pourra réaliser
la maîtrise duvre ou tout autre prestation liée à ce projet sans en
informer préalablement Citélum, de telle sorte que soient respectés les intérêts
légitimes de Citélum. (...) ;
« Par ailleurs, il est expressément convenu entre les
parties que les simulations infographiques personnalisées conçues par Architecture
Lumière à la demande de Citélum seront vendues à Citélum, compte tenu du présent
accord de partenariat, au prix préférentiel de 5 000 F hors taxes la
simulation, prix consenti au jour des présentes au groupe EDF, ce prix comprenant le
tirage photocopie couleur et la diapositive, au lieu de 8 000 F hors
taxes ;
« Il est expressément convenu que le prix des simulations
infographiques vendues à Citélum devra toujours être inférieur dau moins
30 % par rapport au meilleur prix pratiqué par Architecture Lumière auprès de ses
autres clients. A ce titre, Citélum est expressément autorisée à demander à
lorganisme chargé de la certification des compmtes dArchitecture Lumière la
certification du prix de vente des photos. (...) ;
« Citélum sera libre de présenter aux collectivités
locales les images infographiques quArchitecture Lumière aura conçues sur sa
demande, selon son choix, soit sous sa seule signature Citélum ou celle de toute entité
du groupe EDF, soit sous la double signature Architecture Lumière/Citélum ou
Architecture Lumière pour Citélum. Il est dores et déjà convenu entre les
parties que Citélum se présentera seule devant les collectivités locales dont la liste
est jointe en annexe. »
Cette annexe prévoit que : « les villes sur
lesquelles Architecture Lumière sengage à ne pas proposer ses services et à ne
pas effectuer de démarches de sa propre initiative sont toutes les villes du territoire
national de plus de 50 000 habitants (excepté le Grand Lyon). (...) De plus,
Architecture Lumière et Citélum détermineront dun commun accord au plus tard le 1er janvier
1994 une cible de 100 projets dilllumination dont le maître douvrage
sera une ville de 10 000 à 50 000 habitants ou un organisme publice
(ministère de la culture, direction de larchitecture, office public, etc.). Dans ce
cadre, les deux partenaires mèneront une action commerciale conjointe. Cette cible sera
réactualisée annuellement en fonction des résultats de laction commerciale. Pour
toutes les autres collectivités locales autres que les villes du territoire national de
plus de 50 000 habitants visées ci-dessus et hors la cible des
100 projets, Architecture Lumière pourra proposer seule ses services et effectuer
des démarches de sa propre initiative, mais devra en informer Citélum, de telle sorte
que soient préservés les intérêts légitimes de Citélum. Architecture Lumière
laissera notamment la priorité à Citélum pour traiter une affaire si celle-ci
bénéficie de lantériorité de la démarche auprès de la collectivité
locale. »
« La principale activité de la société Architecture
Lumière étant dassurer, au-delà de la prestation infographique, des missions de
conception et dinstallation de lumière, il est précisé quArchitecture
Lumière, après accord de Citélum ou de ses filiales, pourra intervenir auprès de
certaines villes définies ci-dessus de plus de 50 000 habitants. » Cette
dernière mention confirme quen dehors des images infographiques lactivité
dArchitecture Lumière est concurrente de celle de Citélum.
M. Tesconi, directeur général de Citélum, a informé les
directeurs des centres de lexistence de cet accord par une note en date du
29 novembre 1993 (procès-verbal Citélum du 29 août 1994) : « Un
accord de partenariat vient dêtre conclu entre la société Architecture Lumière
représentée par Alain Guilhot et le groupe EDF à travers Citélum. Ce partenariat vise
à accroître notre pénétration du marché des illuminations et à asseoir notre
notoriété par lassociation à un grand nom, ou du moins un acteur reconnu dans ce
domaine. Architecture Lumière représente ainsi un potentiel commercial certain que nous
pouvons utiliser. »
A propos de cette convention, M. Alain Guilhot, gérant
dArchitecture Lumière, a déclaré : « En janvier 1977,
lactivité dArchitecture Lumière a débuté avec un objet social vaste et une
activité de mise en lumière pour les villes, les grandes sociétés, les promoteurs et
les particuliers. (...) En 1993, jai proposé aux principauux opérateurs nationaux
(SCGE-SOGEA, Lyonnaise des Eaux, Bouygues et EDF) de pouvoir maccompagner dans ma
démarche dinfographie en payant un ticket dentrée et en lui proposant des
tarifs préférentiels par la suite. Depuis 1991, nous avons fait 170 images dont la
moitié pour Citélum. (...) Pour Citélum, lillumination est une carte de visite
pour accompagner leur métier qui est la gestion déléguée. Par moment, nous sommes en
concurrence, par exemple pour la ville de Montbéliard. Le risque pour moi est
dêtre absorbé ou dêtre dans un schéma de concurrence contre lequel je ne
pourrai lutter sils intègrent, en salariant des concepteurs, lactivité qui
est la mienne. »
C. - Les griefs notifiés
Sur la base des constatations rapportées
ci-dessus, et en application des dispositions de larticle 21 de
lordonnance no 86-1243 du 1er décembre 1986
alors en vigueur, les griefs suivants ont été notifiés sur le fondement des
dispositions de larticle 7 ou du 1 de larticle 8 de ladite
ordonnance :
violation des dispositions du 1 de larticle 8 de
lordonnance, consistant dans le fait, pour lEtablissement public Electricité
de France, sur le marché de léclairage public, davoir fait bénéficier sa
filiale Citélum de lappui commercial et logistique des centres EDF-GDF Services,
en 1993 et jusquen avril 1994, sans que cet appui ait fait lobjet
dune séparation formelle, matérielle ou comptable entre les moyens utilisés par
ces entités EDF locales respectivement pour lactivité de distribution
délectricité et pour léclairage public ;
violation des dispositions du 1 de larticle 8 de
lordonnance, consistant dans le fait, pour la société Citélum, davoir
sollicité et obtenu, sur le marché de léclairage public, lappui commercial
et logistique des centre EDF-GDF Services, en 1993 et jusquen avril 1994,
sans que cet appui ait fait lobjet dune séparation formelle, matérielle ou
comptable entre les moyens utilisés par ces entités EDF locales respectivement pour
lactivité de distribution délectricité et pour léclairage
public ;
violation des dispositions du 1 de larticle 8 de
lordonnance, consistant dans le fait, pour lEtablissement public Electricité
de France davoir octroyé à la ville de Tourcoing un avantage financier important
en sous-évaluant fortement le montant du marché de léclairage public en
contrepartie de la dévolution de la concession de distribution
délectricité ;
violation des dispositions du 1 de larticle 8 de
lordonnance, consistant dans le fait, pour lEtablissement public Electricité
de France, davoir offert, à titre gratuit, des prestations de diagnostic des
installations déclairage public de la commune de Rieupeyroux, en contrepartie de
lattribution à EDF du marché dentretien déclairage public ;
violation des dispositions du 1 de larticle 8 de
lordonnance, consistant dans le fait, pour lEtablissement public Electricité
de France, davoir, pour des conventions dentretien-maintenance en éclairage
public, mis en place des contrats de durée excessive par rapport à limportance des
investissements en jeu et aux délais normalement pratiqués pour le type de prestations
proposées et, pour certaines de ces conventions, davoir conclu des clauses de
renouvellement ou de dénonciation liant les communes pour une durée excessive ou rendant
plus difficile pour elles le recours à un nouveau prestataire ;
violation des dispositions de larticle 7 de
lordonnance du 1er décembre 1986, consistant dans le fait,
pour la société Citélum, davoir mis en uvre des clauses dans le cadre de la
convention passée avec la société Architecture Lumière relative aux images
infographiques, répartissant entre elles la clientèle des collectivités locales et de
grands organismes publics sur lensemble du territoire national, organisant une
information privilégiée et confidentielle sur les contacts entre Architecture Lumière
et les concurrents de Citélum, et permettant à Citélum dêtre assurée
davoir toujours les meilleurs prix de la part dArchitecture Lumière par
rapport aux acheteurs concurrents.
II. - SUR LA BASE DES CONSTATATIONS QUI
PRÉCÈDENT, LE CONSEIL,
A. - Sur la jonction des saisines F 760 et F 956
Considérant que les saisines ministérielles des
4 mai 1995 et 4 avril 1997 se rapportent au même marché, mettent en
cause les mêmes entreprises et concernent des questions communes ; quil y a
donc lieu de les joindre pour quelles fassent lobjet dune même
décision ;
B. - Sur la procédure
Considérant quEDF fait valoir dans ses
observations que sept procès-verbaux établis par les services de la direction générale
de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ne mentionnent pas
de façon suffisamment précise lobjet et létendue de lenquête ;
quils devraient donc être écartés des débats ainsi que les documents qui y sont
annexés ;
Considérant que, dans un arrêt du 2 mars 1999 (SA
Seco-Desquenne), la cour dappel de Paris appréciant la valeur probatoire des
mentions formelles des procès-verbaux produits, a énoncé que la seule utilisation, dans
un procès-verbal de déclaration, de la « formule préimprimée, telle que celle
selon laquelle lenquêteur a indiqué à monsieur X lobjet de
lenquête, ne permet pas (...) de vérifier que les exigences légales et
réglementaires ont été respectées, dès lors quelle ne mentionne pas dune
façon concrète lobjet et létendue de lenquête » ; que
la vérification du respect de ces exigences a pour objet de sassurer que le recueil
des preuves sest déroulé dans des conditions loyales, de telle sorte que la
personne auditionnée nait pu se méprendre sur la portée de ses déclarations et
se trouver conduite à sauto-incriminer ; que, dans un arrêt du
17 mars 1998 (syndicat des pharmaciens de lAveyron), la cour a,
néanmoins, précisé que « la preuve du respect de lobligation de loyauté
peut être recherchée dans les énonciations du procès-verbal ou dans des éléments
extrinsèques à celui-ci » ;
Considérant que le procès-verbal daudition de
M. Denis Oulès, directeur du développement des activités nouvelles dEDF, en
date du 6 septembre 1994, comporte la mention préimprimée « Nous
avons justifié de notre qualité et indiqué à M. Oulès lobjet de notre
enquête », puis la mention de lordonnance de 1986 relative à la
liberté des prix et de la concurrence ; que la déclaration de M. Oulès
débute par la phrase « Sur le marché de léclairage public nous avons
constaté... » qui fait apparaître que la personne entendue avait connaissance,
dès le début de son audition, du sujet sur lequel elle était conduite à
sexpliquer ; que la suite du procès-verbal confirme que les déclarations de
lintéressé ont porté sur les conditions dans lesquelles les centres EDF-GDF
Services et la société Citélum ont développé leurs interventions sur le marché de
léclairage public ; que lensemble de ces énonciations atteste que
M. Oulès na pu se méprendre sur lobjet et sur le champ de
lenquête ; quen outre, comme le rappelle EDF dans ses observations
écrites, lenquête administrative a débuté dans le contexte du débat ouvert dès
février 1994 à loccasion de la diversification de ses activités dans le
champ concurrentiel ; que M. Oulès, qui était précisément chargé du
développement des activités nouvelles au sein du groupe EDF, ne pouvait ignorer les
questions soulevées par la diversification de cet établissement public au regard des
règles de concurrence ; quil résulte de ces éléments, tant intrinsèques
quextrinsèques au procès-verbal dont la régularité est contestée, que celui-ci
répond aux exigences de loyauté dans la recherche des preuves ; quil ny
a donc pas lieu de lécarter des débats ;
Considérant que le procès-verbal daudition du même
M. Denis Oulès, en date du 23 novembre 1994, comporte la mention
pré-imprimée « Nous avons justifié de notre qualité et indiqué à
M. Oulès lobjet de notre enquête » complétée par la mention
manuscrite « relative à lapplication des titres III et IV de
lordonnance susvisée », puis, la mention de lordonnance
de 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ; que la lecture
du contenu du procès-verbal permet de constater que les déclarations de
lintéressé concernent la mise à disposition de personnels dEDF au profit de
Citélum ; que les documents communiqués sont des factures relatives à ces mises à
disposition ainsi quune note intitulée « Activités nouvelles du champ
concurrentiel », en date du 19 septembre 1994, qui expose les
engagements pris par EDF auprès du ministre de lindustrie à la fin du mois de
juillet 1994 pour les activités de diversification et notamment léclairage
public ; que M. Oulès ne pouvait, compte tenu de ses fonctions et du contexte
dans lequel se déroulait lenquête, se méprendre sur lobjet et
létendue de celle-ci, alors surtout que lavis du Conseil de la concurrence
relatif à la diversification dEDF-GDF avait été publié le
20 octobre 1994 ; que la connaissance de ce contexte est confirmée par la
note précitée du 19 septembre 1994 ; quil résulte de ce qui
précède que le procès-verbal daudition de M. Oulès du
23 novembre 1994 répond aux exigences de loyauté dans la recherche des
preuves ; quil ny a donc pas lieu de lécarter des débats ;
Considérant que le procès-verbal daudition de
M. Patrick Desurmont, directeur adjoint du centre EDF-GDF Services de Lille, en date
du 29 septembre 1994, comporte, en premier lieu, la mention préimprimée :
« Nous avons justifié de notre qualité et indiqué à M. Desurmont
lobjet de notre enquête », en deuxième lieu, la mention de
lordonnance de 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence et,
en troisième lieu, une déclaration de M. Desurmont qui débute par la phrase :
« Nous avons une activité déclairage public depuis de nombreuses
années... » qui fait apparaître que la personne entendue avait connaissance,
dès le début de son audition, du sujet sur lequel elle était conduite à
sexpliquer ; que la lecture du procès-verbal permet de constater que les
déclarations de lintéressé concernent les conventions déclairage public
passées avec plusieurs villes, les relations avec la société Citélum et la
commercialisation dun système de télésurveillance déclairage public ;
que les documents communiqués consistent uniquement dans des conventions
déclairage public et un dépliant de présentation du centre de Lille ; que
lensemble de ces éléments amène à conclure que lobjet et létendue
de lenquête ont été exposés de façon suffisamment concrète et que, à cet
égard, M. Desurmont na pu se méprendre ; quainsi le procès-verbal
du 29 septembre 1994 répond aux exigences de loyauté dans la recherche des
preuves ; quil ny a pas lieu de lécarter des débats ;
Considérant que le procès-verbal daudition de
MM. Bernard Trotez et Serge Pouillot, respectivement responsable du développement et
chef dagence du centre EDF-GDF Services de Douai, en date du 19 septembre 1994
comporte, en premier lieu, la mention préimprimée : « Nous avons justifié
de notre qualité et indiqué à M. Trotez lobjet de notre enquête »
et, en deuxième lieu, la mention de lordonnance de 1986 relative à la
liberté des prix et de la concurrence ; que la lecture du procès-verbal révèle
que les déclarations des intéressés concernent uniquement les conventions
déclairage public passées avec plusieurs villes et les relations avec la société
Citélum ; que les documents communiqués consistent essentiellement dans des
conventions déclairage public ; que lensemble de ces éléments atteste
que MM. Trotez et Pouillot nont pu se méprendre sur lobjet et sur le
champ de lenquête ; quainsi le procès-verbal du 19 septembre 1994
répond aux exigences de loyauté dans la recherche des preuves ; quil ny
a pas lieu de lécarter des débats ;
Considérant que le procès-verbal daudition de
M. Jean-Philippe Lenoir, directeur du centre EDF-GDF Services de
Nice-Alpes-Côtes-dAzur, en date du 19 octobre 1994 comporte, en premier lieu,
la mention pré-imprimée : « Nous avons justifié de notre qualité et
indiqué à M. Lenoir lobjet de notre enquête », en deuxième lieu,
la mention de lordonnance de 1986 relative à la liberté des prix et de la
concurrence et, en troisième lieu, une déclaration de M. Lenoir débutant par la
phrase : « en matière déclairage public nous avons pour seule
activité lexploitation-maintenance... » qui fait apparaître que la
personne entendue avait connaissance, dès le début de son audition, du sujet sur lequel
elle était conduite à sexpliquer ; que la suite du procès-verbal confirme
que les déclarations de lintéressé concernent les conventions déclairage
public passées avec plusieurs villes, les relations avec la société Citélum et la
commercialisation dun système de télésurveillance déclairage public ;
que les documents communiqués consistent uniquement dans des conventions
déclairage public et la répartition du chiffre daffaires du centre ;
que lensemble de ces éléments atteste que M. Lenoir na pu se méprendre
sur lobjet et sur le champ de lenquête ; quainsi le procès-verbal
du 19 octobre 1994 répond aux exigences de loyauté dans la recherche des
preuves ; quil ny a pas lieu de lécarter des débats ;
Considérant que le procès-verbal daudition de
M. Alain Guilhot, gérant de la SARL Architecture Lumière, du 26 décembre 1994
comporte, en premier lieu, la mention : « Nous avons justifié de notre
qualité et indiqué à M. Guilhot lobjet de notre enquête », en
deuxième lieu, la mention de lordonnance de 1986 relative à la liberté des
prix et de la concurrence ; que, dans un arrêt du 15 juin 1999 (Solatrag),
la cour dappel de Paris, se prononçant sur la régularité dun procès-verbal
établi auprès de la société Joulie, dont la validité était contestée par la
société Bec, a énoncé que : « si la formule pré-imprimée selon
laquelle les enquêteurs énoncent (...) nous avons justifié de notre qualité et
indiqué lobjet de notre enquête, ne permet pas en soi de vérifier que les
exigences légales et réglementaires ont été respectées, dès lors quelles ne
mentionnent pas de façon concrète lobjet et létendue de lenquête, la
société Bec nest cependant pas fondée à remettre en cause la régularité du
procès-verbal concernant une entreprise qui na jamais discuté avoir été
valablement informée de lobjet de lenquête et de la nature des
investigations exercée dans le cadre de lordonnance du 1er décembre
1986, expressément citée » ; que le procès-verbal daudition de
M. Guilhot mentionne que les enquêteurs lui ont indiqué lobjet de
lenquête et cite expressément lordonnance du 1er décembre
1986 ; que le gérant de la société Architecture Lumière na jamais prétendu
que, lors de son audition du 26 décembre 1994, il aurait été trompé par les
enquêteurs ou quil aurait pu se méprendre sur ce qui lui était demandé ;
quil en résulte quEDF nest pas fondée à remettre en cause la
régularité dudit procès-verbal et que, dès lors, il ny a pas lieu de
lécarter des débats ;
C. - Sur la compétence du Conseil
Considérant que, à propos de
lattribution du marché de la gestion de léclairage public de la ville de
Tourcoing, EDF fait valoir dans ses observations quil nentre pas dans les
compétences du Conseil de la concurrence dappréhender des pratiques qui sont en
réalité indissociables de la procédure qui a abouti à ladoption de la décision
administrative dattribution de ce marché ;
Mais considérant que la proposition commerciale qui consiste pour
une entreprise, candidate à lobtention dun marché public, à formuler une
offre constitue une pratique détachable de la décision administrative dattribution
du marché ; quainsi le Conseil est compétent pour examiner les pratiques
mises en uvre par EDF en vue dobtenir lattribution du marché
déclairage public de la ville de Tourcoing ;
D. - Sur les pratiques relevées
Sur
la position dEDF sur les différents marchés de lélectricité :
Considérant que, sur le marché de la production
délectricité, lEtablissement public Electricité de France (EDF) détient un
monopole légal, assorti dexceptions limitées, ce qui le conduit à assurer,
en 1993, 96,6 % de la production nationale délectricité ;
quil détient le monopole du transport et quil est concessionnaire des
réseaux de distribution de 95 % des communes françaises ; quainsi EDF
dispose dune position dominante sur les marchés de la production, du transport et
de la distribution délectricité ;
Considérant que, sur la période concernée par lenquête,
le groupe EDF était offreur sur le marché de léclairage public par
lintermédiaire, dune part, des centres EDF-GDF et, dautre part, de sa
filiale Citélum, juridiquement constituée en décembre 1992, et du GIE Eurec,
constitué avec les sociétés ELYO et Citélum ;
Considérant que, selon les estimations figurant au dossier, le
marché de léclairage public hors énergie sélèverait à environ
6 milliards de francs en comptabilisant la part des régies municipales et à
3 milliards de francs ; que, sur cette base, la part de marché consolidée du
groupe EDF peut être évaluée, hors régies, à 10 % en 1993, 7,6 %
en 1994 lors de lenquête administrative, à 8 % en 1997 et à
5 % en 1993, 3,8 % en 1994 et 4 % en 1997, si lon
inclut les régies ; quEDF se situerait ainsi en deuxième position derrière
le groupe SPIE qui, selon que lon prend en compte ou non les régies,
représenterait 7 % ou 14 % du marché ; que le cumul des parts de marché
des cinq grands groupes présents sur ce secteur atteint 15 % régies incluses et
30 % hors régies ;
Sur le soutien
apporté par les centres EDF-GDF Services à Citélum sur le marché de léclairage
public :
Considérant que les documents et déclarations présentés en
I-B.1 permettent de relever que, pendant lannée 1993 et jusquen 1994,
Citélum a bénéficié de lappui commercial et logistique des centres EDF-GDF
Services, sur instruction des services centraux dEDF ;
Considérant, en premier lieu, que la « Plate-forme
Marketing Eclairage public » expose que les centres prennent en charge le
démarchage et le suivi commercial de la clientèle, assurent lexécution des
contrats, que la filiale sappuie sur les centres pour les tâches dingénierie
et que, pour toute offre, elle devra obtenir lagrément du centre concerné, « afin
de garantir au niveau opérationnel la cohérence entre les actions de la S.A. et les
stratégies des centres vis-à-vis des collectivités locales » ; que la
filiale et le centre devront saccorder sur les éléments clés de leur
coopération, notamment le niveau de prix de loffre et le partage des risques et des
marges ;
Considérant, en deuxième lieu, que le « point règles de
vie no 2 » fait état des premiers outils qui faciliteront la
commercialisation par les centres de loffre dexploitation-maintenance et que
le « point règles de vie no 9 » souligne que « Le
développement de Citélum repose sur la parfaite synergie de ses structures avec les
centres EDF-GDF Services. Cet appui et cette démarche conjointe permettront
dassurer la cohérence des choix des Centres et des entités Citélum, et la
cohésion des équipes qui devront les mettre en uvre » ; que la note
dite GEM 154 rappelle que les centres « ...contribuent à la commercialisation
des offres de services et participent à la production du service ; (...) Ils
assurent la relation avec les villes clientes. » ;
Considérant, en troisième lieu, que le « Point Règles de
vie no 29 », daté du 2 mai 1994, élaboré par Citélum et
diffusé aux centres, précise que le centre assume la détection commerciale,
lastreinte et le dépannage en sous-traitance ainsi que la gestion et le pilotage du
contrat, tandis que Citélum assure la commercialisation des offres et la direction des
contrats et, si les conditions économiques le permettent, la gestion et le
pilotage ; que M. Hautier, directeur de la région Sud-Est de Citélum, a
déclaré : « (...) Les agents membres des centres EDF décrivent aux
collectivités les services parmi lesquels léclairage public ; si cette
collectivité est intéressée laffaire est confiée à Citélum. Il existe une
règle écrite selon laquelle les centres assurent la relation avec les villes clientes,
cest-à-dire que les contacts entre Citélum et les collectivités se font en
présence des centres. Par exemple pour lappel doffres de Trèbes, nous avons
remis une offre le 20 septembre 1993, certains renseignements complémentaires
demandés lors de lappel à candidature ont été fournis par le centre vallée
dAude, Citélum nétant pas encore en fonction » ;
Considérant que la « Plate-forme Marketing Eclairage
public », à la rubrique offre commerciale, mentionne encore que lune des
forces dEDF consiste dans sa « notoriété et réputation. (...)
Limage institutionnelle dont nous bénéficierons largement repose sur notre
éthique de service public, nos compétences techniques reconnues. » ; que
des tableaux de présentation des cibles en éclairage public soulignent, parmi les
facteurs favorables à EDF auprès des communes, son image et ses « ...compétences
disponibles à proximité. » ;
Considérant, ainsi, que lintervention du groupe EDF sur le
marché de léclairage public était organisée dans le cadre dune étroite
synergie entre sa filiale et les centres EDF-GDF Services, notamment par laide
logistique et commerciale apportée par ces derniers ; que les centres ont été mis
en place pour la distribution délectricité et sont financés par EDF dans des
conditions telles quil nest pas possible détablir que leurs ressources
ne proviennent pas des activités exercées dans le cadre des monopoles légaux détenus
par létablissement public ; que la notoriété et les compétences techniques
acquises par EDF et le maillage du territoire par ses centres constituent des avantages
directement liés à la mission de service public de cet établissement public ;
Considérant, en quatrième lieu, que la « Plate-forme
Marketing Eclairage public » permet de relever quau travers de
léclairage public, EDF sefforce de fidéliser les communes pour la concession
de la distribution délectricité ; quEDF vie à « (...) renforcer
son activité principale de distributeur délectricité » et « (...)
Ces développements (dans des activités nouvelles) ont pour premier objectif de
consolider les relations dEDF avec ses clients, notamment les collectivités
locales. », ou encore que « les objectifs sont avant tout
dintervenir sur ce marché comme partenaire choisi par la commune, même si la
fourniture de service ne représente que quelques pour cent du chiffre daffaires,
déviter la conclusion de contrats globaux avec un autre opérateur qui assurerait
sur une longue période la totalité des prestations de fourniture dénergie,
dentretien et de travaux. » ;
Considérant que, de la même façon, la note GEM 154 expose
que « Lengagement renouvelé du groupe EDF dans lEclairage Public
(...) a pour objectif de pérenniser avec des contrats de longue durée la relation
contractuelle avec la collectivité cliente pour la fourniture délectricité dans
cet usage en offrant un service meilleur que celui dun autre opérateur. Cette offre
dun service dans le champ concurrentiel enrichit aussi nos liens avec la
collectivité concédante et contribue ainsi à sa fidélité au contrat de concession de
distribution délectricité. » ;
Considérant quil est licite, pour une entreprise
publique qui dispose dune position dominante sur un marché en vertu dun
monopole légal, dentrer sur un ou des marchés relevant de secteurs concurrentiels,
à condition quelle nabuse pas de sa position dominante pour restreindre ou
tenter de restreindre laccès au marché pour ses concurrents en recourant à des
moyens autres que ceux qui relèvent dune concurrence par les mérites ;
quainsi, une entreprise publique disposant dun monopole légal, qui utilise
les ressources de son activité monopolistique pour subventionner une nouvelle activité,
ne méconnaît pas, de ce seul fait, les dispositions de larticle L. 420-2
du code de commerce ;
Considérant, en revanche, quest susceptible de constituer
un abus le fait, pour une entreprise, disposant dun monopole légal,
cest-à-dire un monopole dont lacquisition na supposé aucune dépense
et est insusceptible dêtre contesté, dutiliser tout ou partie de
lexcédent des ressources que lui procure son activité sous monopole pour
subventionner une offre présentée sur un marché concurrentiel lorsque la subvention est
utilisée pour pratiquer des prix prédateurs ou lorsquelle a conditionné une
pratique commerciale qui, sans être prédatrice, a entraîné une perturbation durable du
marché qui naurait pas eu lieu sans elle ; que, par ailleurs, le conseil, dans
son avis no 94-A-15, en date du 10 mai 1994, relatif à une demande
davis sur les problèmes soulevés par les diversifications dactivités
dEDF et de GDF au regard de la concurrence, a relevé que, dans le cas où un
éventuel déficit structurel des activités de diversification serait indéfiniment
compensé par les résultats positifs tirés de lactivité du monopole, « un
tel cas de figure conduirait au maintien sur le marché dune offre artificiellement
compétitive qui sinon disparaîtrait » et que « la permanence de cette
offre rétroagirait, en outre, sur le fonctionnement concurrentiel du marché » ;
quil a encore observé, dans le même avis, que ces mécanismes de subventions
croisées « constituent des facteurs de distorsion de concurrence parce
quen subventionnant des activités de diversification, ils reviennent à consentir
aux filiales des avantages appréciables par rapport aux concurrents. A long terme, de
telles pratiques risquent déliminer du marché tous les acteurs économiques ne
bénéficiant pas de conditions analogues » ; quainsi, une subvention
croisée peut à elle seule, par sa durée, sa pérennité et son importance, avoir un
effet potentiel sur le marché ;
Considérant que la mise à disposition de moyens tirés de
lactivité de monopole pour le développement dactivités relevant du champ
concurrentiel, sans contrepartie financière reflétant la réalité des coûts, est
constitutive de loctroi de subventions susceptibles dêtre qualifiées de
pratiques anticoncurrentielles si lune des conditions relevées ci-dessus est
remplie ;
Considérant que, si EDF fait valoir que lorsque les centres
EDF-GDF Services ont réalisé des prestations pour le compte de Citélum, ces dernières
ont été facturées à la filiale, notamment dans le cadre des contrats de
sous-traitance, affirmation qui sappuie sur la production de neuf factures dont les
dates sont comprises entre le 4 mars et le 7 avril 1994 et si les personnels EDF
mis à disposition de Citélum ont été rémunérés par celle-ci dans le cadre
dune procédure dénommée « amadoc », ces contreparties
financières nont existé que pour des prestations réalisées alors que Citélum
disposait déjà de son personnel dexécution ; quen revanche, pendant la
période où Citélum ne disposait pas de personnel dexécution, hormis quelques
cadres de direction ou personnels administratifs et comptables, et pendant la phase de
démarchage des collectivités publiques, Citélum a bénéficié de lappui
logistique et commercial direct des centres EDF-GDF Services, ainsi quen attestent
sans équivoque les termes des documents cités ci-dessus, sans quil soit démontré
que ces facilités ont fait lobjet de contreparties ; que, par suite, au cours
de cette phase de démarrage, Citélum a été bénéficiaire de subventions en nature de
la part de sa maison mère ;
Mais considérant, dune part, quaucun élément du
dossier ne permet détablir que les conditions financières pratiquées par Citélum
auraient présenté un caractère prédateur ; que, dautre part, si Citélum a
obtenu un certain nombre de contrats, sa part de marché, qui na jamais dépassé
1 % (hors régie), nest pas suffisante pour établir que les pratiques de
subventions auraient perturbé gravement la concurrence ; que les subventions en
nature mises en évidence par linstruction ont eu une durée limitée au démarrage
de lactivité de Citélum et sont restées dune ampleur relativement
modeste ;
Considérant, en effet, en ce qui concerne ce dernier point, que
M. Tesconi, directeur général de la société Citélum, sil a reconnu en
séance lexistence des instructions générales données aux centres pour
accompagner Citélum dans ses démarches commerciales, a déclaré que ces instructions
étaient restées au stade de « vux » et quelles avaient
été peu suivies deffet, notamment en raison « dune forte inertie au
sein du groupe EDF » ; que M. Tesconi a précisé quil avait
été recruté en juin 1993 ; quà partir de cette date Citélum était
très progressivement montée en puissance, son effectif étant, à fin 1993, de
10 personnes et de 50 personnes à fin 1994 ; que les comportements
dénoncés concernent la période allant de la date de constitution de la société
Citélum en décembre 1992 jusquen mars 1994, ce qui coïncide avec la période
de mise en place et de démarrage de son activité ; que la note EDF du
19 septembre 1994 précise que, désormais, les activités du champ
concurrentiel sont conduites par les filiales avec leurs moyens matériels, humains et
commerciaux et que les centres ne doivent pas assurer leur action commerciale ; que
les prestations effectuées par les centres pour les filiales doivent être facturées à
un prix reflétant la réalité des coûts et que des fournisseurs concurrents peuvent
bénéficier dans les mêmes conditions de ces prestations ; quune note du
13 avril 1995, intitulée « Dispositions relatives aux activités
complémentaires en France dElectricité de France en marché concurrentiel »,
précise, notamment, que le recours, exceptionnel, aux moyens et aux infrastructures des
centres EDF-GDF Services doit se faire en toute transparence et dans des conditions non
discriminatoires et que les agents dEDF-GDF Services ne seront plus associés, de
quelque manière que ce soit, à lactivité commerciale des filiales ; que ces
documents établissent un changement de comportement de la part dEDF, notamment en
interdisant à lavenir aux centres de participer à laction commerciale des
filiales ;
Considérant, par ailleurs, que les pratiques qui viennent
dêtre analysées ne peuvent être qualifiées dabus de position dominante de
la part de Citélum, dès lors que cette société ne détient pas de position dominante
sur les marchés où elle est active ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que la mise
à la disposition de Citélum, au travers des centres EDF-GDF Services, de moyens
matériels et humains relevant de lactivité de monopole dEDF et la présence
de ces centres auprès de Citélum à loccasion de la prospection commerciale
auprès des communes nont pas constitué, dans les circonstances de lespèce,
un abus de position dominante ;
Sur le marché
déclairage de la ville de Tourcoing :
Considérant que, le 28 juin 1991, la ville de Tourcoing
a signé avec EDF deux conventions, lune concédant à létablissement public,
pour trente ans à compter du 1er janvier 1992, la distribution
délectricité, lautre lui confiant, pour dix ans, lentretien de
léclairage public ; que cette deuxième convention stipule que « Article 3 :
dans le cadre de lobtention par EDF de la concession de distribution publique
délectricité de la ville de Tourcoing, les prestations de la convention seront
exécutées moyennant une redevance annuelle de maintenance dun montant forfaitaire
de 875 000 F HT. » ;
Considérant quil résulte du compte rendu de la séance du
conseil municipal en date du 27 juin 1991 que, pour la distribution
délectricité, jusque-là gérée par une régie municipale, la solution de la
société déconomie mixte basée sur loffre du groupe Lyonnaise des Eaux a
été écartée pour des raisons financières, une partie des charges et des dettes de
lancienne régie restant supportée par la ville en raison de sa participation
majoritaire dans la SEM ; quainsi il est signalé que « seul le groupe
Ufiner (Lyonnaise des Eaux) a présenté une offre de laquelle il résulte que : son
apport est de 20 MF en capitaux directs, - lemprunt contracté pour la
construction du nouveau siège... est à la charge de la ville, - la dette actuelle
est à la charge de la nouvelle SEM, - lactif apportable est pris en charge par
la nouvelle SEM qui le paie à la ville en contractant un emprunt de 45 MF maximum,
destiné également au financement de la constitution dun fond de
roulement » ;
Considérant, en revanche, que la municipalité a opté pour la
solution de la concession à EDF, en raison des avantages matériels et financiers
substantiels proposés ; quainsi il est exposé en préambule que : « La
réputation de lentreprise nationalisée nest plus à faire. (...) Une agence
sur Tourcoing commune au gaz et à lélectricité sera créée pour rapprocher la
clientèle gaz et électricité et accroître ainsi la qualité et la rapidité du
service. » et, à la rubrique « Aspects financiers », que les
propositions dEDF consistent en : « a) remboursement
aux clients par EDF des avances sur consommation encaissées par le SMET (environ
5 000 000 F) ; b) prise en charge par EDF à
compter du 1er janvier 1992 du service de la dette
(110 200 000 F) en sus de lintégration du personnel
statutaire ; c) prise en charge par EDF du coût salarial du
personnel de la régie (900 000 F) aujourdhui payé par la ville ; d) virement
dans les caisses du receveur municipal, dès la signature de la convention, de la somme de
61,5 millions de francs représentant la valeur des biens apportables ; e)
prise en charge de la maintenance et de lentretien de léclairage public au
quart de sa valeur annuelle, soit 875 000 F hors taxes pendant une durée de dix
ans. » ;
Considérant que le directeur adjoint du centre EDF-GDF Services
de Lille a déclaré, à propos de la convention relative à léclairage
public : « (...) La redevance ne reflète pas les prix moyens appliqués aux
autres communes car son niveau était lié par lobtention par EDF de la concession
de distribution publique délectricité de la ville de Tourcoing. Cette ville
possède environ 8 000 points lumineux. EDF a fait un effort commercial sur le
prix de léclairage public puisquelle obtenait lobtention de la
concession, le maire ayant insisté pour avoir une offre intéressante. » ;
Considérant quil ressort, tant du compte rendu de la
séance du conseil municipal de Tourcoing que de cette déclaration du responsable EDL
local, ainsi que de larticle 3 de la convention déclairage public,
quil existait un lien direct entre, dune part, loctroi par EDF
davantages matériels et financiers substantiels pour la distribution
délectricité lui permettant den obtenir la concession, et, dautre
part, lattribution du marché déclairage public pour lequel elle a consenti,
au surplus, un rabais présenté comme particulièrement avantageux ;
Considérant que les motifs dEDF sont exposés à la fin du
compte rendu : « (...) Le peu dengouement du secteur privé quant à
une éventuelle association au sein dune SEM démontre sa circonscription à
légard dune structure où les perspectives de rentabilité savèrent
aléatoires.
« Les premiers dividendes hypothétiques ne sont
prévus quà lissue de 7 ans seulement ! De plus cest la
nouvelle SFM où notre collectivité détiendrait 51 % des actions, qui doit payer à
la ville les biens apportables. (...) Seule la proposition dEDF apporte des
garanties : 1o Sur le plan de la qualité du service, avec un
programme de modernisation important, (...) avec la prise en compte de techniques
modernes issues des études menées à léchelon national par lentreprise. (...)
3o Financières pour la municipalité, par le versement immédiat du
produit de laliénation des biens apportables ; de plus, la collectivité
naura plus à financer la trésorerie du SMET. Enfin, le service de la dette est
assumé par la structure nationale qui supporte aussi le coût des personnels de la régie
aujourdhui payés par la ville. » ;
Considérant quil ressort de cette conclusion, en ce qui
concerne la concession de la distribution délectricité, dune part, que seule
EDF était en mesure de proposer la création dune agence commune au gaz et à
lélectricité sur Tourcoing, dautre part, que lunique proposition
émanant dune entreprise relevant du secteur concurrentiel nétait pas en
mesure dassurer une rentabilité de lexploitation, dailleurs jugée
aléatoire, avant sept ans et que, comme le souligne le compte rendu, la solution EDF
permettait de transférer les charges et dettes de lancienne régie de Tourcoing à
la « structure nationale » que représente EDF ;
Considérant, en ce qui concerne la convention déclairage
public, que loffre dEDF aboutit à un montant de 115,48 F par point
lumineux, tandis que pour six autres communes ayant conclu un marché
dentretien-maintenance de leur éclairage avec le même centre EDF les montants par
point lumineux séchelonnent de 157,50 F à 190,10 F pour cinq communes
dont le nombre de points lumineux va de 552 à 1 154, soit des montants supérieurs
de 36,38 % à 64,61 % par rapport à Tourcoing, et un montant de 323,49 F
pour la ville de Lille qui compte 13 379 points lumineux ; quune
synthèse du marché, établie à partir de données dun organisme du ministère de
lintérieur, le Cetur, communiquée aux enquêteurs en janvier 1995 par la société
Spie-Trindel, permet de constater que le coût moyen de fonctionnement-maintenance par
point lumineux saccroît avec la densité de la population, donc avec la taille de
la commune et le nombre de points lumineux ; que ce coût est de 158 F pour les
communes de 500 à 2 000 habitants, de 235 F entre 2 000 et
10 000 habitants, de 429 F pour les villes de 50 000 à
100 000 habitants comme Tourcoing qui en compte 93 765 ; que ce coût
est voisin de lévaluation faite en 1991 par le conseil municipal de Tourcoing pour
la maintenance de son réseau déclairage public, soit 3 500 000 F
(875 000 × 4) qui aboutit à un coût de 412 F par point
lumineux ; que, dune part, des éléments recueillis auprès dEDF
signalent que : « La durée annuellle de fonctionnement de léclairage
public croît généralement avec limportance de la commune. » ; que,
dautre part, une enquête en 1992 fait ressortir que la dépense déclairage
public par habitant et par an ressort à 23 F hors énergie pour les communes de
moins de 2 000 habitants, contre 36 F pour les communes comptant entre
20 000 et 100 000 habitants ;
Considérant quil ressort de ce qui précède que
loffre dEDF pour léclairage public de Tourcoing a été faite à un
niveau artificiellement bas par rapport, dune part, aux prix relevés pour des
conventions comparables, dautre part, aux études de coûts relatives à ce type de
prestations ; que cette offre a été déterminante pour la municipalité dans sa
décision dattribuer ledit marché à EDF ; que, dans le cadre de
lobtention de la concession de la distribution délectricité de la ville de
Tourcoing, EDF a proposé à cette collectivité une offre concernant léclairage
public de la ville à un prix particulièrement bas, ce qui a dissuadé la ville de
procéder à un appel doffres pour cette prestation et a permis à
létablissement public demporter ce marché qui, en outre, a été conclu pour
une période de dix ans, renouvelable par tacite reconduction ; quun tel
comportement de la part dune entreprise en position dominante est constitutif
dun abus et est prohibé par les dispositions de larticle L. 402-2
du code de commerce ;
Sur le marché
déclairage de la commune de Rieupeyroux :
Considérant que la convention de partenariat passée entre la
commune de Rieupeyroux et le centre EDF-GDF Services Aveyron-Lozère prévoit quEDF
sengage à effectuer à titre gratuit le diagnostic de lensemble des
installations déclairage public, le coût de cette prestation étant estimé à
30 000 F, « car la commune de Rieupeyroux est la première du centre
EDF-GDF Services Averyon-Lozère à confier la gestion de ses ouvrages déclairage
public à EDF » ;
Considérant quau cas despèce la prestation gratuite
proposée par EDF, qui est dun montant modeste, sinscrit à lintérieur
des marges de liberté dont dispose tout fournisseur, même détenteur dune position
dominante, dans la négociation avec un client potentiel ;
Considérant, par ailleurs, quaucune pratique analogue
na été relevée à loccasion des autres contrats déclairage publics
obtenus par les centres EDF et examinés dans le cadre du présent dossier ;
quil en résulte quil nest pas établi quEDF ait, en effectuant le
diagnostic gratuit de léclairage public à Rieupeyroux, mis en uvre une
pratique susceptible davoir faussé le jeu de la concurrence ;
Sur la durée
des conventions déclairage public :
Considérant que la gestion des installations déclairage
public comprend, selon leur nature, quatre types de prestations identifiées de G 1
à G 4 ; que les prestations regroupées dans les postes G 1 et G 2
constituent lentretien-maintenance, le poste G 1 couvrant la gestion du contrat
de fourniture délectricité, le poste G 2 couvrant la maintenance préventive
et correctrice des installations déclairage et lastreinte, le poste G 3
concernant les grosses réparations et le poste G 4 concernant la rénovation ou
lextension du réseau ; que la duréé des contrats
dentretien-maintenance, à lépoque des faits, était au maximum de
cinq ans ;
Considérant que les conventions relatives à la prise en charge
de léclairage public de 56 communes par différents centres EDF-GDF Services,
présentées au I-B-4, concernant lentretien et la maintenance des installations et
que les grosses réparations ou la rénovation en sont exclues ; que ces conventions
prévoient des durées supérieures à cinq ans, soit dix ans pour
16 communes et six ans pour 40 communes ; quau surplus,
concernant ces mêmes 40 communes, situées dans la Manche, il est prévu pour
16 dentre elles quau terme des six ans le contrat sera reconduit
tacitement dannée en année, sauf dénonciation par lune ou lautre des
parties par lettre recommandée avec préavis de dix-huit mois ; que, pour les
24 autres communes, le préavis est de douze mois ;
Considérant que le centre EDF-GDF Services Nice-Alpes-dAzur
a conclu avec 6 communes des contrats dentretien-maintenance de leur éclairage
public pour une durée de cinq ans renouvelable par tacite reconduction par périodes
de cinq ans avec une faculté de dénonciation qui doit être exercée au minimum un
an avant la date de chaque échéance ;
Considérant quEDF soutient que les durées de ces
conventions ainsi que les clauses de renouvellement et de dénonciation sont justifiées
par limportance des prestations quelles couvrent ;
Mais considérant quil nest pas contesté que les
conventions concernent seulement lentretien et la maintenance des
installations ; que ni létendue de ces prestations, ni le montant annuel des
contrats en cause, ni la durée admise pour ce type de conventions, qui était alors de
cinq ans maximum avec reconductions successives éventuelles, ne permettent de
justifier que ces conventions aient été conclues pour des durées supérieures à cinq
années et, pour certaines, que les clauses de renouvellement aient prévu des délais de
préavis ou de dénonciation de douze, dix-huit ou vingt-quatre mois ;
quau demeurant EDF était parfaitement informée des contraintes réglementaires
relatives à ce type de contrats puisque la « Plate-forme Marketing Eclairage
public » indique, à propos du cadre juridique des contrats avec les communes, pour
lexploitation maintenance : « Contrat de un à trois ans reconductible
sur une période ne pouvant excéder cinq ans. » ; que ce même
document souligne que lune des forces dEDF, dans sa démarche auprès des
communes, consiste dans sa notoriété et sa réputation, son image institutionnelle qui
repose largement sur son éthique de service public, ses compétences disponibles à
proximité ;
Considérant que les conventions en cause ont été négociées et
conclues par des centres EDF-GDF Services, qui, dans le cadre du quasi monopole de la
distribution délectricité dEDF dont ils assurent la gestion au niveau local,
sont en relation constante et privilégiée avec les communes ; que ces centres
bénéficient da la notoriété et de limage dEDF en matière de distribution
de lélectricité et que ces avantages sont susceptibles de leur conférer un rôle
de prescripteur auprès des communes, notamment petites et moyennes ;
Considérant que les pratiques qui consistent, dune part, à
conclure avec des communes, pour lentretien et la maintenance de leur éclairage
public, des conventions dune durée excessive par rapport à limportance des
prestations en cause et des investissements concernés, dautre part, à insérer
dans ces conventions des clauses de dénonciation qui rendent plus difficile le recours à
un autre prestataire, sont constitutives dun abus, sur le marché de
léclairage public, de la position dominante détenue par EDF sur le marché de
la distribution délectricité ; que ces pratiques ont eu pour objet et pour
effet de restreindre laccès des concurrents au marché et sont prohibées par les
dispositions de larticle L. 420-2 du code de commerce ;
Sur la
convention passée entre Citélum et la société Architecture Lumière :
Considérant que la société Citélum a conclu le 20 octobre
1993 une convention avec la société Architecture Lumière pour la fourniture par
celle-ci dimages infographiques pour la représentation de projets déclairage
ou dillumination ;
Considérant quArchitecture Lumière réalise des images
infographiques alors que Citélum nexerce pas une telle activité ;
quainsi, la convention lui permettait de sadjoindre des compétences
quelle ne possédait pas ;
Considérant cependant, quil ressort des mentions figurant
dans la convention ou des déclarations des intéressés quoutre la production
dimages infographiques, lactivité dArchitecture Lumière couvre des
domaines où intervient également Citélum, soit la conception et linstallation
déclairages et de systèmes de lumière, la maîtrise duvre et
linstallation technique de projets dillumination ; quen
conséquence, Citélum et Architecture Lumière sont des concurrents sur le marché des
illuminations ; que la « Plate-forme Marketing Eclairage public »
dEDF signale, dailleurs, que « Pour les grands monuments, les
architectes de lumière constituent une concurrence sérieuse. » ;
Considérant, en premier lieu, que les dispositions de la
convention qui prévoient, dune part, que « lorsque Citélum aura demandé
à Architecture Lumière de réaliser pour son compte une simulation infographique pour
une collectivité locale quelle quelle soit, Architecture Lumière ne pourra
réaliser la maîtrise duvre ou toute autre prestation liées à ce projet
sans en informer préalablement Citélum, de telle sorte que soient respectés les
intérêts légitimes de Citélum », dautre part, que : « Pour
toutes les autres collectivités locales autres que les villes du territoire national de
plus de 50 000 habitants visées ci-dessus et hors la cible des
100 projets, Architecture Lumière pourra proposer seule ses services et effectuer
des démarches de sa propre initiative, mais devra en informer Citélum, de telle sorte
que soient préservés les intérêts légitimes de Citélum. Architecture Lumière
laissera notamment la priorité à Citélum pour traiter une affaire si celle-ci
bénéficie de lantériorité de la démarche auprès de la collectivité
locale. » visent à protéger les intérêts contractuels de Citélum, lorsque
celle-ci a pris linitiative de la prospection commerciale auprès de la commune
considérée et ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire à la protection desdits
intérêts ; quelles ne constituent pas une pratique de nature à fausser la
concurrence entre les deux partenaires ;
Considérant, en revanche, que dautres clauses stipulant que
la société Architecture Lumière sengage à ne pas démarcher les collectivités
locales figurant sur une liste établie préalablement qui inclut toutes les villes de
plus de 50 000 habitants (excepté le Grand Lyon), ainsi quune cible de
cent projets dillumination constituée de villes de 10 000
à 50 000 habitants ou dorganismes publics vont, par leur
généralité et leur étendue, au-delà de ce qui est nécessaire à la protection des
intérêts de Citélum et ont pour objet dorganiser un partage de clientèle qui
fausse lexercice de la concurrence entre deux entreprises exerçant pour partie
des activités similaires ;
Considérant que, si la clause qui prévoit que le prix des
simulations infographiques vendues à Citélum devra toujours être inférieur dau
moins 30 % par rapport au meilleur prix pratiqué par Architecture Lumière
auprès de ses autres clients procure à Citélum un avantage par rapport à ses
concurrents, cet avantage a pour contrepartie le versement initial par Citélum dune
somme de 1 500 000 F au titre du préfinancement du développement
technique du système informatique dArchitecture Lumière ; quainsi cette
hausse de prix ne constitue pas une pratique anticoncurrentielle ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que, par la
convention quelles ont conclue, les sociétés Citélum et Architecture Lumière se
sont concertées en vue de se répartir la clientèle des collectivités locales et de
grands organismes publics sur lensemble du territoire national ; quune
telle clause a eu pour objet et pour effet de limiter la concurrence entre les sociétés
Citélum et Architecture Lumière ; quelle est donc contraire aux dispositions
de larticle L. 420-1 du code de commerce ;
Sur les suites
à donner :
Considérant quaux termes de
larticle L. 464-2 du code de commerce : « Le Conseil de la
concurrence peut ordonner aux intéressés de mettre fin aux pratiques
anticoncurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières.
Il peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas
dinexécution des injonctions. Les sanctions pécuniaires sont proportionnées à la
gravité des faits reprochés, à limportance du dommage causé à léconomie
et à la situation de lentreprise ou de lorganisme sanctionné. Elles sont
déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de
façon motivée pour chaque sanction. Le montant maximum de la sanction est, pour une
entreprise, de 5 % du montant du chiffre daffaires hors taxes réalisé en
France au cours du dernier exercice clos (...). Le Conseil de la concurrence peut
ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications quil
désigne, laffichage dans les lieux quil indique et linsertion de sa
décision dans le rapport établi sur les opérations de lexercice par les gérants,
le conseil dadministration ou de directoire de lentreprise. Les frais sont
supportés par la personne intéressée. » ;
En ce qui concerne
létablissement public EDF :
Considérant que, pour apprécier la gravité des pratiques mises
en uvre, il y a lieu de relever quEDF détient un monopole légal portant à
la fois sur la production et le transport délectricité et une position dominante
sur le marché de la distribution délectricité ; quil bénéficie
dune forte notoriété auprès des collectivités locales ainsi que dun
maillage local au travers des centres EDF-GDF Services, réseau dont ne pouvait
disposer aucun de ses concurrents sur le marché de léclairage public ;
Considérant que, pour apprécier le dommage à léconomie,
il y a lieu de tenir compte de la durée des pratiques mises en uvre et de leur
impact sur le fonctionnement du marché ; quen premier lieu, en ce qui concerne
la convention déclairage public de la ville de Tourcoing, elle a été passée pour
une période de dix ans, renouvelable par tacite reconduction par période dune
année ; que laccès des concurrents à ce marché se trouve ainsi limité sur
une longue durée ; quen deuxième lieu, en ce qui concerne la durée et les
clauses de renouvellement et de dénonciation de contrats déclairage public passés
avec soixante-deux autres communes, il convient de prendre en compte que ces
pratiques ont eu pour effet de limiter laccès des concurrents aux marchés en cause
et de restreindre la possibilité pour les communes concernées de changer de
prestataire ;
Considérant, toutefois, dune part, que ces pratiques ont eu
lieu au cours dune période pendant laquelle une certaine incertitude régnait quant
aux conditions dans lesquelles EDF pouvait régulièrement sengager dans des
activités de diversification ; quelles ont cessé dès lors quà la
suite des avis rendus par le Conseil de la concurrence et le Conseil dEtat, ces
incertitudes ont été levées ; que, dautre part, en dépit de ces pratiques,
la part de marché détenu par le groupe EDF sur le marché de léclairage
public est restée faible et a décru sur la période en cause ;
Considérant quEDF a réalisé en France, au cours de
lexercice 1999, un chiffre daffaires de
168 514 216 304 F ; quen fonction des éléments généraux
et individuels, tels quils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger
une sanction pécuniaire de 800 000 F ;
En ce qui concerne
la société Architecture Lumière :
Considérant que, dans le cadre de la procédure de liquidation
judiciaire ouverte au tribunal de commerce de Lyon à légard de la société
Architecture Lumière, le juge-commissaire, par ordonnance du 25 mars 1997, a
prescrit la cession à M. Jean Mallet ou à son substituant du fonds de commerce de
la débitrice, en application de larticle 156 de la loi du 25 janvier 1985
relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises ; que cette
cession a porté sur les éléments incorporels et, en ce qui concerne les éléments
corporels, uniquement sur le mobilier et le matériel de bureau, les locaux
dexploitation nétant pas repris ; que lordonnance prend acte de ce
que le dirigeant ne participera ni au capital ni à la direction de la nouvelle
structure ; quil nest donc pas établi que subsiste une continuité
économique et fonctionnelle entre la société Architecture et Lumière et le
cessionnaire du fonds de commerce, lequel ne pourrait, en tout état de cause et
conformément aux dispositions de larticle 62, alinéa 3, de la loi
précitée, se voir imposer dautres charges que celles résultant éventuellement de
lordonnance du juge-commissaire et de lacte de cession qui la
suivie ; quen ce qui concerne la société Architecture Lumière, dont le
jugement de liquidation judiciaire a entraîné la dissolution de plein droit en vertu de
larticle 1844-7-7 du code civil, mais qui se survit pour les besoins de sa
liquidation jusquà la publication de la clôture de celle-ci, les éléments du
dossier ne permettent pas de connaître létat des opérations de la liquidation
sociale consécutive à cette dissolution ; quen tout état de cause, le
prononcé dune sanction à lencontre de cette société napparaît pas
opportun, eu égard à la procédure collective dont elle a fait lobjet ;
En ce qui concerne
la société Citélum :
Considérant que les dispositions relatives à la répartition de
clientèle figurant dans la convention passée entre les sociétés Citélum et
Architecture Lumière nont été que partiellement appliquées ; que le chiffre
daffaires réalisé grâce à cette convention a été dun faible
montant ; que la durée de celle-ci na été que de trois années, la
convention ayant pris fin avec la mise en liquidation judiciaire de la société
Architecture Lumière ;
Considérant que la société Citélum a réalisé en France, au
cours de lexercice 1999, un chiffre daffaires de
283 997 265 F HT ; quen fonction des éléments généraux
et individuels, tels quils sont appréciés ci-dessus, il y a lieu de lui infliger
une sanction pécuniaire de 200 000 F,
Décide :
Art. 1er. - Il est
établi quEDF a enfreint les dispositions de larticle L. 420-2 du code de
commerce à loccasion de la passation des conventions de distribution
délectricité et déclairage public dans la ville de Tourcoing, le
28 juin 1991, ainsi quen concluant dans 62 communes des conventions
dentretien et de maintenance de léclairage public dune durée trop
longue.
Art. 2. - Il est établi que la
société Citélum a enfreint les dispositions de larticle L. 420-1 du code de
commerce en signant avec la société Architecture Lumière une convention comportant des
clauses anticoncurrentielles.
Art. 3. - Il ny a pas lieu
de poursuivre la procédure, sagissant des autres griefs qui ont été notifiés
à EDF de Citélum.
Art. 4. - Sont infligées les
sanctions pécuniaires suivantes :
800 000 F à EDF ;
200 000 F à Citélum.
Délibéré sur le rapport de M. Komiha, par
Mme Hagelsteen, présidente, Mme Pasturel, vice-présidente, M. Cortesse,
vice-président, Mmes Boutard-Labarde, Mader-Saussaye, Mouillard et Perrot,
MM. Bargue, Bidaud, Lasserre, Nasse, Piot, Ripotot et Sloan, membres.
La secrétaire de séance, Véronique Jourquin |
La présidente, Marie-Dominique Hagelsteen |
© Ministère de l'économie, des Finances et de l'Industrie-
30 janvier 2001