Sommaire N° 10 du 12 octobre 2000

Avis du 30 septembre 1999 relatif à la contamination du kaolin d’origine allemande par des dioxines et à la fixation de teneurs limites en dioxines pour les additifs appartenant au groupe des agents liants antimottants et coagulants dans l’alimentation des animaux

NOR :  ECOC0000294V

    L’Agence française de sécurité sanitaire des aliments a réuni le 23 septembre 1999 les experts du groupe « contaminants et produits phytosanitaires » du Conseil supérieur d’hygiène publique de France et de la commission interministérielle et interprofessionnelle de l’alimentation animale, afin d’examiner les résultats du plan de prélèvements mis en œuvre par l’administration en août 1999 sur des animaux des élevages susceptibles d’avoir consommé du kaolin en provenance d’Allemagne contaminé par des dioxines. Ces experts avaient, le 2 août 1999 formulé un avis et demandé que les résultats des contrôles leur soient communiqués en vue de réactualiser leur évaluation du risque et conforter les hypothèses quant à l’origine de la contamination.
    Les experts ont également examiné des projets de directive et de décision communautaires de fixation de teneurs limites en dioxine pour les additifs appartenant au groupe des agents liants antimottants et coagulants dans l’alimentation des animaux, transmis pour avis par la DGCCRF les 22 juillet et 22 septembre 1999.
1.  Plan de surveillance des animaux des élevages susceptibles d’avoir consommé du kaolin d’origine allemande contaminé par les dioxines
      Ayant pris connaissance des modalités du plan d’échantillonnage réalisé dans les exploitations dont les animaux ont consommé du kaolin contaminé, permettant d’évaluer l’importance de la contamination par filière (lapins, œufs et poules pondeuses, porcs charcutiers, bovins laitiers et bovins allaitants) et par coopérative de distribution d’aliment concernée ;
      Ayant pris connaissance des teneurs en dioxine obtenues par les analyses, qui montrent :
          un faible niveau de contamination des filières porc et bovin laitier ;
          une contamination significative des filières lapin et poule pondeuse (et œuf), aboutissant à des teneurs en dioxine proches ou supérieures aux valeurs limites proposées par l’Agence française de sécurité alimentaire des aliments, probablement associée à une distribution tardive d’aliment contaminé provenant de certains fournisseurs ;
      Ayant pris connaissance des analyses de profils chromatographiques des congénères de dioxines qui montrent une analogie avec les profils de congénères sur les prélèvements de kaolins incriminés ;
            Les experts considèrent que :
      l’origine de la contamination observée dans les élevages étudiés doit être effectivement liée au kaolin incriminé en provenance d’Allemagne ;
      cette contamination du kaolin révèle une présence quasi exclusive de PCDD et semble donc d’origine naturelle ;
      les risques d’une forte exposition de la population sont faibles en raison du niveau peu élevé du dépassement par rapport aux valeurs recommandées, de la grande variabilité des contaminations résiduelles observées, en particulier dans les filières lapin et poule pondeuse alimentées par certains fournisseurs, ainsi qu’en raison du caractère aléatoire dans le temps et dans l’espace de cette contamination. De plus, pour ce qui concerne spécifiquement le lapin, la teneur en matière grasse des parties comestibles est faible et la consommation de lapin ne constitue pas une part significative de l’apport en protéines animales dans la ration moyenne de la population française.
    Les experts rappellent toutefois leurs recommandations de seuils mentionnés dans les avis précédents, tant pour ce qui concerne les denrées destinées à la consommation humaine que pour l’alimentation animale.
    Par ailleurs, à la lumière de ces événements, les expers proposent que soient mis en place des systèmes de certification des zones de production d’argile, qui devraient éviter, à terme, la survenue de nouveaux incidents, en cohérence avec les recommandations formulées le 2 août 1999.
    Ces propositions entrent dans le cadre général de l’identification et de la réduction des sources significatives de contamination. Dans ce but, les experts rappellent l’importance :
      d’une part des plans de surveillance des produits alimentaires permettant d’apprécier l’exposition des consommateurs,
      d’autre part, des mesures chez l’homme (en particulier dans les lipides sanguins) permettant d’estimer l’exposition présente et passée de différents segments de la population et d’évaluer l’efficacité des mesures de réduction des sources.
2.  Projets de directive et de règlement européens relatifs à la fixation de teneurs limites en dioxine pour les aliments des animaux
    La Commission européenne propose une valeur seuil en dioxines de 500 pg TEQ OMS/kg pour les additifs liants, antimottants et coagulants utilisés dans l’alimentation animale.
    Les experts considèrent :
      que ce seuil proposé pour les additifs (0,5 pg TEQ OMS/g) n’est pas cohérent avec les seuils fixés pour les autres ingrédients utilisés en alimentation animale (matières grasses : 2 pg/g : valeur actuellement en cours de discussion par la Commission européenne) ;
      que ce seuil de 0,5 pg TEQ OMS/g n’est également pas cohérent avec les valeurs admises pour les sols de pâturage (rappelées dans l’avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments du 2 août 1999), alors que les animaux ingèrent une quantité significative de terre lors du pâturage ;
      que prendre comme référence le seuil de détection, pose un problème analytique qui pourrait conduire à l’impossibilité concrète de surveiller le respect d’une norme fondée sur un tel seuil ;
      que les mesures proposées sont disproportionnées en regard des risques réels pour la santé publique. Par ailleurs, elles paraissent contradictoires avec la gestion de ce type de risque dans les pays européens, basée sur l’identification des sources de contamination et leur réduction ;
      qu’il paraît prématuré de proposer de telles mesures extrêmes alors que la majorité des pays de l’Union européenne n’a pas encore procédé à une sérieuse évaluation des risques sur la base des mesures d’exposition à partir des niveaux de contamination des aliments et d’imprégnation des tissus humains.
    En conséquence, à l’unanimité, le groupe estime les propositions de la commission infondées scientifiquement, au regard des considérations de santé publique.


© Ministère de l'économie, des Finances et de l'Industrie- 13 octobre 2000