Avis de la Commission de la sécurité des consommateurs en date du
18 avril 2000 relatif à la sécurité des véhicules automobiles
alimentés en gaz de pétrole liquéfié (GPL)
NOR : ECOC0000184V
REQUÊTES No 99-016, 99-018, 99-021, 99-088 ET
99-089
La Commission de la sécurité des
consommateurs,
Vu le code de la consommation, notamment ses articles
L. 224-1, L. 224-4, R. 224-4 et R. 224-7 à
R. 224-12 ;
Vu les requêtes nos 99-016,
99-018, 99-021, 99-088 et 99-089 ;
Considérant que :
Les saisines
1. La CSC a été
saisie à cinq reprises sur la question du GPL :
Le 8 février 1999, le Syndicat national des
officiers professionnels sapeurs-pompiers saisissait la Commission suite à l’accident
survenu lors d’une intervention sur un véhicule équipé en GPL et qui avait
fait deux blessés dans leur rang (requête no 99-016) ;
Le 17 février 1999, le sénateur Nicolas About
saisissait la Commission sur la question de la sécurité des véhicules
équipés d’un moteur au GPL (requête no 99-018) ;
Le 28 février 1999, le député des Alpes-Maritimes
M. André Aschieri saisissait la Commission suite à l’explosion d’une
voiture fonctionnant au gaz de pétrole liquéfié (GPL) et qui avait
occasionné des blessures graves aux pompiers appelés à intervenir sur le site
(requête no 99-021) ;
Le 6 décembre 1999, une autorité judiciaire saisissait
la Commission suite à un accident (brûlures aux mains ayant entraîné une
interruption temporaire de travail de trois semaines) survenu lors de l’utilisation
d’un pistolet d’une pompe GPL d’un centre commercial (requête no 99-088) ;
Le 28 décembre 1999, M. et Mme P.
saisissaient sur la question de la sécurité des véhicules équipés d’un
moteur au GPL (requête no 99-089).
2. Le problème de sécurité grave posé par
certains véhicules équipés de bi-carburation essence/GPL consiste dans le
fait qu’aucun dispositif de sécurité n’est prévu pour empêcher l’explosion
du réservoir de GPL lors d’un incendie du véhicule.
Le marché
3. On peut estimer
à environ quatre millions le nombre de voitures équipées d’une carburation
au GPL dans le monde. Un million de tels véhicules circulent en italie,
500 000 aux Pays-Bas. En France environ 130 000 véhicules sont
officiellement équipés, une estimation en prévoyait, avant l’accident de
Vénissieux, 250 000 en 2002 (d’après certains professionnels entre
20 000 et 40 000 véhicules supplémentaires non officiellement
recensés - faute de déclaration à la préfecture - circuleraient en
toute impunité). Le nombre de stations-service délivrant du GPL est
actuellement de 1 150 sur les 17 000 présentes sur le territoire et
leur nombre devrait s’élever à 2 000 au cours de l’année 2002 selon
les prévisions actuelles.
Les caractéristiques du GPL
et son utilisation dans les véhicules
Définition et historique
(source CRC-Consommation)
4. Le GPL (gaz de
pétrole liquéfié) est un mélange à proportion à peu près égale de gaz
butane et de gaz propane. Ces gaz, bien connus du grand public pour leur
utilisation domestique, sont obtenus soit par extraction du gaz naturel, soit
pendant l’opération de raffinage du pétrole brut (c’est d’ailleurs ce
gaz que l’on voit brûler dans les torchères lorsqu’il n’est pas
collecté).
5. L’utilisation du gaz comme carburant n’est
pas, en soi, une nouveauté. Les premiers véhicules en service furent des
camions américains dès 1921. En France, c’est en 1969 que le propane a été
autorisé comme carburant par la loi, mais ceci ne concernait alors que de
petits véhicules destinés au transport n’excédant pas deux mètres de long,
comme les véhicules-chariots élévateurs. Dix ans plus tard, en 1979, le GPL a
été autorisé en France pour les véhicules automobiles, mais uniquement en
mono-carburation. Cette décision n’a pas entraîné une hausse sensible du
nombre de véhicules concernés.
6. Il faudra attendre 1985 pour voir
autorisée la bi-carburation. Dans ce cas, le véhicule contient
2 réservoirs, 2 systèmes d’injection, et le conducteur peut passer
d’un carburant à l’autre grâce à un commutateur. Il s’agit là d’une
technique plus souple qui conserve au moteur de bonnes performances et renforce
l’autonomie du véhicule. Le prix du GPL a alors été aligné sur celui du
gazole. En 1995, le parc automobile GPL n’était pourtant que de 30 000
unités (en majorité des véhicules de société) et l’on ne recensait que
700 sations-service sur le territoire délivrant ce carburant. Le seul
argument « vert » s’est avéré, à l’époque, insuffisant pour
assurer le décollement des ventes.
7. En 1996, le Gouvernement français a
allégé la fiscalité sur le GPL ce qui a permis de voir passer le prix du
litre de 4,70 F à 2,50 F. A la même époque, le ministre de l’environnement
a prévu de nombreux avantages fiscaux liés à ce nouveau carburant dans le
cadre d’un projet de loi sur l’air qui sera finalement refusé. Ce sont ces
mesures qui ont permis de relancer l’intérêt pour le GPL. Les constructeurs
ont désormais envisagé l’équipement en série sur un nombre croissant de
modèles, les installateurs agréés se sont développés, les stations-service
se sont multipliées et les ventes ont connu une forte hausse.
8. En 1997, les pics de pollution et la mise
en place de la circulation alternée pour les véhicules essence et diesel ont
renforcé le succès du GPL dont l’atout majeur reste surtout le prix au
litre, moins cher que celui de l’eau minérale.
Principe de fonctionnement
9. L’avantage du GPL
tient à ce qu’il s’adapte « naturellement » aux moteurs
fonctionnant à l’essence sans plomb. De fait, si on l’injecte dans le
moteur, à la place de l’essence, celui-ci continue de tourner sans problème
particulier. En revanche, le GPL ne s’adapte pas aux moteurs diesels.
Pourtant, la concentration des poussières et des hydrocarbures dans les gaz d’échappement
des moteurs au GPL étant très inférieure à celle des gaz émis par les
moteurs diesels, le GPL pourrait être une bonne solution de substitution pour l’équipement
des transports publics, autobus, taxis, etc.
10. Cette souplesse se heurte cependant à
une limite : le GPL ne peut fonctionner avec les moteurs anciens (plus de
60 000 km, ceci incluant les moteurs au super) : les propriétés
décapantes de la combustion élimineraient les dépôts de calamine et les
films hydrocarbures gras, et le moteur perdrait en taux de compression.
11. Quel que soit le cas de figure, le
véhicule fonctionne toujours en bi-carburation. En effet, le circuit à essence
classique subsiste intégralement et c’est toujours l’essence qui est
utilisée pour démarrer le moteur (le GPL ne le permettant pas dans cette
configuration). Au bout de quelques secondes, le GPL peut prendre le relais
automatiquement.
12. C’est le conducteur du véhicule qui
choisit son mode de carburation, en agissant sur un « commutateur »
placé sur le tableau de bord. De la sorte, si le véhicule tombe en panne
sèche de GPL, il reste l’autonomie du réservoir à essence.
13. Les principales modifications à apporter
au véhicule sont l’adjonction d’un réservoir séparé et d’un circuit d’admission
propre. Le réservoir peut être installé dans le coffre du véhicule (sous la
forme d’une bonbonne cylindrique) ou se loger à la place de la roue de
secours (réservoir torique). Celle-ci est alors soit stockée dans le coffre,
soit remplacée par une simple bombe anti-crevaison (rouler sans roue de secours
n’est en effet pas interdit par le code de la route).
Les prescriptions à respecter
14. Les prescriptions
techniques sont majoritairement basées sur le règlement 67 annexé à l’accord
de Genève du 20 mars 1958 révisé concernant l’homologation des
équipements spéciaux des automobiles utilisant les gaz de pétrole liquéfiés
dans leur système de propulsion. Ce règlement a été « ratifié »
par la France qui s’est donc engagée à en respecter les termes et donc à
les traduire en réglementation française. Les règles particulières
concernant le GPL sont édictées par le CFBP (Comité français du butane et du
propane) sous le contrôle de l’administration.
15. Le véhicule transformé doit repasser
par les services de la DRIRE (service des mines) pour une réception « à
titre isolé ». Il en coûte environ 500 F. La carte grise doit être
également modifiée : la rubrique énergie doit comporter la mention
« essence/gaz ». Le coût de cette prestation équivaut au prix d’un
cheval fiscal (de 278 F à 600 F selon les régions).
16. Un arrêté du 15 janvier 1985 (voir en
annexe) déterminait les conditions d’homologation des véhicules utilisant le
GPL comme source d’énergie. D’autre part, les différentes pièces
techniques doivent être conformes à un cahier des charges rigoureux ; d’autre
part, l’installateur doit posséder l’agrément du CFBP (Comité français
du butane et du propane). Les services de la DRIRE sont chargés de vérifier
les certificats de conformité des pièces et d’agrément de l’installateur,
puis de contrôler l’installation.
17. Cet arrêté a été complété par un
arrêté du 4 août 1999 (JO no 200 du 29 août
1999, p. 12947) afin d’introduire les nouvelles prescriptions du
règlement no 67 annexé à l’accord de Genève du
20 mars 1958 révisé concernant l’homologation des équipements
spéciaux des automobiles utilisant les gaz de pétrole liquéfiés dans leur
système de propulsion. Ce dernier arrêté est applicable au 1er janvier
2001, mais, depuis le 1er janvier 2000, toute
intervention (remplacement) effectuée doit conduire à l’adjonction des
dispositifs de sécurité prévus (soupape de supression notamment).
18. L’installation ne peut se faire que par
l’intermédiaire d’un installateur agréé par le CFBP (Comité français du
butane et du propane). C’est d’ailleurs bien souvent l’installateur qui,
une fois les modifications effectuées, s’occupe des démarches auprès du
service des mines pour la conformité du véhicule et présente les différentes
pièces administratives nécessaires.
19. L’installateur va intégrer les
différentes pièces suivantes :
Un réservoir et son orifice de remplissage
(généralement à côté de celui du réservoir à essence). Le GPL est stocké
à l’état liquide, sous basse pression, dans le réservoir ;
Pour acheminer le GPL vers le moteur, une polyvanne puis
des canalisations de cuivre. L’étanchéité entre le réservoir et la
polyvanne est assurée par un joint spécial ;
A l’arrivé au moteur, une électrovanne d’entrée
chargée de réguler l’arrivée du fluide, le vapo-détendeur permettant
ensuite de le faire passer de l’état liquide à l’état gazeux. Dans les
moteurs modernes on procède à l’injection du liquide ;
Un distributeur GPL et les injecteurs GPL (ou un
mélangeur air/gaz) qui distribuent finalement le carburant dans le moteur. Un
boîtier électronique régule le débit de carburant ;
Enfin, une jauge à carburant et un bouton commutateur
« essence/gaz » sont installés sur le tableau de bord du
véhicule ;
Dans certains pays, nordiques notamment, un dispositif
de sécurité - une soupape de sécurité - est monté sur le réservoir
GPL. La soupape de sécurité se compose d’une valve (piston) maintenue en
position fermée par un ressort taré. L’orsqu’une pression dans le réseau
excède le seuil de détection, la valve se soulève et laisse échapper le gaz
jusqu’à ce que la pression interne revienne à la normale. En cas de nouvelle
surpression, la soupape se déclencera à nouveau. Pour fonctionner
correctement, la soupape de décharge doit baigner dans l’environnement gaz
(ciel gazeux). C’est pour cette raison qu’elle est placée à proximité de
la polyvanne ou sur celle-ci.

Les limites techniques
20. Comme indiqué supra,
tous les moteurs ne peuvent pas être équipés. De plus, les équipements
peuvent varier selon le type de carburation en place sur le véhicule. En fait,
il est recommandé de n’équiper que les moteurs pour lesquels un
« kit » est expressément désigné par le constructeur. Certains
installateurs peuvent en effet proposer des équipements un peu
« bricolés », avec notamment un panachage des marques de composants
installés, afin d’adapter le système sur un maximum de véhicules. Cette
solution est à proscrire, pour éviter les problèmes de pannes, de mauvais
réglages et surtout de surconsommation (qui nuiraient à l’intérêt
financier de l’opération).
La responsabilité de l’installateur
21. Ce dernier a la
responsabilité du montage, et c’est à lui de conseiller utilement le
candidat usager (art. 8 de l’arrêté du ministère des transports du
15 janvier 1985). Dans tous les cas de figure, la DRIRE (service des mines)
constitue l’ultime procédure de contrôle pour s’assurer que les règles de
sécurité et les procédures réglementaires ont été respectées.
L’enquête
22. A la suite des
saisines dont elle a fait l’objet, la Commission a immédiatement lancé une
enquête auprès des personnes, professionnels et organismes concernés. Ont
ainsi été interrogés, dans un premier temps par écrit, puis par entretien
direct :
Le Comité des constructeurs français d’automobiles
(CCFA) ;
Le Conseil national des professions de l’automobiles
(CNPA) ;
L’Association auxiliaire de l’automobile
(AAA) ;
La Chambre syndicale des importateurs automobiles
(CSIAM) ;
La Chambre syndicale nationale des experts en
automobile ;
Le Conseil national des professions de l’automobile
(CNPA) ;
La Fédération des industries des équipements pour
véhicules (FIEV) ;
Le Comité français du butane et du propane
(CFBP) ;
L’Union technique de l’automobile et du cycle
(UTAC) ;
Le Bureau de normalisation des appareils d’utilisation
des combustibles gazeux (BNG) ;
La Direction de la sécurité et de la circulation
routière (DSCR - SR/V) ;
Le Bureau de normalisation du pétrole, département
matériels (BNP) ;
L’Institut français du pétrole, division d’applications
énergétiques.
23. Dans le même temps, la presse s’est
fait, de manière très diverse et souvent inconsidérée, l’écho de l’accident
survenu à Vénissieux en cherchant à déterminer les causes et les
responsabilités.
24. Des appels à témoignage et la lecture
de la presse ont permis de dénombrer d’autres cas d’explosions de
réservoirs de :
Renault 4L de La Poste, le 25 août 1994 à
Roanne ;
Citroën CX break, le 23 juillet 1996 à
Orléans (La République du Centre) ;
Ford Orion, en avril 1997 à Firminy (Le Progrès) ;
Citroën C 25, camping-car, le
12 octobre 1997 à Ivry (Le Parisien) ;
Peugeot 405 MI 16, le 16 mai 1998 à
Châteaubourg (Ouest France) ;
Renault Safrane, le 19 juillet 1998 à Brissac
(Courrier de l’Ouest) ;
Renault 21, le 26 mars 1999 à Claye-Souilly (La
Marne).
25. Plus récemment, fin
septembre 1999, un accident survenu entre Aix-en-Provence et Marseille est venu
confirmer la dangerosité des feux de véhicules équipés en GPL. Une
205 Peugeot a heurté violemment un arbre avant de finir sa course contre
un mur en béton. Les secours sont intervenus et ont respecté les consignes de
sécurité édictées après l’accident de Vénissieux à savoir respecter une
distance de 20 mètres du véhicule en feu. Pourtant, lors de l’explosion
du réservoir, deux sapeurs-pompiers ont tout de même été blessés,
heureusement moins gravement que dans l’accident de Vénissieux (brûlures aux
mains dues à des projections de matières plastiques brûlantes et lésions des
tympans).
26. Enfin, le 9 décembre 1999, le réservoir
d’un véhicule alimenté au GPL a éclaté dans le 18e arrondissement
de Paris. Il a été démontré dans cette affaire qu’un incendie a pris
naissance au niveau du moteur, quelques secondes après que le conducteur eut
démarré. L’éclatement du réservoir qui n’était pas muni de soupape est
survenu alors que les sapeurs-pompiers arrivaient sur les lieux. Il n’y a
heureusement pas eu de blessés bien que le réservoir ait été projeté à
plus de 25 mètres.
27. Il faut aussi signaler l’incendie d’un
véhicule utilitaire alimenté au GPL le 27 septembre 1999 à
Nanterre. Le conducteur ayant constaté une prise de feu dans le compartiment
moteur au moment du démarrage a pu demander l’intervention des secours en
précisant la nature du carburant. Le véhicule a été totalement détruit mais
le réservoir n’a pas explosé, une fuite se manifestant au niveau du
raccordement des tuyauteries. Le givrage provoqué par la détente des gaz au
voisinage de la fuite en a limité le débit. Il convient de remarquer que la
prise de feu est intervenue dans ces deux cas par la mise à feu d’une fuite
du circuit d’essence qui est systématiquement utilisé au démarrage. C’est
ensuite l’incendie du véhicule qui peut provoquer l’éclatement du
réservoir.
28. Il faut savoir que l’expérience a
montré que le serrage de la polyvanne « au couple » (sur le joint
dit « fusible ») n’assure pas très longtemps l’étanchéité et
que les intervenants ont tendance à forcer le serrage, « matant »
ainsi le joint qui, emprisonné dans le métal du réservoir est en quelque
sorte « protégé » et n’est plus susceptible de fondre (dans l’hypothèse
où il aurait été calculé pour cette fonction de « joint
fusible » ce qui a été démenti par certains professionnels).
29. Il semble que, dans l’accident de
Vénissieux, le premier à prendre feu a été le réservoir d’essence.

30. Les flammes ont provoqué l’échauffement
du réservoir GPL sur un côté seulement. Selon les premières expertises, l’eau
des pompiers aurait créé un choc thermique sur le métal chauffé à blanc au
point de le faire exploser. Selon une autre version, le choc thermique aurait
créé des micro-fissures, laissant échapper le gaz dans un premier temps. Des
témoins affirment, en effet, avoir aperçu une sorte de torchère, vite suivie
de l’explosion.
31. Il y aurait donc eu en France un terrible
quiproquo et une ignorance quant aux effets de ce fameux joint d’étanchéité
censé jouer le rôle de fusible en cas d’incendie. Certains y voient un
fusible salvateur, d’autres un fusible à l’occasion. La nuance est de
taille. Pour en avoir le cœur net, GPL Magazine a interrogé la
sous-direction de la réglementation technique des véhicules. Ce sont ces
services qui, en 1985, ont conclu à l’autorisation du réservoir type
italien, celui-là même qui a explosé à Vénissieux. La réponse est
claire. « Nous faisons des normes pour la sécurité routière. Le
réservoir a explosé au bout de vingt minutes, les occupants de la voiture ne
risquaient plus rien. »
32. Théoriquement, l’éclatement d’un
réservoir rempli de GPL est inéluctable si la température du liquide dépasse
la température critique. A l’occasion d’un incendie, les réservoirs d’essence
pouvaient s’ouvrir brutalement quand ils étaient constitués de tôle, l’essence
libérée brutalement étant vaporisée et pouvant produire un flash. Il n’y
avait pas de véritable explosion. Avec les réservoirs en matière plastique,
il se produit une fuite qui conduit à l’écoulement de l’essence. Celle-ci
peut atteindre d’autres véhicules et propager l’incendie mais il n’y a
pas d’explosion. Néanmoins, les réservoirs supportent des crash-tests à
100 km/h contre une arête de fonte taillée à 45o. Au
sortir ils doivent rester absolument étanches. Rares sont les crash-tests aussi
violents. Il convient donc de se montrer rassurants pour les
automobilistes : une installation bien faite ne présente pas de danger
particulier. Reste maintenant le problème des sauveteurs en cas d’incendie.
33. Comme l’a montré l’accident de
Vénissieux, les services de secours sont en effet les plus exposés à une
explosion.
Les risques particuliers encourus
du fait des véhicules fonctionnant au GPL
Le risque d’explosion
34. Alors que pour ce qui
concerne les véhicules à essence, le risque principal est constitué par l’incendie,
les véhicules fonctionnant au GPL présentent, si leur installation n’est pas
équipée des dispositifs de sécurité nécessaires, le risque
particulièrement grave d’explosion. En effet toute élévation de
température du réservoir contenant le GPL (notamment lors de l’incendie du
véhicule) conduit à une augmentation très importante de la pression dans le
réservoir et à l’explosion de celui-ci dès que sa limite de résistance est
dépassée. Il existe, en outre, les risques de fuite (avec le risque corollaire
d’inflammation) inhérents à tout appareil fonctionnant au gaz notamment s’ils
ne sont pas périodiquement vérifiés et constamment entretenus.
35. Concernant les fuites simples, le GPL est
un gaz plus lourd que l’air qui se concentrera au niveau du sol et, dès que
les proportions gaz-air seront adéquates, à la moindre source d’ignition
(cigarette évidemment mais aussi action sur un interrupteur électrique,
départ d’un ascenseur...) et l’explosion se produira d’autant plus
facilement que le lieu où se trouve alors le véhicule est confiné (garage
couvert par exemple) et favorise ainsi la concentration du gaz.
36. Des études ont montré que lors d’un
incendie de véhicule GPL le dégazage du réservoir (à travers la soupape de
surpression notamment) conduit à la création d’une torchère de gaz
enflammés dont l’énergie est suffisante pour porter atteinte aux planchers
(même si ceux-ci sont constitués d’une dalle en béton) de ces parkings
couverts, qui risquent de s’effondrer alors même que la structure du
bâtiment - en béton - semble résister.
Le risque de surremplissage du réservoir
37. D’autres
défectuosités susceptibles d’être génératrices d’accidents graves ont
été mises en lumière au cours de l’enquête de la Commission, en
particulier concernant le remplissage des réservoirs GPL. Les dispositifs de
sécurité de remplissage - qui sont destinés à garantir que le
réservoir ne pourra pas être rempli à plus de 80 % de gaz
liquide - ne sont pas efficaces dans tous les cas, car ils sont basés
sur une différence de pression (entre le réservoir et le flexible d’alimentation)
alors que la pression des pompes d’admission n’est pas normalisée. Plus
généralement, à ce jour, la limitation du remplissage repose sur un système
de flotteur analogue à celui des chasses d’eau, dont la fiabilité est
faible. Il s’ensuit que l’utilisateur faisant son plein de carburant peut
inconsciemment ou tout à fait consciemment (il serait en effet possible de
forcer le remplissage, ce qui est recherché par certains utilisateurs déçus
du peu d’autonomie en mode GPL) remplir entièrement son réservoir de gaz
liquéfié. On appelle cela un « plein hydraulique ». Les conditions
de pression ne sont plus les mêmes que dans le cas où il existe une phase
gazeuse suffisante. Il faut savoir qu’une augmentation de 1 oC
développe alors une augmentation de pression de 10 bars environ. Or
certains utilisateurs font leur plein le matin « à la fraîche »,
car le volume massique du carburant froid est évidemment plus faible.
38. Le surremplissage peut aussi être obtenu
si le fond du réservoir n’est pas dans un plan parfaitement honrizontal ou si
la timonerie du flotteur n’est pas dans un plan vertical. Il s’ensuit que le
métal constitutif du réservoir « travaille », se déforme,
« fatigue » lors de la dilatation du liquide et, in fine, se
fragilise.
39. Il est à noter que, lors d’un plein
hydraulique, le flotteur, soumis à une trop forte pression, s’écrase et qu’il
ne remplit ensuite plus son office.
40. Si le réservoir lors de l’incendie
éventuel est en plein hydraulique, d’une part, l’explosion se produira plus
rapidement (et plus sûrement) et celle-ci sera plus importante du fait de la
plus grande quantité de gaz contenue.
Le risque de brûlure froide par refoulement
lors du remplissage du réservoir
41. La Commission a été
récemment saisie d’un accident survenu à l’occasion du remplissage. En
avril 1999 vers 11 heures, Mme O. a subi des brûlures aux mains ayant
entraîné une interruption temporaire de travail de trois semaines. Il n’est
pas contesté que ses brûlures aient été produites par l’écoulement de GPL
survenu alors que Mme O. effectuait le plein du réservoir de son véhicule
à la station-service GPL d’un centre commercial. Il est cependant possible
que Mme O. n’ait pas correctement ajusté le pistolet sur l’embout
adaptable de son réservoir.
42. L’enquête conduite par la gendarmerie
a permis de rassembler les informations suivantes :
La société P. a fait état de contrôles subis par l’installation
de distribution de GPL du centre commercial « X » attestant de la
conformité de ce distributeur à la législation en vigueur ;
Le procès-verbal de synthèse établi par la brigade
territoriale de la gendarmerie nationale relate l’exposé des faits de
Mme O., tels qu’elle les a présentés lorsqu’elle a déposé plainte
en avril 1999 ;
Les représentants de la société P. affirment qu’ils
n’ont « pas de problème particulier avec la station “X” »...
et que « l’accident est consécutif soit à une mauvaise
manipulation de la part de la cliente, soit à une défaillance de l’embout ».
Le directeur du magasin affirme qu’à sa connaissance « il n’y
a jamais eu d’incident aussi grave à la station-service ».
43. L’audition du responsable de la
station-service apporte des informations intéressantes : « J’ai
remarqué qu’une cliente avait du mal avec le GPL... Je me suis dirigé
aussitôt auprès de cette cliente... J’ai constaté que le pistolet se
trouvait mal enclenché dans l’embase du réservoir du véhicule... Avant de
retirer le pistolet de son embase, j’ai constaté que du gaz s’échappait.
Des renseignements recueillis auprès de la société P. qui a installé la
pompe, ce gaz venait du tuyau de la pompe... Je tiens à signaler que cette
embase est adaptable sur le réservoir de la voiture de cette cliente et
appartient au client... J’ai constaté que cette dame avait les mains
blanches... » « ... et je n’ai jamais constaté d’incident
causé par un problème de cette pompe GPL ; les seuls incidents que j’ai
pu voir venaient d’un mauvais enclenchement du pistolet de la part des
clients ». « La société P. m’a informé que des incidents
semblables étaient déjà arrivés dans d’autres stations. Il ressort que ces
incidents proviennent de mauvaises manipulations des clients et non d’une
défaillance du matériel de la station-service... » « Je tiens à
signaler que la pompe n’est pas équipée par son installateur d’un système
empêchant le gaz de venir vers le réservoir lorsque le pistolet est mal
enclenché... »
44. Ce témoignage indique que l’écoulement
du GPL à l’occasion du remplissage n’est pas exceptionnel et qu’il peut
survenir même avec un matériel entretenu. Compte tenu des effets du contact du
GPL avec les mains, il semble nécessaire de prévoir un dispositif de
sécurité bloquant le pistolet s’il n’est pas correctement engagé dans l’embase
fixée à l’origine du réservoir.
45. Le risque existe pour les professionnels
chargés d’effectuer le plein des véhicules mais ceux-ci bien formés portent
vraisemblablement des gants ainsi qu’il est conseillé à tous les usagers du
GPL.
46. Il apparaît donc que, compte tenu du
risque présenté par le remplissage des réservoirs, d’écoulement de GPL sur
les mains des clients, sur leurs vêtements ou sur le sol, les appareils de
distribution devraient être munis d’un dispositif qui bloque le pistolet de
livraison s’il est mal assujetti à l’orifice des réservoirs.
47. En dehors du risque de
« brûlures » telles que celles qui ont été constatées sur les
mains de Mme O., des risques d’incendie, provoquant des brûlures graves
aux clients dont les mains et les vêtements seraient recouverts de GPL ainsi
que le sol à proximité de l’endroit où ils se trouvent, sont très
importants. Des aménagements devraient donc être prévus pour les éviter.
48. Le fait qu’il soit possible de
déclencher l’écoulement du GPL dont la vaporisation produit d’une part un
brutal abaissement de température provoquant des lésions présentant l’aspect
de brûlures, et d’autre part la production d’une quantité importante de
gaz combustibles, la manœuvre ne devrait pas être confiée à des
non-professionnels sauf si des dispositifs de sécurité permettent de supprimer
le risque.
49. Il est à noter que le responsable de la
station-service devait surveiller plus de dix pompes à carburant et une pompe
à GPL, tout en assurant le service de la caisse.
50. L’affirmation de la société P.
attribuant la responsabilité de l’accident « au montage défectueux
du dispositif de la voiture » n’est étayée par aucune constatation
d’expert qui aurait éventuellement pu vérifier si ce montage était
défectueux, s’il ne correspondait pas à un matériel agréé, et si ces
défauts étaient de la responsabilité du propriétaire du véhicule. De toutes
manières, de telles imperfections du véhicule devraient avoir pour
conséquence l’impossibilité de procéder au remplissage du réservoir.
Les risques dus au manque de compétence
de certains installateurs
51. Un autre problème a
été soulevé lors de l’enquête de la CSC : il concerne la compétence
des installateurs. Il semble qu’une partie (faible mais non nulle) de ceux-ci
n’ait pas les connaissances nécessaires (même s’il s’agit d’excellents
garagistes par ailleurs) pour mener à bien une telle modification de véhicule.
L’agrément est délivré par le CFBP qui est avant tout un organisme
constitué des professionnels du gaz en bouteille.
52. Il est bien évident que compte tenu des
risques évoqués ci-dessus le fait de réaliser une installation non conforme
aux règles de l’art ne peut qu’aggraver les accidents.
Les solutions retenues et leurs insuffisances
La question de la soupape de sécurité
53. En 1985, le
ministère des transports avait le choix entre des réservoirs de type
hollandais avec soupape et des réservoirs de type italien sans soupape. A l’époque,
les soupapes ne présentaient pas toutes les garanties de fiabilité
nécessaire. Elles pouvaient, par exemple, dégazer en conditions normales d’utilisation,
plusieurs cas ayant été recensés lors d’un été avec une température
normale pour la saison. Ailleurs, des garages chauffés alors que le plein avait
été fait par grand froid avaient provoqué ce type de dégazage mais la
soupape n’est pas forcément à incriminer dans ce dernier cas.
54. Par contre, les réservoirs italiens sont
réputés très étanches, sans soupape, dans un pays aux conditions
météorologiques proches des nôtres et avec un million de véhicules
équipés, sans catastrophe connue (il semble néanmoins que des problèmes ont
dû exister car des travaux d’évaluation de dispositifs de sécurité,
notamment des soupapes, sont à l’heure actuelle à l’étude en Italie).
55. Compte tenu de ces indications, en
France, les pouvoirs publics ainsi que l’UTAC qui intervient comme
« centre technique de l’automobile » (qui est chargé de proposer
les solutions techniques et qui de plus agrée les installateurs GPL) ont opté
pour le « tout étanchéité ». C’est aussi la solution retenue en
Italie. Un des articles de l’arrêté du 15 janvier 1985 qui réglemente
l’équipement des véhicules GPL précise ainsi que « les sorties en
phase gazeuse ne peuvent être utilisées que pour la carburation du
véhicule ». On ne peut pas être plus clair. Ces quelques phrases
interdisant de fait la soupape.
56. Les réservoirs sont réputés tenir
vingt à trente minutes avant explosion, ce qui laisse en principe le temps d’évacuer
le véhicule et de s’en éloigner (à Vénissieux, l’explosion s’est
produite vingt minutes après le début de l’incendie). Il semble que ces
considérations reposaient avant tout sur la connaissance des caractéristiques
de résistance à la pression des réservoirs. Malheureusement, dans le cas des
réservoirs de GPL, il s’agit avant tout de résistance au feu et d’évolution
des caractéristiques du métal constitutif des réservoirs sous l’effet de la
chaleur et d’éventuels chocs thermiques (au contact de l’eau ou des mousses
d’extinction) ou gradients de température (réservoirs chauffés sur un seul
côté par exemple).
57. A la question de savoir quelles données
techniques ont évolué pour permettre de passer d’une interdiction à une
obligation, le ministère des transports a répondu : « le tarage.
En effet, les soupapes hollandaises étaient très sensibles à la pression. En
France, le plafond de dégazage est plus élevé : 25 bars contre
20 bars pour certaines de ces anciennes soupapes. Il y a d’ailleurs fort
à parier que la future limite sera de 28 ou 30 bars. En clair, seul un feu
pourra provoquer le dégazage et non une promenade dans les Corbières au mois d’août.
De plus, un compartiment étanche permet en cas de petit dégazage de conduire
le GPL vers l’extérieur sans entrer dans l’habitacle ».
58. Ceci étant, des milliers de voitures
roulent aujourd’hui sans cette soupape. Encore une fois, il n’y a pas à
proprement parler de danger pour leurs propriétaires ou leurs passagers. En
revanche, si des casseurs mettent le feu au véhicule ou si une mise à feu
accidentelle se produit, les pompiers pourront s’exposer à des risques
certains.
Les discussions en cours
59. Des discussions ont
eu lieu tant au ministère des transports qui a convoqué les professionnels du
GPL pour leur demander s’ils étaient prêts à changer de normes, qu’à un
niveau interministériel où une décision devait être prise. Le
28 février 2000, un communiqué interministériel fait le point sur la
position du Gouvernement (voir en annexe).
60. De toute façon, la France devait changer
de norme en 2001 pour adopter un règlement international avec soupape
obligatoire. L’accident de Vénissieux aura eu, en l’occurrence, un effet d’accélérateur
puisque cette nouvelle norme (soupape obligatoire) devrait finalement rentrer en
vigueur courant 2000.
L’avenir de la filière
61. De nombreux
consommateurs, aujourd’hui, se méfient du GPL. Ce dernier reste pourtant sans
danger pour ceux qui l’utilisent à l’aide d’une installation correctement
sécurisée, propre et économique (voir annexe). Les fabricants français (et
certains étrangers tels que Volvo) semblent décidés à aller encore plus loin
avec ce carburant. Il est possible que ces fabricants prennent, à l’avenir,
à leur charge la modification des véhicules (première monte) qu’ils ont
commercialisés.
62. Le problème le plus préoccupant reste
bien évidemment le parc actuellement en service équipé par des monteurs
indépendants (entre 90 000 et 120 000 véhicules sont concernés
selon les sources). Les modifications ont un coût qui varie de
1 000 F (adjonction simple d’une soupape sur un réservoir prévu
pour ce faire) à 8 000 F et même 10 000 F s’il faut
changer entièrement le réservoir.
63. Ces utilisateurs sont, entièrement à
leur corps défendant, propriétaires de véhicules rendus potentiellement
dangereux par l’application d’un règlement national et il apparaît
difficile de leur faire entièrement supporter le coût d’une telle
modification. Dans le cas contraire, cela pourrait entraîner une désaffection
complète des utilisateurs pour le GPL qui permet d’abaisser les teneurs
en particules et en hydrocarbures des gaz d’échappement même si rien n’est
démontré pour l’un des polluants devenu le plus préoccupant, l’oxyde d’azote.
64. Des pompiers et la Fédération des
automobile-clubs ont proposé de marquer les plaques d’immatriculation des
voitures de façon à permettre le repérage des véhicules fonctionnant au GPL.
Cette idée présente deux inconvénients majeurs. D’abord, cette
signalisation permettrait à des personnes animées de mauvaises intentions de
mieux repérer ces véhicules, même si un œil averti reconnaît déjà vite le
bouchon de remplissage supplémentaire (voir schéma) présent sur certains des
véhicules GPL (première monte notamment). Ensuite, en cas d’incendie,
il n’est pas évident d’identifier une marque de couleur au milieu des
flammes et de la fumée ou, dans des cas extrêmes, lorsque la plaque a fondu. D’autres,
et notamment certains responsables syndicaux des pompiers, ont imaginé un
système d’alerte par fumigène coloré. Placé à côté du réservoir ou
mélangé au revêtement de celui-ci, ce procédé se déclencherait lorsque la
température s’élève anormalement. Cette solution peut s’avérer peu
efficace si l’incendie survient la nuit ou en milieu clos, mais elle présente
des avantages notables par rapport à la précédente.
65. Une autre piste consisterait à équiper
les véhicules au GPL d’une « puce » interrogeable à
distance par un petit émetteur dont disposeraient les services de secours
(codage du message afin d’éviter les bricoleurs). Cette solution présente l’avantage
de signaler si le véhicule en feu ainsi que les véhicules proches (cas des
parkings) sont du type GPL. Encore faut-il que les intervenants possèdent
l’émetteur en état de marche lors de leur intervention et que la puce n’ait
pas été détruite avant qu’ils n’arrivent sur les lieux (15 à
20 minutes après le début de l’incendie).
66. Il conviendrait donc d’adapter un
dispositif de signalisation destiné à prévenir les services de secours des
caractéristiques du véhicule. Afin d’éviter les actes de malveillance, ce
dispositif ne devrait entrer en fonction que si un incendie se déclare (une
solution pourrait être un corps chimique placé au plus près du réservoir et
qui signalerait l’augmentation dangereuse de la température par un signal
coloré par exemple) ou sur sollicitation desdits services de secours (puce
électronique). Le dispositif à émission de fumée colorée aurait le mérite
de prévenir toute personne susceptible d’approcher le véhicule et non
seulement les services de secours. Un tel système bien que n’offrant pas une
efficacité totale permettrait peut-être d’éviter certains accidents.
67. L’idéal serait évidemment de disposer
de réservoirs qui n’explosent pas. C’est théoriquement possible et ce
depuis longtemps. Les réservoirs de type hollandais disposent d’une soupape
de sécurité qui permet de dégazer et de faire chuter la pression interne dès
qu’elle devient trop importante. Néanmoins des essais ont montré que pour
que cette soupape soit efficace, il convient qu’elle possède un débit
suffisant (un consensus semble se dégager pour des débits supérieurs à 17 à
20 m3 par minute selon la capacité du réservoir).
68. Concrètement, le gaz sous pression s’échappe
et s’enflamme provoquant une sorte de torchère plus ou moins importante.
Cette flamme s’ajoute aux autres, mais l’explosion est évitée en même
temps que la dispersion de projectiles alentours. Si le réservoir de
Vénissieux avait été équipé de cette soupape, il n’aurait sans doute
jamais explosé. Il convient cependant de rester prudent car rien n’est
aujourd’hui absolument prouvé et, de plus, il n’est pas à exclure qu’une
soupape refuse un jour de fonctionner (vice de fabrication, mauvais montage...).
Il conviendra donc de prévoir au moins un autre dispositif de sécurité comme
un véritable joint fusible par exemple.
69. Les tests réalisés avec l’installateur
France GPL ou les essais réalisés par Renault en 1996 sur une Clio, ont
montré que les soupapes haut débit fonctionnaient correctement. Il
conviendrait donc de rendre obligatoires deux dispositifs de sécurité : l’un
étant constitué d’une soupape à haut débit (convenablement vérifiée afin
d’assurer une bonne fiabilité dans le temps), l’autre étant destiné à
suppléer une défectuosité toujours possible de la soupape. Un véritable
fusible thermique pourrait constituer une solution à ce problème. Des essais
ont été conduits qui ont montré que de telles « pastilles
fusibles » existent et qu’elles possèdent une bonne fiabilité.
70. Le rapporteur insiste pour que les
pouvoirs publics envisagent l’adoption de revêtements de réservoirs anti-feu
du type de celui utilisé par les militaires pour la protection des munitions.
Des fabricants proposent actuellement de tels revêtements dont certains ont
montré leur efficacité au cours d’essais organisés par le CFPB
en 1999. Les réservoirs équipés de ces revêtements n’ont ni explosé
ni dégazé.
L’avis des professionnels
71. Conformément aux
termes de l’article 8 du décret no 84-270 du
11 avril 1984, l’ensemble des pièces du dossier ont été mises en
communication auprès des personnes concernées du 24 janvier 2000 au
23 février 2000. Ainsi ont été invités à venir consulter le
dossier et à formuler toute remarque pertinente les personnes, sociétés ou
organismes suivants : SNOP-SP : Syndicat national des officiers
professionnels sapeurs-pompiers ; CCFA : Comité des constructeurs
français d’automobiles ; UTAC : Union technique de l’automobile
et du cycle ; CSNEAF : Chambre syndicale nationale des experts en
automobile de France, Auto Plus ; BMP de Marseille : bataillon
de marins-pompiers de Marseille ; DRIRE PACA -FIEV : Fédération
des industries des équipements de véhicules ; BNPé : Bureau de
normalisation du pétrole ; CNPA : Conseil national des professions de
l’automobile ; CFPB : Comité français du butane et du
propane ; IFP : Institut français du pétrole ; BNG :
bureau de normalisation du gaz ; CSIAM : Chambre syndicale des
importateurs automobiles ; Sénat : M. le sénateur Nicolas
About ; Assemblée nationale : M. le député André Aschieri ;
DSCR : direction de la sécurité et de la circulation routière ;
brigade de sapeurs-pompiers de Paris ; société Primagaz ; SFEPA :
Syndicat des fabricants d’équipement et de pièces pour automobiles ;
DIGITIP : Direction générale de l’industrie des technologies de l’information
et des postes ; DGCCRF : Direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes.
72. Le CCFA considère, dans ses
observations, que le problème est résolu par le « nouveau
règlement 67 », mais la préconisation d’une soupape de sécurité
ou d’un bouchon fusible nous semble très insuffisante (actuellement, les
autocuiseurs, qui sont quand même des appareils moins sophistiqués et
considérablement moins onéreux qu’un véhicule automobile mais qui peuvent
aussi engendrer des risques importants, sont pourvus de deux dispositifs de
sécurité : soupape et joint d’extrusion). Le fait qu’un essai à la
flamme soit semble-t-il prévu n’exclut pas qu’un écran thermique nous
semble une bonne protection supplémentaire. Les essais effectués par le CFBP
sur plusieurs configurations de sécurité ont montré que les seules
configurations n’ayant occasionné aucun trouble supplémentaire sont celles
qui disposaient de ce revêtement isolant. Cette protection pourrait constituer
(sous réserve de confirmation des résultats de ces essais sur un nombre plus
grand de matériel) une piste pour diminuer les risques, jusqu’ici aggravés,
lors de l’incendie d’un véhicule dans un local clos (parking en sous-sol
notamment).
73. A l’heure actuelle, rien ne nous prouve
que le problème est résolu par l’adjonction réglementaire d’un seul
dispositif de sécurité. Car enfin, même dans le cas où la réception aura
été correctement faite (ce n’était pas le cas jusqu’à présent et aucune
mesure vraiment nouvelle ne nous semble prise pour que cela change à l’avenir),
qui contrôlera la maintenance de cet unique dispositif dans le temps ?
Emet
l’avis suivant :
Pour sécuriser le véhicule
1. Rendre obligatoire
deux dispositifs de sécurité, l’un étant constitué d’une soupape à haut
débit (convenablement vérifiée afin d’assurer une bonne fiabilité dans le
temps), l’autre étant destiné à suppléer une défectuosité toujours
possible de la soupape. Un véritable fusible thermique ou l’adoption de
revêtements de réservoirs antifeu, du type de celui utilisé par les
militaires pour la protection des munitions, pourraient constituer une solution
à ce problème.
Pour identifier le véhicule
2. Adapter un dispositif
de signalisation destiné à prévenir les services de secours des qualités du
véhicule. Afin d’éviter les actes de malveillance, ce dispositif ne devrait
entrer en fonction que si un incendie se déclare ou sur sollicitation desdits
services de secours.
Mieux contrôler l’installation des dispositifs de
sécurité
3. Pour ce faire, il
convient de prévoir qu’à l’occasion du contrôle technique des véhicules
le certificat de contrôle ne soit pas accordé aux véhicules alimentés en GPL,
sans que soient vérifiés, selon une procédure particulière, un certain
nombre de points (tels que, par exemple, les dates d’épreuves et de
ré-épreuves des réservoirs, l’étanchéité des canalisations, le
fonctionnement des dispositifs de sécurité [soupape], le serrage des joints d’évents
ou des joints fusibles, le fonctionnement du dispositif d’arrêt de
remplissage pour éviter le plein hydraulique). La commission du contrôle
technique est invitée à se prononcer rapidement sur ces procédures.
Mieux former les intervenants et informer les utilisateurs
4. Assurer une meilleure
formation des intervenants et la sanctionner par un agrément géré par un organisme
indépendant des professionnels de la filière ou représentant l’ensemble
des parties intéressées (utilisateurs notamment).
5. Eduquer les utilisateurs, dans les
stations-service notamment, à ne jamais forcer lorsqu’ils font le plein (la
volonté d’accroître l’autonomie engendrant des risques supplémentaires)
et leur conseiller de consulter leur installateur s’ils constatent qu’ils
font régulièrement des « pleins hydrauliques » (leur limiteur de
remplissage pouvant alors être hors d’usage).
Dispositions concernant les dispositifs de remplissage
des stations-service
6. Il convient d’imposer
des limiteurs fiables mais aussi une pression de service minimale pour les
stations de distribution de GPL. Un débit de pompe trop faible empêche, en
effet, ce limiteur de jouer correctement son rôle.
7. Une normalisation ou une réglementation
des dispositifs doit être mise en œuvre (pistolet et orifice de remplissage du
réservoir) le plus rapidement possible, afin d’éviter les problèmes d’éventuelle
mauvaise connexion lors du remplissage.
8. Les appareils de distribution doivent
être munis d’un dispositif interdisant l’arrivée du GPL si le pistolet de
livraison est mal assujetti à l’orifice des réservoirs.
Dispositions concernant le parc existant
9. Les pouvoirs publics
doivent enfin prendre des mesures propres à inciter les possesseurs de
véhicules déjà sur le marché et dépourvus des dispositifs de sécurité
proposés ci-dessus à faire modifier leur installation.
Dispositions concernant le stationnement
10. Les véhicules
équipés en GPL, qui présentent un risque non négligeable d’émission d’une
« torchère » de gaz enflammés, doivent être interdits de
stationnement dans les parkings fermés accessibles au public en raison des
risques d’incendies incontrôlables.
Adopté au cours de la séance du
18 avril 2000, sur le rapport de M. Henri Viellard, assisté de
M. Jean-Michel Maignaud, conseiller technique de la Commission,
conformément à l’article R. 224-4 du code de la consommation.
© Ministère de l'économie, des Finances et de l'Industrie-
13 juin 2000