Esport : quel encadrement pour les compétitions de jeux vidéo ?

L’esport pour « electronic sport, sport électronique » est un secteur en pleine expansion. En France, les spectateurs de compétitions de jeux vidéo et les joueurs de jeux vidéo compétitifs se compteraient par millions. Quel est l’encadrement juridique de cette pratique ? On vous éclaire.

Auparavant, faute d’un meilleur cadre juridique, la pratique compétitive de jeux vidéo était assimilée à un jeu de hasard, et donc théoriquement interdite par la loi. Mais un nouveau cadre, mis en place par la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016, a permis de la sécuriser, notamment grâce aux articles 101 et 102. En 2017, deux décrets (n° 871 et 872) sont venus renforcer ces articles.

Le statut des joueurs professionnels

Depuis la loi pour une République numérique, le joueur professionnel salarié de l’esport est défini comme « toute personne ayant pour activité rémunérée la participation à des compétitions de jeu vidéo dans un lien de subordination juridique avec une association ou une société bénéficiant d'un agrément du ministre chargé du numérique ».

Son statut est encadré par le décret n° 872 du 9 mai 2017, qui s’adresse aux entreprises ou associations organisant des compétitions de jeux vidéo employant des joueurs professionnels ainsi qu’aux joueurs eux-mêmes.

Le texte définit les conditions d'obtention de l'agrément désormais requis pour employer des joueurs professionnels de jeux vidéo.

Esport : la demande d’agrément

L'agrément est délivré pour une durée de trois ans renouvelables. Sa demande doit être adressée par le représentant légal de l’association ou de la société au ministre chargé du numérique par voie électronique ou par lettre recommandée avec avis de réception. En cas de renouvellement, la demande doit être déposée, au plus tard, trois mois avant le terme de la période d’agrément.

La demande d’agrément doit comporter :

  1. l'adresse et la raison sociale de l'association ou de la société,
  2. l'adresse du principal établissement de l'association ou de la société ainsi que l'adresse de ses établissements secondaires, le cas échéant,
  3. l'objet de la société ou de l'association,
  4. les événements compétitifs et les disciplines auxquelles l'association ou la société envisage de participer,
  5. le cas échéant, les activités secondaires de l'association ou de la société,6.    la description des moyens humains, matériels et financiers mis en œuvre pour satisfaire l'objet pour lequel l'agrément est sollicité,
  6. la description des conditions d'emploi des joueurs professionnels salariés, en particulier leurs conditions d'entraînement, de formation et d'encadrement physique et mental,
  7. la description des moyens mis en œuvre pour prévenir les risques professionnels liés à l'exercice du métier de joueur professionnel de jeux vidéo compétitif.

Que doit comporter le contrat esport ?

Le décret, tout comme la loi pour une République numérique, précise également les caractéristiques du contrat de travail spécifique aux joueurs professionnels de jeux vidéo, qui est obligatoire pour les sociétés bénéficiant de l’agrément décrit ci-dessus.

Ainsi, la durée du contrat liant entreprise ou association d’esport et joueur professionnel ne doit pas être inférieure à la durée d’une saison de jeu vidéo compétitif de 12 mois et est conclu pour une durée maximale de cinq ans renouvelables.

Néanmoins, un contrat de travail à durée déterminée peut être signé pour une durée de moins de 12 mois :

  • dès lors qu'il court au minimum jusqu'au terme de la saison de jeu vidéo (1),
  • ou s'il est conclu pour assurer le remplacement d'un joueur professionnel de jeu vidéo en cas d'absence du joueur professionnel ou de suspension de son contrat de travail.

Et ceci en vue de :

  • la création d'une équipe pour concourir sur un jeu nouvellement lancé,
  • la création d'une équipe pour concourir sur un jeu où aucune autre équipe existante de l'employeur ne dispute de compétitions dans le même circuit de compétition,
  • la création d'un nouveau poste dans une équipe existante.

(1) Les modalités de détermination des dates de début et de fin des saisons de jeu vidéo sont précisées par voie réglementaire : voir tableaux.

Contrat esport : les mentions obligatoires à respecter

Le contrat esport doit être rédigé par écrit en au moins trois exemplaires. Des mentions obligatoires doivent y figurer : 

  • l’identité et l’adresse des parties,
  • la date d’embauche et la durée pour laquelle il est conclu,
  • la désignation de l’emploi occupé et les activités auxquelles participe le salarié,
  • le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris les primes et accessoires de salaire s’il en existe,
  • les noms et adresses des caisses de retraite complémentaire et de prévoyance et de l’organisme assurant la couverture maladie complémentaire,
  • l’intitulé des conventions ou accords collectifs applicables. 

 Le contrat esport doit être transmis par l’employeur au joueur professionnel de jeu vidéo compétitif au plus tard deux jours ouvrables après l’embauche.

Outre les obligations prévues par le régime de droit commun du code du travail, notamment en termes de sécurité et de santé au travail, l’employeur s’engage, par la signature de contrats de travail esportif, à garantir une équité de traitement dans la préparation et les entraînements de l’ensemble de ses joueurs professionnels salariés.

Le respect des conditions de fond et de forme susmentionnées est impératif. Dans le cas contraire, le contrat peut être requalifié en contrat à durée indéterminée et l'équipe peut être condamnée au paiement d'une amende de 3 750 euros. En cas de récidive, la contravention monte à hauteur de 7 500 euros et est accompagnée de six mois d’emprisonnement.

Comment déclarer une compétition de jeux vidéo ?

Le décret n° 871 du 9 mai 2017 s’adresse aux organisateurs et aux particuliers participant à des compétitions de jeux vidéo.

Les modalités de déclaration, ainsi que le formulaire à utiliser, peuvent être trouvés sur le site du ministère de l'Intérieur. Cette déclaration doit être envoyée au plus tôt un an et au plus tard un mois avant le début de la compétition. Il est également possible de déclarer plusieurs compétitions à la fois.

Déclarez vos compétions auprès du Service central des courses et jeux (SSCJ)

Le dossier de déclaration est déposé un an au plus et, sauf urgence motivée, trente jours au moins avant la date de début de la compétition.

Compétition esport : quels coûts d’organisation ?

La déclaration mentionne notamment les frais prévisionnels totaux payés par les joueurs et les coûts prévisionnels d’organisation de la compétition. Ces coûts comprennent notamment :

  • les dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à l'organisation de la compétition,
  • les dépenses de personnel relatives aux salariés des organisateurs affectés directement à l'organisation de la compétition,
  • les autres dépenses de fonctionnement, pour leur quote-part affectée à l'organisation de la compétition. Ces dépenses comprennent les achats de matières, fournitures et matériels, les loyers des locaux utilisés, les frais d'entretien et de réparation afférents à ces locaux, les frais de voyage et de déplacement exposés par les organisateurs,
  • les dépenses exposées pour l'organisation de la compétition et résultant de prestations confiées à d'autres entreprises ou organismes, dans des conditions normales de marché,
  • les contributions volontaires en nature,
  • les dépenses de communication et de promotion directement liées à l'organisation de la compétition et les frais liés à la retransmission de la compétition, quels que soient les médias utilisés, à la charge de l'organisateur,
  • les lots et les gains mis en jeu par les organisateurs pour la compétition.

Lorsque les frais réels payés par les joueurs dépassent finalement les coûts réels d’organisation de la compétition, l’organisateur doit en notifier le SCCJ, au plus tard un mois après la fin de la compétition.

Et les compétions esport intégralement ou partiellement en ligne ?

Les compétitions de jeux vidéo ouvertes au public, intégralement en ligne et offrant des récompenses, sont autorisées dès lors que les coûts d’acquisition du jeu utilisé pour la compétition ou de connexion à Internet constituent les seuls frais payés par les joueurs pour y participer.

De la même manière, les compétitions hybrides, comportant une phase qualificative en ligne et une phase finale physique, sont autorisées à condition qu’aucun frais, autre que le coût d’acquisition du jeu ou de la connexion Internet, ne soit exigé des joueurs pour la participation à la partie en ligne de la compétition.

Dans le cas des compétitions hybrides, les obligations déclaratives, y compris les dates limites de déclaration, portent uniquement sur la partie physique de ces compétitions.

Tout défaut de déclaration d’une compétition de jeux vidéo, répondant aux critères et dans les conditions citées plus haut, est puni d’une contravention de 4e classe, à savoir 135 euros.

Compétition esport : qui peut participer ?

Comme le précise le décret n° 871, les compétitions de jeux vidéo offrant des récompenses monétaires sont interdites aux mineurs de moins de 12 ans.

Au-delà de cet âge, la participation des mineurs (jusqu’à 16 ans) à des compétitions de jeux vidéo est conditionnée au recueil d’une autorisation d’un représentant légal.

Ce dernier doit justifier de son identité et de celle du mineur par la présentation de leur carte nationale d'identité ou passeport délivrés par l'administration compétente de l'État dont le titulaire possède la nationalité. Ces documents doivent être en cours de validité, à l'exception de la carte nationale d'identité française et du passeport français, qui peuvent être présentés en cours de validité ou périmés depuis moins de cinq ans.

L'organisateur de la compétition est tenu de conserver une copie pendant un an, éventuellement sous forme dématérialisée, de cette autorisation, ainsi que le numéro, la nature et l'autorité de délivrance du document d'identité du ou des représentants légaux et du mineur concerné.

Notez que l’ensemble des obligations et restrictions applicables aux mineurs salariés de 16 ans et décrites aux articles L. 7124-1 à L. 7124-35 du code du travail doivent être respectées.

Sur ce dernier point, la commission des enfants du spectacle déterminera, lors de l’examen de la demande d’autorisation, la part de la rémunération qui doit être mise sous séquestre à la Caisse des dépôts et consignations. Le reste de la rémunération sera laissée à la disposition des représentants légaux du mineur.

Déposez les rémunérations des compétiteurs de jeux vidéo mineurs (12 à 16) ans

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