Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

Gratuit ou pas gratuit ? L’action de la DGCCRF

Connaître et comprendre les mécanismes de fonctionnement des modèles économiques fondés sur des actes présentés comme gratuits ou désintéressés, mais qui ont parfois pour objet final de générer un retour financier, fait partie des actions menées par la DGCCRF. Elle s’assure, ainsi, que le consommateur est correctement informé des conditions de mise en œuvre et des contreparties éventuelles, qui conditionnent la réelle « gratuité » du produit ou du service. Lorsque l’acte gratuit émane du consommateur (ex : dons en ligne, crowdfunding), la DGCCRF s’intéresse à l’utilisation véritable des fonds, en conformité avec ce qui a été annoncé. Elle contrôle également la réalité de la gratuité, qui ne peut se limiter à un simple slogan d’accroche du consommateur. Dans cette éventualité, en effet, ceci caractériserait une pratique commerciale trompeuse.

 

Historiquement, la gratuité est un ressort commercial important des entreprises pour attirer l’attention des consommateurs. Cette thématique a toujours fait l’objet d’une vigilance particulière de la part des pouvoirs publics, et en particulier de la DGCCRF, afin d’éviter que la vente d’un bien ou la fourniture d’un service se réalise, non pas à partir d’une analyse par le consommateur des caractéristiques du bien ou du service proposé par rapport à son besoin ou son attente, mais uniquement en raison de l’octroi d’un avantage économique qui pourrait se révéler illusoire. C’est pourquoi les ventes avec primes et les ventes par lots ont pendant longtemps été interdites par principe, même si celui-ci était assorti d’exceptions. De la même façon, la publicité en faveur du crédit gratuit a été prohibée durant une longue période, afin de protéger les consommateurs contre différentes formes de pratiques commerciales trompeuses ou agressives, largement préjudiciables à leurs intérêts.

Les ventes avec primes, de même que l’offre d’un produit ou d’un service gratuit lors de l’acquisition d’un autre produit, ne sont pas des procédés commerciaux apparus récemment. Aujourd’hui, cependant, le développement du commerce électronique a fait naître de nouvelles méthodes de vente mettant en avant l’offre de produits ou de services gratuits (cashback lié à l’utilisation de cartes privatives, par exemple).

Une grande variété de secteurs économiques concernés

L’économie du gratuit couvre des champs très divers. Le terme de « gratuit » renvoie, par exemple, aux offres de promotions toujours plus nombreuses que propose la grande distribution, mais aussi aux achats groupés, aux ventes avec primes, par lots ou loteries commerciales, aux offres promotionnelles dans l’immobilier, ou encore à l’illimité dans la téléphonie mobile. Dans chacun de ces domaines, la DGCCRF est vigilante et intervient de diverses manières : observation des mécanismes de fonctionnement de ces modèles économiques, mise en place d’une régulation si nécessaire (par voie réglementaire ou via l’autorégulation par les professionnels), contrôles sur le terrain de la loyauté de l’information et des pratiques commerciales.

Dans le secteur de la grande distribution, les enquêteurs de la DGCCRF s’assurent ainsi de la disponibilité des produits faisant l’objet de promotions, vérifient les caractéristiques des produits par rapport à la publicité promotionnelle (conditionnement, poids etc.) et contrôlent la licéité des offres. Dans le secteur de la téléphonie mobile, des négociations entre associations de consommateurs et professionnels, animées par la DGCCRF, ont permis de converger sur des règles d’utilisation du terme « illimité » et d’expressions comparables, afin de mettre fin à l’illusion que toutes les composantes d’un forfait étaient disponibles sans limite d’utilisation.

Une vigilance particulière sur les relations entre entreprises

Outre la relation professionnel-consommateur, l’économie du gratuit peut également avoir des incidences sur l’équilibre des relations commerciales entre entreprises. Les enquêtes effectuées ces dernières années par la DGCCRF ont mis en évidence les difficultés soulevées par le développement des nouveaux instruments promotionnels (NIP) lorsque ces opérations commerciales ne sont pas maîtrisées par les fournisseurs. Lorsque de telles situations conduisent à des abus manifestes, la DGCCRF peut demander au juge, au titre du respect de l’ordre public économique, de sanctionner l’entreprise responsable du déséquilibre significatif dans la relation commerciale avec son co-contractant.

Des abus en matière de revente d’informations administratives

Le gratuit n’est plus seulement lié à un achat ou à une prestation, il touche désormais la gratuité de la sphère publique. Ainsi, des sites internet proposent des prestations onéreuses pour l’obtention de renseignements ou de documents relevant du domaine de l’offre publique et fournis gratuitement par les administrations aux citoyens ou aux entreprises. Des candidats à l’auto-entrepreneuriat en ont été victimes : des opérateurs leur ont facturé l’accès à des formulaires administratifs disponibles gratuitement sur des sites internet officiels.  

Quand la gratuité devient un produit d’appel

La gratuité du produit d’appel peut parfois se révéler un leurre destiné à appâter le consommateur, afin de lui faire payer des produits ou des services plus chers que leur valeur réelle. C’est le cas notamment dans les ventes « à la postiche », dans les offres de services divers adossées à l’appel de numéros de téléphone surtaxés, dans les offres de crédit gratuit destinées à masquer le coût réel d’une installation (ex. : équipements photovoltaïques, systèmes de télésurveillance à domicile).

Des démarches caritatives sont parfois associées à une activité marchande, comme dans le cas des micro-dons destinés à un bénéficiaire associatif, s’ajoutant sur le prix payé à la caisse. Internet offre aussi ce type de collecte des dons : le commerçant s’engage à reverser un pourcentage réduit du prix d’acquisition du produit à une association caritative. Dans un cas comme dans l’autre, se pose la question de la traçabilité des sommes reversées aux bénéficiaires.

Avec le développement des sites web solidaires, on note que le reversement aux associations ne s’effectue qu’à partir d’un certain volume de dons et, de manière générale, que le coût de la collecte vient souvent s’imputer sur le montant effectivement reçu par le bénéficiaire.

La variété des exemples présentés et les pratiques et astuces observées montrent à quel point il convient, pour le consommateur, de rester vigilant à l’égard de tout ce qui a l’apparence de la gratuité. Ce qui est présenté comme gratuit ne l’est pas toujours, le profit restant la motivation principale d’un acte marchand.

 

Débusquer la fausse gratuité

Exemples d’intervention des enquêteurs de la DGCCRF sur les sites internet ou la téléphonie mobile

  • Données personnelles : il arrive que des plateformes de réseaux sociaux utilisent (à des fins commerciales ?) les données personnelles mises à disposition gratuitement par les internautes.
  • Inscriptions en ligne sur des sites apparemment gratuits : les services ou informations disponibles peuvent devenir rapidement payants par l’intermédiaire d’internet +, et sans utilisation de la carte bancaire (ex. : certains sites de régimes amincissants).
  • Jeux présentés comme gratuits sur mobiles : certains sites peuvent générer des achats d’options payantes (ex. : Candy crush).
  • Offres d’e-books gratuits : elles peuvent masquer un abonnement périodique payant.
  • Simplification des démarches administratives : certains sites qui prétendent simplifier les démarches administratives (simulateur d’impôt, permis de conduire, carte grise, CERFA...) peuvent se révéler payants, alors que les sites officiels permettent d’accéder gratuitement aux mêmes informations.
  • Financement participatif (crowdfunding) : ces systèmes de dons pour le financement de projets offrent parfois aux donateurs des contreparties de valeur symbolique.
  • Sites collaboratifs : la mise en relation de particuliers en vue de partager des biens ou des prestations ne respecte pas toujours la réglementation ; ces sites peuvent placer les consommateurs en situation d’infraction ou les priver de recours s’agissant de contrats entre particuliers et non entre consommateurs et professionnels (ex. : prêts ou échanges d’appartements, prêt ou échange de matériels divers, transports en voiture particulière).
  • Dons par SMS : la collecte par les opérateurs au profit d’une association caritative, souvent pour soutenir une cause spécifique, peut conduire parfois à un reversement très insuffisant au bénéficiaire.