Marion AUBERT, experte des produits chimiques au bureau des produits industriels, nous éclaire sur l’action menée par la DGCCRF pour contrôler les produits biocides à usage domestique et rappelle les précautions d’emploi à respecter pour une utilisation sans danger.
Pouvez-vous nous présenter ces produits biocides qui regroupent de nombreux produits utilisés dans notre quotidien ?
Les produits biocides sont des produits chimiques destinés à lutter contre les organismes nuisibles à l’homme ou à ses activités. Ils sont utilisés dans la sphère domestique comme dans le milieu professionnel.
Parmi les grandes familles de produits biocides, les plus connus sont les désinfectants, les produits de protection (conservateurs protégeant le bois, les fibres) ou les produits de lutte contre les nuisibles (insecticides, répulsifs, produits de lutte contre les rongeurs). Ces produits contiennent des substances « actives », c’est-à-dire des substances chimiques à l’origine de l’effet désinfectant ou insecticide, par exemple. Ces composés peuvent présenter des dangers (toxicité, sensibilisation, corrosion), les produits doivent donc être utilisés en respectant strictement les précautions d’emploi indiquées sur leurs étiquettes.
Leur caractère potentiellement dangereux a conduit à encadrer la fabrication et la vente de ces produits depuis une vingtaine d’années.
La règlementation[1], actuellement en vigueur, prévoit un système d’autorisation en deux étapes :
- une première étape d’évaluation des substances actives est réalisée au niveau européen. Cette étape permet d’interdire les actifs présentant trop de risque (toxicité pour l’homme ou pour l’environnement) ;
- une deuxième étape d’évaluation des produits est réalisée au niveau national. Seuls les produits efficaces et les moins dangereux sont autorisés.
De plus, les autorisations de mise sur le marché (AMM) encadrent les conditions d’emploi des produits et les avertissements destinés aux utilisateurs.
Quelle est l’action menée par la DGCCRF dans le contrôle de ces produits ?
La DGCCRF est chargée de contrôler le respect de la réglementation par les entreprises qui fabriquent et distribuent les produits destinés au consommateur, et commercialisés principalement dans les supermarchés, drogueries ou magasins de bricolage.
Pour réaliser un suivi sur tout le territoire, de la fabrication à la commercialisation, la DGCCRF lance ainsi chaque année un plan de contrôle destiné à :
- vérifier la conformité des produits, leurs étiquettes et la nature des composants actifs par exemple (examens visuels et documentaires) ;
- effectuer des prélèvements pour mettre en évidence, à partir d’analyses en laboratoire, les éventuelles non-conformités qui ne sont pas détectables par l’examen visuel ou documentaire, par exemple la présence d’un composant interdit.
Quels sont les conseils à donner au consommateur qui achète ou utilise ces produits ?
La lecture attentive des étiquettes ou des notices d’explication est la clé d’une utilisation efficace du produit ! Elle est par ailleurs indispensable pour minimiser les risques liés à l’utilisation de ces produits.
On peut recommander aux consommateurs de tenir compte des pictogrammes, mentions d’avertissement et de danger (par exemple provoque une irritation cutanée, peut provoquer une allergie cutanée) et de bien suivre les recommandations du fabricant relatives aux conditions d’utilisation du produit :
- conseils de prudence présents sur les étiquettes recommandant par exemple le port de gants lors de l’application d’un produit désinfectant afin d’éviter un risque d’allergie ou d’irritation de la peau,
- conseils sur le stockage du produit pour que celui-ci reste efficace jusqu’à la date de péremption indiquée, (conserver à l’abri de la lumière, par exemple),
- ou encore conseils portant sur l’élimination des emballages.
Enfin, dans un souci de respect de l’environnement, mais aussi de préservation de la santé, le consommateur doit utiliser ces produits de façon raisonnée.
Les produits dits « écologiques » sont de plus en plus nombreux dans les rayons des supermarchés. Ces allégations sont-elles fondées ?
De nombreuses allégations vantent les mérites de certains produits, par exemple « contenant des actifs d’origine naturelle ou plus respectueux de l’environnement ».
La règlementation biocide interdit l’utilisation de certaines mentions telles que produit biocide à faible risque, non toxique, ne nuit pas à la santé, naturel, respectueux de l’environnement, respectueux des animales, ou toutes autres indications similaires sur les étiquettes et dans les publicités de ces produits. Ces allégations peuvent induire le consommateur en erreur sur les risques éventuels.
En effet, ces produits, destinés à détruire ou repousser des organismes nuisibles, peuvent aussi présenter des risques pour la santé humaine ou pour l’environnement. De plus, le risque présenté par une substance d’origine naturelle n’est pas, par principe, moindre que celui présenté par une substance d’origine synthétique.
Le consommateur doit garder l’esprit critique face à ces allégations qui ne garantissent en aucune manière l’absence de risque pour l’environnement ou pour l’homme et doit toujours se reporter aux informations présentes sur l’étiquette.
A noter :
Dans le contexte actuel de l’émergence et de la réémergence de maladies à transmission vectorielles telles que le zika, la dengue ou le chikungunya, la DGCCRF a publié une fiche pratique consacrée aux produits anti-moustiques. Cette fiche a pour but de sensibiliser les consommateurs à la règlementation applicable à ces produits et de donner des conseils sur le choix et l’utilisation de ce type de produits.
[1] Règlement (CE) n°528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l’utilisation de produits biocides et le chapitre II du titre II du livre V du Code de l’environnement.
Qui fait quoi en matière de contrôle des produits biocides ?
- La Direction générale de la prévention des risques (DGPR) du ministère de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer élabore la règlementation relative aux biocides. Elle effectue également des contrôles au sein des installations classées qui fabriquent ou utilisent des produits biocides.
- L’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) évalue et autorise les produits efficaces et présentant un niveau de risque acceptable.
- La DGCCRF, en coordination avec la DGPR, contrôle les produits biocides destinés aux consommateurs.
L’action de la DGCCRF dans le secteur des biocides en 2015
- 761 établissements ont été visités.
- Plus de 2200 références de produits biocides ont été contrôlées.
- Sur 141 échantillons analysés, 94 se sont révélés non conformes dont 4 non-conformes et dangereux.
- 150 avertissements, 64 mesures de police administrative et 9 procédures contentieuses ont donné suite aux constats effectués.