Lettre de la DAJ - Demande de la Cour de justice de transférer partiellement au Tribunal sa compétence en matière préjudicielle et d’étendre le mécanisme d’admission préalable des pourvois

En application de l’article 281 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la Cour demande la modification de son statut afin, d’une part, de transférer partiellement sa compétence préjudicielle au Tribunal et, d’autre part, d’étendre le mécanisme préalable des pourvois portés devant elle.

Depuis le Traité de Nice du 26 février 2001 et en vertu de l’article 256, paragraphe 3 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), afin d’alléger la charge de travail de la Cour de justice, le Tribunal peut être saisi de questions préjudicielles, soumises en vertu de l’article 267 du TFUE, dans des matières spécifiques lesquelles doivent être déterminées par le statut de l’institution « Cour de justice de l’Union européenne ».

En vertu de l’article 281 du TFUE, le statut peut être modifié par le Parlement européen et le Conseil notamment sur demande de la juridiction et après consultation de la Commission.

Or, depuis plus de vingt-ans, pour diverses raisons invoquées par la Cour – création en 2005 du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne, transfert de la majorité des recours en annulation et en carence au Tribunal, réforme de l’architecture juridictionnelle à partir de 2015 – aucune modification du statut n’est intervenue dans la répartition des compétences entre les deux juridictions en matière préjudicielle d’autant qu’entre temps, grâce à plusieurs mesures d’organisation interne, la Cour avait réduit la durée moyenne de traitement des affaires préjudicielles.

Toutefois, eu égard à l’accroissement des questions préjudicielles de plus en plus complexes et sensibles et à l’allongement progressif du délai de traitement, la Cour de justice a récemment déposé une demande au Parlement européen de transférer partiellement sa compétence préjudicielle au Tribunal.

Afin de faciliter la mise en œuvre de la future compétence du Tribunal, la Cour a sélectionné des matières pouvant être clairement identifiables à la lecture de la question préjudicielle, soulevant peu de questions de principe transversales, donnant lieu à un nombre de renvois suffisamment important et disposant d’un socle important de jurisprudence de la Cour.

Ainsi, en application de ces critères, la Cour demande que soit transférée au Tribunal sa compétence préjudicielle dans cinq matières spécifiques : (i) système commun de taxe sur la valeur ajoutée, (ii) droits d’accise, (iii) code de douanes et classement tarifaire des marchandises dans la nomenclature combinée, (iv) indemnisation et assistance des passagers, (v) système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre.

20 % des questions préjudicielles sont actuellement posées dans ces matières et leur transfert conduira a priori à un allègement significatif de la charge de travail de la Cour.

Pour des raisons de sécurité juridique et de célérité du traitement, les questions préjudicielles devront continuer d’être posées devant la Cour de justice laquelle, le cas échéant, les transmettra au Tribunal qui les attribuera à des chambres désignées à cet effet.

La composition des formations de jugement saisies de questions préjudicielles, dont le nombre de membres pourra se situer entre 5 et 15 (taille actuelle de la grande chambre), sera déterminée par le règlement de procédure du Tribunal ainsi que les circonstances et conditions dans lesquelles elles siègeront.

Un avocat général devra être désigné pour chaque question préjudicielle sans obligation de présenter systématiquement des conclusions notamment lorsque l’affaire ne soulève aucune question de droit nouvelle.

En application de l’article 256, paragraphe 3 du TFUE, si l’affaire appelle une décision de principe susceptible d’affecter l’unité ou la cohérence du droit de l’Union, le Tribunal pourra toujours, s’il l’estime nécessaire, la renvoyer devant la Cour. De même, pour le même motif, de manière exceptionnelle, ses décisions pourront faire l'objet d'un réexamen par la Cour.

Enfin, afin de préserver l’efficacité de la procédure de pourvoi et lui permettre de se concentrer sur les pourvois qui soulèvent des questions de droit importantes, la Cour demande également d’étendre le mécanisme d’admission préalable :

  • aux pourvois formés contre les arrêts ou ordonnances du Tribunal relatives à une décision d’une chambre de recours indépendante d’un organe ou organisme de l’Union qui, au 1er mai 2019, date de mise en place du mécanisme, disposait d’une telle chambre de recours indépendante mais qui n’avait pas été mentionnée à l’article 58 bis du statut ;
  • aux pourvois formés contre les décisions du Tribunal rendues en application de clauses compromissoires au sens de l’article 272 du TFUE.

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