
1. L’architecture du cadre de référence
La notion de cadre de référence traduit le fait que l’audit interne est une pratique professionnelle normée au plan international. Pour que l’administration puisse bénéficier des meilleures pratiques en ce domaine, la France a fait le choix de transposer et d’adapter aux spécificités de l’État les lignes directrices applicables à l’audit, qui sont définies au niveau international par des instances professionnelles privées.
Parmi les différents standards internationaux disponibles, c’est le Cadre de référence international des pratiques professionnelles de l’audit interne (CRIPP) publié par l’Institute of Internal Auditors (IIA), qui a été retenu par le CHAI.
Concrètement, le cadre de référence de l’IIA, traduit en français par l’Institut français de l’audit et du contrôle interne (IFACI), est structuré en deux types de lignes directrices :
- des dispositions obligatoires, représentant une trentaine de pages et comportant :
- la définition de l’audit interne ;
- les normes professionnelles ;
- le code de déontologie ;
- des dispositions recommandées, beaucoup plus développées, comprenant :
- des modalités pratiques d’application des normes ;
- des guides pratiques ;
- des prises de position.
Pour progresser concrètement dans ce qui est sa mission première, à savoir la définition d’un cadre de référence de l’audit interne dans l’administration de l’Etat (CRAIE) (PDF - 849 Ko), le CHAI a décidé de mener deux démarches complémentaires, en avançant à la fois :
- de manière descendante, avec l’élaboration des normes générales de rang le plus élevé, applicables à l’ensemble des ministères, et correspondant aux dispositions obligatoires du modèle IIA ;
- de manière ascendante, avec la définition d’outils opérationnels, aménageables par chaque ensemble ministériel, et correspondant aux dispositions recommandées de l’IIA.
2. Les dispositions obligatoires
2.1 Des dispositions obligatoires, mais dans un cadre de droit souple
Les lignes directrices élaborées par des instances professionnelles de l’audit interne comme l’IIA constituent ce qu’il est convenu d’appeler du droit souple (soft law). Celui-ci se différencie de la pyramide traditionnelle des normes d’origine étatique (loi, décret, arrêté…), que l’on peut qualifier symétriquement de droit dur.
Ainsi, lorsque le décret du 28 juin 2011 prévoit que le CHAI élabore le cadre de référence de l’audit interne de l’État, il délègue au CHAI un pouvoir normatif, mais dans le seul domaine du droit souple.
Complément méthodologique : les conséquences de l’emploi du droit souple
Le fait que le cadre de référence relève du droit souple comporte plusieurs conséquences.
En premier lieu, il convient de respecter la primauté du droit dur. Celle-ci est plus prégnante lorsqu’il s’agit d’organiser la fonction d’audit interne de l’État, qui s’exerce dans un maillage législatif et réglementaire sans équivalent dans le secteur privé. Ainsi les auditeurs appartenant à des corps de contrôle sont-ils soumis à des dispositions statutaires souvent plus contraignantes que les principes et règles de conduite prévus par les codes de déontologie d’origine professionnelle.
En second lieu, pour les lignes directrices de rang le plus élevé, le qualificatif « obligatoires », doit s’apprécier en tenant compte du fait qu’il s’agit de droit souple. Les sanctions restent elles-mêmes à l’intérieur de l’univers du droit souple et sont essentiellement de nature professionnelle et de caractère moral (appréciation défavorable lors de l’évaluation d’un service d’audit).
Le caractère « obligatoire » renvoie donc au respect d’un engagement consenti volontairement par les auteurs mêmes de ces normes, i. e. les membres du CHAI, et vers le respect duquel ils doivent s’efforcer de tendre. L’évaluation du respect du cadre de référence par un service d’audit comporte une dimension pragmatique, que le CHAI s’attachera à prendre en compte.
2.2 Les trois composantes des dispositions obligatoires du cadre de référence de l'audit interne
Dans le cadre de référence retenu pour l’audit interne, les dispositions obligatoires, communes à tous les services d’audit interne, comportent trois composantes :
- la définition de l’audit interne ;
- le code de déontologie ;
- les normes de qualification et de fonctionnement.
La définition de l'audit interne
La définition de l’audit interne est contenue dans l’article 1er du décret du 28 juin 2011, qui le décrit comme « une activité exercée de manière indépendante et objective qui donne à chaque ministre une assurance sur le degré de maîtrise de ses opérations et lui apporte ses conseils pour l’améliorer. L’audit interne s’assure ainsi que les dispositifs de contrôle interne sont efficaces.».
Cette définition est rappelée et développée dans le code de déontologie et les normes de qualification et de fonctionnement élaborés par le CHAI.
Le code de déontologie
Le code de déontologie du cadre de référence de l'Audit Interne de l'Etat (PDF - 27 Ko) a pour objet de guider l’exercice de l’audit interne par le respect de principes et de règles de conduite qui fondent la qualité des travaux qu’il produit et la confiance sur laquelle il s’appuie. Il énonce et précise les principes et règles de conduite qui s’imposent aux personnes et entités réalisant des activités d’audit interne : intégrité, objectivité, confidentialité, compétence.
Les normes de qualification et de fonctionnement
Les normes de qualification et de fonctionnement du cadre de référence de l'Audit Interne de l'Etat ont pour objet de définir les principes fondamentaux de la pratique de l'audit interne, d’établir les critères directeurs d’appréciation du fonctionnement de l’audit interne et de favoriser l’harmonisation et l’amélioration des pratiques d’audit interne au sein des administrations.
Les normes adoptées comportent :
- des normes de qualification (normes 1000 et suivantes) qui énoncent les caractéristiques que doivent présenter les services et les agents accomplissant des missions d'audit interne ;
- des normes de fonctionnement (normes 2000 et suivantes) qui décrivent la nature des missions d'audit interne et définissent des critères de qualité permettant de mesurer la performance des services fournis ;
- au sein de chacune de ces deux catégories, les normes de mise en œuvre précisent les exigences applicables dans les activités d’assurance (normes en A) ou de conseil (normes en C) ;
- enfin, un glossaire définit les termes spécifiques utilisés dans les normes.
2.3 Des dispositions compatibles avec les normes internationales
Complément méthodologique : la transposition des normes IIA
La méthode retenue par le CHAI
L’élaboration des « normes », terme générique utilisé pour désigner l’ensemble des dispositions obligatoires du cadre de référence (définition de l’audit interne, code de déontologie, normes de qualification et de fonctionnement proprement dites, glossaire), représente l’aboutissement d’un processus de près de neuf mois.
Elle a fait l’objet, sous l’égide du CHAI, d’une concertation approfondie, associant les représentants des missions ministérielles d’audit interne, des services d’inspection et de contrôle, de la DGFiP et de la direction du Budget, ainsi ainsi que d’une information des instances professionnelles de l’audit interne.
Pour procéder à une acclimatation satisfaisante des normes, le CHAI a examiné les trois options alternatives suivantes :
- reprendre les normes IIA telles quelles, quitte à les assortir de commentaires pour marquer les spécificités de l’État. Une telle solution a été retenue notamment au Royaume-Uni ;
- ou, au contraire, partir de zéro et écrire en totalité un corpus spécifiquement français ;
- ou, enfin, retenir une solution intermédiaire : partir des normes IIA et les transposer au cas français, en ne changeant que ce qui est nécessaire, mais en n’hésitant pas à changer tout ce qui est nécessaire.
- C’est cette dernière solution, celle de la transposition, qui a été retenue car elle conciliait au mieux deux exigences :
- suivre au plus près les standards internationaux, afin notamment de faciliter la reconnaissance par nos partenaires européens (en particulier dans le cadre de la surveillance de la trajectoire des finances publiques), ainsi que par l’auditeur externe (Cour des Comptes, dans sa fonction de certification des comptes de l’État) ;
- disposer d’un document plus lisible par les auditeurs, car intégrant directement les spécificités de l’administration française.
Des dispositions compatibles avec les normes internationales
Par rapport au Cadre de référence international des pratiques professionnelles de l’audit interne (CRIPP), les dispositions obligatoires du Cadre de référence de l’audit interne de l’administration de l’État (CRAIE) comportent la même architecture, la même numérotation des rubriques et une formulation identique dans la très grande majorité des cas.
Pour ce qui est des modifications effectuées, une concertation a été engagée avec l’IFACI en fin de procédure, afin de concilier les exigences du droit dur français et les concepts internationaux applicables aux professionnels de l’audit.
Ceci permet d’obtenir une « interopérabilité » avec les autres référentiels, afin d’éviter des ruptures pour les auditeurs qui ont été amenés à évoluer sous des normes internationales (audits dans le champ des travaux de certification de la Cour des Comptes ; audits portant sur des opérateurs, ou sur des politiques communautaires), et qui devront désormais travailler conformément aux normes définies par le CHAI.
3. Les dispositions recommandées
Au-delà des dispositions obligatoires de portée générale, le CHAI s’attache également à élaborer des dispositions recommandées, notamment celles qui constituent des outils pratiques pour les auditeurs. Ce volet important de l’activité du CHAI s’effectue dans le cadre de groupes de travail mobilisant aujourd'hui plus de cinquante personnes, principalement membres des missions ministérielles d’audit et des services d’inspection générale des ministères, et qui participent activement et régulièrement à ces travaux.
3.1 Les outils au service des audits comptables et budgétaires
Les premiers livrables sont issus des travaux d’un groupe dédié à la conduite des audits comptables et budgétaires. A partir de l'expérience développée dans les ministères, ce groupe a dégagé un socle commun de pratiques partagées et consensuelles en vue d’harmoniser les méthodes de travail et faciliter les travaux des auditeurs internes au sein de l’administration de l’État.
Les livrables réalisés comportent :
- une typologie des audits comptables et budgétaires, qui permet de disposer d’un vocabulaire commun et de mieux appréhender l’ensemble du champ dans toute sa diversité ;
- un vademecum de l’audit interne comptable, qui capitalise et harmonise l’expérience acquise par les équipes d’audits spécialisées au sein des ministères ;
- des cahiers pratiques d’audit comptable, concernant les processus pour lesquels existe un référentiel de contrôle interne à jour du développement de Chorus : Commande publique ; Interventions ; Parc immobilier.
3.2 Les outils au service des audits métiers
Un groupe de travail dédié à la conduite des audits métiers élabore des outils opérationnels d’aide au travail des auditeurs. Il vise également à favoriser l’harmonisation des pratiques entre ministères et l’exercice des missions conjointes.
Compte tenu de la diversité beaucoup plus grande des missions envisageables dans le domaine des audits métiers, le groupe a fait le choix d’élaborer en priorité des guides pratiques pour trois fonctions transverses, communes à tous les ministères :
- la fonction « Achats-marchés » ;
- la fonction « Systèmes d’information » ;
- la fonction « Ressources humaines ».
Documents publiés
- Cadre de référence de l'audit interne de l'Etat (Version 2018) (PDF - 850 Ko)
- Cadre de référence de l'audit interne de l'Etat (Version en anglais 2018) (PDF - 1,32 Mo)
- le code de déontologie ;
- les normes de qualification et de fonctionnement ;
- le glossaire.
- IAHC Standards : Mandatory guidance for the practise of internal auditing within the French State administration (issued : October 2013)
(la traduction en anglais du Cadre de référence de l'audit interne dans l'administration de l'Etat français)
Communiqués
21/08/2014 - IIA : French Government Moves to Enhance Internal Audit Quality : new standards based on International Professional Practices Framework
Liens utiles
- The Institute of Internal Auditors (IIA)
- L'Institut français de l'audit et du contrôle internes (IFACI)
- Conseil d'Etat - Etude annuelle 2013 : le droit souple - Juillet 2013
- Cour des comptes - Certification des comptes de l'Etat : exercice 2014 - Mai 2015
- Cour des comptes - Certification des comptes de l’Etat : exercice 2013 – Mai 2014