Table des matières
La Commission d’examen des pratiques commerciales,
Vu la lettre du 29 novembre 2023 enregistrée le 8 décembre 2023 sous le numéro 23-30 par laquelle le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l’artisanat, ont saisi la Commission d’examen des pratiques commerciales aux fins de dresser un état des lieux portant sur les clauses de révision et de renégociation des prix visées aux articles L. 443-8 et L. 441-8 du code de commerce, d’identifier les bonnes pratiques en la matière, permettant d’accroître leur effectivité et leur efficacité et de formuler des propositions d’évolution de ces dispositions en vue d’alimenter les réflexions à venir sur la modification éventuelle du cadre législatif.
Vu l’article L. 440-1 du code de commerce permettant à la Commission d’adopter des recommandations sur les questions dont elle est saisie et sur toutes celles entrant dans ses compétences, notamment celles portant sur le développement des bonnes pratiques ;
Vu les articles L. 440-1 et D. 440-1 à D. 440-13 du code de commerce ;
Vu les travaux du groupe de travail constitué au sein de la Commission pour instruire la demande ;
Les rapporteurs entendus lors de la séance plénière du 28 novembre 2024.
Issues des États Généraux de l’Alimentation (EGA) de 2017, les lois dites EGAlim 1 de 2018 et EGAlim 2 de 2021[1] avaient pour objectif de permettre aux agriculteurs français de mieux vivre de leur travail en instaurant un principe de marche en avant du prix des produits agricoles et alimentaires, de l’amont vers l’aval. Afin de protéger le prix de la matière première agricole (MPA) tout au long de la chaîne de valeur, deux dispositifs ont été mis en place :
L’article L. 441-8 du code de commerce prévoit l’obligation d’insérer dans les contrats d’une durée supérieure à trois mois et sauf produits exclus par arrêté, une clause de renégociation, tenant compte de la variation des prix des MPA et d’autres intrants (transport, énergie, emballages) dont les variations des prix affectent significativement les prix de production des produits faisant l’objet de la convention.
Le dispositif impose le contrat écrit dès la première cession pour certaines filières, sur initiative du producteur qui mentionne dans son offre initiale un indicateur de coûts de production, et prévoit un second dispositif, pour certains opérateurs, à savoir la protection à l’aval des prix ainsi négociés via deux dispositions, intégrés à l’article L. 443-8 du code de commerce, et qui sont les suivants :
- Non-négociabilité, dans le tarif du fournisseur, de la part liée au coût des MPA (principe dit de sanctuarisation de la MPA)[2] ;
- Obligation de prévoir dans le contrat une clause de révision automatique des prix (CRA) tenant compte de la variation des prix des principales MPA entrant dans la composition des produits.
La saisine de la Commission est fondée sur le constat des Ministres selon lequel ces clauses contractuelles prévues par la loi n’auraient pas, à ce jour, rempli leurs objectifs.
Afin de rédiger cette recommandation, les membres du groupe de travail de la CEPC se sont appuyés sur un questionnaire renseigné par un certain nombre d’acteurs concernés par la mise en œuvre de ces clauses, industriels comme distributeurs. La DGCCRF a également fourni un état des lieux de ces clauses sur la base des conventions examinées en 2023 et 2024. Le Médiateur des relations commerciales agricoles a par ailleurs été auditionné.
Les clauses de révision automatique des prix[3]
Dans l’esprit du législateur, la marche en avant du prix des MPA a vocation à se dérouler comme suit.
En premier lieu, les premières cessions doivent faire l’objet d’un contrat écrit, dans le respect des dispositions des articles L. 631-24[4] et suivants du code rural et de la pêche maritime (CRPM), c’est-à-dire :
- Négocié sur la base d’une proposition initiale du producteur, qui doit mentionner dans son offre de contrat un indicateur pertinent de coûts de production ;
- Tenant compte, pour la détermination du prix ou des modalités de détermination du prix, de trois familles d’indicateurs (coûts de production, prix de marché, et critères particuliers tels que quantité/qualité/origine etc.).
Le prix ainsi convenu, comme ses variations, sont réputés protégés à l’aval dans toute la chaîne de commercialisation et de transformation. Les cessions ultérieures, sauf exclusions prévues par décret, doivent en effet faire l’objet de conventions conformes aux dispositions de l’article L. 443-8 du code de commerce, lequel prévoit les principes, décrits plus haut, de sanctuarisation de la part de la MPA dans le tarif du fournisseur et de révision automatique des prix convenus en cas de variations significatives du prix des principales MPA entrant dans la composition des produits.
L’article L. 443-8 du code de commerce dispose ainsi : « la convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût des matières premières agricoles, à la hausse ou à la baisse, entrant dans la composition du produit alimentaire ou du produit destiné à l'alimentation des animaux de compagnie ». Il est prévu que « les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés. Lorsque l'acquisition de la matière première agricole par le fournisseur fait l'objet d'un contrat écrit en application du I du même article L. 631-24, la clause de révision inclut obligatoirement les indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture. ».
Comme on le voit, la rédaction de la clause est soumise à la libre négociation des parties, même si l’article L. 443-8 du code de commerce encadre assez strictement l’exercice.
Il prévoit en effet que la CRA :
- Fonctionne à la hausse comme à la baisse ;
- Tient compte de la durée du cycle de production ;
- Fait référence aux indicateurs prévus à l’article L. 631-24-III du CRPM : coûts de production, prix de marché, critères particuliers liés aux quantités/à la qualité etc.
On remarquera que l’article L. 443-8 du code de commerce ne précise pas si au moins un indicateur de chacune de ces trois familles doit être retenu ou si la référence à une seule de ces trois catégories d’indicateurs est suffisante. Il précise toutefois qu’en cas de mise en œuvre d’une MPA ayant fait l’objet d’un contrat écrit relevant de l’article L. 631-24 du CRPM, la clause inclut obligatoirement les indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture.
La Commission en déduit que, dans les autres cas, les parties sont libres de choisir la ou les catégories d’indicateurs cités par le CRPM à inclure dans la CRA, sans obligation d’en retenir un pour chacune de ces dernières.
Sont donc laissés à l’appréciation des parties :
- La ou les MPA concernant lesquelles l’évolution des indicateurs sera prise en compte. Selon l’interprétation de la Commission, il est loisible aux parties de ne retenir que la ou les principales MPA entrant dans la composition des produits dans le périmètre de la clause ;
- Le ou les indicateurs relatifs à ces MPA. Selon la Commission, l’article L. 443-4 du code de commerce prévoit la mention des indicateurs dont les conventions tiennent compte pour la détermination de ses prix, mais aucune obligation n’est faite aux parties de retenir ces derniers pour l’élaboration de la CRA ;
- Les seuils de variation de ces derniers entraînant une révision du prix convenu ;
- La période durant laquelle ces indicateurs de référence seront observés et au terme de laquelle, si le seuil de variation contractualisé est atteint, le prix convenu sera révisé ;
- La pondération à retenir pour tenir compte du fait que la MPA ne représente qu’une partie du prix convenu.
L’article L. 441-7, I du code de commerce applicable aux produits à marque de distributeur (MDD) alimentaires dispose quant à lui : « les parties déterminent librement la formule de révision, en tenant compte notamment des indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture mentionnés au III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime ». Le fabricant est réputé avoir fait état du prix ou des modalités de détermination du prix des MPA mises en œuvre. La Commission note que, dans le cadre de ces contrats, seule la référence aux indicateurs de coûts de production est obligatoire. Elle souligne par ailleurs que cette obligation ne semble s’appliquer que dans les cas où les MPA ont fait l’objet d’un contrat amont relevant de l’article L. 631-24 du CRPM[5], ce qui limite considérablement la portée de cette obligation de transparence, d’une part, et de mention d’une CRA d’autre part.
Les grossistes n’entrent pas dans le champ d’application de l’article L. 443-8 du code de commerce.
Ils ne sont pas concernés par l’article L. 443-4 visant l’obligation légale de prise en compte des indicateurs, à l’exception du régime spécifique de la convention, prévue à l’article L. 443-2 du code de commerce portant sur les produits agricoles listés à l’article D. 443-2 du même code : fruits et légumes, viande fraiche, congelés ou surgelés de volailles et de lapins, œufs et miel.
1- Difficultés concrètes d’application
Premièrement, la Commission relève que le contrat écrit à l’amont est loin d’être généralisé.
D’une part, de nombreuses filières ont demandé à être exemptées de la contractualisation écrite obligatoire à l’amont. Ainsi, seuls les secteurs des œufs, du lait et des viandes sont concernés par cette obligation.
D’autre part, même lorsque le contrat écrit est obligatoire, de nombreux opérateurs de l’amont, producteurs comme acheteurs, ne respectent pas cette obligation, notamment dans le secteur de la viande bovine.[6] Lorsque le contrat écrit n’est pas requis, ou lorsqu’il est requis mais que cette obligation n’est pas respectée, il n’existe donc pas de contrats amont permettant d’identifier l’indicateur de coûts de production à prendre en compte.
Il convient cependant de rappeler que l’article L. 682-1 du CRPM charge l’Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM) de publier trimestriellement sur son site[7] un certain nombre d’indicateurs, dont les indicateurs de coût de production élaborés par les interprofessions ou à défaut, les instituts techniques, et cela est notamment le cas des filières porcine et bovine.
De plus, la chaîne amont-aval ayant pour débouché le commerce de détail, peut comprendre d’autres intermédiaires :
- Industriels de première transformation qui ne mettent pas nécessairement en œuvre uniquement de la MPA française. Or, lorsque les MPA sont en tout ou partie importées, il peut être plus difficile d’identifier les systèmes de publication d’indicateurs étrangers de référence comparables au système national (en dehors de cours mondiaux, relatifs au cacao ou aux céréales par exemple). Dans ce cas, la notion d’indicateurs de référence perd en pertinence (dans la mesure où la prise en compte des indicateurs nationaux pour des productions étrangères dont les coûts peuvent être très différents - coût du travail, en particulier- ne semble en effet pas adaptée) ;
- Marginalement des grossistes, hors champ des dispositions de l’article L. 443-8 du code de commerce.
En outre, certaines interprofessions ne publient pas d’indicateurs de coûts de production pertinents pour toutes les productions spécialisées. Ensuite, certains indicateurs sont adaptés pour suivre les évolutions à l’amont mais, ils sont plus complexes à établir à l’aval et variables d’un industriel à l’autre en raison de la diversité de leurs approvisionnements. Dans certains cas de figure en effet, les industriels sont susceptibles de couvrir leurs approvisionnements par des contrats dits à terme, c’est-à-dire à un prix fixe, convenu lors de l’accord, et qui sera le prix pratiqué quelles que soient les variations des cours sur la période. A cet égard, l’article L. 443-8 du code de commerce dispose d’ailleurs bien que la formule de révision retenue dans la convention est déterminée « selon la durée du cycle de production » qu’il convient, selon toute logique, d’entendre comme étant le cycle de production du vendeur, et non celui de l’amont agricole.
Ils peuvent par ailleurs s’approvisionner à l’étranger, sur des marchés concernant lesquels il n’existe pas toujours d’indicateurs pertinents.
Lorsque de tels indicateurs ne sont pas disponibles ou, pour diverses raisons, ne sont pas adaptés aux modalités d’approvisionnement du fournisseur, il est complexe de construire une formule de révision automatique des prix reflétant valablement la variation des prix subie à l’amont par l’industriel.
De telles considérations conduisent la Commission à s’interroger sur la pertinence de maintenir l’obligation légale générale de faire figurer une telle clause dans les conventions, sans considération pour les cas de figure développés plus haut.
- Les options de transparence n° 1 et 2 et, surtout, l’option n°3 ne permettent pas, dans de nombreux cas, de construire une clause de révision automatique des prix adaptée aux produits faisant l’objet de la convention
Les options de transparence (art. L. 441-1-1 du code de commerce) :
En option de transparence dite option 1, le fournisseur détaille, dans ses conditions générales de vente (CGV), la part de chaque MPA entrant dans la composition de chacun de ses produits, exprimée en pourcentage du tarif et en pourcentage du volume.
En option dite option n°2, il détaille de manière agrégée la part des matières premières entrant dans la composition de chacun de ses produits, exprimée en pourcentage du tarif et en pourcentage du volume.
En option dite option n°3, la part de la matière première agricole dans le tarif n’est pas communiquée à l’acheteur. En effet, sous réserve que les CGV fassent état d’une évolution du tarif, le fournisseur a recours à un tiers indépendant qui est chargé, avant la négociation, d’attester la part de cette évolution imputable à celle du prix des MPA entrant dans la composition des produits, et devra également, au terme de la négociation, s’assurer que la négociation n’a pas porté sur cette part.
Or, la CRA doit permettre de tenir compte « de la variation du coût des matières premières agricoles ».
Dans la mesure où la MPA ne représente qu’une partie du prix convenu entre les partenaires commerciaux, l’impact des variations des indicateurs retenus doit être pondéré en fonction de cette part.
Ceci pose toutefois, eu égard au fonctionnement des options de transparence décrites plus haut, de nombreuses difficultés pratiques :
- Pour les options 1 et 2
La part des MPA est exprimée en pourcentage du tarif de chaque référence de produit.
Or cette part peut être très variable, pour un même fournisseur, en fonction des produits qu’il propose (par exemple, à chaque fois pour un même fournisseur : 27% du tarif pour un croque-monsieur, 38% pour un hamburger ou bien 34% du tarif pour une crème fleurette 20 cl et 55% pour une plaquette de beurre de 250 grammes, ou encore 10% pour de la faisselle à 0% de MG et 35% pour un fromage de chèvre).
De plus, les fournisseurs ne commercialisent jamais une seule référence et la convention porte toujours sur plusieurs références, voire plusieurs dizaines de références parmi celles que ces derniers proposent ; ainsi, la part moyenne de la MPA dans le tarif, et par voie de conséquence dans le prix convenu, tous produits confondus, peut difficilement être appréciée par le distributeur, ce qui complexifie la négociation de la clause de révision.
Ainsi, la pondération qu’il est nécessaire d’apporter quant à l’impact de la CRA sur le prix convenu est plus ou moins difficile à déterminer parce que :
- D’une part, le moyen de pondération retenu est généralement un critère de part de la MPA dans le tarif alors que la part de cette MPA est plus élevée dans le prix convenu, toujours inférieur au tarif car intégrant les remises et avantages consentis par le fournisseur au distributeur ;
D’autre part, la part moyenne de la MPA dans le tarif, tous produits confondus, n’est pas connue, et elle l’est encore moins dans le prix convenu.
Enfin, rien ne garantit qu’un ou plusieurs produits de la gamme ne seront pas surreprésentés dans les commandes de l’acheteur, comportant une part de MPA dans le tarif correspondant, éventuellement supérieure ou inférieure à celle retenue pour la pondération de la clause. Ajoutons qu’en option 2, la part des MPA dans le tarif n’étant connue que de manière agrégée et les CRA visant seulement la ou les principales MPA entrant dans la composition des produits, la part spécifique de ces principales MPA, seules appelées à être prises en compte dans la CRA, n’est pas connue.
- Pour l’option 3 :
Avec les seules informations prévues par la loi dans le cadre de cette option, la construction d’une formule de révision automatique est d’autant plus compliquée que les parties ne sont pas to
Si la CRA peut être appropriée et adaptée dans le cadre des contrats amont, ainsi que pour des contrats aval portant sur une gamme limitée et homogène de produits pas ou peu transformés, elle est plus complexe à mettre en œuvre pour des conventions aval dans lesquelles la profondeur de gamme est importante.
Conformité des contrats conclus par la grande distribution à dominante alimentaire
Selon les constats de la DGCCRF, qui analyse chaque année plusieurs centaines de conventions portant sur des produits alimentaires et relevant de l’article L. 443-8 du code de commerce, les conventions soumises aux dispositions de ce texte comportent généralement bien une CRA.
Les rares cas où elles n’en mentionnent pas correspondent généralement aux conventions portant sur des viandes destinées au rayon boucherie traditionnelle, dans le cadre desquelles les prix sont négociés de gré à gré et de façon hebdomadaire conformément aux CGV des fournisseurs concernés.
La Commission estime que dans de telles situations, la CRA ne serait de toute façon pas pertinente, puisqu’elle se déclencherait bien moins souvent que les négociations prévues contractuellement. Les produits visés étant très proches de l’amont agricole, les parties disposent en outre de données de marché relatives aux coûts de production objectives sur la base desquelles elles peuvent négocier de façon éclairée et raisonnable.
Rédaction des clauses – généralités
Il est fréquent que les clauses soient peu susceptibles de se déclencher : seuils de variation des indicateurs de référence très élevés, période d’observation des indicateurs de référence très longues.
Ce phénomène s’explique notamment par le fait que les deux parties, du fait de l’incertitude entourant l’évolution future des indicateurs visés, peuvent trouver un intérêt à neutraliser les clauses.
Aucune des parties n’est en effet en mesure de savoir à l’avance si le déclenchement éventuel de la clause lui sera favorable ou non (déclenchement aboutissant à une baisse de prix : favorable au distributeur ; à une hausse : favorable au fournisseur).
Certains fournisseurs proposent, ce qui n’est pas requis par les textes, des CRA dans leurs CGV. Dans certaines circonstances, il peut arriver que, dès ce stade, les clauses soient rédigées de façon à ne pas se déclencher.
Ces fournisseurs illustrent bien le cas de figure dans lequel, ayant couvert pour une longue période leurs approvisionnements principaux, ils seraient nécessairement lésés si une clause, rédigée de façon à être rendue opérante, déclenchait une révision à la baisse du prix convenu sans qu’eux-mêmes aient bénéficié de meilleurs prix à l’amont.
La Commission note que dans ces cas de figure, une clause neutralisée ne porte de toute façon pas préjudice à l’amont agricole.
En outre, les clauses basées sur des indicateurs très volatils, voire spéculatifs comme les cours mondiaux des produits, posent également des problèmes dans leur application automatique du fait de cette volatilité permanente.
La négociation de ces clauses entre les parties permet alors d’atténuer, sinon de neutraliser ces effets.
Rédaction des clauses – cas typiques
Des modèles de clauses de révision automatique sont proposés par les distributeurs dans le cadre des conventions-type qui seront par la suite modifiées ou non pour tenir compte du résultat de la négociation.
Il arrive aussi parfois (et de plus en plus souvent depuis l’entrée en vigueur de la loi dite EGAlim 2 en 2021) que les fournisseurs prévoient dans leurs CGV la CRA qu’ils proposent d’insérer dans la convention.
Pour les produits très peu transformés et/ou les fournisseurs PME plus proches de l’amont agricole ou davantage dépendants des approvisionnements dits spots, les clauses proposées dans les CGV, quand c’est le cas, et/ou négociées dans la convention, peuvent être rédigées de façon à être opérationnelles. Ces cas sont assez fréquents pour les PME fournissant des produits de charcuterie ou des produits laitiers : périodes d’observation des indicateurs de référence de six semaines à trois mois, seuils de variation de ces indicateurs compris entre 5 et 10%.
Certains fournisseurs ayant choisi l’option de transparence dite option 3, n’étant pas tenus de communiquer la part des MPA dans les produits, aucune indication relative à la pondération à apporter à la CRA ne figure dans les CGV.
Dans ces cas, il peut arriver que les parties s’accordent sur le fait que le fournisseur :
- s’engage à faire intervenir le tiers indépendant lorsque que la clause doit se déclencher, à la hausse comme à la baisse,
- ou s’engage à faire intervenir le tiers indépendant pour établir la part de MPA dans le produit si le taux de variation de l’indicateur déclenchant la CRA est atteint,
- ou fasse preuve de davantage de transparence que ce qui est requis dans le cadre de cette option, en indiquant, par exemple :
- Le volume de MPA mise en œuvre pour 1kg de produit fini (cas observé dans une convention portant sur des produits laitiers) ;
- Le poids global moyen de la MPA dans le prix convenu (par exemple dans une convention portant sur des biscuits) ;
- Le poids de chaque MPA principale dans le tarif (idem).
Certains distributeurs prévoient dans leurs contrats-types plusieurs options, dont une seule sera retenue par les parties :
- Période d’observation des indicateurs pendant X mois consécutifs (à déterminer entre les parties) ;
- Révision à dates fixes si les seuils sont atteints à ces dates ;
- Révision selon les modalités prévues par le fournisseur.
Une enseigne semble reprendre systématiquement les indicateurs mentionnés dans les CGV. Le fournisseur explicite dans une annexe de la convention comment il prend en compte ces indicateurs.
La CRA reprend également dans certains cas à l’identique les périodes d’observation des indicateurs et les seuils de déclenchement demandés par le fournisseur dans ses CGV.
Les conventions de certains distributeurs stipulent en outre :
- Que si l’activation de la clause de révision automatique mène à une hausse de plus de 10% du prix convenu, l’équilibre contractuel est rompu, et la convention doit donc être renégociée ;
- Ou que la CRA n’est pas applicable aux produits faisant l’objet de services de coopération commerciale ou aux produits en promotion, bien que le texte ne prévoie aucune exception à la mise en œuvre de la clause négociée.
- Indicateurs utilisés
En ce qui concerne les indicateurs utilisés pour les clauses de révision automatique, on trouve régulièrement cités la base MINTEC, les indicateurs publiés de type IMPAPA, ITAVI ou encore les cours mondiaux ou nationaux des MPA. Dans certains secteurs, les organisations interprofessionnelles ne respectent pas les dispositions légales en ne publiant pas d’indicateurs de coûts de production ou en ne les mettant pas suffisamment à jour.
- Seuils de déclenchement
En général, la fréquence de déclenchement des CRA est trimestrielle ou semestrielle. Par ailleurs, l’encadrement du seuil de déclenchement en valeur à la hausse et à la baisse constitue un tunnel à l’intérieur duquel les variations n'ont pas d'effet afin de neutraliser les variations non significatives, et dont la prise en compte perturberait la bonne exécution du contrat.
En cas de déclenchement de la CRA, les nouveaux prix facturés par l’industriel s’appliquent en général dans un délai d’un mois à compter de la révision elle-même (délai maximal autorisé par la loi[8]).
Les clauses de renégociation[9]
Le législateur a, dès 2014, dans le cadre de la loi dite Consommation, instauré l’obligation de prévoir dans les conventions conclues entre fournisseurs et distributeurs une clause de renégociation, assortie d’une obligation de moyens, dont le champ d’application portait à l’origine sur la variation à la hausse comme à la baisse du coût des matières premières agricoles.
La loi dite EGAlim 1 a intégré dans le périmètre de cette clause les coûts de l’énergie en 2018, puis la loi dite EGAlim 2 y a intégré les coûts liés à l’emballage et au transport, la clause étant en outre rendue obligatoire dans les contrats portant sur les produits MDD.
En son état actuel, l’article L. 441-8 du code de commerce dispose ainsi :
« I. - Sans préjudice de l'article 172 bis du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil, les contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois portant sur la vente des produits agricoles et alimentaires dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires et des produits agricoles et alimentaires, de l'énergie, du transport et des matériaux entrant dans la composition des emballages comportent une clause relative aux modalités de renégociation du prix permettant de prendre en compte ces fluctuations à la hausse comme à la baisse.
Cette clause, définie par les parties, précise les conditions et les seuils de déclenchement de la renégociation.
La renégociation de prix est conduite de bonne foi dans le respect du secret des affaires, ainsi que dans un délai, précisé dans le contrat, qui ne peut être supérieur à un mois. Elle tend à une répartition équitable entre les parties de l'accroissement ou de la réduction des coûts de production résultant de ces fluctuations. Elle tient compte notamment de l'impact de ces fluctuations sur l'ensemble des acteurs de la chaîne d'approvisionnement. Un compte rendu de cette négociation est établi, selon des modalités définies par décret. (…).
Si la renégociation de prix n'aboutit pas à un accord au terme du délai d'un mois prévu au troisième alinéa, et sauf recours à l'arbitrage, il est fait application de l'article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime sans que le contrat puisse prévoir un autre dispositif de médiation.
Le présent article ne fait pas obstacle à toute autre renégociation, dans le respect du présent titre (…) ».
Les clauses de renégociation ne concernent que certains produits alimentaires[10], les céréales, produits de minoterie, les huiles végétales et de nombreuses appellations de vin notamment étant exclus du champ d’application de l’article L. 441-8.
Les clauses de renégociation sont contractuelles et librement négociables dans le respect des dispositions de l’article L. 441-8.
La Commission note que par la loi dite EGAlim 2, le législateur a supprimé la référence à des indicateurs[11].
Si la référence à ces derniers est l’usage, rien n’exclut, ainsi, la possibilité pour les parties de se fonder sur d’autres éléments, comme par exemple les factures d’approvisionnement que produirait le fournisseur, pour prouver que les seuils de déclenchement sont atteints.
Cet article dispose par ailleurs que les conventions portant sur « des produits agricoles et alimentaires dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires et des produits agricoles et alimentaires, de l'énergie, du transport et des matériaux entrant dans la composition des emballages comportent une clause relative aux modalités de renégociation (…) ».
Si les prix de revient du fournisseur ou du producteur agricole ne sont pas significativement affectés par les variations du prix des transports, de l’énergie ou des matériaux entrant dans la composition des emballages, la Commission estime donc qu’il n’y a pas lieu d’obliger les parties, libres de négocier cette clause, à insérer l’ensemble des postes de coûts énumérés dans cet article dans la clause de renégociation et qu’elles peuvent ne retenir que celui ou ceux qu’elles estiment pertinent(s).
Difficultés concrètes d’application
Les parties doivent aboutir, dans le cadre de la négociation de cette clause, à une base objective permettant d’obtenir que les variations des prix de ces intrants, affectant significativement les coûts de production du fournisseur ou du producteur agricole, conduiront à l’ouverture de renégociations.
La Commission souligne le formalisme exigeant de la mise en œuvre de la clause de renégociation telle que prévue à l’article L. 441-8 :
- Lorsque les critères de conditions et seuils de déclenchement sont remplis ;
- La renégociation ne peut s’engager que si l’une des parties le demande ;
- Les parties peuvent négocier pendant un mois au maximum et doivent établir un compte-rendu au terme de la négociation ;
- A ce stade, il n’existe aucune obligation de résultat. En l’absence d’accord, les parties ne peuvent avoir recours, qu’à l’arbitrage ou aux dispositions prévues à l’article L. 631-28 du CRPM qui prévoit une procédure de médiation auprès du médiateur des relations commerciales agricoles. La durée de la médiation, qui ne peut excéder un mois, est renouvelable une fois ;
- En cas d'échec de la médiation, les parties peuvent ensuite saisir le président du tribunal compétent.
Ainsi, les conventions aval étant généralement annuelles, quelle que soit la période d’observation des indicateurs retenue dans la clause (généralement entre trois et six mois), en cas de désaccord au terme de la négociation, les deux parties seront toujours – et selon toute probabilité pour un bon moment encore- en litige au moment où s’ouvriront les négociations annuelles suivantes.
La Commission constate que, dans de telles conditions, les parties ne s’engagent pour ainsi dire jamais dans le processus de renégociation tel que décrit à l’article L. 441-8, et ce d’autant plus que cet article ne fait pas obstacle à d’autres formes de renégociation[12].
Clauses de renégociation – état des lieux
Le présent état des lieux porte uniquement sur le secteur aval, en l’absence d’éléments disponibles concernant l’amont.
Indicateurs utilisés
Les indicateurs choisis pour les seuils de déclenchement des clauses de renégociation sont souvent basés sur les données de l'INSEE et correspondent à la variation des cours des matières hors matières premières agricoles, qui sont souvent difficiles à mettre en rapport avec la réalité des coûts de chaque fournisseur.
Les indicateurs retenus pour les MPA sont souvent les mêmes que ceux retenus dans les CRA.
Seuils de déclenchement
Les seuils de déclenchement sont très variables : s’ils sont généralement compris entre 15% et 30%, ils peuvent parfois atteindre 70% pour l’énergie.
De tels seuils, aussi élevés soient-ils, ne sont pas nécessairement le signe d’une clause rédigée de manière abusive, car il est vraisemblable que, quelles que soient les variations du prix de l’énergie, la part de cette dernière dans le prix de revient soit négligeable.
Au demeurant, pour les intrants prévus à l’article L. 441-8 du code de commerce comme pour la MPA, de nombreux industriels couvrent leurs approvisionnements, de sorte que les coûts réellement supportés sont plus ou moins déconnectés des variations des indices sur des périodes de court terme.
On peut noter que pour une même enseigne, selon les fournisseurs, les seuils de déclenchement par matière première industrielle (MPI) sont parfois variables, ce qui semble attester d’une négociation effective.
Dans les conventions d’autres enseignes, les seuils de déclenchement sont manifestement préremplis par le distributeur car même les indicateurs non retenus par les parties (cases non cochées) sont assortis de seuils de variation. Cela ne suffit pas à prouver que ces seuils ne sont pas négociables, mais cela peut constituer un point de vigilance.
Périodes d’observation
Elles sont également très variables selon les conventions (et les enseignes) : de deux à six mois.
Mise en œuvre des clauses de renégociation
La Commission note qu’il y a peu de cas de déclenchement des clauses de renégociation de l'article L. 441-8 du code de commerce. Ces clauses ont pu s'appliquer quelquefois à des variations de coûts d’énergie ou d’emballages, mais force est de constater que, la mise en œuvre de la clause légale de renégociation est pénalisée par son formalisme très lourd sans aucune garantie de résultat et ce d’autant plus que cet article ne fait pas obstacle à d’autres formes de renégociation qui sont par ailleurs plébiscitées par les opérateurs.
Bonnes pratiques identifiées en l’état actuel du droit
Clauses de révision automatique des prix
Le fait pour le fournisseur de proposer une clause de révision automatique dans ses CGV permet d’avoir une base de négociation identique pour l’ensemble des acheteurs, susceptible de refléter au mieux les contraintes d’approvisionnement du fournisseur et de prévoir la prise en compte des indicateurs les plus pertinents au regard de ses conditions et cycles d’approvisionnement.
Une telle approche est susceptible de réduire la probabilité que chaque enseigne négocie une CRA différente, avec des critères de déclenchement (seuils, périodes d’observation), voire des indicateurs différents, situation actuellement courante, alors que les variations de coûts subies par le fournisseur sont les mêmes quels que soient ses acheteurs. Cette situation peut aboutir à des déclenchements décalés dans le temps et en termes d’évolution du prix convenu[13].
La conséquence d’une telle pratique est que chaque acheteur, dès lors que le fournisseur a présenté sa formule et argumenté sa pertinence, peut accepter de reprendre ces propositions de clauses dans les conventions. Ainsi, le fait, de reprendre la clause insérée dans les CGV du fournisseur si elle est justifiée apparait également comme une bonne pratique.
Clauses de renégociation
De même, les fournisseurs qui indiquent dans leurs CGV les indicateurs publiés pertinents concernant leurs intrants hors MPA posent des bases de discussion harmonisées avec l’ensemble de leurs acheteurs.
Le fait de proposer une formule, qui ne tienne éventuellement compte que des intrants pertinents parmi ceux prévus à l’article L. 441-8 du code de commerce, est également une bonne pratique.
C’est en effet le fournisseur qui est le mieux à même de savoir :
- Quels sont, parmi ces postes, ceux qui sont susceptibles d’impacter significativement ses prix de production ;
- Et quels sont les indicateurs et périodes d’observation à retenir, selon la façon dont ses approvisionnements sont couverts à court ou moyen terme.
Les recommandations de la Commission
Recommandations à droit constant
Clauses de révision automatique des prix
Recommandation n° 1 : Les seuils de déclenchement et les délais de mise en œuvre doivent être identiques pour une révision à la hausse ou à la baisse ou, s'ils sont différents, avoir été pleinement négociés et justifiés pour éviter tout risque de grief de déséquilibre significatif. D’une manière plus générale, les clauses doivent prévoir une réciprocité dans les taux et dans les seuils de déclenchement.
Recommandation n°2 : Dans la mesure du possible, les clauses de révision automatique de prix à l’aval entre le fournisseur et l’acheteur, reprennent des indicateurs similaires à ceux prévus à l’amont au titre de l’article L. 631-24, III,1° du CRPM sous réserve du respect de ces dispositions par les parties dans le cadre de la relation amont, et de la pertinence de cette similarité au regard de la composition des produits fabriqués par l’industriel.
Recommandation n°3 : Les fournisseurs doivent proposer une formule de révision automatique adaptée à leurs cycles de production et d’approvisionnement.
Recommandation n°4 : Tout en préservant les parties de discussions trop fréquentes, les seuils négociés doivent être réalistes, et en cohérence avec les cycles de production et de commercialisation des produits visés par le contrat afin de rendre la clause opérationnelle et ne pas conduire à une neutralisation de ses effets.
Recommandation n°5 : Lorsque le fournisseur propose une gamme très étendue, avec des produits dont la composition est très variable, les parties pourraient convenir d’une CRA par catégorie de produits relativement homogènes, laquelle serait appelée à déclencher, le cas échéant, une révision du prix convenu uniquement pour les produits de ladite catégorie.
Recommandation n°6 : Les clauses de révision automatique ne doivent pas être interprétées comme des clauses induisant une fluctuation permanente et un ajustement corrélatif du prix, mais comme le moyen de refléter une variation significative et durable des coûts de production agricole, résultant d'une discussion initiale entre les parties sur des bases objectives en vue d’une révision du prix en cours d'exécution du contrat, dans la préservation de l’équilibre contractuel,
A ce titre, une révision automatique devrait potentiellement intervenir au plus une fois par an lorsque le contrat est annuel, voire deux fois en cas de variation significative de la matière première agricole.
Recommandation n°7 : En application de l’article L. 631-24 du CRPM, les organisations interprofessionnelles reconnues sont tenues de publier des indicateurs de référence pour les produits agricoles qu’elles représentent. Ces indicateurs sont nécessaires à la bonne application des dispositions relatives à la clause de révision automatique des prix. Ils doivent donc être publiés et mis à jour de façon régulière.
Clauses de renégociation
Recommandation n°8 : Dans le respect de l’esprit des articles L. 441-8 et L. 442-1, I, 2° du code de commerce, les parties peuvent ne tenir compte que des postes de coûts les plus pertinents parmi ceux mentionnés par ce texte.
Recommandation n°9 : En application de l’article L. 631-24 du CRPM, les organisations interprofessionnelles reconnues sont tenues de publier des indicateurs de référence pour les produits agricoles qu’elles représentent. Ces indicateurs sont nécessaires à la bonne application des dispositions relatives à la clause de renégociation. Ils doivent donc être publiés et mis à jour de façon régulière.
Recommandations portant sur des évolutions législatives
Les débats intervenus lors de l’examen de la saisine n’ont pas permis d’aboutir à un consensus sur des recommandations d’évolutions législatives.
Annexe 1 - Cadre législatif encadrant la clause de révision automatique des prix et la clause de renégociation
Les textes encadrant la clause de révision automatique des prix :
Contrats dits amont : Art. L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime
I.-Tout contrat de vente de produits agricoles livrés sur le territoire français est conclu sous forme écrite et est régi, dans le respect des articles 1365 et 1366 du code civil, par le présent article.
Le présent article et les articles L. 631-24-1 à L. 631-24-3 ne s'appliquent ni aux ventes directes au consommateur, ni aux cessions réalisées au bénéfice des organisations caritatives pour la préparation de repas destinés aux personnes défavorisées, ni aux cessions à prix ferme de produits agricoles sur les carreaux affectés aux producteurs et situés au sein des marchés d'intérêt national définis à l'article L. 761-1 du code de commerce ou sur d'autres marchés physiques de gros de produits agricoles.
Un décret en Conseil d'Etat peut fixer un ou plusieurs seuils de chiffre d'affaires en-dessous desquels le présent article n'est pas applicable aux producteurs ou aux acheteurs de produits agricoles. Ces seuils peuvent, le cas échéant, être adaptés par produit ou par catégorie de produits.
II.-La conclusion d'un contrat de vente écrit relatif à la cession à leur premier acheteur de produits agricoles figurant à l'annexe I du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil destinés à la revente ou à la transformation en vue de la revente est précédée d'une proposition du producteur agricole.
Lorsque le producteur a donné mandat à une organisation de producteurs reconnue dont il est membre ou à une association d'organisations de producteurs reconnue à laquelle appartient l'organisation de producteurs dont il est membre pour négocier la commercialisation de ses produits sans qu'il y ait transfert de leur propriété, la conclusion par lui d'un contrat écrit avec un acheteur pour la vente des produits en cause est précédée de la conclusion et est subordonnée au respect des stipulations de l'accord-cadre écrit avec cet acheteur par l'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs. L'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs propose à l'acheteur un accord-cadre écrit conforme aux prescriptions du présent article. La proposition de contrat ou d'accord-cadre écrit est le socle unique de la négociation au sens de l'article L. 441-1 du code de commerce. Tout refus de la proposition de contrat ou d'accord-cadre écrit par le premier acheteur ainsi que toute réserve sur un ou plusieurs éléments de cette proposition doivent être motivés et transmis à l'auteur de la proposition dans un délai raisonnable au regard de la production concernée.
III.-La proposition de contrat ou d'accord-cadre écrit mentionnée au II et le contrat ou l'accord-cadre écrit conclu comportent a minima les clauses relatives :
1° Au prix et aux modalités de révision automatique, à la hausse ou à la baisse, de ce prix, selon une formule librement déterminée par les parties, ou aux critères et modalités de détermination du prix, parmi lesquels la pondération des indicateurs mentionnés au quinzième alinéa du présent III ;
2° A la quantité totale, à l'origine et à la qualité des produits concernés qui peuvent ou doivent être livrés ;
3° Aux modalités de collecte ou de livraison des produits ;
4° Aux modalités relatives aux procédures et délais de paiement ;
5° A la durée du contrat ou de l'accord-cadre, qui ne peut être inférieure à trois ans ;
6° Aux règles applicables en cas de force majeure ;
7° Au délai de préavis et à l'indemnité éventuellement applicables dans les différents cas de résiliation du contrat. Dans l'hypothèse où la résiliation est motivée par une modification du mode de production, le délai de préavis et l'indemnité éventuellement applicables sont réduits. En cas d'aléa sanitaire ou climatique exceptionnel indépendant de la volonté des parties, aucune pénalité ne peut être imposée à un producteur ne respectant pas les volumes prévus au contrat.
La durée minimale des contrats de vente et accords-cadres mentionnée au 5° du présent III peut être augmentée jusqu'à cinq ans par extension d'un accord interprofessionnel en application de l'article L. 632-3 ou, à défaut, par décret en Conseil d'Etat. L'accord interprofessionnel ou le décret en Conseil d'Etat peut prévoir que la durée minimale des contrats portant sur un produit dont le producteur a engagé la production depuis moins de cinq ans est augmentée, dans la limite de deux ans. Un producteur peut renoncer, expressément et par écrit, à ces augmentations de la durée minimale du contrat.
Les contrats portant sur un produit dont le producteur a engagé la production depuis moins de cinq ans ne peuvent être résiliés par l'acheteur avant le terme de la période minimale, sauf en cas d'inexécution par le producteur ou en cas de force majeure. Ils fixent la durée de préavis applicable en cas de non-renouvellement.
Lorsqu'un acheteur a donné son accord à la cession d'un contrat par le producteur à un autre producteur engagé dans la production depuis moins de cinq ans, la durée restant à courir du contrat cédé, si elle est inférieure à la durée minimale fixée en application du présent III, est prolongée pour atteindre cette durée.
Sont considérés comme un producteur ayant engagé une production depuis moins de cinq ans l'exploitant qui s'est installé ou a démarré une nouvelle production au cours de cette période ainsi qu'une société agricole intégrant un nouvel associé répondant aux conditions fixées au présent alinéa et détenant au moins 10 % de son capital social.
Un décret en Conseil d'Etat précise les produits considérés comme relevant de la même production pour l'application du présent article.
Les dispositions relatives à la durée minimale du contrat prévues au présent III ne sont applicables ni aux produits soumis à accises, ni aux raisins, moûts et vins dont ils résultent.
La proposition de contrat ou d'accord-cadre constitue le socle de la négociation entre les parties. Au titre des critères et modalités de révision ou de détermination du prix mentionnés au 1° du présent III, elle prend en compte un ou plusieurs indicateurs relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture et à l'évolution de ces coûts. Dans le contrat ou dans l'accord-cadre, les parties définissent librement ces critères et ces modalités de révision ou de détermination du prix en y intégrant, outre le ou les indicateurs issus du socle de la proposition, un ou plusieurs indicateurs relatifs aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur le ou les marchés sur lesquels opère l'acheteur et à l'évolution de ces prix ainsi qu'un ou plusieurs indicateurs relatifs aux quantités, à la composition, à la qualité, à l'origine et à la traçabilité des produits ou au respect d'un cahier des charges. Dans le cadre de leurs missions et conformément au règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 précité, les organisations interprofessionnelles élaborent et publient des indicateurs, qui servent d'indicateurs de référence. Elles peuvent, le cas échéant, s'appuyer sur l'observatoire mentionné à l'article L. 682-1 ou sur l'établissement mentionné à l'article L. 621-1. A défaut de publication, par une organisation interprofessionnelle, des indicateurs de référence dans les quatre mois suivant la promulgation de la loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, les instituts techniques agricoles les élaborent et les publient dans les deux mois suivant la réception d'une telle demande formulée par un membre de l'organisation interprofessionnelle.
Les contrats, accords-cadres et propositions de contrat et d'accord-cadre mentionnés au premier alinéa du présent III comportent également, le cas échéant, la clause mentionnée à l'article L. 441-8 du code de commerce et celle prévue à l'article 172 bis du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 précité.
Les contrats, accords-cadres et propositions de contrat et d'accord-cadre mentionnés au premier alinéa du présent III ne comportent pas de clauses ayant pour effet une renégociation ou une modification automatique du prix liée à l'environnement concurrentiel.
IV.-La proposition d'accord-cadre écrit et l'accord-cadre conclu mentionnés au premier alinéa du III précisent en outre :
1° La quantité totale, l'origine et la qualité des produits agricoles à livrer par les producteurs membres de l'organisation ou les producteurs représentés par l'association ;
2° La répartition des quantités à livrer entre les producteurs membres de l'organisation ou les producteurs représentés par l'association et les modalités de cession des contrats ;
3° Les modalités de gestion des écarts entre le volume ou la quantité à livrer et le volume ou la quantité effectivement livrés par les producteurs membres de l'organisation ou les producteurs représentés par l'association ;
4° Les règles organisant les relations entre l'acheteur et l'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs, notamment les modalités de la négociation sur les quantités et le prix ou les modalités de détermination du prix entre l'acheteur et l'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs ;
5° Les modalités de transparence instaurées par l'acheteur auprès de l'organisation de producteurs ou de l'association d'organisations de producteurs, précisant les modalités de prise en compte des indicateurs figurant dans le contrat conclu avec l'acheteur en application de l'article L. 631-24-1.
L'acheteur transmet chaque mois à l'organisation de producteurs ou à l'association d'organisations de producteurs avec laquelle un accord-cadre a été conclu les éléments figurant sur les factures individuelles des producteurs membres ayant donné un mandat de facturation à l'acheteur et l'ensemble des critères et modalités de détermination du prix d'achat aux producteurs. Les modalités de transmission de ces informations sont précisées dans un document écrit.
V.−Pour les volumes en cause, l'établissement de la facturation par le producteur est délégué à l'organisation de producteurs ou à l'association d'organisations de producteurs commercialisant ses produits. Lorsque les membres de cette organisation ou de cette association réunis en assemblée générale le décident, ou à défaut d'organisation de producteurs ou d'association d'organisations de producteurs, cette facturation peut être déléguée à un tiers ou à l'acheteur. Dans tous les cas, l'établissement de la facturation fait l'objet d'un mandat écrit distinct et qui ne peut être lié au contrat.
Le mandat de facturation est renouvelé chaque année par tacite reconduction.
Le producteur peut révoquer ce mandat à tout moment, sous réserve d'un préavis d'un mois.
VI.- Sans préjudice du 5° du III, le contrat écrit ou l'accord-cadre écrit est prévu pour une durée, le cas échéant, au moins égale à la durée minimale fixée par un accord interprofessionnel étendu en application de l'article L. 632-3 et est renouvelable par tacite reconduction pour une période équivalente, sauf stipulations contraires. Il fixe la durée de préavis applicable en cas de non-renouvellement. Lorsque ce préavis émane de l'acheteur, il ne peut être inférieur à trois mois.
VII.-La proposition de contrat ou la proposition d'accord-cadre soumise à l'acheteur en application du II par le producteur agricole, l'organisation de producteurs ou l'association d'organisations de producteurs est annexée au contrat écrit ou à l'accord-cadre écrit.
VIII.-Lorsque le contrat ou l'accord-cadre ne comporte pas de prix déterminé, l'acheteur communique au producteur et à l'organisation de producteurs ou à l'association d'organisations de producteurs, avant le premier jour de la livraison des produits concernés par le contrat, de manière lisible et compréhensible, le prix qui sera payé. Le présent VIII n'est pas applicable aux contrats de vente comportant des stipulations justifiant de les qualifier de contrats financiers, au sens du III de l'article L. 211-1 du code monétaire et financier, ou comportant une indexation à de tels contrats ou des stipulations qui prévoient la conclusion d'un contrat financier pour la détermination du prix. Il ne s'applique pas non plus aux contrats conclus par les collecteurs mentionnés à l'article L. 666-1 du présent code lorsqu'ils prévoient une indexation conformément au 1° du III du présent article, en l'absence de contrat financier de référence.
IX.-Pour déterminer les indicateurs utilisés au titre du présent article, les parties peuvent notamment s'appuyer sur les modalités de fixation du prix des systèmes de garantie et des labels de commerce équitable définis à l'article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.
Conventions dites aval marque nationale : art. L. 443-8 du code de commerce
I.-Pour les produits alimentaires et les produits destinés à l'alimentation des animaux de compagnie pour lesquels les conditions générales de vente sont soumises au I de l'article L. 441-1-1, une convention écrite conclue entre le fournisseur et son acheteur mentionne les obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l'issue de la négociation commerciale, dans le respect des articles L. 442-1 et L. 442-3. Cette convention est établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre et des contrats d'application.
La convention mentionne chacune des obligations réciproques auxquelles se sont engagées les parties à l'issue de la négociation commerciale ainsi que leur prix unitaire.
Lorsqu'elle est conclue avec un distributeur, la convention est conclue dans les conditions prévues aux articles L. 441-3 et L. 441-4, sous réserve du présent article.
II.-La négociation commerciale ne porte pas sur la part, dans le tarif du fournisseur, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au I de l'article L. 441-1-1.
III.-Lorsque le fournisseur a fait le choix de faire figurer dans ses conditions générales de vente les éléments mentionnés aux 1° ou 2° du I de l'article L. 441-1-1, la convention mentionne, aux fins de concourir à la détermination du prix convenu, la part du prix unitaire ou agrégé des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés aux mêmes 1° ou 2°, tel qu'il figure dans les conditions générales de vente. La convention précise les modalités de prise en compte de ce prix d'achat dans l'élaboration du prix convenu.
IV.-La convention comporte une clause de révision automatique des prix du contrat en fonction de la variation du coût des matières premières agricoles, à la hausse ou à la baisse, entrant dans la composition du produit alimentaire ou du produit destiné à l'alimentation des animaux de compagnie. Les parties déterminent librement, selon la durée du cycle de production, la formule de révision et, en application du III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, les indicateurs utilisés. Lorsque l'acquisition de la matière première agricole par le fournisseur fait l'objet d'un contrat écrit en application du I du même article L. 631-24, la clause de révision inclut obligatoirement les indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture. Les évolutions de prix résultant de la clause de révision automatique des prix sont mises en œuvre au plus tard un mois après le déclenchement de ladite clause.
V.-A.-La convention mentionnée au I du présent article est conclue pour une durée d'un an, de deux ans ou de trois ans.
B.-La convention est conclue au plus tard le 1er mars et le fournisseur communique ses conditions générales de vente à l'acheteur au plus tard trois mois avant cette date.
C.-Le distributeur dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception des conditions générales de vente pour soit motiver explicitement et de manière détaillée, par écrit, le refus de ces dernières ou, le cas échéant, les dispositions des conditions générales de vente qu'il souhaite soumettre à la négociation, soit notifier leur acceptation.
VI.-Sans préjudice des articles L. 442-1 à L. 442-3, tout avenant à la convention mentionnée au I du présent article fait l'objet d'un écrit, qui mentionne l'élément nouveau le justifiant.
VII.-Tout manquement aux I à VI du présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.
VIII.-Pour les produits mentionnés au I du présent article, sont applicables le II de l'article L. 442-1 ainsi que, pour la détermination du prix applicable durant la durée du préavis, le II du présent article.
Conventions dites aval en marque de distributeur : art. L. 441-7 du code de commerce
I.-Le contrat conclu entre un fournisseur et un distributeur portant sur la conception et la production de produits alimentaires selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur et vendus sous marque de distributeur mentionne le prix ou les critères et modalités de détermination du prix d'achat des produits agricoles entrant dans la composition de ces produits alimentaires.
La détermination du prix tient compte des efforts d'innovation réalisés par le fabricant à la demande du distributeur. La négociation du prix ne porte pas sur la part, dans le prix proposé par le fabricant, du prix des matières premières agricoles et des produits transformés mentionnés au I de l'article L. 441-1-1.
Le contrat comporte une clause de révision automatique des prix en fonction de la variation du coût de la matière première agricole ou des produits transformés soumis au I de l'article L. 441-1-1 du présent code entrant dans la composition des produits alimentaires. Les parties déterminent librement la formule de révision, en tenant compte notamment des indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture mentionnés au III de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime.
Le distributeur peut demander au fabricant de mandater un tiers indépendant pour attester, sous quinze jours, l'exactitude de la variation du coût de la matière première agricole supportée par le fabricant. Dans ce cas, le fabricant remet au tiers indépendant, sous dix jours, les pièces justifiant l'exactitude de ces éléments. Les frais d'intervention du tiers indépendant sont à la charge du distributeur. En cas d'inexactitude ou de tromperie volontaire de la part du fabricant quant à la variation du coût de la matière première agricole ou du produit transformé, constatée par le tiers indépendant et entraînant l'impossibilité de délivrer l'attestation mentionnée à la première phrase du présent alinéa, ces frais sont à la charge du fabricant. Le tiers indépendant est astreint au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont il a pu avoir connaissance à raison de ses fonctions.
I bis A.-Lorsque le contrat porte sur une période supérieure à douze mois, il fixe une date annuelle à laquelle le prix est renégocié pour tenir compte des fluctuations des prix des matières premières entrant dans la composition du produit.
La négociation ne porte pas sur la part, dans le prix proposé par le fabricant à l'occasion de cette renégociation, que représente le prix des matières premières agricoles et des produits transformés composés de plus de 50 % de matières premières agricoles qui entrent dans la composition du produit. Le dernier alinéa du I du présent article s'applique lors de cette renégociation.
I bis.-En cas d'appel d'offres portant sur la conception et la production de produits alimentaires selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur et vendus sous marque de distributeur, l'appel d'offres comporte un engagement du distributeur relatif au volume prévisionnel qu'il souhaite faire produire.
I ter.-Le contrat mentionné au I comporte une clause relative au volume prévisionnel que le distributeur s'engage à faire produire sur une période donnée ainsi qu'un délai raisonnable de prévenance permettant au fabricant d'anticiper des éventuelles variations de volume.
I quater.-Le contrat définit la durée minimale du préavis contractuel à respecter en cas de rupture de la relation contractuelle. Il prévoit le sort et les modalités d'écoulement des emballages et des produits finis en cas de cessation de contrat.
II.-L'obligation prévue au I s'applique uniquement lorsque la vente des produits agricoles fait l'objet d'un contrat écrit. Elle s'applique, le cas échéant, lorsque le vendeur est une société mentionnée à l'article L. 521-1 du code rural et de la pêche maritime.
III.-Le contrat mentionné au I comporte une clause de répartition entre le distributeur et le fournisseur des différents coûts additionnels survenant au cours de l'exécution du contrat.
IV.-Aucune dépense liée aux opérations promotionnelles d'un produit vendu sous marque de distributeur ne peut être mise à la charge du fabricant.
V.-Le contrat établit un système d'alerte et d'échanges d'informations périodiques entre le distributeur et le fabricant afin d'optimiser les conditions d'approvisionnement et de limiter les risques de ruptures.
VI.-Tout manquement au présent article est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale.
Le maximum de l'amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et à 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.
Les textes encadrant la clause de renégociation
Article L. 441-8 du code de commerce
« I. - Sans préjudice de l'article 172 bis du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 234/79, (CE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil, les contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois portant sur la vente des produits agricoles et alimentaires dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires et des produits agricoles et alimentaires, de l'énergie, du transport et des matériaux entrant dans la composition des emballages comportent une clause relative aux modalités de renégociation du prix permettant de prendre en compte ces fluctuations à la hausse comme à la baisse..
Cette clause, définie par les parties, précise les conditions et les seuils de déclenchement de la renégociation.
La renégociation de prix est conduite de bonne foi dans le respect du secret des affaires, ainsi que dans un délai, précisé dans le contrat, qui ne peut être supérieur à un mois. Elle tend à une répartition équitable entre les parties de l'accroissement ou de la réduction des coûts de production résultant de ces fluctuations. Elle tient compte notamment de l'impact de ces fluctuations sur l'ensemble des acteurs de la chaîne d'approvisionnement. Un compte rendu de cette négociation est établi, selon des modalités définies par décret.
Le fait de ne pas prévoir de clause de renégociation conforme aux deux premiers alinéas du présent I, de ne pas respecter le délai fixé au troisième alinéa, de ne pas établir le compte rendu prévu au même troisième alinéa ou de porter atteinte, au cours de la renégociation, aux secrets de fabrication ou au secret des affaires est passible d'une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale. Le maximum de l'amende encourue est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.
Si la renégociation de prix n'aboutit pas à un accord au terme du délai d'un mois prévu au troisième alinéa, et sauf recours à l'arbitrage, il est fait application de l'article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime sans que le contrat puisse prévoir un autre dispositif de médiation.
Le présent article ne fait pas obstacle à toute autre renégociation, dans le respect du présent titre.
Le présent article est également applicable aux contrats d'une durée d'exécution supérieure à trois mois portant sur la conception et la production, selon des modalités répondant aux besoins particuliers de l'acheteur, de produits mentionnés au premier alinéa.
II. - Un arrêté du ministre chargé de l'agriculture peut fixer la liste de certains produits agricoles et alimentaires pour lesquels, par dérogation, le I du présent article n'est pas applicable. Cette dérogation fait l'objet d'une demande motivée de l'interprofession représentative des produits concernés ou, lorsqu'il n'existe pas d'interprofession pour ce type de produits, d'une organisation professionnelle représentant des producteurs. »
Article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime
« Tout litige entre professionnels relatif à la conclusion ou à l'exécution d'un contrat ou d'un accord-cadre mentionné à l'article L. 631-24 ayant pour objet la vente de produits agricoles ou alimentaires doit, préalablement à toute saisine du juge, faire l'objet d'une procédure de médiation par le médiateur des relations commerciales agricoles et, en cas d'échec de la médiation, d'une saisine du comité de règlement des différends commerciaux agricoles mentionné à l'article L. 631-28-1, sauf si le contrat prévoit un autre dispositif de médiation ou en cas de recours à l'arbitrage et sauf pour certaines filières, dont la liste est définie par décret, pour lesquelles des modes alternatifs de règlement des différends ont été mis en place.
Le médiateur des relations commerciales agricoles fixe la durée de la médiation, qui ne peut excéder un mois, renouvelable une fois sous réserve de l'accord préalable de chaque partie. Le chapitre Ier du titre II de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative est applicable à cette médiation.
En cas d'échec de la médiation, dans un délai d'un mois à compter du constat de cet échec, toute partie au litige, après en avoir informé les parties, peut saisir le comité de règlement des différends commerciaux agricoles. Toute partie à un litige relatif à l'exécution d'un contrat peut, le cas échéant, saisir le président du tribunal compétent pour qu'il statue sur le litige selon la procédure accélérée au fond sur la base des recommandations du médiateur des relations commerciales agricoles. La saisine du président du tribunal compétent selon ces modalités est également ouverte au terme du délai prévu au présent alinéa.
Par dérogation au premier alinéa, en cas d'échec de la médiation portant sur un litige mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 441-8 du code de commerce, toute partie au litige peut directement saisir le juge compétent. »
[1] Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (EGalim 1) et loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs (EGalim 2)
[2] L’acheteur est réputé connaître cette part dans la mesure où le fournisseur doit en faire état dans ses CGV, dans les conditions de transparence prévues à l’art. L. 441-1-1 du code de commerce. Il dispose pour ce faire de trois options.
Option 1 : Présentation de la part de chaque matière première agricole entrant dans la composition du produit alimentaire, en pourcentage du tarif et en pourcentage du volume du produit.
Option 2 : Présentation de manière agrégée de la part des matières premières agricoles entrant dans la composition du produit alimentaire, en pourcentage du tarif et en pourcentage du volume du produit.
Option 3 : La part de la matière première agricole dans le tarif n’est pas communiquée à l’acheteur. En effet, sous réserve que les CGV fassent état d’une évolution du tarif, le fournisseur a recours à un tiers indépendant, qui est chargé, avant la négociation, d’attester la part de cette évolution imputable à celle du prix des MPA entrant dans la composition des produits, et devra également, au terme de la négociation, s’assurer que la négociation n’a pas porté sur cette part.
[4] « La proposition de contrat ou d'accord-cadre constitue le socle de la négociation entre les parties. Au titre des critères et modalités de révision ou de détermination du prix mentionnés au 1° du présent III, elle prend en compte un ou plusieurs indicateurs relatifs aux coûts pertinents de production en agriculture et à l'évolution de ces coûts.
Dans le contrat ou dans l'accord-cadre, les parties définissent librement ces critères et ces modalités de révision ou de détermination du prix en y intégrant, outre le ou les indicateurs issus du socle de la proposition, un ou plusieurs indicateurs relatifs aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur le ou les marchés sur lesquels opère l'acheteur et à l'évolution de ces prix ainsi qu'un ou plusieurs indicateurs relatifs aux quantités, à la composition, à la qualité, à l'origine et à la traçabilité des produits ou au respect d'un cahier des charges. Dans le cadre de leurs missions et conformément au règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 précité, les organisations interprofessionnelles élaborent et publient des indicateurs, qui servent d'indicateurs de référence. Elles peuvent, le cas échéant, s'appuyer sur l'observatoire mentionné à l'article L. 682-1 ou sur l'établissement mentionné à l'article L. 621-1. A défaut de publication, par une organisation interprofessionnelle, des indicateurs de référence dans les quatre mois suivant la promulgation de la loi n° 2021-1357 du 18 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs, les instituts techniques agricoles les élaborent et les publient dans les deux mois suivant la réception d'une telle demande formulée par un membre de l'organisation interprofessionnelle. »
[5] Cf. l’article L. 441-7, II du code de commerce : « II. L’obligation prévue au I s'applique uniquement lorsque la vente des produits agricoles fait l'objet d'un contrat écrit. Elle s'applique, le cas échéant, lorsque le vendeur est une société mentionnée à l'article L. 521-1 du code rural et de la pêche maritime. »
[6] Voir notamment le rapport récent de la Cour des comptes, pp.30 et suivantes : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2024-03/20240214_Controle-contractualisation-dans-cadre-des-lois-Egalim.pdf
[8] Cf. art. L. 443-8-I du code de commerce : « (…). Les évolutions de prix résultant de la clause de révision automatique des prix sont mises en œuvre au plus tard un mois après le déclenchement de ladite clause. »
[9] Le cadre législatif encadrant ces clauses est précisé en annexe 1
[10] Arrêté du 31 juillet 2023 fixant la liste des produits agricoles et alimentaires pour lesquels le I de l’article L 441-8 du code de commerce n’est pas applicable
[11] La version antérieure disposait : « (…) Cette clause, définie par les parties, précise les conditions et les seuils de déclenchement de la renégociation et prend notamment en compte les indicateurs mentionnés à l'article L. 631-24-1 du code rural et de la pêche maritime ou, à défaut, un ou plusieurs indicateurs des prix des produits agricoles ou alimentaires constatés sur le marché sur lequel opère le vendeur diffusés, le cas échéant, par accords interprofessionnels ou par l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. (…) »
[12] Les renégociations intra-annuelles de 2022 encouragées par le gouvernement dans le contexte de la guerre en Ukraine se sont par exemple déroulées en dehors de ce dispositif.
[13] La FAQ portant sur le dispositif EGAlim explique toutefois à cet égard que « la loi prévoit spécifiquement que la clause est fixée par les parties qui négocient la formule de révision et les indicateurs utilisés. Il ne s’agit pas d’un avantage conféré à l’une ou l’autre des parties mais d’un dispositif qui doit permettre de prendre en compte les fluctuations des coûts des matières premières. A cet égard, elle n’entre pas dans le champ de l’interdiction de la discrimination ». Cf. https://agriculture.gouv.fr/egalim-2-une-faq-pour-repondre-aux-questions-des-professionnels-et-des-citoyens-sur-la-nouvelle-loi
Télécharger : Recommandation n° 24-1 relative à un guide de bonnes pratiques en matière de clauses de révision automatique des prix et de clauses de renégociation dans les relations entre industriels et distributeurs - PDF, 450 Ko