Avis n° 22-7 relatif à une demande d’avis d’un cabinet d’avocats portant sur le champ d'application de l'article L. 441-3 du code de commerce
La Commission d’examen des pratiques commerciales,
Vu la lettre enregistrée le 6 avril 2022, sous le numéro 22-25, par laquelle un cabinet d’avocats interroge la Commission sur l’applicabilité de l’article L. 441-3 du code de commerce, qui impose notamment la rédaction d'une convention écrite matérialisant les relations commerciales négociées entre les fournisseurs et les distributeurs, à son client.
Vu les articles L. 440-1 et D. 440-1 à D. 440-13 du code de commerce ;
Le rapporteur entendu lors de sa séance plénière du 17 novembre 2022 ;
L’article L. 441-3 du code de commerce prévoit l’établissement d’une convention écrite qui fixe un certain nombre d’obligations aux cocontractants. Il s’applique à la relation contractuelle entre un fournisseur et un distributeur ou prestataire de services.
L’article L. 441-3 du code de commerce ne s’applique pas à la relation contractuelle entre une entreprise qui crée, fabrique et commercialise des vêtements de prêt à porter et des accessoires de mode et ses « fabricants » de composants ni à la relation contractuelle entre cette entreprise et ses façonniers, qui assemblent, sans les fabriquer, les vêtements et accessoires de mode créés par l’entreprise.
Une entreprise (ci-après l’entreprise)crée, fabrique et commercialise des vêtements de prêt à porter et des accessoires de mode.
Elle achète les composants des modèles qu’elle crée à des fournisseurs, les fait assembler par des façonniers et les revend en l’état à ses distributeurs, vraisemblablement griffés à sa marque (sans précision à ce sujet).
L’entreprise conclut des contrats de prestations avec ses façonniers à qui elle fournit (ou pas) les composants ainsi que les instructions pour le montage des pièces en réalisation des créations. Elle vend ensuite ses articles en tant que fabricant à ses distributeurs (sans précision sur le contenu de ces conventions).
Première question du conseil de l’entreprise : « l’article L. 441-3 du code de commerce s’applique-t-il à l’achat à un fabricant par l’entreprise, d’un modèle conçu par ses soins, fabriqué exclusivement sur ses strictes directives et pour lesquelles elle fournit la matière première ? »
La question présente une difficulté d’interprétation dans la mesure où d’après les renseignements fournis à la Commission, l’entreprise achète d’une part les composants de ses créations à des fabricants et d’autre part, achète une prestation de service de façonnage avec lesdits composants auprès de façonniers qui assemblent les pièces des vêtements ou accessoires de mode selon les instructions de l’entreprise. Par convention, pour éviter toute confusion sur le terme « fabricant », la Commission va considérer que la « matière première » correspond aux composants des vêtements et accessoires et que le « fabricant » est le fournisseur de ces composants (sans que l’on sache s’il les a produits ou s’il est lui-même dans une chaîne d’approvisionnement plus large, voire que l’entreprise elle-même aurait fabriqué tout ou partie des composants).
AncreL’article L. 441-3 du code de commerce prévoit l’établissement d’une convention récapitulative qui fixe un certain nombre d’obligations aux cocontractants dont il est précisé qu’ils sont d’une part un fournisseur et d’autre part un distributeur ou prestataire de services, ce qui n’est pas le cas des relations contractuelles entre l’entreprise, ses fournisseurs de composants (dont on ne sait pas par ailleurs s’ils en sont les fabricants) et ses façonniers à qui elle met à disposition les composants ou, si l’on comprend bien, la « matière première », pour l’exécution sur ses directives, d’un travail à façon, d’une prestation de service en sous-traitante.
Deuxième question : « l’article L. 441-3 du code de commerce s’applique-t-il à l’achat à un fabricant par l’entreprise, d’un modèle conçu par ses soins, fabriqué exclusivement sur ses strictes directives et pour lesquelles elle ne fournit pas la matière première ? ».
La réponse est la même que pour la première question, la fourniture ou non de la « matière première » par l’entreprise au façonnier étant indifférente à l’analyse juridique au cas particulier.
Troisième question : « …par analogie avec l’analyse relative aux produits MDD, faut-il considérer les instructions de (l’entreprise) – cahier des charges, patronage, dessin – comme permettant de formaliser le contrat de fabrication existant entre (l’entreprise) et ses fabricants, écartant ainsi l’application de l’article L. 441-3 du code de commerce » ?
La réponse est la même que pour les deux questions précédentes : l’article L. 441-3 du code de commerce ne s’applique pas d’une part à la relation contractuelle entre l’entreprise et ses « fabricants » de composants, et d’autre part à la relation contractuelle entre l’entreprise et ses façonniers, qui assemblent (et ne fabriquent pas) les vêtements et accessoires de mode créés par l’entreprise.
La relation contractuelle de l'entreprise avec ses prestataires et « fabricants » de composants doit se fonder sur d'autres bases juridiques.
Délibéré et adopté par la Commission d’examen des pratiques commerciales en sa séance plénière du 17 novembre 2022, présidée par Madame Annaïg LE MEUR
Fait à Paris, le 18 novembre
La présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales
Annaïg LE MEUR