La Commission d’examen des pratiques commerciales,
Vu la lettre enregistrée le 1er décembre 2016, sous le numéro 16-57, par laquelle un avocat interroge la Commission sur la possibilité pour une entreprise dont le cycle fiscal, contractuel et commercial, au niveau mondial, démarre au 1er avril de chaque année, de bénéficier de l’exception relative aux cycles de commercialisation particuliers prévue à l’article L441-7 du code de commerce (alinéa 2 du I).
Vu les articles L440-1 et D440-1 à D440-13 du code de commerce ;
Les rapporteurs entendus lors de sa séance plénière du 27 avril 2017 ;
L’ article L.441.7 alinéa 7 du Code de commerce, modifié par la loi du 17 mars 2014, impose que le prix convenu s’applique au plus tard le 2 mars.
Par exception, il est possible de conclure la convention « dans les deux mois suivant le point de départ de la période de commercialisation des produits ou des services soumis à un cycle de commercialisation particulier ». Si le texte ne le prévoit pas de manière explicite, la dérogation à la date de signature emporte de facto une dérogation à la date d’application du prix convenu. Par analogie, celui-ci doit s’appliquer au plus tard dans les deux mois qui suivent le point de départ de la période de commercialisation.
La contrainte d’une société, filiale d’un groupe étranger qui impose de clôturer son exercice fiscal à une date différente de l’année civile, n’entre pas dans le champ de l’exception visée à l’article L.441.7 du Code de commerce, qui vise une saisonnalité spécifique du cycle de commercialisation. Il incombe à celui qui invoque le caractère particulier du cycle de commercialisation d’apporter la preuve de celui-ci.
La société a toutefois la possibilité de proposer, ultérieurement à la date du 1er mars, une modification de son tarif, que le client demeure libre d’accepter ou pas. Toutefois, il est rappelé que tout avenant signé ultérieurement ne doit pas remettre en cause l’économie générale du contrat tel qu’initialement signé.
1. Objet de la saisine
Un avocat représentant une entreprise interroge la CEPC sur la possibilité de déroger aux dispositions de l’article L.441.7 alinéa 7 du Code de commerce, qui prévoient que « Les obligations relevant des 1° et 3° concourent à la détermination du prix convenu. Celui-ci s'applique au plus tard le 1er mars. La date d'entrée en vigueur des clauses prévues aux 1° à 3° ne peut être ni antérieure ni postérieure à la date d'effet du prix convenu. Le fournisseur communique ses conditions générales de vente au distributeur au plus tard trois mois avant la date butoir du 1er mars ou, pour les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier, deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation».
Avant l’entrée en vigueur de la loi du 17 mars 2014, les dispositions de l’article L.441.7 imposaient la signature de la convention avant le 1er mars, mais ne mentionnaient pas les modalités d’entrée en vigueur de celle-ci, notamment en ce qui concerne la date d’application du prix convenu.
Désormais, le prix convenu s’applique au plus tard le 1er mars. Aucune disposition n’est venue préciser ce qu’il advenait lorsque les contrats sont conclus dans les deux mois du point de départ de la période de commercialisation.
Cette obligation d’appliquer les clauses constitutives du prix au plus tard le 1er mars pose un problème au client du demandeur du présent avis, dans la mesure où la société qu’il représente clôture ses comptes au 31 mars, en raison de contraintes fiscales, contractuelles et commerciales imposées par le groupe auquel la société appartient.
Ce faisant, à la date du 1er mars, la société n’a pas totalement connaissance de l’assortiment qu’elle est en mesure de proposer, le lancement de certains produits ne pouvant intervenir en interne qu’au 31 mars. Les changements de prix ne sont pas connus en interne, de sorte qu’il n’est pas possible d’arrêter le tarif. Enfin, le bilan des contrats s’effectue courant mars, et en l’absence de ce bilan, il est difficile de faire le constat de l’année passée.
Les contraintes exposées pourraient-elles justifier de recourir à la possibilité d’appliquer le prix convenu deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation en application de l’article L. 441-7 alinéa 7 du code de commerce ?
2. Analyse de la saisine
L’article L.441.7 du Code de commerce prévoit que la convention unique doit être conclue entre le fournisseur et le distributeur « au plus tard le 1er mars ». Une exception est toutefois prévue, pour les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier, qui vise les produits et services soumis à un cycle saisonnier ou à une période de commercialisation qui ne correspond pas à l’année civile.
La loi du 17 mars 2014 (dite « loi Hamon ») a précisé que le prix convenu s’applique au plus tard le 2 mars.
La loi en l’état n’indique pas à quelle date le prix convenu doit s’appliquer s’agissant des conventions conclues dans les délais dérogatoires. Le législateur ayant voulu fixer un plafond correspondant à la date butoir de signature, laquelle doit intervenir, pour les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier, dans les deux mois suivant le démarrage de la commercialisation, il apparaît légitime de conclure que le prix convenu ne saurait s’appliquer postérieurement à ce délai de deux mois.
L’exception porte sur « les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier ». L’exégèse de ce texte conduit à conclure que cette exception s’applique à des produits ou services dont les caractéristiques intrinsèques contraignent (le terme « soumis » semble le souligner) à une saisonnalité de la commercialisation. Cela peut viser à la fois la disponibilité des produits, ou une saisonnalité de la commercialisation, intervenant pendant une période spécifique (par exemple les décorations de Noël).
Il appartient aux professionnels qui souhaitent bénéficier de cette exception d’apporter la preuve de la particularité de leur cycle de commercialisation. Si la notion de cycle de commercialisation n’a pas été clairement définie par la loi, il paraît opportun de retenir une interprétation restrictive, ce afin de conserver une certaine sécurité juridique.
L’argument relatif au rythme comptable et fiscal de l’entreprise, dans ce contexte, n’apparaît pas comme de nature à justifier que la convention ne soit pas signée au plus tard au 1er mars et que le prix convenu ne soit pas appliqué à cette même date. Le choix de la société mère d’opter pour un exercice fiscal décalé par rapport à l’année civile relève d’une volonté motivée par des raisons qui lui appartiennent, mais est sans lien direct avec la nature des produits commercialisés, ou avec le cycle de commercialisation.
Il reste toutefois la possibilité au fournisseur de modifier son tarif après le 1er mars. Cette modification ne peut être effectivement appliquée que sous réserve de l’accord de ses cocontractants, lesquels demeurent libres de l’accepter ou pas, ce que confirme la note d’information de la DGCCRF du 22 octobre 2014 visant à l’application des dispositions de la loi relative à la consommation (disponible sur le lien suivant : http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/concurrence/relations_commerciales/NI_bis_loi_conso_PCR_final_version_communication.pdf) et venant interpréter les dispositions de la loi précitée.
Il est par ailleurs rappelé que tout avenant signé ultérieurement ne doit pas remettre en cause l’économie générale du contrat tel qu’initialement signé.
Délibéré et adopté par la Commission d’examen des pratiques commerciales en sa séance plénière du 27 avril 2017, présidée par Madame Annick LE LOCH
Fait à Paris, le 27 avril 2017,
La présidente de la Commission d’examen des pratiques commerciales