Commission d'examen des pratiques commerciales

Avis n° 09-06 Venant compléter le dispositif de Questions- Réponses relatif à la mise en oeuvre de la loi de modernisation de l'économie.

Questions

Avis et Réponses

CEPC 09041501

CGV catégoriels :

Est-ce légal : des fournisseurs (dans le secteur du bâtiment) ont créé deux catégories de CGV : l’une pour les négociants stockistes, l’autre pour les coopératives stockistes. Les seconds stockent trois fois plus que les premiers. Les seconds prennent deux fois plus de références que les premiers, mais les barèmes et prix des CGV des premiers sont 10% moins élevés ?

Les pratiques discriminatoires n’étant plus spécifiquement interdites, un fournisseur peut traiter différentes catégories de clients selon des critères qui lui sont propres. Toutefois, ce traitement ne doit pas :

Constituer un acte de concurrence déloyale,

Créer un déséquilibre significatif dans la relation contractuelle fournisseur/distributeur,

Résulter d’une entente,

Constituer un abus de domination.

CEPC 09041502

Coopération commerciale acompte :

Est-ce légal : le client exige une mensualisation du règlement des coopérations commerciales. Ainsi, celles qui n’arriveront qu’en décembre commencent à être réglées dès le mois de mars.

Non si elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et devoirs des parties.

CEPC 09041503

Coopération commerciale non exécutée :

Est-ce légal : depuis 2006, notre client nous a demandé que les deux tracts nationaux jusqu’à présent rémunérés par un budget fixe, le soient désormais en contrepartie d’un budget annuel calculé en pourcentage du chiffre d’affaires à hauteur de 5.00 % pour deux opérations nationales. En 2008, nous réalisons une première opération nationale à Pâques, puis nous préparons la seconde pour le début du mois de décembre. Sans nouvelle de cette opération en septembre, nous appelons le responsable des tracts nationaux. Nous apprenons alors que notre opération nationale a été confiée à un concurrent, et donc sur 2008, nous avons payé 5.00 % pour un seul tract au lieu de deux.

Non, car le contrat n’a pas été respecté. La somme doit être remboursée avec éventuellement des pénalités au profit du fournisseur.

Nous le rappelons : le contrat doit comprendre les accords de coopération commerciale. Chaque partie est tenue de respecter ses engagements.

CEPC 09041504

Délais paiement accords dérogatoires 1 :

Qui est concerné par l’accord dérogatoire non étendu ?

Il est nécessaire d’appartenir à une des organisations dans le cas d’un décret homologuant un accord sans extension ; en revanche, en cas d’extension, il n’est pas nécessaire d’appartenir à une de ces organisations.

CEPC 09041505

Délais paiement accords dérogatoires 2 : Comment identifier les clients et les fournisseurs ayant droit aux dérogations ?

Une entreprise est comprise dans le champ d’extension du décret dès lors qu’elle est susceptible d’adhérer à l’une des organisations signataires au moment de la conclusion des accords et qu’elle est concernée par l’activité du champ d’application de l’accord.

CEPC 09041506

Délais paiement accords dérogatoires 3 : Comment déterminer si les produits ou services ou l’opérateur de ces produits ou services, sont concernés, par un accord dérogatoire : en fonction du code NAF, du produit, de son adhésion à une fédération… ?

 

Sera concernée l’activité qui répond aux deux critères cumulatifs suivants :

1) Elle relève du champ d’application défini dans l’annexe du décret de l’accord concerné ;

2) Elle relève d’au moins une organisation professionnelle signataire.

CEPC 09041507

Délais paiement accords dérogatoires 4 :

Si tous les niveaux d’une même filière sont concernés par un accord dérogatoire, sauf les fournisseurs du niveau le plus en amont, leur trésorerie pourrait se trouver déséquilibrée. L’accord lie-t-il les fournisseurs et clients d’une même filière ?

Non, chaque accord dérogatoire ne s’applique qu’aux opérateurs signataires ou ceux concernés par l’extension. Voir réponse 09041506.

CEPC 09040201

Délais paiement accords dérogatoires 5 :

Est-il légal d’écarter d’un accord dérogatoire sur les délais de paiement une catégorie d’acteurs comme des coopératives d’artisans ?

Le champ de l’accord relève des parties signataires. Mais les accords excluant a priori une catégorie d’acteurs peuvent être considérés comme ayant des effets anticoncurrentiels. Dans ce cas, l’accord peut ne pas être validé par le décret ministériel pris après avis de l’Autorité de la concurrence ou être étendu à la catégorie exclue.

CEPC 09040202

Délais paiement accords dérogatoires 6 :

Le décret peut-il imposer l’accord dérogatoire à des fédérations non signataires ?

Le champ de l’accord relève des parties signataires. Mais les accords excluant a priori une catégorie d’acteurs peuvent être considérés comme ayant des effets anticoncurrentiels. Dans ce cas, l’accord peut ne pas être validé par le décret ministériel pris après avis de l’Autorité de la concurrence ou être étendu à la catégorie exclue.

CEPC 09041508

Délais paiement accords dérogatoires client :

Un fournisseur A vend des produits aux clients d’une filière B. A n’est pas affilié à un syndicat signataire d’un accord dérogatoire. B l’est et se trouve bien en aval du fournisseur A. Les syndicats signataires de l’accord de cette filière sont ceux des clients B directs du fournisseur A.

1) L’accord s’applique t’il de droit, sans décret d’extension, au fournisseur A de cette filière B ?

2) Le fournisseur A risque t’il d’être concerné par l’accord dérogatoire par extension du décret ?

Non, l’accord ne s’applique pas au fournisseur A s’il n’appartient pas à une des organisations signataires de l’accord.

Non, le fournisseur A ne peut être concerné par une extension du décret car ce serait une extension « verticale » contraire à l’esprit de réduction des délais de paiement de la LME.

CEPC 09041509

Délais paiement accords dérogatoires concernés :

Est-il légal d’écarter d’un accord dérogatoire une catégorie de produits destinés au bâtiment alors même que certaines entreprises relevant d’un syndicat amont non-signataire souhaiteraient pouvoir accorder ces délais de paiement dérogatoires aux acteurs aval de la filière ?

Oui. Sera concernée l’activité qui répond aux deux critères cumulatifs suivants :

1) Elle relève du champ d’application défini dans l’annexe du décret de l’accord concerné ;

2) Elle relève d’au moins une organisation professionnelle signataire.

CEPC 09041510

Délais paiement accords dérogatoires :

Où trouver les accords dérogatoires signés ?

La liste des organisations professionnelles signataires est disponible sur le site de la DGCCRF et de l’Autorité de la concurrence à l’adresse suivante :

http://www.dgccrf.bercy.gouv.fr/documentation/lme/derogations_delais_paiement.htm

Les accords dérogatoires sont disponibles auprès des organisations professionnelles concernées.

CEPC 09041511

Délais paiement accords dérogatoires interprétation :

Est-ce légal : une enseigne du secteur du bricolage et de l’aménagement de la maison s’appuie sur l’accord dérogatoire de la filière pour écrire à ses fournisseurs, leur dire que cet accord prévoit de réduire, les délais de paiement de 15 jours au premier janvier 2009, pour ceux qui étaient entre 45 et 90 jours fin de mois, et, comme ses délais de paiement étaient de 90 jours fin de mois, soit 105 jours en moyenne en 2008, son délai sera donc de 90 jours nets en 2009. Or, l’accord stipule que les délais de paiement devront être de 75 jours fin de mois en 2009 ?

Selon la LME, le délai de paiement en 2009 ne peut être supérieur à celui en pratiqué en 2008.

En l’occurrence : 1) le client n’a pas à imposer des délais de paiement. Ils doivent être négociés avec le fournisseur dans la limite de la loi et des accords dérogatoires.

2) L’accord en question ne permet pas au client de passer à 90 jours quand l’accord stipule le délai maximum de 75 jours fin de mois.

CEPC 09041512

Délais paiement calcul activités saisonnières.

Un fournisseur livre un client en stock consignation. Il facture le client au moment de la sortie du produit du stock du client et non à la livraison. Est-ce acceptable selon la LME ? Y a t-il une différence d’appréciation pour cette pratique d’usage pour des activités saisonnières ?

Les parties peuvent modifier le cadre juridique antérieur en pratiquant par exemple le dépôt-vente au lieu de la vente ferme ; les juristes spécialisés doivent pouvoir proposer des montages sécurisés avec, notamment le jeu de la clause de réserve de propriété.

Pour le stock initial, le même type de mécanisme peut être imaginé. Le code monétaire et financier (article 511-7) offre certaines possibilités pour le fournisseur de consentir des avances sur commandes.

La LME ne remet pas en cause le régime juridique du dépôt-vente ou vente en consignation. La vente en consignation n’est pas interdite. Cependant, appliquer contrairement aux habitudes anciennes, une telle pratique dans le but de contourner les obligations relatives à la réduction des délais de paiement, devient une pratique abusive.

CEPC 09041513

Délais paiement calcul date de commande :

Est-il de bonne pratique pour un fournisseur d’émettre sa facture dès la commande du client ou avant que la marchandise soit mise à disposition ou livrée ?

La facture doit être délivrée dès la réalisation de la vente ; elle devrait donc l’être dès la conclusion du contrat de vente. Il est toutefois de pratique courante que la facture ne soit établie qu’à la livraison de la marchandise ou, en cas de vente de départ, au moment de sa prise en charge, ce qu’a admis la DGCCRF.

CEPC 09041514

Délais paiement calcul entre 45 et 60 jours.

Peut-on alterner les délais, dans l’entreprise, pour un même client ou fournisseur ?

Certains de nos clients se réfugient derrière une publication sur le site de la DGCCRF publication en tout point conforme à votre avis en date du 22 décembre 2008 et qui affirme, je cite : « Comment comprendre le mode de computation des 45 jours fin de mois ? Une pratique consiste à comptabiliser les 45 jours à compter de la date d’émission de la facture, la limite de paiement intervenant à la fin du mois civil au cours duquel expirent ces 45 jours. Toutefois, il est également envisageable de comptabiliser les délais d’une autre façon, consistant à ajouter 45 jours à la fin du mois d’émission de la facture ». Or, le rapport du Sénat n°413 du 24 juin 2008, article 6, II, 1° affirme je cite : 1) plafonner à 45 jours fin de mois (c’est à dire dont la computation débute à la fin du mois) ou 60 jours (calendaires) à compter de la date d’émission de la facture le délai de paiement convenu entre les parties (tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur, d’une part ; tout acheteur de produits ou de prestations de services, de l’autre). Les conséquences ne sont pas négligeables puisque pour des livraisons effectuées à compter du 17 du mois M nous allons avoir avec la méthode « DGCCRF » des règlements le 30 ou 31 du mois M + 2 alors que si l’on suit les directives du Sénat et de son rapport toute facturation effectuée au cours du mois M se doit d’être réglée le 15 du mois M + 2. Par ailleurs, le délai de départ et les calculs des intérêts de retard s’en trouvent affectés. Un client peut-il demander à utiliser un mode de calcul pour ses factures avant le 15 du mois puis un autre mode de calcul pour les facturations après le 15 ?

Non, ce serait une façon de détourner la loi pour allonger les délais de paiement. Il ne peut y avoir de calcul différent en fonction de la date dans le mois de départ du délai.

Le plafond 45 jours fin de mois est une facilité accordée aux entreprises qui préfèrent travailler de cette manière. C’est pourquoi il est demandé à ce que la double option retenue (60 jours ou 45 jours fin de mois, puis 45 jours fin de mois ou fin de mois 45 jours) soit inscrite dans le contrat et appliquée durant l’exécution de ce contrat.

CEPC 09041515

Délais paiement calcul imposé :

« Peut-on imposer un mode de calcul du délai ? »

Cela résulte de la seule négociation commerciale. Si les partenaires ne parviennent pas à convenir d’un délai, ce sera le délai supplétif de 30 jours qui sera applicable par défaut.

CEPC 09041516

Délais paiement CGV

Nos conditions générales de vente mentionnent un paiement à 30 jours date de facture. Doit-on les modifier pour les clients qui réclament l’application des 60 jours date de facture ?

Non : les CGV sont librement rédigés par le fournisseur en fonction de sa politique et on le suppose du marché concurrentiel. Par contre, la négociabilité des CGV est libre. Si le client avec le fournisseur négocie un allongement des délais (supérieurs à celui des CGV mais dans la limite de la loi), c’est possible et il peut, au titre de l’équilibre exister une compensation à la charge du client.

CEPC 09041517

Délais paiement concernés contrat annuel et mensualisation :

Les dispositions de la LME concernent-elles un prestataire de services informatiques faisant un contrat annuel d’assistance technique présenté en début d’année, mais avec un payement mensuel de son client, celui-ci ayant toujours pratiqué ainsi ?

Oui, la loi n’opère pas de distinction. Dans la mesure où le contrat d’assistance se concrétise par des interventions déroulées toute l’année, un règlement mensuel moyen répond bien au souci du législateur d’un délai raccourci.

CEPC 09041518

Délais paiement contrôles :

Quels sont les types de contrôles pour faire appliquer la loi LME sur les délais de paiement ?

Deux principales sources de contrôle :

Le commissaire aux comptes devra révéler chaque client ou fournisseur qui ne respecterait pas la loi ou l’accord dérogatoire ou l’accord convenu.

Le ministère public et en particulier la DGCCRF effectueront dans les entreprises les enquêtes permettant de vérifier le bon respect de la loi ou des accords.

CEPC 09041520

Délais paiement étranger :

Est-il légal qu’une société française fasse facturer une relation commerciale purement française par une filiale étrangère pour déroger à la LME ?

Non : toute pratique nouvelle destinée à détourner la loi est susceptible des sanctions pour non-respect de la loi.

DGCCRF 09

Délais paiement étranger :

Les nouvelles dispositions relatives aux délais de paiement s’imposent-elles aux contrats internationaux ?

La jurisprudence a reconnu le caractère d’ordre public à l’article L 442-6 du code de commerce qui prévoit la sanction civile du dépassement des délais légaux de paiement.

La DGCCRF qui intervient au nom de l’ordre public économique, veillera à ce que des créanciers français ne se voient pas imposer des délais de paiement anormalement longs par leurs débiteurs, en particulier ceux qui utiliseraient des centrales de paiement à l’étranger dans le seul but d’échapper aux dispositions nationales.

En outre, la DGCCRF veillera à ce que les débiteurs établis en France règlent leurs créanciers résidant à l’étranger sans entraîner de distorsion de concurrence vis à vis d’opérateurs résidant en France.

CEPC 09041521

Délais paiement facture à réception :

Dans les marchés de travaux, l’envoi de la facture par chaque prestataire est souvent conditionné à la réception globale du marché. Cette réception peut avoir lieu plusieurs mois après la fin des travaux d’un prestataire individuel. Est-il de bonne pratique de retarder ainsi la date d’émission de la facture ?

L’article L 442-6 du code de commerce sanctionne le débiteur qui demande au créancier sans raison objective de différer la date d’émission de la facture. Ainsi, la réception des marchés de travaux ne doit pas être utilisée abusivement pour retarder la date d’émission de la facture.

CEPC 09041522

Délais paiement litige :

Un litige peut-il suspendre le délai ?

Si c’est un litige exceptionnel comme par exemple une fois dans l’année, le délai peut effectivement être remis en cause comme l’est alors la facture. A l’inverse, la généralisation ou la multiplication de litiges ne peut servir de prétexte au non-respect des délais de paiement.

CEPC 09041523

Délais paiement secteur public :

Quelles conditions pour les marchés publics ? Doit-on appliquer les délais de la LME aux collectivités publiques et locales ?

L’article 98 du code des marchés publics, modifié par un décret de décembre 2008, organise les délais de paiement des marchés publics : 30 jours pour l’Etat et les établissements publics autres que ceux ayant un caractère industriel et commercial (car ceux-ci sont soumis à la LME) ; 45 jours pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux (40 jours depuis le 1er janvier 2009 ; 35 à compter du 1er janvier 2010 ; 30 à compter du 1er juillet 2010)

50 jours pour les établissements publics de santé et les établissements du service de santé des armées.

CEPC 09041524

Délais paiement transporteurs :

Quel est le délai applicable pour le paiement de certains transporteurs répondant à des appels d’offres lancés par des collectivités territoriales (30 jours en application de l’article L 441-6 du code de commerce ou 40 à 45 jours en application du code des marchés publics) ?

Il convient de regarder quelle loi est applicable aux appels d’offres lancés par les collectivités locales. Si l’appel d’offres est soumis au :

Code des marchés publics : les règles relatives aux délais de paiement du code des marchés publics (article 98 du code des marchés publics) s’appliquent.

Code de commerce : les règles issues du code de commerce, spécifiques pour les transporteurs s’appliquent. L’article L 441-6 du code de commerce indique que le délai de paiement pour le transport […] ne peut en aucun cas dépasser 30 jours à compter de la date d’émission de la facture.

CEPC 09040203

Négo appels d’offres :

Un client peut-il organiser des appels d’offres privés basés sur le modèle des marchés publics alors même que l’article L 441-6 du code de commerce dispose que les conditions générales de vente constituent le socle des négociations ?

Oui, si ces appels d’offres ont pour objet de permettre au donneur d’ordres d’entrer en contact avec des fournisseurs et que les CGV restent le socle des négociations qui peuvent en découler.

CEPC 09040204

Négo révision des prix, garantie de marge :

Compte tenu du principe de libre fixation des prix par un revendeur, règle fondamentale en droit de la concurrence, l’interrogation porte sur la légalité de mettre en place un système de révision des prix entre une centrale d’achat de l’enseigne « A » et le fournisseur quand les prix d’achat au fournisseur évolueront en fonction des prix de revente des magasins de l’enseigne A qui s’aligneront sur les prix des concurrents ?

Cette pratique va à l’encontre de l’objectif de la loi de modernisation de l’économie de permettre aux opérateurs de différencier leurs conditions commerciales pour introduire une véritable concurrence par les prix entre les distributeurs. Elle permet en pratique de garantir les marges du revendeur. Elle pourrait ainsi favoriser un alignement des conditions de vente accordées par le fournisseur à chaque revendeur.

 

Fait à Paris, le 20 mai 2009

Le Président de la Commission d’examen des pratiques commerciales

Jean-Paul CHARIE